A
quinze
kilomètres
au
nord,
on
voit
les
restes
d'un
château
appelé
Maougha-kaléssi;
ces
ruines
couronnent
un
énorme
rocher
coupé
et
poli,
semblable
à
une
tour
carrée,
et
inaccessible
de
trois
côtés:
du
côté
de
la
vallée
du
fleuve
il
tombe
perpendiculairement
d'une
hauteur
de
2,
000
à
2,
500
pieds.
Davis
voulut
y
entrer,
le
23
juin
1875,
et
examiner
la
place;
l'ascension,
dit-il,
était
des
plus
difficiles:
on
ne
voyait
que
des
abîmes
et
des
précipices
dont
la
vue
seule
était
suffisante
pour
donner
le
frisson.
Le
seul
moyen
d'accès
à
la
forteresse,
est
un
étroit
rebord
de
rocher
du
côté
du
sud-est.
Ce
rebord
qui
a
de
chaque
côté
un
gouffre
profond,
a
été
coupé
en
travers
à
la
profondeur
de
quelque
vingt-cinq
pieds,
et
ainsi
a
été
formé
une
espèce
de
fossé
extérieur,
sur
lequel
les
Yourouks
ont
jeté
un
faible
pont
de
troncs
d'arbres
couvert
de
broussailles
et
de
pierres.
Ils
y
trouvent
pour
leurs
troupeaux
un
refuge
parfaitement
sûr
contre
les
animaux
féroces.
Regardée
par
dessus
le
yaïla,
à
travers
les
deux
grandes
fentes
qui
séparent
le
rocher
de
Maougha
du
reste
de
la
montagne,
la
vue
de
la
plaine,
avec
la
jonction
des
deux
cours
d'eau
l'
Erménég
et
le
Gueuk-sou
et
les
montagnes
au-delà
de
la
vallée
du
fleuve,
est
étrangement
grandiose.
En
bas
dans
la
vallée,
les
collines
boisées
de
sapins,
quoique
d'une
grande
hauteur,
n'apparaissent
plus
que
comme
des
fourmilières.
Nous
passâmes
le
pont,
dit
le
voyageur,
mais
nous
ne
pûmes
trouver
aucun
accès
à
la
forteresse,
qui
surplombe
d'effroyables
précipices;
les
rebords
du
rocher
se
projettent
en
saillie
sur
le
gouffre,
et
montrent
des
profondes
déchirures
et
des
cavernes,
qui
doivent
avoir
servi
de
refuge
à
la
garnison.
Le
rebord
sur
lequel
nous
étions
passés,
avait
été
autrefois
défendu
par
un
mur
et
une
tour,
maintenant
en
ruines,
et
la
porte
devait
être
en
cet
endroit.
Mais
même
celle-ci
ne
conduit
qu'à
un
re-dan
isolé,
espèce
de
plateau,
qui
en
partie
entoure
le
rocher
du
côté
du
sud.
Il
est
possible
de
regarder
de
l'extrémité
extérieure
de
ce
redan
jusqu'à
sa
base
même:
c'est
un
spectacle
qui
retient
l'haleine,
le
gouffre
au-dessous
étant
si
épouvantable
et
le
panorama
si
vaste
et
si
grandiose.
Après
avoir
exploré
toutes
les
galleries
accessibles
et
tous
les
passages,
après
des
vaines
tentatives
pour
monter
à
la
partie
la
plus
élevée
du
rocher,
je
trouvai
enfin
la
vraie
entrée.
C'est
une
porte
dans
une
seconde
tour,
bâtie
derrière
la
première
sur
un
rocher
en
saillie.
Cette
porte
est
à
environ
quarante
pieds
au-dessus
du
rebord
sur
lequel
nous
étions,
et
l'accès
n'était
possible
qu'au
moyen
de
cordages;
les
marques
des
cordes
sont
encore
visibles
sur
les
pierres
qui
en
forment
le
seuil.
Cette
porte
est
aujourd'hui
barrée
par
les
décombres,
de
manière
que
la
place
est
maintenant
complètement
inaccessible.
Maougha
était
probablement
un
des
repaires
des
anciens
brigands
de
la
Cilicie:
plus
tard
il
semble
avoir
été
pris
aux
Grecs
de
Byzance
par
les
Seldjouks.
Davis
trouva
sur
la
tour
une
inscription
arabe,
datant
de
l'an
586
de
l'hégire
(1190),
et
relative
au
sultan
Mahmoud.
Presqu'à
la
même
époque,
à
la
fin
du
XII
e
siècle,
ce
lieu
avait
été
conquis
par
Léon
I
er;
car
un
de
ses
Barons
liges,
Guir-Sag,
c'est-à-dire
le
Baron
Isaac,
seigneur
de
ce
château,
fut
pris
en
1217,
au
siége
de
Gaban
par
le
sultan
Kay-kaouze,
avec
Constantin
le
Bailli
et
d'autres
princes,
et
ils
furent
délivrés
par
Léon
qui
paya
leur
rançon.
Ce
lieu
était
appelé
par
les
Arméniens
Château
de
Maghva:
qui
n'est
probablement
que
le
château
de
Mélouos,
(
Μελου
̃
ος
)
des
Byzantins.
L'empereur
Basile
I
er
s'empara
de
cette
place,
après
avoir
conquis
le
château-fort
de
Loulou,
comme
nous
le
dit
Constantin
Porphyrogène.
Du
côté
ouest
de
Moute,
descend
le
Bouzakdji,
le
plus
grand
affluent
du
fleuve
de
Séleucie;
on
trouve
aussi
plusieurs
petites
rivières
et
torrents,
entre
les
montagnes
Topdji
ou
Top-guédig,
Ali-bey
et
Marache.
La
principale
localité
de
cette
vaste
vallée
est
Graouvka?
à
l'ouest
s'étendent
les
pâturages,
appelés
Graouvka-yaïlassi.
Dans
la
partie
supérieure
de
la
vallée
se
voient
les
villages
Boudjak-kechela
et
Bostan-sou
ou
Bostan-euzu,
au
pied
de
la
montagne
à
une
altitude
de
500
mètres,
au
bord
du
fleuve,
qui
devient
impasse
pendant
l'hiver.
Les
habitants
de
cette
contrée,
où
Tchihatcheff
séjourna
en
1848,
(25
octobre),
employaient
des
chameaux
au
lieu
d'ânes
pour
transporter
les
fardeaux
sur
des
chemins
raboteux.
La
partie
inférieure
de
la
montagne
Top-guédig
est
toute
boisée,
les
sommets,
dont
la
hauteur
est
de
2000
mètres,
sont
presque
sans
végétation;
à
la
hauteur
de
5
à
600
mètres,
un
chemin
les
traverse
et
le
divise
en
deux,
et
descend
vers
le
vallon
de
Balkéssen.
Au
nord
de
ces
villages
se
trouve
un
vallon,
arrosé
par
une
petite
rivière
et
appelé
Katran-déréssi:
on
l'appelle
ainsi
à
cause
des
arbres
résineux
que
les
Turcs
nomment
Katran-aghadji.
A
quelques
lieues
à
l'ouest
du
pont
Khodja,
est
le
village
Dorla
avec
trente
maisons,
et
un
peu
plus
bas,
Tchifdlig,
et
Kadi-keuy.
On
voit
encore
dans
ce
petit
vallon,
près
de
Dorla,
les
ruines
d'une
ancienne
ville
du
nom
de
Palaiapolis
(
Παλαίαπολις
)
nommée
Balabole
au
moyen
âge,
et
aujourd'hui
Balabolou;
c'est
un
village
de
quelques
maisons,
situé
à
peu-près
à
égale
distance
d'Erménég,
à
l'est,
et
de
Maghoua,
à
l'ouest.
Les
ruines
sont
à
l'extrémité
d'un
long
promontoire:
on
voit
au
nord,
un
grand
nombre
de
sarcophages
de
marbre,
sculptés
assez
grossièrement
et
portant
des
signes
de
croix,
ils
forment
un
amas
de
monuments
et
d'inscriptions
abîmées:
on
voit
sur
quelques
marbres
des
figures
de
lions
et
de
léopards;
on
remarque
encore
des
sarcophages
taillés
dans
la
simple
pierre.
La
ville
n'est
plus
qu'un
amas
de
ruines:
on
distingue
cependant
les
traces
d'anciens
remparts,
presque
entièrement
couverts
de
grands
genévriers,
qui
ont
même
un
diamètre
de
11
pieds.
Le
guide
turc
du
voyageur
anglais,
qui
visita
ce
lieu
le
25
juin
1875,
affirmait
que
les
Arméniens
étaient
restés
maîtres
de
la
ville
jusqu'en
1382:
ce
fut
alors
que
les
soldats
de
Karaman-oghlou
vinrent
l'assiéger
avec
des
mangonneaux
et
s'en
rendirent
maîtres,
après
en
avoir
battu
les
murailles,
de
la
colline
voisine.
Un
grand
nombre
de
mahométans
perdirent
la
vie
dans
cette
guerre,
et
grâce
aux
inscriptions
de
leurs
tombeaux
on
est
parvenu
à
vérifier
la
date
de
cet
événement.
Cette
ville
n'est
pas
citée
parmi
les
anciennes,
mais
dans
la
statistique
ecclésiastique,
elle
est
classée
dans
la
province
de
Pamphylie;
quelques-uns
la
croient
près
de
Kéléndris,
dont
nous
parlerons
plus
loin.
Dans
cette
contrée,
la
végétation
et
les
fleurs
sont
en
grande
abondance;
l'apiculture
y
est
pratiquée
sur
une
grande
échelle,
car
elle
rapporte
beaucoup.
A
l'ouest
de
Bouzakdji,
s'ouvre
l'étroite
vallée
de
la
rivière
Bal-késsèn
ou
Balekan
[3],
entre
la
montagne
Top-guédig
et
celles
qui
séparent
ce
district
de
celui
d'Erménég.
Le
sol
du
vallon
est
formé
de
couches
argileuses
horizontales
et
contient
de
jolies
coquilles
pétrifiées.
On
y
voit
plusieurs
cavernes
avec
de
longs
couloirs
et
des
stalactites
en
forme
de
colonnes;
le
fond
du
vallon
est
couvert
de
mottes
de
terre.
Dans
la
partie
inférieure
près
de
la
jonction
de
la
rivière
avec
le
fleuve
Gueuk-sou,
on
indique
les
villages
Moughallar
et
Esvénd.
Suivant
les
cartes,
(car
je
n'ai
pas
rencontré
la
description
de
cette
région),
le
côté
supérieur
au
nord-ouest
semble
formé
de
plusieurs
vallons
et
de
petites
vallées.
Au
milieu
des
montagnes,
près
de
Karamane
au
nord-ouest,
on
indique
le
grand
hameau
de
Perloughanda,
ou
Pilergonda,
ou
Pilavganda;
c'est
le
chef
lieu
du
district
de
ce
nom,
appelé
aussi
District
de
Khadem.
Cette
localité
qui
ressemble
à
une
ville,
se
dresse
au
milieu
d'un
espace
inhabité;
mais
les
environs
sont
agréables,
riches
en
toutes
sortes
de
fleurs
et
couverts
de
vignes
et
d'arbres
fruitiers,
parmi
lesquels
le
pêcher:
la
terre
rouge
et
noire
fait
croire
à
des
mines
de
fer.
Ce
hameau
paraît
avoir
fait
partie
de
l'ancienne
Isaurie;
les
habitants
sont
manufacturiers.
Il
est
mentionné
au
XV
e
siècle,
dans
un
livre
italien
sous
le
nom
de
Pilarga;
ce
livre
a
été
traduit
d'un
historien
grec,
et
il
y
est
dit
qu'une
douane
y
existait
alors.
Une
grande
chaîne
de
montagnes
sépare
ce
district
de
la
province
de
Karaman.
Les
pâturages
des
Turcomans
abondent
aux
alentours:
on
y
rencontre
des
troupeaux
de
chèvres
et
de
chameaux.