(p.
283-
Vue
de
Mamestie
ou
Messis,
d'après
Langlois)
Mamestie
ou
Messis
est
l'une
des
trois
principales
villes
de
la
Cilicie
de
Plaine;
elle
occupe
la
partie
sud-est
du
territoire,
et
a
pour
confins,
au
nord,
Anazarbe;
à
l'ouest,
la
province
d'Adana
et
la
région
peu
connue
du
Djahan
et
du
Sarus;
au
sud,
la
vaste
plaine
jusqu'à
Ayas,
à
l'est,
les
montagnes
qui
bordent
le
côté
nord-ouest
du
Golfe
des
Arméniens,
et
s'appellent
du
nom
de
la
ville
Djébel-Missis
(Montagnes
de
Messis).
Dans
toute
sa
longueur
du
nord
au
sud,
la
province
est
arrosée
par
le
cours
tortueux
du
Djahan.
La
rive
droite,
c'est-à-dire
la
partie
ouest,
forme
une
vaste
plaine,
indiquée
sur
les
cartes
comme
un
lieu
désert
et
inculte,
sans
habitations.
La
rive
gauche,
plus
étroite,
est
mieux
connue
à
cause
des
montagnes
que
nous
venons
de
citer.
Ce
sont
plutôt
des
monticules
que
des
montagnes,
dont
la
chaîne
commence
à
l'angle
du
golfe
d'Ayas
(où
s'élève
le
mont
Djébel-Havdé,
haut
de
608
mètres)
et
se
divise
en
deux
rameaux,
s'étendant
l'un,
au
nord-est,
jusqu'aux
bords
des
Montagnes
Noires,
l'autre,
au
nord-ouest,
jusqu'au
célèbre
(Château
des
serpents)
Chahi-Maran,
que
nous
croyons
limitrophe
de
cette
province
et
de
celle
d'Anazarbe.
La
partie
moyenne
de
la
chaîne
occidentale
(près
de
Messis),
peut-être
la
plus
haute
dans
toute
la
chaîne,
s'appelle
Djébel-el-Nour
جبيل
النور
(Mont
de
la
lumière),
716
mètres.
Cette
montagne
est
célèbre
parmi
les
orientaux
à
cause
de
ses
nombreuses
plantes
médicinales:
le
grand
médecin
Lokman
y
a,
paraît-il,
fait
des
recherches.
La
chaîne
occidentale,
plus
longue,
entoure
les
plages
d'Ayas
et
s'appelle
Amiran,
nom
qui
tire
probablement
son
origine
du
château
Chahi-Maran.
Selon
certains
auteurs,
la
plaine
ou
la
vallée
qui
se
trouve
entre
ces
deux
rameaux,
se
nomme
Arik.
Après
le
naturaliste
arabe,
ce
fut
le
botaniste
autrichien
Kotschy,
qui
explora
le
Mont
de
la
Lumière,
en
1859,
aux
derniers
jours
d'avril
(24-6),
du
côté
de
l'ouest
de
Messis;
il
déploya
sa
tente
sur
la
première
pente,
sous
les
figuiers
et
les
grenadiers,
là
où
se
trouvait
autrefois
le
jardin
d'un
riche
propriétaire
turc
du
nom
de
Hadji-effendi.
Deux
sources
arrosaient
ce
lieu
de
délices;
Kotschy
trouva
magnifique
le
spectacle
que
présentaient
à
cette
saison
les
plaines
désertes
d'Adana,
s'étendant
vers
l'ouest;
elles
étaient
couvertes
de
mille
fleurs
différentes.
Les
Turcomans
y
avaient
planté
leurs
tentes
noires
et,
çà
et
là,
de
minces
filets
de
fumée
blanche
montaient
dans
l'air.
Aux
alentours
se
trouvaient
les
enclos
des
bœufs
et
des
buffles
qui
faisaient
retentir
l'air
de
leurs
mugissements,
et
le
grand
fleuve
déroulait
silencieux
ses
ondes
tortueuses
aux
pieds
des
monticules.
Le
jour
suivant
dès
le
matin
(25
avril),
voulant
monter
plus
haut
Kotschy
passa
au
milieu
des
bois
de
chênes,
de
térébinthes,
de
mirthes
et
d'autres
espèces
d'arbres;
après
une
heure
et
demie
de
traversée,
il
entrait
dans
un
bois
épais
de
chênes,
au
delà
duquel
les
arbres
diminuaient
et
donnaient
lieu
à
une
grande
prairie
toute
en
fleurs.
Une
demi-heure
après,
il
trouva
un
marais
plein
de
roseaux,
à
côté
d'une
source.
Il
s'y
arrêta
pour
observer
attentivement
ces
lieux,
qui
s'étendaient
au
sud
du
côté
de
la
mer
jusqu'à
la
montagne
Djiafar-dédé,
et
plus
loin
à
l'ouest,
il
voyait
les
collines
d'Adana
et
au
milieu,
le
grand
village
Akdaména;
au
nord,
l'ancienne
et
la
nouvelle
Messis,
et
plus
loin
les
petits
villages
de
Kapoulou,
de
Réga,
de
Dourak,
et
d'autres
encore,
au
milieu
des
vignes
fertiles
et
des
champs
parés
de
fleurs
magnifiques.
La
source
se
trouve
à
2,
000
pieds
au-dessus
du
niveau
de
la
mer,
et
le
sommet
du
mont
paraissait
de
1,
000
pieds
plus
haut
encore.
Kotschy
eut
le
caprice
de
gravir
ces
pentes
abruptes,
et
trouva
dans
les
cavités
une
chapelle
arménienne;
épuisé
de
fatigue,
les
vêtements
déchirés,
il
parvint,
en
tournant
à
l'ouest,
sur
une
cime
circulaire,
d'où
se
dévoilaient
clairement
à
ses
yeux,
à
l'est,
les
montagnes
Amanus,
au
sud
la
vallée
Djiafar-dédé
et
Hadji-Begtache;
et
plus
près
le
mont
Séki
et
le
Dandi,
dont
le
sommet
a
la
forme
d'un
plateau
où
l'on
remarque
les
restes
de
plusieurs
constructions
anciennes.
A
deux
heures
de
la
montagne
Nour,
au
nord-est,
s'élève
le
mont
Harémi;
à
une
heure
de
distance
il
s'unit
à
un
pic
rocheux;
plus
loin
on
aperçoit
Chahi-Maran
et
Thoumlou-kalé.
Kotschy
après
avoir
examiné
tous
ces
lieux,
traça
le
plan
de
la
montagne
et
descendit
à
la
source
citée;
près
de
celle-ci
s'élevaient
une
chapelle
et
un
ermitage,
qui
était
un
lieu
de
pèlerinage
pour
le
lundi
de
Pâques.
La
côte
occidentale
de
la
montagne
jusqu'à
la
hauteur
de
800
pieds
est
aride
et
escarpée;
plus
bas
le
sol
est
calcaire,
mais
on
n'y
a
pas
trouvé
de
coquilles
pétrifiées.
Entre
autres
animaux
quadrupèdes,
on
rencontre
des
sangliers:
parmi
les
oiseaux,
surtout
des
coqs
de
bruyère;
mais
les
oiseaux
chanteurs
y
font
défaut.
La
flore,
sans
correspondre
tout-à-fait
à
sa
renommée,
est
cependant
assez
riche,
mais
il
n'est
pas
vrai
qu'on
y
trouve
toutes
les
espèces
des
plantes
thérapeutiques,
comme
on
l'a
prétendu.
Kotschy
pensait
encore
plus
riche
la
flore
du
versant
sud-ouest,
mais
il
n'osa
pas
s'y
aventurer,
de
peur
des
Turcomans
Bozan.
Parmi
les
espèces
qu'il
recueillit,
il
indique
l'
Arum
Dioscoridis,
l'Anthriscus
silvestris,
le
maceron,
une
espèce
de
Crocus,
près
de
la
source,
et
au
pied
de
la
montagne,
l'Orobe,
la
Bisaille,
le
Ceresier
Mahaleb,
le
Cyclamen
Cilicium,
l'Orchide,
l'Olivier,
le
Laurier,
le
Fragon.
—
Quelque
part
il
a
trouvé
le
Sumac,
le
Rhamus
Alaternus,
le
Pourpier,
l'
Ophrys,
le
Gladiolus,
et
d'autres.
Dans
les
régions
plus
hautes
il
a
rencontré
près
des
sources,
des
Anémones,
la
Tulipe,
surnommée
Œil
de
Christ,
le
Symphytum,
la
Gagea,
la
Polygala
supina,
la
Garance,
le
Lythospermum.
-
Dans
les
cavités
des
roches
il
cite
le
Fenu
grec,
l'
Ysatis,
l'Ajuga,
l'
Origane
sauvage,
le
Lamium,
l'Onosma
congesta,
la
Lavandula
Stœchas,
l'Asplenium,
la
Scille,
le
Ranunculus
Malabailœ,
le
R.
myriophyllus,
la
Rosa
centifolia,
la
Garance
à
feuilles
dures,
et
d'autres.
Edib,
le
pèlerin
de
la
Mecque,
mentionne
avec
admiration
la
fleur
de
Jacinthe
du
Djebel-Nour
et
l'excellente
Mandragore.
Paul
Lucas
qui
passa
par
ces
lieux
en
1704,
parle
aussi
de
la
célébrité
des
plantes
médicinales
du
mont
Djebel-Nour,
et
traduit
ce
dernier
nom
par
Mont
des
fleurs.
A
deux
lieues
au
nord
de
la
montagne
Nour
et
à
six
à
l'est
d'Adana,
sous
la
même
latitude,
à
droite
du
fleuve
Djahan
qui
est
au
nord,
est
située
l'antique
mopsueste.
Ce
nom
vient
de
deux
mots
grecs,
Μόφου
ε
̉
στία,
ce
qui
signifie
autel
de
Mopsus
[1];
car
selon
la
mythologie
grecque,
Mopsus,
fils
d'Apollon
et
de
la
pythonesse
Mandou,
se
rendit
en
Cilicie,
après
la
guerre
de
Troie,
et
s'arrêta
d'abord
à
Mallus,
où
il
éleva
un
autel
ou
un
temple
pour
les
augures.
Après
son
combat
avec
Amphiloque,
dans
lequel
tous
les
deux
périrent,
on
éleva
ici
même
un
temple
à
sa
mémoire.
Ainsi
on
remarque
sur
plusieurs
monnaies
frappées
dans
cette
ville,
la
figure
d'un
autel,
comme
on
peut
le
voir
dans
notre
figure.
(p.
286-
Ancienne
monnaie
de
Mamestie)
Au
moyen
âge
le
nom
de
la
ville
fut
abrégé
en
Mamestie,
et
souvent
encore
en
Messis,
nom
qu'on
lui
donne
de
nos
jours.
Les
Arabes
l'appelaient
Méssissah,
مصيصه,
les
Turcs
Missis,
ميسيس.
Les
Occidentaux
altérèrent
encore
davantage
ce
nom;
leurs
chroniqueurs
l'écrivaient
Mamistra,
Mampsysta,
Mansista,
Mamysta,
Malmistra,
Manustra,
Manustria,
Mamistria,
etc.
Des
auteurs
plus
anciens
écrivent
simplement
Mopsus.
Cicéron,
qui
y
séjourna
pendant
qu'il
allait
à
Tarse,
fut
peut-être
le
premier
à
se
servir
du
mot
Mopsuestia
[2].
Un
siècle
après,
la
ville
était
placée
par
les
Romains
au
nombre
des
villes
libres,
comme
l'indiquent
les
monnaies
de
bronze
qui,
avec
le
mot
grec
αυτονομου,
autonome,
portent
d'un
côté
l'image
des
fortifications
de
la
ville
et
de
l'autre,
l'image
de
Jupiter
victorieux.
La
même
liberté
est
attestée
par
l'inscription
de
l'empereur
Adrien,
qui
y
fit
plusieurs
constructions,
d'où
on
l'appela:
Hadriana
Mopsuestia.
Dans
une
inscription
grecque
trouvée
dans
la
ville,
Messis
est
accompagnée
de
grandes
épithètes,
comme
sainte,
libre,
inviolable,
indépendante,
amie
et
alliée
des
Romains.
ΤΗΕ
ΙΕΡΑΣ
ΚΑΙ
ΕΛΕΥΘΕΡΑΣ
ΚΑΙ
ΑΣΛΟΥ
ΚΑΙ
ΑΥΤΟΝΟΜΟΥ,
ΦΙΛΗΣ
ΚΑΙ
ΣΥΜΜΑΧΟΥ
ΡΩΜΑΙΩΝ.
L'un
des
plus
anciens
événements
historiques
qui
s'y
rattachent
est
le
passage
de
Séleucus,
fils
d'Antiochus
Grypus,
l'an
94
avant
Jésus-Christ,
après
sa
défaite
par
Eusèbe
de
Cilicie;
il
fit
souffrir
la
ville
par
de
graves
impositions;
les
habitants
poussés
à
bout
par
sa
tyrannie,
mirent
le
feu
à
son
palais,
et
il
y
périt
dans
les
flammes.
Aux
premiers
temps
du
christianisme,
Mopsuestie
ne
fut
qu'un
siège
épiscopal,
mais
plus
tard
elle
fut
élevée
au
rang
de
siège
métropolitain.
L'un
de
ses
premiers
évêques
fut
Saint
Auxence,
d'abord
soldat,
martyrisé
durant
le
règne
de
Licinius
en
316.
Au
V
e
siècle,
l'évêque
Théodore,
renommé
par
sa
science
et
sa
doctrine
erronée,
est
connu
généralement
sous
le
nom
de
Théodore
de
Mopsueste.
(p.
286-
Monnaie
de
Mopsueste
sous
les
Romains)
Nestorius,
son
disciple,
devint
encore
plus
tristement
célèbre
que
lui
par
sa
funeste
hérésie.
Avant
que
l'erreur
de
Théodore
ne
fût
publique,
nos
saints
pères
Traducteurs
étaient
en
bonnes
relations
et
en
correspondance
avec
lui;
c'est
probablement,
sur
la
demande
de
Saint
Mesrobe
qu'il
écrivit,
contre
la
fausse
doctrine
des
Persans,
et
peut-être
notre
Yeznig,
profita-t-il
de
ce
livre.
Mais
quand
l'hérésie
de
Théodore
fut
condamnée
par
les
Pères
du
concile
d'Ephèse,
ces
derniers
prévinrent
les
Arméniens
des
erreurs
de
ses
livres,
et
notre
catholicos,
Saint
Isaac,
leur
envoya
une
épître,
les
rassurant
à
ce
propos.
Comme
les
autres
villes
de
la
Cilicie,
Mamestie
devint
aussi
une
occasion
de
disputes
entre
les
Byzantins
et
les
Arabes;
ces
derniers
à
la
fin
du
VII
e
siècle
s'emparèrent
de
la
ville.
Selon
le
chronologiste
arménien
(Samuel
d'Ani),
en
692
«les
Mussulmans
fortifièrent
Mamestie,
c'est-à-dire
Messis,
par
de
fortes
murailles
et
y
placèrent
comme
gouverneur
un
certain
Abderahim».
Jusqu'à
la
moitié
du
X
e
siècle,
la
ville
resta
sous
la
domination
des
Arabes,
plus
longtemps
qu'elle
ne
le
fut
ensuite
sous
celle
de
nos
Roupiniens.
L'empereur
Nicéphore,
s'en
empara
deux
fois,
en
962
et
965,
et
depuis
lors
les
Arabes
perdirent
du
terrain.
Au
commencement
du
règne
des
Roupiniens,
le
seigneur
de
Messis
était
Abelgharib,
fils
de
Khatchig
Ardzerouni,
établi
comme
gouverneur
de
la
Cilicie
sous
l'autorité
des
empereurs.
Les
Croisés
s'emparèrent
de
Messis
dès
leur
première
entrée
en
Cilicie.
Peut-être
le
hardi
Tancrède
s'en
empara-t-il
arbitrairement.
Voulant
l'arracher
des
mains
de
ce
dernier,
le
prince
Baudouin,
plus
hardi
et
plus
téméraire
que
Tancrède,
lui
livra
bataille
devant
la
ville;
la
victoire
resta
à
Baudouin;
mais
les
deux
princes
s'étant
reconciliés
le
jour
suivant,
la
ville
demeura
au
pouvoir
de
Tancrède
qui
l'annexa
à
Antioche.
A
cette
époque,
selon
le
témoignage
de
l'évêque
de
Tyr,
l'historien
des
Croisés
[3],
Mamestie
était
l'une
des
plus
célèbres
villes
de
la
Cilicie
par
ses
fortifications,
par
le
nombre
d'habitants
et
par
son
éclat.
Elle
retomba,
paraît-il,
sous
la
domination
de
l'empereur;
car
Tancrède
réussit
à
s'en
emparer
une
seconde
fois,
en
1106.
Le
gouverneur
était
alors
un
Arménien,
nommé
Asbiéd,
personnage
célèbre
par
son
courage
et
sa
bravoure,
mais
dégradé
par
la
débauche;
Tancrède
attaqua
la
ville
du
côté
du
fleuve,
avec
10,
000
soldats
arméniens
et
francs,
et
obtint
ainsi
la
victoire.
Quand
les
Roupiniens
eurent
augmenté
leur
puissance,
ils
disputèrent
Messis
aux
Antiochéens;
Thoros
II
à
la
fin
parvint
à
la
soumettre
à
son
autorité
avec
la
plus
grande
partie
de
la
Cilicie;
Messis
fut
une
des
premières
villes
dont
il
s'empara,
il
y
fit
prisonnier
le
duc
Thomas.
C'est
encore
dans
Messis
que
Thoros
fut
assiégé
en
1152
par
Andronic
parent
de
l'empereur,
qui
en
l'insultant
et
en
l'injuriant
l'invitait
à
sortir,
afin
qu'il
se
laissât
enchaîner
et
conduire
à
l'empereur
à
Constantinople,
comme
nous
l'avons
déjà
rapporté
ailleurs.
Thoros
irrité,
«fit
une
brèche
dans
la
muraille
pendant
la
nuit,
et
se
jetant
soudain
comme
un
lion
sur
les
ennemis,
les
passa
au
fil
de
l'épée...
Ses
soldats
se
contentèrent
de
dépouiller
ces
lâches
Grecs
et
les
laissèrent
aller....
ainsi
Thoros
conquit
Messis
et
sans
trop
de
peine
toutes
les
provinces»
[4].
Il
est
certain
que
Meléh,
frère
et
successeur
de
Thoros,
s'empara
aussi
de
Messis;
car,
comme
nous
l'avons
déjà
dit,
c'est
près
de
cette
ville,
qu'en
1171,
il
tendit
un
piège
au
comte
Etienne
pendant
qu'il
se
rendait
comme
ambassadeur
du
roi
de
Jérusalem
auprès
de
l'empereur
Manuel.
Au
commencement
de
son
règne,
Léon
I
er
(1188)
donna
Messis
à
Héthoum,
fils
de
Tchordouanel
de
Sassoun,
en
le
mariant
avec
Alise,
fille
de
son
frère
Roupin;
de
même
il
donna
à
Chahen-chah,
frère
de
Héthoum,
la
ville
de
Séleucie.
La
position
favorable
de
Mamestie
et
son
voisinage
à
la
mer,
devait
en
faire
une
ville
commerciale,
d'autant
plus
que
l'embouchure
du
fleuve
Djahan
était
autrefois
moins
encombrée,
ce
qui
permettait
aux
bateaux
de
l'approcher
aisément.
Aussi
les
républiques
de
Gênes
et
de
Venise
reçurent
de
Léon
le
privilège
d'y
établir
des
maisons
de
commerce:
ce
n'est
qu'à
partir
de
ce
moment
que
la
ville
devint
florissante;
car,
lorsque
Willebrand
visita
ces
lieux
en
1211-2,
la
ville
ne
comptait
encore
qu'un
petit
nombre
d'habitants,
quoiqu'elle
fût
fortifiée
par
des
murailles
et
des
tours.
Après
le
grand
tremblement
de
terre
de
1114,
elle
fut
certainement
restaurée.
Le
plus
beau
temps
pour
Mamestie
fut
le
long
règne
de
Héthoum
I
er;
et
peut-être
la
fête
la
plus
solennelle
qui
y
fût
jamais
célébrée
fut
celle
donnée
par
ce
prince,
lorsque
son
fils
aîné
Léon
âgé
de
vingt
ans
y
fut
armé
chevalier.
A
cette
solennité
il
invita
ses
deux
gendres,
Bohémond
prince
d'Antioche
et
Julien
seigneur
de
Sidon,
avec
leurs
femmes
(Sibil
et
Fimie)
et
sa
sœur
Marie,
comtesse
de
Jobbé,
«et
tous
ses
amis
(Français);
il
réunit
aussi
tous
les
ordres
du
clergé.
Cette
fête
joyeuse
eut
lieu
le
17
novembre
1256.
Le
roi
se
réjouit
grandement
avec
son
père
Constant,
avec
toute
sa
famille
et
tous
les
assistants»
[5].
Cependant
Messis
qui
avait
vu
la
magnificence,
et
la
joie
de
Héthoum
dans
cette
fête,
vit
aussi
son
grand
deuil
dix
ou
onze
ans
plus
tard,
quand
son
fils
Léon
fut
fait
captif,
et
qu'un
autre
de
ses
fils,
Thoros,
eut
trouvé
la
mort
dans
le
combat
de
Mari
(1266).
«Le
fier
Egyptien
qui
obtint
la
victoire,
«Incendia
Sis
et
Messis,
Et
tous
les
villages
entre
ces
deux».
Pourtant
la
ville
de
Messis
ne
fut
pas
ruinée,
jusqu'à
rendre
impossible
la
célébration
de
la
plus
grande
fête
annuelle
des
Arméniens.
Vers
la
fin
de
cette
même
année
(1267),
le
roi
magnanime
«envoya
une
invitation
générale
pour
le
Nouvel
an
et
la
fête
de
l'Epiphanie,
à
tous
les
princes,
tant
à
ceux
qui
étaient
voisins,
qu'à
ceux
qui
étaient
éloignés,
les
priant
de
s'assembler
dans
la
ville
de
Messis
pour
la
fête
de
la
bénédiction
des
eaux.
Tous
les
grands
du
royaume
se
réunirent:
alors
le
roi
leur
ordonna
de
venir
s'asseoir
devant
lui.
Quand
tous
eurent
pris
leur
place,
le
roi
dit
à
ses
gens:
Il
en
manque
encore
d'autres,
appelez-les.
On
lui
répondit:
O
saint
roi,
tous
sont
ici
présents
devant
vous.
Mais
le
roi
insista,
leur
commandant
d'appeler
les
princes,
et
les
barons
qui
n'étaient
pas
venus
au
rendez-vous.
Les
serviteurs
embarrassés
ne
pouvaient
comprendre
ce
que
leur
maître
voulait
dire.
Alors
les
princes
dirent
au
roi:
Ceux
que
tu
as
ordonné
d'appeler,
sont
tous
ici,
personne
ne
manque.
Le
saint
roi
d'un
cœur
excité
porta
ses
regards
de
côté
et
d'autre,
et
d'une
voix
vibrante,
les
larmes
aux
yeux
cria:
Si
tous
sont
ici
présents,
où
sont
donc
Léon
et
Thoros?
A
ces
mots
tous
les
princes
s'émurent,
et
versèrent
des
larmes,
se
souvenant
de
ces
charmants
fils
de
leur
maître,
dont
l'un
était
captif
des
mahométans,
et
dont
l'autre
avait
été
massacré
par
les
mains
des
barbares.
Tout
le
monde
pénétré
de
douleur
versait
des
larmes,
non
seulement
les
princes,
mais
encore
les
prêtres
et
les
docteurs
de
l'église...
il
n'y
avait
personne
qui
pût
leur
offrir
des
consolations;
l'affliction
rendait
tout
le
monde
perplexe.
Toutefois
le
sage
et
magnanime
roi
Héthoum
reprit
possession
de
lui-même,
et
se
tournant
vers
les
assistants
il
adressa
des
paroles
de
consolation
aux
princes,
aux
prêtres
et
aux
docteurs»,
etc.
Il
leur
indiqua
encore
le
moyen
de
pouvoir
délivrer
Léon
de
la
captivité
du
sultan
d'Egypte,
et
il
y
réussit.
(p.
288-
Plan
de
la
ville
de
Mamestie)
Cependant
avant
le
retour
de
Léon,
une
dernière
fête
solennelle
fut
donnée
par
Héthoum
à
Messis,
qui
devint,
à
ce
qu'il
paraît,
la
capitale,
après
la
ruine
générale
du
pays
et
de
la
ville
de
Sis.
La
même
année
(1268)
Héthoum
rassembla
un
grand
concile
national,
«
dans
la
capitale
de
Messis,
et
dans
ce
concile
fut
élu
Catholicos
le
digne
et
vénéré
docteur
Jacques,
le
12
février,
premier
dimanche
du
carnaval».
A
cette
occasion
est
mentionnée
Saint-Sarkis,
l'église
paroissiale
où
fut
célébrée
solennellement
l'ordination
du
catholicos.
Outre
Saint-Sarkis,
je
trouve
encore
mentionnée,
en
1297,
l'église
de
Saint-Thoros;
et
l'église
de
Saint-Etienne
[6],
en
1315,
date
à
laquelle
Mamestie
continue
à
être
appelée
capitale.
Willebrand
nous
raconte,
qu'en
1212,
on
lui
montra
à
Messis
le
tombeau
de
Saint-Pantaléon,
et
il
nous
affirme
que
Saint-Servatius
était
de
cette
même
ville;
il
cite
encore
près
de
Messis,
un
château,
patrimoine
du
monastère
de
Saint
Paul.
Une
des
plus
remarquables
constructions
publiques
était
le
grand
Pont
de
Messis,
(p.
289-
Pont
de
Messis)
ruiné
en
1274
par
le
sultan
Bendoukhtar,
selon
un
chroniqueur;
mais
d'après
le
Connétable,
«le
sultan
dévasta
le
Cantara
(acqueduc)
de
Messis
et
poursuivit
son
chemin
jusqu'à
Coricus».
Ce
pont
est
remarquable
par
son
antiquité:
construit
par
l'empereur
Constant,
fils
de
Constantin
le
Grand,
il
fut
restauré
par
Justinien.
Malgré
de
nombreuses
vicissitudes
il
est
resté
debout
avec
ses
neuf
arches,
en
pierres
de
taille:
à
ses
deux
extrémités
se
trouvent
des
bas-reliefs
anciens;
sur
l'un,
on
distingue
une
tête
de
bœuf,
sur
l'autre,
une
inscription
latine,
souvenir
d'un
soldat
de
la
XVI
e
légion.
Cinq
de
ses
arches
renversées
par
le
torrent,
en
1737,
ont
été
reconstruites.
En
1832,
les
Turcs
dans
leur
guerre
contre
les
Egyptiens,
ruinèrent
l'une
des
arches
pour
empêcher
le
passage
des
leurs
ennemis;
on
la
restaura
plus
tard
avec
du
bois;
et
c'est
l'unique
passage
lors
de
la
crue
des
eaux
du
Djahan,
pour
tous
ceux
qui
veulent
se
rendre
de
Marache
aux
plages
de
la
mer.
La
largeur
du
fleuve
dépasse
ici
430
pieds.
Par
sa
proximité
à
la
frontière
du
royaume
des
sultans
d'Egypte,
Messis
était
très
en
butte
aux
périls
de
la
guerre,
et
ce
n'est
que
grâce
à
ses
formidables
murailles
qu'elle
put
supporter
longtemps
plusieurs
sièges.
En
1322,
les
Arméniens
subirent
une
cruelle
défaite
sous
les
murs
de
cette
ville;
plusieurs
de
leurs
princes
tombèrent
dans
la
bataille,
entre
autres,
Héthoum
seigneur
de
Tchelganotz,
son
frère
Constantin,
Ochine,
fils
du
connétable,
Vahram
Lodigue,
«21
chevaliers
et
beaucoup
d'hommes
du
peuple».
A
cause
de
ces
alarmes
et
de
ces
continuelles
vexations,
le
siége
de
l'évêque
latin,
qui,
depuis
le
règne
de
Léon
le
Grand
était
établi
à
Messis,
fut
transféré
à
Ayas,
en
1320,
par
ordre
du
Pape
Jean
XXII.
Quant
aux
archevêques
arméniens
de
Mamestie,
que
nous
connaissons,
en
voici
la
liste:
[3]
«Erat
autem
Mamistra
una
de
nobilioribus
ejusdem
provinciæ
civitatibus,
muro
et
multorum
incolatu
insignis,
sed
et
optimo
agro
et
gleba
ubere
et
amænitate
præcipue
commendabilis».
—
Gul.
Tyrensis.
[6]
Cette
église
est
aussi
mentionnée
par
un
certain
prêtre
Guiragos,
qui
y
avait
écrit
un
Hymnaire,
pour
son
fils
spirituel,
le
prêtre
Jacques.
[7]
Peut-être
qu'à
part
celui-ci,
il
y
eut
un
autre
évêque
latin
du
nom
de
Jean,
élu
dans
la
même
année,
et
qui
avait
apposé
sa
signature
au
chrysobulle
de
Roupin,
Prince
d'Antioche.
Dans
la
série
des
évêques
latins,
on
en
trouve
un
nommé
Guillaume,
en
1245.
—
Paoli,
I,
258.