Il
serait
intéressant
de
savoir
à
qui
appartenait
ce
château
durant
le
règne
de
Léon,
alors
que
la
domination
de
ce
prince
s'étendait
sur
tous
les
parages
maritimes
jusqu'à
Attalie.
Nous
ne
le
trouvons
pas
mentionné
dans
la
liste
des
châteaux
et
de
leurs
seigneurs
présents
à
son
couronnement,
ni
ailleurs,
(p.
370-
Alaya
-
forteresse
et
tour)
pas
plus
sous
le
nom
de
Coracésium
que
sous
celui
d'
Alaya,
comme
on
le
nomme
aujourd'hui,
ou
sous
les
divers
noms
que
lui
donnaient
les
commerçants
italiens
et
les
marins
au
moyen
âge:
Candélor,
Calandros,
Scalandros,
Calanders,
quelquefois
Castel
Ubaldo
ou
simplement
Baldo.
Je
suis
persuadé
de
l'identité
de
Calandros
avec
le
Calonoros
des
Arméniens.
Daniel
Heguémon,
voyageur
russe
écrivait
en
1106-7:
«Il
y
a
100
verstes
d'Antioche
à
Laodicée
»,
après
quoi
il
cite
Antiochette,
puis
Galinoros
ou
Ganinoros,
Mauronoros,
Satalie,
etc.
Les
écrivains
accrédités
qui
rapportent
les
faits
et
gestes
de
Léon
le
Grand,
nous
informent
que
cette
forteresse
appartenait
à
Sir
Adan,
le
premier
et
en
même
temps
le
chef
des
barons
du
royaume,
qui
fut
aussi
bailli,
et
que
Léon,
vers
la
fin
de
sa
vie,
nomma
tuteur
de
sa
fille
Zabel,
princesse
héritière,
en
lui
donnant
pour
assistant
un
deuxième
bailli,
Constantin,
son
frère
de
lait.
Sir
Adan,
vu
l'importance
de
ses
fonctions,
devait
avoir
un
patrimoine
plus
vaste
que
celui
des
autres
barons;
en
effet,
selon
l'historien
royal,
«Il
était
maître
de
plusieurs
châteaux
et
provinces
de
la
Séleucie
jusqu'à
Galonoros,
et
la
contrée
s'appelle
encore
maintenant
Pays
de
Sir
Adan;
il
était
Sénéchal
des
Arméniens».
Nous
conservons
aussi
pour
ces
plages
maritimes,
cette
appellation
de
Pays
de
Sir
Adan,
comme
une
tradition
nationale.
Lorsque
l'historien
nous
affirme
que
la
suzeraineté
de
Sir
Adan
s'étendait
jusqu'à
Galonoros,
il
est
vrai
qu'il
ne
dit
pas
si
cette
place
doit
être
prise
inclusivement;
cependant
il
ne
l'attribue
à
aucune
autre
personne
de
différente
nationalité.
Suivant
le
même
historien
et
son
continuateur
Sempad,
le
maître
de
ce
lieu
et
d'autres
châteaux
était
Kir-Vart,
fils
ou
petit-fils
de
ce
même
Adan;
évidemment
ce
dernier
lui
avait
passé
ces
lieux
de
son
vivant.
Après
la
mort
de
Sir
Adan
(survenue
peu
avant
celle
de
Léon),
durant
les
troubles
de
l'interrègne
qui
précéda
l'avènement
de
Héthoum,
Alaïeddin,
nouveau
sultan
d'Iconium,
trouva
les
circonstances
favorables,
et
selon
Sempad,
il
«ravit
le
château
de
Golonoros,
à
Kir-Vart,
petit
fils
de
Sire
Adan,
et
demanda
la
main
de
sa
fille;
mais
la
jeune
fille
ne
put
vivre
en
paix
avec
lui
à
cause
de
la
différence
de
leurs
religions».
Il
est
à
regretter
que
l'on
n'ait
pas
davantage
de
détails
sur
ces
faits,
ni
une
connaissance
plus
certaine
de
ce
château
de
Galonoros,
(beau
mont,
χαλον
ο
̉́
ρος,
en
grec).
La
confrontation
des
récits
des
historiens
arabes
et
turcs
avec
ceux
des
nôtres,
nous
offre
la
conviction
de
son
identité
avec
Alaya.
Les
premiers
affirment
que
Kéikobad-Alaïeddin
y
éleva
une
ville
et
lui
donna
son
nom,
qu'elle
porte
encore
de
nos
jours,
(sans
la
terminaison
eddin
)
الايا.
Le
sultan
y
avait
amassé
ses
trésors
[1];
il
y
habitait
souvent,
de
même
son
fils
Ghiatheddin,
qui
y
mourut.
Notre
historien
rapporte
ce
fait:
«Pendant
que
ses
soldats
assiégeaient
la
ville
de
Tarse,
dit-il,
(en
1246),
il
se
trouvait
à
Galonoros
dans
son
château,
et
s'enivrait;
tout
à
coup
il
s'écria:
—
A
moi!
à
moi!
et
il
mourut».
—
Son
frère
s'empara
du
trône
d'Iconium,
et
le
fils
de
Ghiatheddin,
son
héritier
légitime,
encore
tout
jeune,
se
contenta
du
sultanat
d'Alaya.
Ses
successeur»
en
firent
un
port
pour
leur
armée
navale.
Laissons
les
étrangers
pour
revenir
à
notre
histoire
nationale.
Que
nous
serions
heureux
de
découvrir
l'époque
de
l'établissement
des
Arméniens
dans
une
place
si
forte
et
si
remarquable,
et
de
connaître
mieux
Sir
Adan,
qui
laissa
son
nom
à
tout
ce
territoire!
Quelques
européens,
versés
dans
la
langue
arménienne,
ont
supposé
Adan
d'origine
française,,
car
on
trouve
mentionnés
durant
les
Croisades,
des
seigneurs
français
du
nom
d'Adam,
qui
traversèrent
la
Syrie
et
l'Arménie;
mais
notre
historien
Cyriaque,
rapporte
que,
celui-ci
était
grec
de
religion:
il
n'était
donc
ni
Latin,
ni
grec,
mais
arménien
de
rit
grec.
Son
nom
aura
probablement
été
transformé
par
les
Grecs,
mais
en
réalité
on
devrait
écrire
Adom,
comme
le
fait
Sempad.
S'il
était
maître
d'un
si
vaste
territoire,
les
empereurs
byzantins
devaient
le
lui
avoir
laissé
comme
héritage
de
famille.
Mais
qui
pouvaient
être
ses
ancêtres,
sinon
les
descendants
royaux
de
Sen-nachérib
[2]
l'Ardzerouni,
qui
avaient
émigré
de
Vaspouracan
et
étaient
venus
s'établir
avec
une
colonie
aux
alentours
de
Sébaste.
Traqués
et
persécutés
par
les
Grecs,
une
partie
put
résister,
une
autre
se
soumit
au
rit
de
leur
église;
or
nos
historiens
les
appellent
tous
grecs,
sans
distinguer
la
confession
de
la
nationalité;
comme
le
fait
l'historien
royal
pour
un
certain
Baron
Sempad,
qu'il
dit
pourtant
de
la
famille
du
père
du
roi
Héthoum.
Le
même
historien
cite
encore
d'autres
barons
dont
le
nom
est
évidemment
arménien;
pourtant
il
les
dit
Grecs,
(on
confondait
déjà
la
confession
avec
la
nationalité
et
la
langue,
et
on
déterminait
la
nationalité
par
la
confession).
Avant
sa
conquête
par
les
Roupiniens,
cette
région
était
probablement
gouvernée
par
les
Adoméens;
leurs
parents,
les
Abelgharibiens,
possédaient
la
troisième
partie
de
la
Cilicie
Maritime,
c'est-à-dire
Tarse
et
la
région
montagneuse,
et
avaient
pour
voisins
et
alliés
les
Héthoumiens
et
les
Nathanaëliens.
Michel
le
Syrien
rapporte,
«qu'à
la
fin
du
XI
e
siècle,
durant
le
règne
de
l'empereur
Basile,
la
famille
royale
des
Arméniens
émigra
du
département
de
Vaspouracan;
peu
à
peu
sa
puissance
diminua,
à
cause
de
la
perfidie
des
Grecs,
et
elle
finit
par
être
considérablement
affaiblie.
Cependant
elle
passa
dans
le
territoire
de
la
Cilicie
et
s'empara
de
plusieurs
provinces
avec
leurs
châteaux
et
places
fortes».
On
cite
comme
du
domaine
de
Kir-Vart,
non
seulement
le
château
de
Galonoros,
mais
encore
les
forts
de
Sainte
Sophie,
de
Joudape
ou
Yudapé,
de
Naghlon
et
de
Cotrate.
(p.
372-
Vue
de
la
ville
d'Alaya)
En
1340,
lorsque
la
dynastie
des
Roupiniens
touchait
presque
à
sa
fin,
le
célèbre
géographe
arabe
Ibn-Batouta
arriva
à
Alaya:
il
appelle
cette
ville,
le
commencement
du
territoire
des
Grecs,
et
l'une
des
parties
les
plus
belles
de
la
terre,
où
le
Seigneur
a
amassé
les
diverses
délices
des
autres
pays.
Les
habitants
sont,
dit-il,
beaux,
très
propres
dans
leurs
vêtements,
très
délicats
dans
leur
nourriture,
et
doux
de
caractère.
C'est
à
eux
que
s'applique
le
dicton
suivant:
«La
bénédiction
dans
la
Syrie,
la
bonté
dans
le
territoire
des
Grecs».
Les
hommes
et
les
femmes
sont
hospitaliers
et
honorent
les
étrangers;
les
femmes
ne
se
couvrent
pas
avec
un
voile.
Après
quoi,
le
voyageur
s'étonne
de
l'ha
bitude
des
habitants
de
ne
cuire
le
pain
que
tous
les
huit
jours,
ainsi
que
de
préparer
les
différents
mets.
On
lui
apporta
à
manger
encore
chaud
et
on
lui
dit:
«C'est
un
don
que
te
font
les
femmes».
Il
décrit
la
ville
au
bord
de
la
mer,
la
dit
vaste,
habitée
par
les
Turcomans
et
fréquentée
par
les
commerçants
d'Alexandrie,
du
Caire
et
de
la
Syrie.
On
y
fait
un
grand
commerce
de
bois
de
construction,
qu'on
transporte
à
Alexandrie
et
à
Damiette,
et
de
là
dans
toute
l'Egypte.
A
l'extrémité
supérieure
de
la
ville
se
dressait
une
forteresse
imprenable
et
magnifique,
(p.
373-
Forteresse
d'Alaya)
bâtie
par
le
sultan
Alaïeddin-er-Roumi;
le
cadi
de
la
place
à
cette
époque
était
Djélal
d'Erzenga,
avec
qui
il
fit
ses
prières
dans
le
château.
Il
cite
encore
Chemseddin,
fils
d'Arrédjihan,
fils
d'Alaïeddin,
qui
mourut
à
Melli;
le
seigneur
ou
sultan
du
lieu
était
Youssouf,
fils
de
Karaman;
son
palais
était
à
dix-huit
kilomètres,
sur
une
colline
près
de
la
mer.
Lorsque
le
voyageur
lui
fut
présenté,
Youssouf
était
assis,
à
ses
pieds
se
trouvaient
les
émirs
et
les
officiers,
et
les
soldats
étaient
rangés
à
sa
droite
et
à
sa
gauche;
le
voyageur
fut
honoré
de
plusieurs
cadeaux
et
partit
pour
Attalie.
A
cette
époque
Alaya
était
très
fréquentée
par
les
commerçants
européens,
les
Vénitiens
et
les
Génois,
les
Catalans
et
les
Majorquins
[3]
d'Espagne
et
les
Lombards.
Ces
derniers
l'auraient
appelé
Gastello
Lombardo,
Castrum
Lom-bardum,
mais
certains
auteurs
placent
plus
loin
le
lieu
connu
sous
ce
nom.
De
même
le
nom
d'
Ubaldo
que
l'on
donnait
quelquefois
à
la
ville,
est
lombard:
évidemment
cette
ville
était
tombée
sous
la
puissance
des
Lombards:
une
de
ses
mosquées
a
dû
à
l'origine
servir
d'église.
Les
Lombards
firent
un
dernier
effort
en
1471-3;
ils
occupèrent
les
plages
de
la
mer
et
soutinrent
les
Karamans
contre
les
Turcs;
mais
lorsque
ces
derniers
eurent
vaincu
les
Persans,
les
Occidentaux
se
retirèrent.
Alors
(1471)
le
célèbre
Guédig-Ahmed-pacha
fut
envoyé
pour
conquérir
Alaya,
où
dominait
Klidj-Arslan,
de
la
famille
des
premiers
sultans
d'Iconium:
celui-ci
se
soumit
et
fut
conduit
au
sultan
des
Turcs,
qui
lui
accorda
un
lieu
d'habitation,
mais
quelque
temps
après
il
s'échappa
en
Egypte.
Les
300
soldats,
que
Jacques,
roi
de
Chypre,
avait
envoyés
pour
la
défense
de
la
ville,
furent
réduits
en
captivité.
La
position
d'Alaya
est
très
pittoresque:
les
petites
maisons
de
bois
grimpent
le
long
de
la
pente
escarpée,
séparées
par
des
ruelles
parallèles:
chaque
rangée
de
toits
sert
de
terrasse
aux
maisons
de
la
file
supérieure,
et
la
ville,
selon
l'expression
d'un
voyageur,
s'étage
ainsi,
comme
un
troupeau
de
chèvres
accrochées
aux
aspérités
d'un
roc.
Les
rayons
d'un
soleil
de
feu
y
dardent
pendant
l'été,
tandis
que
l'hiver
souvent
des
tempêtes
effroyables
y
mugissent.
Il
n'y
a
rien
de
remarquable
dans
la
ville,
et
le
château
est
presque
désert.
Les
voyageurs
européens
dans
les
premières
années
de
notre
siècle
n'y
aperçurent
que
deux
canons.
Les
mosquées
sont
peu
nombreuses
et
petites,
à
l'exception
de
celle
qui
était
autrefois
une
église.
Les
remparts
ruinés
sont
formés
de
pierres
massives,
de
même
que
la
porte.
De
nos
jours
on
a
construit
une
dizaine
de
maisons
au
milieu
de
grands
figuiers.
Parmi
les
habitants
d'Alaya,
on
compte
environ
1,
500
Turcs
et
500
Grecs.
La
ville
sert
de
résidence
à
un
pacha.
Près
du
port
on
a
élevé
une
large
tour
octogonale
appelée
Kisil-kalé;
elle
a
un
diamètre
de
30
mètres,
et
une
hauteur
à
peu
près
égale.
On
y
trouve
encore
un
souvenir
d'Allaïeddin:
une
inscription
arabe
en
deux
lignes,
sous
un
chapiteau
corinthien,
avec
des
sculptures
de
fleurs
et
une
tête
ailée.
Les
botanistes
modernes
citent
aux
environs
d'Alaya
entre
autres
produits,
le
Vitis
orientalis,
le
Silene
Oreades,
le
S.
Heldreichij,
le
Gypsophila
serpilloides,
le
Cerastium
macranthum,
le
Lathyrus
Stenophyllus,
la
Valerianella
obtusiloba,
le
Pyrethrum
fructiculosum,
le
Chamœpeuce
alpini,
l'
Alkanna,
macrophylla,
le
Verbascum
stenocarpum,
l'Ayuga
bombycina,
la
Philipœa
axyloba,
etc.
[1]
Un
historien
d'Occident
dit
pour
ces
trésors
du
sultan:
«Est
autem
in
ejus
regno
fortissimum
castrum
quod
Candelaria
dicitur,
ubi
thesaurus
ejus:
et
dicitur
quod
ibi
sunt
sexdecim
pythaci
æ
plen
æ
auro
depurato
in
ipsis
liquato,
exceptis
lapidibus
pr
æ
tiosis
et
pecunia
multa
nimis.
H
æ
c
autem
omnia
per
Francos
acquisivit.
[3]
En
1300,
on
trouve
mentionnés
des
marchands
de
la
Majolique,
qui
avaient
un
bateau
appelé
le
Saint-Jean,
et
qui
fréquentaient
Alaya;
ils
y
apportaient
des
marchandises
de
Chypre.