Léon le Magnifique premier Roi de Sissouan ou de l'Arménocilicie

Հեղինակ

Բաժին

Թեմա

  Ce doit être un fait tout autre, arrivé non pas après le Ramazan des Musulmans, mais à l'approche de la Pâque des Chrétiens, que nous raconte Ghiragos, et ce fut le sultan d'Iconie qui y prit part, ou probablement, l'un de ses généraux, que l'historien a pris pour le sultan d'Alep. Comme Ghiragos, est le seul qui nous raconte ce fait avec quelques détails, nous lui laisserons la parole:

«Léon marcha contre lui avec ses troupes. C'était pendant les jours de Pâques. Le sultan lui envoya des messagers pour lui dire: Si tu ne te mets pas à mes ordres, je ferai passer au fil de l'épée tous les habitants de ton pays, la mère sous les yeux du fils, et votre jour de fête que vous passez dans la joie pour l'honorer comme le jour anniversaire de la résurrection de votre Christ, je le changerai en jour de deuil; et les mets que vous aurez preparés, vous les mangerez sur la selle des chevaux. Après qu'il eut fait partir ses messagers, il s'avança à la tête de ses nombreux soldats, arriva près des frontières du pays de Léon et y mit son camp pour attendre le retour de ses messagers. Le roi Léon ayant appris l'arrivée de ces derniers et la marche des musulmans ordonna de conduire les envoyés du sultan à certain lieu, comme si le roi s'y fut trouvé et, se hâtant de réunir ses soldats, il tomba sur les ennemis par un autre côté. Il les surprit et en fit grand massacre. A peine si le sultan put sauver sa vie. Le roi Léon, s'empara de tout le butin du camp de l'ennemi, de leurs tentes, de leurs drapeaux, de leurs prisonniers, et vint camper dans son pays près des bords du fleuve. Il ordonna à ses soldats de dresser les tentes des musulmans et de fixer leurs drapeaux à l'entrée des tentes et de faire venir les messagers. Quand ceux-ci arrivèrent, ils reconnurent les tentes de leurs soldats et les drapeaux de leurs légions. Ils en furent très surpris, car ils ignoraient ce qui s'était passé. Quand ils le surent, ils tombèrent aux pieds du roi et le supplièrent de leur épargner la vie. Le roi fut pris de pitié et leur laissa la vie sauve puis les renvoya chez leur maître. Quant au tribut que le sultan lui avait demandé, Léon le fit plus considérable et l'exigea des musulmans dont il fit ses tribu taires».

Tous nos historiens sont unanimes pour raconter que de même que Roupin accabla son ambitieux voisin le sultan d'Iconie, jusqu'à forcer le fameux Salaheddin à lui prêter l'appui de ses armes en 1180, selon les historiens arabes, et l'obliger à lui rendre ses prisonniers et à lui restituer les provinces qu'il avait prises, de même Léon ayant rencontré le moment favorable, mit en péril les fils du sultan Kelidge-Aslan, tantôt en envahissant leur territoire, enlevant leur butin et reprenant ses prisonniers, tantôt en s'emparant de leurs forteresses 1.

L'un des principaux de ces forts était Bragana. Le sire Baudouin, connétable d'Arménie, qui devait probablement être de nationalité latine, vint par avis de Léon, assiéger de nuit Bragana. Non-seulement il ne put s'en emparer, mais il perdit la vie en l'assiégeant. Deux mois après, Léon, usant du même stratagème s'en empara. Il fit arrêté le commandant du nom de Dipli-amira, et le fit mettre à mort avec deux cents hommes de la garnison pour venger la mort de son général Baudouin. Ceci eut lieu en 1188, la deuxième année de son règne. C'est cette même année, qu'il fit construire la fameuse et grandiose forteresse d'Anazarbe sur laquelle il fit mettre une inscription célèbre.

C'est aussi à peu près à cette époque que fut prise et reconstruite la forteresse de Loulou, par Chahenchah le Héthoumien, dont Léon avait su gagner l'alliance. Léon en fit une place forte pour faire opposition aux forts du sud-ouest du pays qu'on appellait la Seconde Cappadoce. Ce fort de Loulou lui permit de tenir sous sa domination le chef-lieu de la province do Tiana. Comme nous le dit le frère du seigneur de ce fort, S. Nersès de Lambroun.

On peut voir à présent jusqu'où s'étaient étendues les limites des Etats de Léon. Aucun de ses ancêtres n'avait fixé nettement les frontières du pays. Selon le dicton de nos pères, cité par Moîse de Khorène: «L'arme du guerrier fait les frontières du pays, plus il frappe en avant, plus il les recule».

L'arme de Léon était un glaive tranchant qui, dans mainte bataille, s'était rougi de sang, car Léon voulait atteindre le noble but qu'il s'était proposé, le pouvoir monarchique. Il lui fallait donc un vaste territoire bien organisé qui lui permît de se mesurer avec des ennemis plus grands et plus terribles dans leurs ravages. Son voisin d'occident, le sultan d'Iconie l'apprit bientôt. Comme il s'était approprié de nombreuses contrées immenses qu'il ne tenait pas de l'héritage paternel mais qu'il avait eues par la force, Léon ne se fit aucun scrupule d'amoindrir ses Etats et d'accroître les siens. Et, comme le sultan désolait le pays qu'il tenait sous son joug, ce n'est pas seulement en conquérant que Léon lui enleva ces pays, c'est aussi par droit de croisade.

Pour cela, Léon sut profiter des dissensions et des querelles intimes des nombreux fils de sultan Kelidge-Aslan, auquel il prit toute l'Isaurie et la ville de Héraclée. La fortune lui étant favorable, il se dirigea aussi vers le nord et poussa jusqu'à la ville de Césarée, la capitale de l'Asie-Mineure, devant laquelle il mit le siège. Il la réduisit aux dernières extrémités et força le sultan de lui livrer, outre cette ville, la ville de Héraclée et de lui donner en outre beaucoup d'or. Léon se retira après la conclusion de traité 2.

1 Notre historien royal, dit: «Léon, aidé de ses prudents princes et de ses vaillants soldats, repoussait bravement la multitude de ses ennemis. Il vainquit les fils de Kelidge-Aslan qui avaient étendu leur domination sur le pays des Grecs qu'ils accablaient et qu'ils ruinaient soit en leur arrachant leurs forteresses, soit en s'emparant de leurs provinces. Léon passait pour invincible parmi ses ennemis».

2 Vahram mit en vers le récit de l'ancien historien de la maison Roupénienne:

«S'emparant dn pays d'Isaurie,

II arriva à la Grande Attalie,

Se saisit de Héraclée

Et l'échangea contre des trésors.

Il entoura la Césarée avec ses troupes

Et, sur le point de s'en saisir,

II reçut beaucoup de pièces d'or

Et fit un traité avec le sultan».