Nous
avons
décrit
les
vallées
moyennes
et
supérieures
du
Cydnus
dès
le
début
de
notre
topographie
générale
de
Sissouan:
après
avoir
traversé
les
défilés
de
la
Cilicie,
nous
sommes
parvenus
à
Mopsucrène
et
jusqu'à
l'entrée
de
la
plaine;
maintenant
en
descendant
vers
le
sud
il
nous
reste
à
explorer
la
vallée
inférieure
du
fleuve
qui
s'étend
jusqu'à
la
mer.
La
ville
de
Tarse
n'est
qu'à
quelques
kilomètres
des
montagnes
du
nord-ouest,
et
à
quatre
kilomètres
de
la
mer.
Ce
qu'on
appelle
«la
Plaine
de
Tarse»
se
trouve
à
l'est
et
au
sud
de
la
ville,
et
elle
est
coupée
par
le
célèbre
fleuve
du
Cydnus,
qui
coule
directement
vers
le
sud
avec
de
petites
déviations.
La
magnifique
végétation
de
cette
partie
de
la
Cilicie
a
toujours
été
célébrée;
elle
est
surtout
très
riche
aux
alentours
de
la
ville,
qui
est
entourée
de
jardins
et
de
vergers.
Les
vignes,
les
figuiers,
les
oliviers,
les
mûriers
et
les
orangers
y
abondent,
de
même
le
coton,
dont
le
commerce
est
si
avantageux
pour
le
pays.
Les
monts
à
pentes
rapides
et
à
précipices
abritent
dans
leurs
buissons
force
gibier:
des
gazelles,
des
coqs
et
des
oies
sauvages,
et
d'autres
oiseaux.
Vu
la
fertilité
du
terrain,
les
habitants
de
cette
partie
de
la
Cilicie
devraient
être
nombreux,
comme
ils
l'étaient
autrefois.
Tarse
a
été
en
effet
la
première
et
la
plus
florissante
des
capitales
successives
de
la
Cilicie;
cette
ville
est
connue
depuis
2500
ans.
Réduite
maintenant
au
même
état
que
toutes
les
autres
villes
de
ce
pays,
elle
n'a
plus
à
ses
alentours
ni
bourgs,
ni
villages
importants.
Toute
la
région
de
l'est
jusqu'aux
frontières
d'Adana,
et
au
sud,
jusqu'à
la
mer,
est
presqu'un
désert.
Cependant
ce
manque
d'habitants,
est
dû
surtout
au
climat
très
chaud
et
malsain.
Cette
partie
du
territoire
de
la
Cilicie
a
subi
depuis
les
temps
anciens
de
curieuses
et
continuelles
transformations:
autrefois
la
ville
de
Tarse
était
presque
maritime,
en
communication
avec
le
golfe
de
Rhegma
qui,
à
une
lieue
à
peine
des
murailles
de
la
ville,
recevait
un
fleuve
navigable,
et
les
vaisseaux
de
la
Méditerranée
pouvaient
ainsi
arriver
jusqu'aux
portes
de
Tarse.
De
nos
jours,
comme
nous
l'avons
dit
plus
haut,
la
ville
reste
à
quatre
ou
cinq
kilomètres
de
la
mer,
et
son
terrain
marécageux
a
été
formé
par
les
dépots
du
fleuve.
Tous
les
anciens
ports
sont
encombrés
au
sud
de
Tarse,
et
on
est
obligé
maintenant
pour
en
trouver
un,
d'aller
jusqu'à
Mersine,
c'est-à-dire,
plus
de
20
kilomètres
à
l'ouest
de
la
ville.
Tarse
devait
donc
fatalement
perdre
son
prestige
et
son
éclat,
et
Adana,
comme
nous
l'avons
vu,
lui
a
été
préférée
et
est
devenue
le
siège
du
gouverneur.
Pourtant
Tarse
est
l'une
des
villes
et
l'un
des
points
du
terrain
qui
a
conservé
le
plus
intacts
les
souvenirs
anciens
et
glorieux.
Nous
allons
les
explorer,
avec
d'autant
plus
de
loisir
que,
comme
nous
l'avons
indiqué,
toute
la
vallée
inférieure
du
Cydnus
ne
nous
offre
aucune
autre
construction
que
cette
grande
capitale
isolée.
Quel
fut
le
fondateur
de
Tarse?
Les
mythologistes
grecs
avancent
diverses
affirmations:
l'un
d'eux,
Athénodor,
natif
de
Tarse,
la
fait
remonter
jusqu'aux
Japhetionides;
selon
lui
cette
ville
aurait
été
construite
par
Anchiale,
fille
de
Japhet,
(laquelle
avait
déjà
donné
son
nom
à
une
ville
maritime
aussi
célèbre
que
Tarse),
et
par
son
fils
Cydnus,
qui
donna
le
sien
au
fleuve,
et
par
Parthénius,
fils
de
ce
dernier,
qui
éleva
aux
environs
une
ville
appelée
Parthenia.
Selon
Josèphe
et
d'autres,
ce
serait
Tarsis
fils
de
Javan
qui
aurait
fondé
la
ville.
Ce
nom
de
Tarse
pourrait
bien
aussi
provenir
d'un
mot
grec
qui
signifie
Terre
ferme,
peut-être
aussi
parce
que
ce
furent
ses
habitants
qui
inventèrent
la
manière
de
sécher
les
fruits,
ou
parce
que
ce
fut
ce
terrain
qui
fut
visible
le
premier
après
le
déluge;
ou,
enfin,
du
mot
grec
ταρσος
qui
signifie
talon,
comme
si
le
héros
Bellérophon
y
eût
laissé
les
traces
de
ses
talons!
(p.
306-
Tarsus,
ancienne
capitale
de
la
Cilicie)
Mais
les
savants
attribuent
plutôt
l'origine
de
Tarse
aux
descendants
de
Sem
qu'à
ceux
de
Japhet.
Ce
qui
est
hors
de
doute
c'est
que
ce
lieu
si
florissant
dans
le
passé,
existait
déjà
du
temps
des
souverains
Assyriens;
dont
le
dernier,
Sardanapale
ou
Thonos-Concoléros,
selon
le
témoignage
des
historiens
anciens
(Eusèbe),
fonda
en
un
même
jour
les
deux
villes
de
Tarse
et
d'Anchiale,
(820
ans
avant
J.
-C),
comme
il
le
fit
écrire
sur
son
tombeau.
Abydénus
l'attribue
à
Sennachérib,
et
notre
historien
Thomas
l'Ardzerouni,
admettant
cette
opinion
repète:
«Sennachérib
construisit
la
ville
de
Tarse
à
l'instar
de
Babylone,
faisant
passer
le
fleuve
par
le
milieu».
Michel
le
Syrien
apporte
une
autre
version:
«La
vingtième
année,
dit-il,
du
gouvernement
de
Tola
(juge
des
Israélites)
fut
construite
la
ville
de
Tarse
des
Ciliciens
par
Brissus
(Persée),
fils
de
Danaé».
Selon
d'autres
auteurs
grecs,
l'Argien
Triptolème
aurait
bâti
la
ville
pendant
qu'il
était
à
la
recherche
de
Io.
Quelques
autres
en
regardent
comme
le
vrai
fondateur,
Perséus
(1326
ans
avant
J.
-C.
)
et
allèguent
qu'elle
fut
appelée
Perséopolis,
Περσε
̉
ω
πολιν.
Quelques-uns
enfin
ont
entrevu
dans
la
ville
de
Tarse,
la
Tarchiche
des
Ecritures
saintes,
la
grande
ville
commerçante;
mais
les
exégètes
les
plus
autorisés
placent
cette
dernière
ville
sur
les
côtes
d'Espagne.
Tant
de
divergences
d'opinions
sont
une
preuve
de
la
grandeur
et
de
la
splendeur
de
cette
ville
qui
a
intéressé
tant
de
monde.
C'est
pourquoi
nous
croyons
devoir
ajouter
ici
le
témoignage
de
notre
Saint
Nersès
de
Lambroun,
qui
est
pour
nous,
après
Saint
Paul,
la
plus
grande
gloire
de
Tarse:
«Cette
ville,
dit-il,
appartient
aux
Ciliciens.
Arrosée
des
eaux
du
Cydnus,
elle
est
située
au
pied
du
Taurus,
montagne
très
grande
de
la
Cilicie.
Elle
fut
construite
par
Sénnachérib,
roi
des
Syriens;
car,
lorsqu'il
apprit
en
venant
de
l'Assyrie
que
les
Grecs
avaient
fait
une
irruption
dans
le
territoire
des
Ciliciens,
il
les
attaqua.
En
jetant
ainsi
son
armée
en
face
de
l'ennemi,
il
souffrit
une
grande
perte
de
soldats,
toutefois
la
victoire
lui
resta.
Il
fit
ériger
sa
statue
à
la
même
place.
Une
inscription
en
lettres
chaldéennes,
devait
transmettre
aux
générations
futures
le
souvenir
de
sa
bravoure
et
de
sa
force:
et
à
la
même
place
il
éleva
une
ville
à
l'imitation
de
Babylone,
et
l'appela
Tarsine.
L'histoire
même
prophétique
de
Jonas
fait
allusion
à
cette
ville
et
non
pas
à
la
Tharsis
d'Ethiopie»
[1].
Les
Arméniens
écrivent
Tarson,
Տարսոն,
et
rarement
Tarsous,
ainsi
que
les
étrangers
qui
disent
presque
toujours
Ταρσο
̀
ς,
Tarsus,
et
quelquefois
Τερσο
̀
ς.
Comme
il
y
avait
encore
dans
les
temps
anciens
une
autre
ville
de
ce
même
nom,
on
ajoutait
pour
la
première,
près
du
Cydnus,
Ταρσός
πρές
τω̣
Κύδνφ.
Les
Turcs
et
les
Arabes
aussi
l'appellent
Darsous
طرسوس.
Au
moyen
âge
les
Latins
écrivaient
par
corruption
Tursolt.
On
trouve
à
Tarse
des
monnaies
avec
diverses
effigies,
la
plupart
avec
des
inscriptions
grecques,
quelques-unes
avec
des
lettres
phéniciennes,
comme
celle
que
nous
reproduisons:
on
y
voit
l'image
de
Baal,
et
au
revers
un
lion
en
train
de
tuer
un
taureau
ou
un
cerf,
symbole
du
Persan
conquérant
du
Taurus;
d'autres
représentent
Sardanapale
ou
son
tombeau
pyramidal.
(p.
307-
Ancienne
monnaie
de
Tarse)
Dans
les
fouilles
que
l'on
a
faites
aux
alentours
de
la
ville,
on
a
trouvé
plusieurs
terres-cuites
et
des
pierres
avec
des
inscriptions
et
figures
mythologiques.
Tout
cela
prouve
clairement
que
Tarse
eut
des
habitants
de
différentes
religions
et
nationalités,
mais
surtout
des
Grecs.
Ceux-ci
au
temps
d'Alexandre
réussirent
à
en
faire
une
ville
grecque,
en
y
introduisant
leur
langue
et
leur
civilisation.
(p.
307-
Monnaie
grecque
de
Tarse)
Les
données
certaines
sur
la
ville
remontent
à
un
siècle
avant
ce
changement,
c'est-à-dire
400
ans
avant
l'ère
chrétienne,
à
Cyrus
le
Jeune,
qui,
dans
sa
marche
contre
son
frère
s'y
reposa
20
jours,
chez
Syennis
gouverneur
ou
roi
du
pays.
Toutefois
plusieurs
la
font
remonter
encore
plus
haut,
en
admettant
que
Tarchiche
où
s'enfuit
le
prophète
Jonas
n'est
autre
que
Tarsus
dont
nous
parlons:
ils
lui
attribuent
encore
les
paroles
des
lamentations
d'Ezéchiel
sur
Tyr
«Syrus
negotiator
tuus,
propter
multitudinem
operum
tuorum
».
Quoiqu'il
en
soit,
il
est
certain
que
Tarsus
fut
anciennement
très
florissante,
par
son
commerce,
grâce
à
son
port
sûr
et
commode,
où
il
avait
un
mouvement,
selon
quelques
historiens,
de
3,
000
bateaux
par
an.
Tous
ceux
qui
nous
rapportent
le
passage
d'Alexandre
le
Grand
par
la
ville
de
Tarse,
n'oublient
point
de
mentionner
son
bain
dans
le
Cydnus
et
sa
maladie
mortelle,
que
plusieurs
veulent
attribuer
à
la
qualité
des
eaux,
mais
les
auteurs
sérieux
rejettent
cette
opinion.
Alexandre
délivra
Tarse
du
joug
des
Perses
qui
y
avaient
alors
établi
pour
gouverneur
un
certain
Archam.
Durant
la
dynastie
des
Séleucides,
sous
l'autorité
desquels
elle
tomba,
la
ville
fit
de
grands
progrès
dans
les
arts,
le
commerce
et
les
sciences,
au
point
d'être
estimée
la
première
au
point
de
vue
intellectuel
après
Athènes
et
Alexandrie.
Elle
conserva
cette
prérogative
durant
six
ou
sept
siècles
au
moins;
elle
surpassait
toutes
les
villes
de
l'Asie
Mineure.
Peu
à
peu
sa
population
s'augmenta,
et
Michel
le
Syrien
rapporte
que
Séleucus
força
de
s'établir
à
Tarse
un
grand
nombre
d'étrangers,
car,
à
cause
de
son
climat
malsain,
bien
peu
de
personnes
consentaient
à
y
demeurer.
Enfin
comme
les
rois
des
Syriens
ou
des
Séleucides
portaient
ordinairement
le
nom
d'Antiochus,
Tarse
fut
aussi
appelée
la
ville
des
Antiochiens,
avec
le
surnom
de
«
près
du
Cydnus»,
comme
on
le
voit
sur
les
monnaies.
Cette
ville
fut
la
patrie
ou
le
séjour
de
plusieurs
personnages
savants,
comme
les
deux
Athénodor,
les
stoïciens
Antipatrus,
Archedamus
et
Nestor
l'académicien,
et
les
grammairiens,
Artemior
et
Diodore,
le
comédien
Dionyside
et
d'autres.
Pompée
fut
le
premier
qui
soumit
Tarse
à
l'empire
de
Rome;
il
lui
octroya
des
privilèges
de
liberté;
elle
fut
encore
plus
honorée
par
César:
dont
elle
s'était
montrée
partisan
dans
la
guerre
civile;
on
l'appela
dès
lors
ville
de
César,
Juliopolis;
Antoine
la
favorisa
encore
plus,
en
l'exemptant
d'impôt.
Tout
le
monde
connaît
la
réception
magnifique
que
fit
Antoine
à
Cléopâtre,
lorsque
remontant
le
cours
du
Cydnue,
dans
un
bateau
garni
de
voiles
de
pourpre,
cette
reine,
toujours
pompeusement
parée,
vint
le
trouver
dans
la
ville.
Elle
avait
envie
de
gagner
par
ses
charmes
le
cœur
du
voluptueux
consul;
mais
cette
entrevue
n'aboutit
qu'à
leur
perte
commune.
Leur
vainqueur,
César
Auguste,
accorda
à
Tarse
les
privilèges
des
villes
libres,
et
l'on
inscrivit
sur
les
monnaies
Libera
Civitas.
Nous
pourrions
dire
que
Tarse
atteint
l'apogée
de
sa
splendeur,
par
la
grâce
du
Dominateur
suprême;
car
presqu'en
même
temps
Dieu
lui
accorda
la
fortune
de
donner
le
jour
à
un
homme
incomparable,
à
Saint
Paul,
l'Apôtre
universel,
et
vase
d'élection;
qui
se
disait
lui
même:
«Juif
de
Tarse
en
Cilicie,
et
citoyen
de
cette
ville
célèbre»;
libre
citoyen
romain
par
naissance
[2].
Or,
la
patrie
d'un
tel
personnage,
la
capitale
d'un
grand
territoire
de
l'Asie
Mineure,
devait
être
fournie
d'un
glorieux
siége
ecclésiastique;
elle
eut
pour
premier
pasteur
Jason
disciple
de
Paul:
elle
devint
ensuite
un
siège
archiépiscopal
ou
métropolitain,
dépendant
du
patriarcat
d'Antioche,
mais
ayant
pourtant
sous
sa
propre
juridiction
sept
siéges
d'évêques
[3].
Vers
la
fin
du
X
e
siècle
on
y
établit
un
siège
archiépiscopal
arménien.
Ce
siège
fut
occupé
pendant
le
dernier
quart
du
XII
e
siècle,
par
l'immortel
Saint
Nersès
de
Lambroun,
digne
fils
de
Saint
Paul,
et
l'un
des
flambeaux
éclatants
de
notre
église.
L'importance
de
la
ville
et
le
grand
nombre
de
chrétiens
qui
y
séjournaient
excitèrent
probablement
les
persécutions:
on
pourrait
y
citer
plusieurs
martyrs
du
Christ;
les
uns
furent
exécutés
dans
la
ville
même;
les
autres
jugés
seulement
et
envoyés
ailleurs
pour
y
verser
leur
sang;
ainsi
Sainte
Aréthuse,
sous
Valérien;
Cyrianée
et
Julienne
sous
Maximien;
la
vierge
Pélagie,
sous
Dioclétien,
Saint
Boniface
[4],
et
enfin
Taracus
et
ses
compagnons;
Zénaïde
et
Philonille,
parents
et
disciples
de
Saint
Paul,
versèrent
aussi
leur
sang
dès
les
premiers
temps
de
l'Eglise.
C'est
après
les
persécutions
seulement
que
le
siège
de
Tarse
fut
élevé
canoniquement
au
grade
de
siège
métropolitain,
et
dans
les
conciles
de
l'église
il
est
rangé
parmi
les
plus
importants.
Un
des
plus
fameux
citoyens
de
Tarse,
grâce
à
sa
science,
fut
Diodore,
maître
de
Théodore
de
Mopsueste,
à
qui
il
fit
partager
ses
erreurs.
A
mesure
que
leurs
colonies
se
développaient
dans
cette
région,
les
Croisés
établirent
à
Tarse
un
archevêque
latin,
et
Léon
le
Grand
consentit
à
le
recevoir;
il
se
brouilla
cependant
quelquefois
avec
lui
et
le
chassa,
puis
l'invita
de
nouveau
à
revenir.
Nos
historiens
arméniens
rapportent
que
vers
le
milieu
du
IV
e
siècle,
Archélaüs,
prince
de
la
IV
e
Arménie,
se
réfugia
à
Tarse,
après
avoir
tué
Saint
Arisdacés,
fils
de
Saint
Grégoire
l'Illuminateur.
Dans
ce
même
siècle
la
ville
vit
les
funérailles
de
Julien
l'Apostat,
puis
celles
de
Jovien,
son
successeur.
D'autres
princes
avaient
été
déjà
enterrés
à
Tarse:
les
empereurs
Tacite,
Florien
son
frère,
et
Maximien.
Tarse,
n'était
donc
pas
seulement
estimée
comme
la
ville
principale
d'un
canton
ou
d'un
pays,
mais
encore
comme
l'une
des
plus
glorieuses
villes
du
vaste
empire
des
Romains
et
des
Byzantins
en
Orient.
Les
empereurs
y
séjournaient
quelquefois.
Les
prétendants
à
la
couronne
s'y
retranchèrent
aussi,
comme
Léon
sous
le
règne
de
l'empereur
Zénon
(484),
et
Athénodore,
au
temps
d'Anastase,
(497).
Vers
la
fin
du
VI
e
siècle,
l'empereur
Maurice
restaura
le
temple
de
Saint-Paul.
Au
commencement
du
VII
e
siècle
Khorème,
général
persan,
envoyé
par
Khosroès
II,
conquit
la
ville
de
Tarse,
mais
l'empereur
Héracle
ayant
conclu
un
traité
avec
les
Perses,
la
ville
lui
fut
rendue.
Peu
après,
de
nouveaux
conquérants,
les
Arabes,
soumirent
pour
longtemps
cette
ville;
non
seulement
ils
y
instituèrent
des
gouverneurs
comme
dans
les
autres
districts,
mais
quelques-uns
de
leurs
califes
vinrent
s'y
établir;
c'est
là
que
mourut,
le
31
Juillet,
833
Mémoun,
dont
le
fils,
né
dans
la
même
ville,
combattit
avec
grand
acharnement
contre
les
Grecs.
Quelques
années
après,
en
865,
l'empereur
Nicéphore,
avec
l'aide
de
son
général,
Jean
Zimisces,
assiégea
Tarse
et
la
réduisit
par
la
famine.
Il
la
repeupla
de
chrétiens,
transporta
ses
portes
et
celles
de
Mopsueste
à
Constantinople,
en
signe
de
sa
victoire,
et
les
attacha
aux
murailles
et
à
la
Porte
d'or.
Pantaléon,
docteur
arménien
contemporain,
rapporte
ainsi
cet
événement:
«L'empereur
vainquit
les
païens
en
plusieurs
guerres
et
brisa
le
joug
qui
pesait
sur
le
cou
des
chrétiens;
il
s'empara
de
plusieurs
châteaux
inaccessibles,
surtout
de
la
grande,
célèbre
et
magnifique
Tarse
des
Ciliciens...
et
il
en
emporta
les
ornements
de
leurs
chefs,
les
mages,
pour
embellir
Sainte-Sophie».
Il
délivra
de
même
les
bannières
chrétiennes
que
les
Arabes
avaient
arrachées
90
ans
avant
(en
877),
après
avoir
battu
près
de
Tarse
l'insoucieux
général
Stupiote.
Basile
II,
le
successeur
de
ces
conquérents,
eut
soin
de
fortifier
encore
davantage
la
ville
et
ses
alentours,
pour
y
assurer
la
prédominance
des
Grecs;
il
y
séjourna
une
année
(999-1000).
La
domination
des
Grecs
dura
un
siècle,
leur
gouverneur
résidait
à
Tarse.
Dans
le
troisième
quart
du
XIe
siècle
leur
représentant
était
un
arménien,
Abelgharib
Ardzerouni,
fils
de
Khatchig;
durant
la
présidence
duquel
ou
quelque
peu
avant,
le
catholicos
Georges,
l'assistant
du
grand
Martyrophile
(Grégoire
II)
renvoyé
par
ce
dernier,
se
retira
à
Tarse
avec
le
repentir
dans
son
cœur
et
y
mourut.
A
la
première
apparition
des
Croisés,
avant
la
prise
d'Antioche,
la
troupe
de
l'ardent
Tancrède,
parvint
la
première
à
Tarse;
grâce
à
la
coopération
des
habitants
arméniens,
il
en
chassa
la
garnison
turque
et
fit
hisser
sa
bannière
sur
les
murailles;
Baudouin,
frère
de
Godefroy
de
Bouillon,
arriva
contre
la
ville,
avec
une
troupe
plus
forte,
et
se
crut
en
droit
de
remplacer
le
drapeau
de
Tancrède
par
le
sien.
Tancrède
lui
céda
la
place
et
alla
conquérir
la
ville
de
Mamestie.
Peu
de
temps
après,
300
pèlerins
se
firent
voir
à
la
porte
de
la
ville;
mais
comme
on
ne
leur
permit
pas
l'entrée,
ils
furent
tous
massacrés
par
les
Turcs.
Ce
fait
irrita
extrêmement
tous
les
chrétiens
contre
Baudouin;
celui-ci
s'excusa
d'abord,
en
prétextant
une
alliance
avec
les
Turcs;
mais
à
la
fin
pour
apaiser
l'excitation,
il
chassa
tous
les
Turcs
de
la
ville
et
crut
avoir
ainsi
réparé
sa
faute.
A
partir
de
cette
époque
jusqu'à
la
fin
du
XII
e
siècle,
Tarse
fut
un
continuel
objet
de
querelle
entre
les
Grecs,
les
Latins
et
les
Arméniens:
ces
derniers
s'en
emparèrent
enfin
définitivement
et
en
devinrent
maîtres
absolus.
D'abord
ce
fut
l'audacieux
Baron
Léon,
en
1130,
qui,
selon
le
Docteur
Vahram,
«S'empara
de
Mamestie
Et
parvint
jusqu'à
la
grande
Tarse».
Après
lui
Thoros
II,
son
digne
fils,
plus
heureux
que
lui,
«Enrôla
des
soldats
Et
conquit
l'illustre
Tarse».
Durant
les
règnes
assez
courts,
de
son
frère
Meléh
et
de
son
neveu
Roupin
II,
Tarse
tomba
sous
la
domination
du
prince
d'Antioche;
aussi
Léon,
neveu
de
Meléh,
s'y
réfugia
d'abord
pour
couper
court
aux
calomnies
de
quelques
uns
auprès
de
son
frère,
de
là,
il
passa
à
Constantinople
(1181).
Deux
ans
après,
le
prince
d'Antioche
revendit
Tarse
à
Roupin;
car
il
n'espérait
plus
conserver
sous
sa
domination
cette
grande
ville
si
lointaine,
perdue
au
milieu
des
possessions
du
grand
prince
des
montagnes
[5].
Arrivés
à
ce
point
de
l'histoire
de
la
ville,
je
crois
convenable
de
jeter
un
coup
d'œil
sur
les
alentours
de
Tarse,
avant
d'exposer
les
faits
historiques
arméniens,
et
d'explorer
les
débris
des
édifices
de
ses
premiers
conquérants.
Ces
restes
ont
été
de
plus
en
plus
détruits;
toutefois
on
en
aperçoit
les
traces
et
les
fondements.
D'abord
nous
devons
nous
arrêter
un
peu
sur
la
position
de
la
ville
qui
a
soulevé
plusieurs
discussions;
nous
avons
indiqué
plus
haut,
que
Tarse
était
coupée
par
le
fleuve
Cydnus,
comme
Babylone
par
l'Euphrate,
selon
le
témoignage
de
nos
historiens
Arméniens,
parmi
lesquels
Etienne
Assoligue.
Or,
la
ville
actuelle
est
à
la
droite,
à
l'ouest
du
fleuve.
Quelques
savants
ont
supposé
que
ce
dernier
avait
changé
son
cour;
d'autres
n'attribuent
aucun
changement
ni
au
fleuve
ni
à
la
ville,
supposant
qu'elle
n'était
pas
traversée
par
le
fleuve,
mais
coupée
par
quelques
canaux
qui
y
aboutissaient,
comme
on
en
voit
encore
de
nos
jours;
en
tout
cas
la
partie
la
plus
importante
et
surtout
les
murailles
de
la
ville
sont
sur
la
rive
droite
du
fleuve;
sur
la
gauche
on
ne
voit
rien
de
remarquable,
on
pourrait
alléguer
que
la
Tarse
actuelle
ne
représente
qu'un
quart
de
l'ancienne.
Parmi
les
constructions
les
plus
anciennes,
nous
pouvons
citer
les
remparts;
mais
comme
ils
furent
restaurés
plusieurs
fois,
c'est
à
peine
si
sur
les
fondements
on
aperçoit
les
vestiges
de
son
ancien
style
gigantesque.
Tarse
possède
en
outre
une
énorme
construction
d'un
style
particulier,
appelée
par
les
Turcs
Deunuk-tache
ou
Délik-tache
[6];
on
suppose
que
ce
soit
le
Tombeau
de
Sardanapale.
(p.
310-
Deunuk-tache,
Tombeau
de
Sardanapale)
Elle
se
trouve
au
sud-est
de
la
ville
près
de
Démir-kapou
(Porte
de
fer),
au
milieu
d'un
jardin;
c'est
un
vaste
parallélipipède
mesurant
42
mètres
de
long,
sur
20
mètres
de
large,
et
3
pieds
de
haut.
Il
est
formé
d'un
mélange
de
petits
cailloux,
de
chaux
et
de
sable.
A
ses
deux
extrémités
il
y
a
des
fossés
carrés
maçonnés
de
la
même
matière,
l'un
est
grand
et
comblé
de
terre,
l'autre
plus
petit
et
vide;
on
remarque
encore
trois
autres
petites
fosses
carrées,
près
desquelles
on
voit
des
cavités
dans
le
mur,
qui
semblent
indiquer
la
place
des
poutres
qui
supportaient
le
plafond
de
l'édifice,
dont
on
ne
distingue
qu'u-ne
entrée
large
de
10
pieds,
au
nord-ouest.
En
face
de
cette
construction,
au
nord-est
s'élève
un
mur
parallèle,
plus
un
autre
é-galement
parallèle
à
celui-ci,
avec
les
restes
d'un
plafond
voûté,
presque
entièrement
ruiné.
La
masse
de
la
construction
est
formée
de
couches
horizontales
d'environ
50
centimètres
d'épaisseur,
réunies
à
leur
base
par
des
débris
de
chaux
blanche,
comme
dans
les
autres
édifices;
mais
elle
est
maintenant
entièrement
couverte
de
débris.
Les
trois
parties
de
la
construction
prises
ensemble
ont
une
longueur
de
115
mètres;
l'épaisseur
des
murs
est
de
6
mètres
50,
la
longueur
du
grand
fossé
carré
de
23
mètres,
la
largeur
de
16
m.
50;
la
longueur
du
petit
fossé
est
de
18
mètres,
sa
largeur
de
11
et
la
hauteur
de
tous
les
deux
est
de
7
m.
60.
Les
savants
et
les
explorateurs
ne
sont
pas
d'accord
sur
la
destination
de
cette
édifice;
plusieurs
y
voient
un
tombeau,
les
uns
de
Sardanapale,
les
autres
de
Julien.
Quelques-uns
aifirment
que
ce
sont
les
ruines
d'un
temple
ou
d'un
château,
d'autres
que
c'est
le
tombeau
non
d'un
seul,
mais
de
plusieurs
personnages
de
la
noblesse;
enfin
l'opinion
la
plus
probable
est
que
nous
ayons
là
les
restes
d'un
temple
au
dieu
soleil
de
Tarse,
auquel
on
offrait
le
feu
sacré;
pourtant
tous
les
savants
témoignent
que
c'est
une
construction
originale
et
d'un
style
tout
à
fait
particulier
[7].
L'
Aqueduc
en
arcades
est
une
construction
romaine:
il
passe
près
du
marché
actuel
de
la
ville,
le
long
d'une
rue.
Il
y
a
encore
un
autre
petit
aqueduc
hors
de
la
ville,
à
gauche
du
fleuve,
et
les
habitants
l'appellent
à
présent
un
château;
ces
deux
constructions
sont
entourées
de
masses
de
cailloux
et
de
sable.
On
a
découvert
au
fond
de
la
ville
des
égouts
voûtés,
le
principal
mesure
4
mètres
de
haut
sur
2
m.
50
de
largeur;
les
autres
1
m.
50
sur
0,
50
de
largeur;
ils
aboutissent
au
fleuve.
Le
pont
à
l'est
de
la
ville
paraît
une
construction
romaine,
sans
doute
on
l'aura
restauré
plusieurs
fois.
A
part
cela
on
ne
voit
aucun
autre
édifice
ancien
debout
à
Tarse,
ni
temples,
ni
arcs
de
triomphe,
seulement
des
inscriptions
sur
des
pierres
isolées
enchâssées
çà
et
là
dans
quelques
constructions
récentes;
ces
inscriptions
peuvent
intéresser
les
archéologues
savants,
mais
elles
ne
disent
rien
sur
la
construction
de
la
ville.
Hors
des
murailles
on
trouve
des
traces
de
monuments
romains;
au
sud-est
de
la
ville
s'élève
le
monticule
Gueozluk-kalè
qui
paraît
avoir
été
dans
les
temps
anciens
une
grande
nécropole:
(p.
311-
Des
fouilles
de
Gueozluk-kalé)
dans
des
fouilles
on
a
trouvé
des
statuettes
d'argile
et
des
sculptures
païennes,
plutôt
grecques
que
romaines.
L'
arène,
mentionnée
par
Strabon,
se
trouvait
sur
la
pente
orientale
de
la
colline:
elle
est
semi-circulaire;
les
fondements
sont
de
pierres
de
taille,
et
la
partie
supérieure
est
formée
d'un
mélange
de
cailloux
et
de
mortier.
Actuellement
on
enlève
toutes
les
grandes
pierres
pour
de
nouvelles
constructions.
Au
nord
de
cette
arène
était
le
Champ
de-Mars,
transformé
maintenant
en
terre
labourable;
c'est
là
que
se
tenaient
au
temps
des
empereurs
les
jeux
et
les
grandes
réunions;
car
la
ville
de
Tarse
était
le
lieu
des
assemblées
de
la
régence
administrative
des
villes
d'Isaurie,
de
Carie
et
de
Lycaonie.
Les
régences
avaient
été
établies
durant
la
domination
des
Grecs,
avant
la
conquête
des
Romains;
l'assemblée
portait
le
nom
de
Κοινόν
Κιλιχίας,
Alliance
cilicienne.
Parmi
les
monuments
byzantins
l'un
des
plus
remarquables
est
la
porte
Khandji-kapou
non
loin
de
Gueozluk-kalé,
au
sud-est
des
murailles
de
la
ville;
sur
la
gauche
de
cette
porte,
on
voit
une
grande
niche
qui
devait
sans
doute
contenir
une
statue.
(p.
312-
Khandji-Kapou)
La
forteresse
de
Tarse
était
une
construction
byzantine,
au
sud-est
de
la
ville.
Elle
était
entourée
d'une
double
muraille
et
de
tranchées,
sa
porte
regardait
le
sud.
Sans
doute
on
devait
y
trouver
aussi
des
inscriptions
arméniennes,
mais
l'explosion
d'une
poudrière
durant
la
guerre
égyptienne,
ruina
les
murailles
de
fond
en
comble.
On
trouve
dans
les
divers
quartiers
de
la
ville
des
restes
de
sculptures
et
de
dalles
romaines
avec
des
mosaïques,
mais
très
peu
d'inscriptions.
La
plus
précieuse
des
antiquités
trouvées
à
Tarse,
est
un
monument
funéraire
en
marbre
blanc,
dans
lequel
on
a
trouvé
intacts
les
ossements
du
mort.
Le
consul
américain,
envoya
le
tout
à
New-York,
en
1871.
Peut-être
tous
les
édifices
remarquables
que
nous
avons
cités,
sont-ils
surpassés
par
les
Souterrains
ou
Catacombes
de
Tarse;
mais
je
n'ai
sur
ces
curieuses
constructions
aucune
donnée
précise;
j'en
attends
des
explorateurs
à
venir.
Comme
nous
l'avons
déjà
indiqué,
durant
la
deuxième
moitié
du
XII
e
siècle,
Tarse
tomba
sous
la
domination
des
premiers
Roupiniens,
qui
ne
la
perdirent
qu'après
deux
siècles.
Les
premiers
souvenirs
arméniens
de
cette
ville
appartenaient
plutôt
à
l'église
qu'au
gouvernement
civil.
Des
premiers
évêques
arméniens
qui
y
résidèrent,
de
la
fin
du
X
e
siècle
jusqu'à
la
fin
du
XII
e,
nous
n'avons
ni
les
noms,
ni
le
souvenir
de
leurs
actes.
Quand
la
population
arménienne
augmenta
à
Tarse,
le
catholicos
Khatchig
y
établit
un
archevêque.
A
l'époque
dont
nous
nous
occupons,
le
premier
archevêque
connu
fut
Grégoire
Abirad;
il
fut
nommé
par
son
parent
Grégoire
Degha,
lorsque
ce
dernier
monta
sur
le
siège
patriarcal;
mais,
comme
il
paraît,
quand
Abirad
fut
transféré
au
siège
de
Cappadoce,
il
fut
remplacé
par
Nersès
de
Lambroun.
Après
la
mort
de
celui-ci,
le
siège
fut
divisé
en
deux
diocèses,
dont
l'un
garda
l'ancien
titre
(de
Tarse),
et
l'autre
fut
appelé
de
Lambroun.
A
cette
époque,
la
ville
de
Tarse
fut
plus
fortifiée
que
jamais
dans
le
passé.
Avant
le
couronnement
de
Léon
I
er,
Grégoire
le
catholicos
s'était
rendu
à
Tarse,
où
il
reçut
(au
mois
d'octobre
en
1185)
les
lettres
du
Pape
Lucius,
et
le
livre
des
règlements
de
l'église
de
Rome,
le
tout
accompagné
d'une
mitre
et
d'un
pallium;
ce
fut
Grégoire
l'évêque
de
Philippopolis,
qui
les
lui
apporta.
Le
catholicos
qui
l'avait
envoyé
comme
nonce
auprès
du
Pape,
fit
traduire
en
arménien,
par
Saint
Nersès,
la
lettre
et
le
livre.
Cinq
ans
après,
lorsque
l'empereur
Frédéric
I
er
traversa
ces
lieux,
le
catholicos
se
rendit
de
nouveau
à
Tarse
pour
aller
à
sa
rencontre,
se
faisant
précéder
de
saint
Nersès
son
coadjuteur.
A
la
nouvelle
de
l'accident
fatal
qui
avait
coûté
la
vie
à
l'empereur,
près
de
Séleucie,
Nersès
retourna
à
son
poste,
plein
d'affliction.
«Il
accueillit
solennellement
l'archevêque
de
la
ville
de
Munster,
qui
était
accompagné
de
1,
000
cavaliers».
Il
reçut
de
cet
archevêque
le
canon
latin
de
la
bénédition
des
rois
et
le
traduisit
en
arménien;
quelque
temps
après
Léon
fut
sacré
roi
suivant
ce
canon,
et
Saint
Nersès
prit
part
aux
cérémonies.
Cette
solennité
nous
donne
le
droit
d'appeler
Tarse
la
première
capitale
des
Arméniens.
Sainte-Sophie,
la
grande
église
érigée
par
les
Grecs
et
dédiée,
selon
leur
idée,
à
la
Sagesse
Divine,
fut
choisie
pour
la
célébration
de
cette
fête
solennelle;
elle
portait
de
même
le
nom
de
Saint-Pierre,
peut-être
ajouté
par
Léon,
à
cause
du
drapeau
de
Saint
Pierre
qu'il
avait
reçu
du
pape.
Willebrand,
qui
visita
la
ville
de
Tarse
douze
ans
après
le
couronnement
de
Léon,
place
au
centre
de
la
ville
la
cathédrale
bâtie
en
marbre
blanc
et
très
élégante.
A
l'extrémité
de
l'église
il
y
avait
une
statue
sur
laquelle
avait
été
peinte
par
une
main
angélique,
l'image
de
Notre-Dame,
objet
d'une
grande
vénération:
on
disait
que
cette
image
versait
en
abondance
de
grosses
larmes,
lorsque
de
graves
périls
menaçaient
le
pays
[8].
Léon
avait
accordée
cette
église
à
l'archevêque
des
Latins,
le
jour
de
son
couronnement,
mais
il
la
lui
repris
plus
tard.
«Hors
de
l'église,
dans
un
coin,
dit
Willebrand,
il
y
a
le
tombeau
de
la
fille
de
Mahomet,
très
vénéré
des
mahométans»;
mais
ce
devait
être
celui
de
la
fille
de
quelque
émir
ayant
résidé
à
Tarse.
Il
ajoute
pour
la
ville
qu'elle
était
très
peuplée
et
entourée
de
murailles
assez
délabrées:
mais
elle
avait
encore
un
château
fortifié
en
bon
état,
élevé
à
l'endroit
où
Saint
Théodore
subit
le
martyre,
et
la
chapelle
lui
en
était
dédiée.
Willebrand
et
l'ambassadeur
du
duc
de
l'Autriche,
furent
reçus
solennellement
dans
cette
ville
par
Léon
qui
les
garda
à
la
cour
dix-sept
semaines.
Dans
la
cathédrale
de
Tarse
à
(Sainte-Sophie)
furent
encore
sacrés
rois
deux
célèbres
successeurs
de
Léon,
Héthoum
I
er,
son
gendre,
et
Léon
II,
son
petit-fils,
comme
l'indique
l'historien
royal.
L'an
1226,
dit-il,
«furent
assemblés
à
Tarse
le
catholicos
Constantin,
les
évêques
et
les
princes
et
ils
sacrèrent
roi...
le
jeune
Héthoum,
et
ce
fut
une
joie
extrême
pour
les
Arméniens;
tous
manifestèrent
une
grande
sympathie
pour
le
pape
de
Rome
et
pour
l'empereur
des
Allemands»
[9].
Un
autre
historien
dit:
«Le
6
Janvier
en
1271,
on
sacra
roi
des
Arméniens,
Léon,
fils
du
roi
Héthoum,
dans
la
capitale
de
Tarse,
dans
l'église
de
Sainte-Sophie;
plusieurs
personnages
de
diverses
nations
s'y
étaient
réunis
pour
être
témoins
de
la
réjouissance
commune,
qui
était
digne
d'être
vue.
Le
même
jour
plusieurs
citoyens
furent
honorés
de
dignités
et
plusieurs
délivrés
de
prison»
[10].
Le
sacre
d'Ochine
eut
aussi
lieu
à
Tarse
en
1308,
et
probablement
d'autres
encore,
En
considérant
avec
quelle
pompe
les
chefs
de
la
nation
célébraient
à
Tarse
la
plus
grande
des
fêtes
nationales,
nous
déduisons
que
cette
ville
conserva
toujours
son
titre
et
sa
splendeur
de
capitale;
surtout
étant
un
port
maritime,
elle
se
trouvait
en
de
meilleures
conditions
que
Sis,
pour
attirer
le
concours
des
étrangers
et
des
hôtes
dans
les
jours
solennels.
Sainte-Sophie
paraît
avoir
disparu
en
même
temps
que
le
royaume
des
Arméniens;
depuis
lors,
ni
son
nom,
ni
son
emplacement
ne
sont
plus
rappelés;
mais
on
croit
qu'elle
devait
être
située
là
où
les
Ramazans
ont
érigé
leur
mosquée
d'
Oulou-djami.
Ainsi
que
nous
venons
de
le
voir,
Tarse
a
été
toujours
une
ville
très
populeuse;
par
conséquent
lors
de
sa
conquête
par
les
Arméniens
elle
devait
être
peuplée
en
grande
partie
par
des
Grecs,
comme
le
déclare
notre
Saint
Nersès
de
Lambroun.
Ces
Grecs
après
la
mort
de
Léon
le
Grand,
se
mirent
d'accord
avec
le
parti
contraire
au
régent
Constantin,
le
Bailli
des
Arméniens;
ils
choisirent
pour
chef
et
commandant
le
grand
prince
Baron
Vahram,
et
à
la
tête
de
5,
000
insurgés,
pensèrent
surprendre
le
Bailli.
Mais
celui-ci
informé
à
temps,
sut
prévenir
leurs
intentions:
les
attaqua
près
d'Adana,
les
battit
et
les
poursuivit
jusqu'à
Tarse,
où
ils
se
réfugièrent.
«Ils
fermèrent
les
portes
et
montèrent
sur
les
remparts
pour
résister
aux
assaillants.
Mais
un
homme
de
la
ville,
du
nom
de
Basile,
entra
en
négociations
avec
le
Bailli
qui
lui
promit
tout
ce
qu'il
voulait.
Pendant
la
nuit
Basile
ouvrit
les
portes
et
le
Bailli,
entrant
avec
ses
soldats
dans
la
ville,
fit
piller
les
maisons
des
Grecs.
Les
princes
révoltés
s'enfuirent
de
la
ville
et
se
réfugièrent
dans
la
forteresse
qui
était
inaccessible.
Le
sage
Constantin
réussit
à
les
réduire
sans
coup
férir,
et
après
les
avoir
soumis,
les
mit
en
prison;
quelques-uns
furent
délivrés,
mais
d'autres
y
restèrent
jusqu'à
la
fin
de
leur
vie».
Tous
ces
faits
sont
rapportés
par
notre
historien
de
la
Cilicie.
Héthoum
s'étant
affermi
sur
le
trône,
en
1228,
se
mit
à
restaurer
les
murailles
de
Tarse,
ce
que
Léon
n'avait
pas
eu
le
temps
de
faire,
étant
occupé
à
d'autres
constructions.
Une
pierre
de
couleur
noirâtre,
portant
une
inscription
arménienne,
sauvée
par
une
heureuse
chance,
quoique
usée
en
certains
endroits,
reste
encore
comme
témoignage
du
passé.
On
l'a
appliquée
contre
le
mur
extérieur
de
l'église
de
la
Sainte-Vierge:
elle
est
longue
de
75
centimètres
et
haute
de
55;
en
voici
l'inscription:
«L'an
677
de
l'ère
arménienne
(1238)
les
remparts
de
Tarse
ont
été
renouvelés
par
la
main
de
Héthoum
roi
des
Arméniens».
[1]
Nersés
de
LAMBROUN
dans
son
Commentaire
sur
la
prophétie
de
Jonas.
—
Ephrem
aussi,
catholicos
de
Sis,
dans
son
Commentaire
sur
la
même
prophétie
ajoute:
«Elle
fut
bâtie
par
Sennachérib,
roi
des
Assyriens,
après
avoir
battu
les
Hellènes.
Il
y
érigea
sa
statue
en
signe
de
triomphe,
et
y
fit
graver
une
inscription
en
lettres
chaldéennes.
Il
la
fit
construire
semblable
à
Babylone.
Jules
César
l'agrandit,
augmenta
son
territoire,
et
l'appela
Juliopolis,
permettant
aux
habitants
de
porter
le
titre
de
Romains.
C'est
dans
ce
sens
que
Paul
s'écria:
Vous
est-il
permis
de
flageller
un
citoyen
romain»?
[3]
Ces
diocèses
sont:
Pompéiopolis,
Sébaste,
Coricus,
Adana,
Aloussia,
Malcos
et
Zéphyrion.
—
Dans
un
autre
cens
diocésain
du
VI
e
siècle,
on
ne
trouve
indiqués
que
cinq
diocèses
de
Tarsus,
qui
sont:
Sébaste,
Mallos,
Thina,
Coricus,
Potandus
ou
Potératus.
Mais
l'archimandride
Nile
Doxopatrias,
dans
son
traité
des
cinq
patriarcats,
traduit
par
Nersès
de
Lambroun,
en
indique
six.
[4]
Celui-ci,
prié
par
Aglayée,
(noble
et
riche
dame,
avec
laquelle
il
vivait
scandaleusement
à
Rome),
de
lui
procurer
quelque
corps
des
martyrs
d'Orient,
répondit
en
se
moquant:
«Et
comment
le
recevriez-vous
si
c'était
mon
propre
corps
qu'on
vous
portait»?
Grondé
par
son
amante,
il
partit
avec
ses
domestiques:
arrivé
à
Tarse,
il
fut
touché
de
la
grâce
divine,
se
convertit,
et
souffrit
le
martyr.
Son
corps
fut
porté
par
les
domestiques
à
Aglayée,
qui
l'ensevelit
sur
la
voie
Latine,
et
fit
élever
une
chapelle
sur
son
tombeau;
elle
y
fut
ensevelie
elle-même
et
vénérée
comme
sainte,
(8
ou
16
Mai).
[5]
Guil.
Tyr.
XXII,
24.
—
Tarsum...
quam...
G
ræcis
receperat,
Rupino
Armeniorum
Satrapæ
potentissimo,
qui
ejusdem
regionis
urbes
reliquas
possidebat,
multarum
pecuniarum
tradidit,
interventu,
consulte
id
faciens:
nam
cum
esset
ab
eo
remota
nimis,
et
prædicti
Rupini
terra
in
medio
constituta,
non
nisi
cum
difficultate
et
infinitis
sumptibus
ejus
curam
Princeps
gerere
poterat,
quod
prædicto
nobili
viro
erat
facile.
[6]
Pierre
tournante
ou
trouée.
Selon
une
tradition
transmise
par
certains
Turcs,
elle
fut
appelé
ainsi
parce
que
leur
prophète
l'ayant
maudite,
la
construction
se
renversa,
comme
châtiment
infligé
au
propriétaire
qui
l'avait
insulté.
[7]
Voici
les
paroles
de
Mme.
de
Belgiojoso.
—
«On
éprouve,
en
parcourant
cette
mystérieuse
enceinte,
une
incertitude
vague
et
mélanconique,
qui
vous
plonge
dans
les
abîmes
du
passé
sans
vous
enchaîner
ni
à
une
époque,
ni
à
une
nation
définie;
incertitude
qui
n'est
pas
sans
un
charme
singulier».
[8]
In
fine
sui
(ecclesi
æ
)
habens
quamdam
statuam,
cui
imago
Domin
æ
nostr
æ
angelicis
manibus
est
dipincta,
qu
æ
in
maxima
ab
hominibus
illius
terr
æ
habetur
veneratione:
sicut
enim
multi
et
omnes
videre
consueverunt;
h
æ
c
imago
dum
aliquod
grave
periculum
illi
terr
æ
imminet,
coram
omnibus
et
magna
quantitate
solet
lacrymari.
H
æ
c
est
illa
qu
æ
dicitur
qu
æ
Tbeophilum
reformavit.
—
Willebrand.
—
Ce
Théophile
était
le
gardien
de
l'église
d'Adana;
il
avait
refusé
la
dignité
épiscopale
par
humilité
et
crainte
de
n'être
pas
à
la
hauteur
d'une
si
noble
fonction.
Mais
le
nouvel
élu
lui
ayant
enlevé
la
charge
de
gardien
de
l'église,
il
se
révolta,
renia
sa
foi,
et
tomba
même
dans
des
artifices
magiques.
Cependant
après
quelque
temps
il
se
repentit,
pria
avec
ferveur
devant
l'image
de
la
Sainte-Vierge,
et
non
seulement
obtint
le
pardon
de
sa
faute,
mais
encore
le
pacte
d'engagement
qu'il
avait
donné
au
démon
lors
de
son
apostasie,
lui
fut
retourné;
et
s'étant
confessé
devant
le
peuple
dans
l'église,
il
la
jeta
au
feu.
Après
quoi
il
fit
pénitence
le
reste
de
ses
jours,
et
mourut
en
538.
Les
Grecs
l'honorent
parmi
les
Saints,
le
4
Février.