Le
château
de
Séleucie
qui
couronne
la
montagne,
surpasse
par
sa
grandeur
toutes
les
autres
constructions;
il
est
à
l'ouest
de
la
ville;
on
y
arrive
par
un
chemin
escarpé
rendu
doublement
difficile
par
des
éboulements
de
terrain;
les
murailles
sont
hautes
et
fortifiées
par
un
double
fossé.
Le
château
est
de
forme
ovale
entouré
de
grandes
tours,
reliées
entre
elles
par
de
fréquentes
arcades;
on
remarque
dans
l'enceinte,
les
ruines
d'une
chapelle,
plusieurs
constructions,
des
colonnes,
un
réservoir
et
des
entrepôts
taillés
dans
le
roc.
La
porte
de
la
muraille
extérieure,
qui
n'est
pas
aussi
haute
que
l'intérieure,
est
surmontée
d'une
croix,
cantonnée
de
rosaces,
au-dessous
de
laquelle
il
y
a
une
pierre
carrée,
avec
trois
bordures,
et
une
inscription
arménienne
de
dix
lignes;
mais
elle
est
en
partie
effacée
et
n'a
été
que
fort
mal
relevée
par
les
explorateurs:
elle
ne
peut
donc
pas
satisfaire
le
désir
des
patriotes
arméniens:
l'amiral
Beaufort
dans
sa
topographie
ne
nous
en
offre,
de
même
que
Langlois,
qu'une
idée
très
imparfaite
et
obscure;
on
ne
peut
déchiffrer
dans
les
deux
premières
lignes
que
ces
mots:
Dans
l'ère
des
Arméniens
685,
(1236).
Dans
les
troisième
et
quatrième
lignes,
il
est
parlé
du
Roi
Héthoum;
les
lignes
suivantes
doivent
rapporter
sans
doute
qu'il
fut
le
constructeur,
le
restaurateur
ou
le
conquérant
de
ces
murailles;
sur
la
septième
ligne
on
lit
le
nom
de
Constantin,
père
de
Héthoum,
et
sur
la
dernière,
le
nom
de
Léon.
Sur
la
bordure
de
droite
on
remarque
le
nom
de
Sempad,
probablement
du
Connétable,
frère
de
Héthoum;
au-dessus
il
est
écrit,
selon
Langlois,
Jésus-Christ.
Dès
le
commencement
de
son
règne,
Léon
I
er,
accorda
Séleucie
à
Chahanchah,
fils
de
Tchordouanel
de
Sassoun
et
de
la
sœur
du
catholicos
Grégoire
Degha.
Après
la
mort
de
Chahanchah,
en
1194,
la
ville
passa
au
prince
Costantz,
à
ce
qu'il
paraît
parent
de
Comartias
d'origine
grecque
ou
latine;
car
au
couronnement
de
Léon,
celui-ci
est
mentionné
comme
maître
du
château
de
Séleucie,
et
le
château
nommé
de
Camartias
est
regardé
comme
un
fief
de
son
père,
le
Sébaste
Henri.
Les
historiens
des
Croisades
citent
en
1190,
avec
Constants,
son
frère
Baudouin
de
Camartias
[1],
comme
envoyés
tous
deux
par
Léon
à
la
rencontre
de
l'empereur
Frédéric
II,
alors
qu'il
s'avançait
pour
délivrer
Jérusalem,
où
il
ne
parvint
pas,
puisqu'il
se
noya
en
traversant
le
Calycadnus.
Henri
ou
Heri,
honoré
du
titre
de
Sébaste,
était
l'un
des
principaux
Barons
durant
le
règne
de
Léon.
Son
fils
Constantz,
comme
nous
l'avons
dit,
fut
envoyé
en
ambassade
à
l'empereur
Frédéric;
et
comme
il
porte
le
surnom
de
Coumardias,
nous
pouvons
croire
qu'il
devrait
être
le
maître
de
ce
second
château
sous
la
surveillance
de
son
père;
en
Latin
on
trouve
écrit
Camardesium
ou
Camardius,
en
italien
Camardo.
Ce
nom
paraît
plutôt
venir
du
grec
que
de
l'arménien,
Langlois
le
fait
pourtant
dériver
du
mot
arménien
Gamar
(arcade)!
En
1207
«le
roi
Léon
ayant
eu
quelque
différend
avec
le
sébaste
Héri,
se
saisit
de
sa
personne
et
de
ses
fils
Constantz
Camardias,
Josselin
et
Baudouin,
et
les
mit
en
prison.
Comme
Héri
était
le
gendre
du
catholicos
Jean,
cet
événement
fut
cause
d'un
désaccord
entre
le
roi
et
ce
dernier».
Héthoum,
frère
de
Saint
Nersès
de
Lambroun,
«parvint
à
les
réconcilier
et
délivra
aussitôt
même
les
fils
de
Héri,
Josselin
et
Baudouin;
le
troisième
(Constantz)
était
déjà
mort».
Ils
étaient
encore
enfermés
en
prison,
lorsque
Léon
accorda
leurs
châteaux
aux
Chevaliers,
et
fit
confirmer
cette
donation
par
un
bref
du
Pape.
Probablement
les
Hospitaliers
restèrent
depuis
lors
les
maîtres
de
Camardias,
car
ce
château
n'est
plus
cité
dans
notre
histoire.
Plus
d'un
siècle
après
ces
événements,
en
1317-20,
seigneur
de
Nor-Pert
était
un
certain
Etienne
qui
fut
envoyé
comme
ambassadeur
par
le
roi
Ochine
au
Pape
et
au
roi
de
France.
Léon
I
er,
dans
la
douzième
année
de
son
règne,
accorda
la
ville
de
Séleucie
avec
ses
alentours,
ainsi
que
les
châteaux
de
Norbert
et
de
Camartias,
aux
Hospitaliers,
qui
l'avaient
aidé
grandement
dans
ses
guerres
et
conquêtes;
il
en
investit
leur
commandeur
Garin
ou
Guérin:
Garinus
a
Monte
Acuto
en
latin,
Guérin
de
Montaigu,
en
français.
Léon
informa
le
Pape
Innocent
III
de
cette
donation
et
lui
demanda
de
sanctionner
son
chrysobulle,
(avril,
1210).
Le
Pape
exauça
sa
demande
par
une
bulle
datée
du
3
août
de
la
même
année.
Ces
lieux
restèrent
longtemps
aux
mains
des
Hospitaliers,
alliés
de
nos
Arméniens.
Le
premier
gouverneur
ou
châtelain
de
Séleucie,
nommé
par
les
Chevaliers
s'appelait
Hayméricus
de
Pax;
en
1214
nous
en
trouvons
un
autre,
Frater
Feraldus
de
Barras,
Castellanus
Selephii,
qui
signa
un
autre
édit
de
Léon.
Au
commencement
du
règne
de
Héthoum,
quelque
temps
après
son
mariage
avec
Zabel,
cette
princesse
vint
au
château
de
Séleucie
pour
rendre
visite
à
sa
mère
et
séjourna
chez
les
Hospitaliers.
Excitée
par
cette
dernière,
Zabel
ne
voulait
pas
retourner
chez
son
jeune
époux;
mais
Constantin
père
du
roi,
vint
assiéger
le
château
et
intima
aux
Hospitaliers
l'ordre
de
lui
rendre
la
reine.
Les
Chevaliers
résistèrent
d'abord,
mais
ensuite,
craignant
d'un
côté
de
s'attirer
l'inimitié
des
Arméniens
qui
auraient
pu
s'allier
avec
les
Iconiens
et
les
chasser
de
leur
place,
ne
voulant
pas
de
l'autre
avoir
l'apparence
de
traîtres,
et
enfreindre
les
lois
de
l'hospitalité
envers
la
fille
de
leur
bienfaiteur,
ils
firent
la
réponse
suivante:
«Le
roi
Léon
nous
a
donné
cette
forteresse,
nous
ne
pouvons
pas
dire
à
sa
fille,
quitte-la;
mais
nous
en
sortirons;
et
alors
vous
prendrez
la
forteresse
et
la
reine.
C'est
ainsi
qu'ils
(les
Arméniens)
prirent
Séleucie
et
la
reine»
[2].
A
cette
époque
le
commandant
des
Hospitaliers
s'appelait
Bertrand.
La
même
année
Héthoum
fit
placer
au
fronton
du
château,
l'inscription
dont
nous
venons
de
parler.
En
1248,
le
commandant
de
la
place
s'appelait
Guiscard
et
portait
le
titre
de
Bailli,
(Paoli,
CCXIX).
Ce
qui
précède
montre
que
la
place
était
très
bien
fortifiée,
et
qu'il
était
presque
impossible
de
s'en
emparer
d'assaut;
la
preuve
en
fut
donnée
après
la
mort
de
Léon
durant
les
invasions
du
sultan
Alaïeddin.
Celui-ci
«conquit
le
territoire
d'Isaurie
jusqu'à
la
porte
de
Séleucie;
mais
Séleucie
était
gardée
par
les
Hospitaliers,
aidés
par
des
Arméniens.
Le
baron
Constantin,
étant
un
homme
sage
laissa
prudemment
s'écouler
plusieurs
jours»,
et
au
moment
proprice
il
reprit
tous
les
lieux
dont
les
ennemis
s'étaient
emparés.
Cependant
comme
Séleucie
se
trouvait
entre
le
territoire
des
Arméniens
d'un
côté
et
celui
des
Turcs
de
l'autre,
elle
fut
un
objet
de
continuelles
contestations,
surtout
lorsque
la
tribu
des
Karamans
se
fut
rendue
de
plus
en
plus
forte,
après
la
moitié
du
XIII
e
siècle.
Selon
leurs
historiens,
ils
réussirent
à
conquérir
ce
territoire
par
fraude.
Ils
rapportent
qu'une
grande
foire
des
chrétiens
eut
lieu
aux
environs
et
que
les
gardiens
du
château
de
Séleucie
aussi
s'y
rendirent.
(p.
333-
Château
de
Séleucie
et
tombeaux)
Alors
quelques
Turcomans,
partisans
des
Karamans,
changeant
de
costume,
se
déguisèrent
en
chrétiens,
et
se
couvrant
le
visage
entrèrent
sans
peine
dans
le
château
dont
ils
se
rendirent
maîtres.
Nouré-Sofi,
père
de
Karaman,
et
ami
du
sultan
Alaïeddin,
dont
il
était
un
des
favoris,
obtint
sa
protection
et
assura
ainsi
la
possession
du
lieu
à
son
fils
[3].
Après
cet
événement,
il
est
encore
rapporté
dans
notre
histoire,
que
Léon
II
au
commencement
de
son
règne
visita
l'Isaurie;
mais
on
ne
trouve
plus
cité
le
nom
de
Séleucie,
ni
durant
le
règne
de
ce
Léon
ni
durant
celui
de
ses
successeurs.
On
ne
trouve
plus
même
mention
des
évêques;
je
n'en
trouve
que
deux
seuls
dans
le
XII
e
siècle:
Basile,
assistant
en
1175,
au
concile
de
Rome-cla,
et
Thoros,
cité
en
1198.
Un
siècle
après
la
suppression
du
royaume
des
Arméniens,
le
vénitien
Barbaro
visita
Séleucie,
en
1471,
et
en
fit
la
description.
«Au
pied
de
la
ville,
dit-il,
coule
un
fleuve
qui
se
jette
dans
la
mer;
il
est
comparable
par
sa
grandeur
à
la
Brenta.
Le
théâtre
est
dans
le
genre
de
celui
de
Vérone,
fort
spacieux,
entouré
de
colonnes
monolithes
et
de
plusieurs
rangées
de
gradins.
En
escaladant
la
montagne
pour
aller
au
château,
on
voit
un
grand
nombre
d'arches,
en
partie
d'un
seul
bloc,
détaché
du
roc,
en
partie
creusées
à
même
le
rocher.
En
montant
toujours,
on
arrive
aux
portes
de
la
première
enceinte
de
la
forteresse:
ces
portes
situées
presqu'au
sommet
de
la
hauteur
et
flanquées
d'une
grande
tour
de
chaque
côté,
sont
en
fer:
on
n'y
voit
aucune
trace
de
bois.
Elles
sont
hautes
de
quinze
pieds
et
larges
de
moitié;
de
plus,
elles
sont
ciselées,
comme
si
le
métal
était
d'argent,
grosses
en
épaisseur
et
très
fortes.
Le
château
est
bâti
sur
un
terrain
en
pente,
qui
a
trois
milles
de
tour
à
sa
base,
tandis
qu'au
sommet
il
n'a
qu'un
mille,
ce
qui
le
fait
ressembler
à
un
pain
de
sucre.
C'est
dans
cette
enceinte
que
se
trouve
le
château
de
Séleucie,
avec
ses
tours
et
ses
murs,
qui
sont
donc
séparés
de
la
première
enceinte
par
une
grande
distance;
le
château
se
trouve
à
30
pas
des
murailles.
Dans
l'intérieur
on
voit
une
cave
carrée,
creusée
dans
le
roc,
profonde
de
cinq
pas,
longue
de
25
et
large
de
7
environ,
dans
laquelle
on
a
emmagasiné
une
grande
provision
de
bois.
A
côté
de
cette
cave,
il
y
a
une
grande
citerne
dans
laquelle
l'eau
ne
tarit
jamais»
[4].
Les
explorateurs
venus
quatre
siècles
plus
tard,
Beaufort,
Laborde,
Tchihatcheff,
Langlois
et
d'autres,
n'ajoutent
rien
de
nouveau
à
cette
description.
Langlois
assis
sur
le
premier
échelon
du
théâtre,
contemplant
à
droite
la
mer
de
Chypre,
se
plut
à
décrire
les
montagnes
du
Taurus,
dont
le
panorama
se
déroule
magnifique:
à
sa
gauche
le
Calycadnus
roulait
ses
ondes
dans
une
vaste
plaine
émaillée
de
fleurs,
couverte
de
tentes
des
Turcomans.
Les
troupeaux
de
moutons
et
de
bestiaux
de
la
tribu
de
Yourouk
paissaient
aux
alentours,
sous
la
garde
de
cavaliers
armés
de
fusils
et
de
lances.
De
grands
platanes
couvraient
de
leur
ombrage
plusieurs
familles:
les
femmes
étaient
occupées
à
tisser
ou
à
tresser
des
nattes;
les
troncs
des
arbres
avaient
été
transformés
en
métiers
à
tisser.
Là
le
son
des
trombes,
le
beuglement
des
bestiaux,
les
murmures
des
eaux
formaient
une
harmonie
ravissante;
de
temps
en
temps
on
entendait
un
coup
du
fusil
répété
par
les
échos
des
montagnes;
des
cavaliers
se
faisaient
voir
dans
le
bois
poursuivant
une
hyène
ou
un
chien
sauvage,
affolé
par
la
poursuite
des
lévriers
du
Taurus,
semblables
aux
chiens-loups.
Le
même
voyageur
cite
avec
étonnement
des
pompes
à
roues
et
des
canaux
pour
arroser
les
jardins
potagers,
où
croissent
de
bons
melons,
des
pastèques,
différentes
espèces
de
citronniers,
des
oliviers
et
des
vignes.
L'apiculture
est
aussi
en
honneur
dans
la
contrée,
et
la
cire
est
d'un
grand
rapport
pour
les
montagnards.
[1]
Quelques
auteurs
écrivent
Coumartias;
Nersès
Balon,
écrit
Khoumartiache.
[4]
Ascendendo
in
monte
per
andare
nella
terra,
a
man
manca
si
veggono
assaissime
arche,
parte
di
un
pezzo...,
separate
dal
monte,
e
parte
cavate
nel
proprio
monte.
Ascendendo
più
suso,
si
trovano
le
porte
della
prima
cinta
della
terra,
che
sono
quasi
alla
sommità
del
monte:
le
quali
hanno
un
torrione
per
lato,
e
sono
di
ferro
senza
legname
alcuno,
alte
circa
quindici
piedi,
larghe
la
metà,
lavorate
politissimamente,
non
meno
che
se
fossero
d'argento,
e
sono
grossissime
et
forti.
Il
muro
è
grossissimo,
pieno
di
dentro
con
la
sua
guardia
davanti,
il
quale
di
fuora
è
carico
e
coperto
di
terreno
durissimo,
tanto
erto,
che
per
esso
non
si
potè
ascendere
alle
mura,
il
qual
terreno
gli
va
d'ogni
intorno,
ed
è
tanto
largo
dalle
mura,
che
da
basso
circonda
tre
miglia,
ed
in
cima
il
muro
non
circonda
più
di
uno,
ed
è
fatto
a
similitudine
d'un
pan
di
zuccaro:
dentro
di
questa
mura
è
il
castello
di
Seleuca
con
le
sue
mura
e
torri
piene,
tr'al
quale
et
le
mura
della
prima
cinta
è
tanto
terreno
vacuo,
che
a
un
bisogno
faria
da
300
stara
di
frumento:
è
distante
la
cinta
dal
castello
passi
30
e
più.
Dentro
del
castello
è
una
cava
quadra
fatta
nel
sasso,
profonda
passa
cinque,
lunga
25
e
più,
larga
circa
sette.
In
questa
erano
legne
assai
da
munitione,
ed
una
cisterna
grandissima,
nella
quale
non
è
mai
per
mancare
acqua.
—
J.
Barbaro,
presso
Ramusio,
II,
100.