Léon le Magnifique premier Roi de Sissouan ou de l'Arménocilicie

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  Avant que la réconciliation du Catholicos Jean avec le roi ait été accomplie, du vivant du Catholicos David, il y eut une question ecclésiastique au réglement de laquelle prirent part les deux Catholicos: David, au point de vue ecclésiastique, Jean, au point de vue civil, il fit preuve de beaucoup d'adresse. Cette question introduit sur la scène de notre récit, un autre personnage célèbre du temps, bien qu'éloigné de la Cour et des Etats de Léon, mais rapproché par son grand nom, et qui méritait d'avoir sa place auprès de notre roi. Si le destin les avait réunis et les avait fait agir ensemble dans les guerres et dans l'accomplissement des mêmes œuvres, l'Arménie serait devenue l'une des plus grandes puissances de ce siècle-là. Ce grand personnage était le Sebassalar Zacharie. C'était le premier ministre de la glorieuse reine des Géorgiens Thamar. Il était le glaive et le bouclier de tout le Caucase et de l'Arménie septentrionale. Léon et Zacharie, ces deux hommes extraordinaires, brillèrent presqu'en même temps aux deux extrémités des terres arméniennes. Léon, en fondant un nouveau royaume et en donnant une nouvelle patrie aux Arméniens; Zacharie, en délivrant sa vieille patrie tombée dans les mains des Arabes et des Persans, de ses cruels dominateurs et en mettant à son tour sous son glaive ceux qui avaient mis son pays sous leur joug. Il leur fit la guerre pendant vingt ans consécutifs, de 1191 à 1210. Il leur arracha toute cette grande étendue arménienne de la vallée de l'Araxe et, dépassant cette vallée vers l'occident, il mit en péril d'abord et soumit enfin le sultan de Garine (Erzéroum), le frère du sultan d'Iconie. Du côté de l'Orient, il envahit les possessions des Persans «jusqu'à la ville d'Ardavil et vengea sur eux le sang des Chrétiens, de ces Princes qu'ils avaient brûlés vifs dans l'église de Nakhitchévan, et... des saints prêtres qu'ils avaient immolés à Pagouan » 1.

De , il se dirigea vers le Sud et vint assiéger Khelath, la ville royale du Chah-Armèn, qui y régnait. Et lorsque son frère Ivané ( Jean ) l'Atabegh, y faisant une excursion, tomba sans défiance dans un guet-apens et fut pris par eux, ce qui combla de joie les assiégés, Zacharie leur envoya une ambassade pour leur dire: « Si vous faites sortir mon frère de la ville, (pour le conduire captif au sultan) ou si vous le tuez, je transporterai la terre de votre pays dans la Géorgie, et je la dépeuplerai complétement. Ils eurent peur, et demandèrent la fille d'Ivané en mariage, prirent des otages et mirent Ivané en liberté » 2.

Cet homme aussi guerrier que profondément religieux, Zacharie, qui passa presque toute sa vie hors du palais et sur les champs de bataille, ne pouvant assister, comme il le désirait, aux offices de l'Église, les docteurs du temps, par ignorance ne croyaient pas qu'il fût permis, sans autorisation, de transporter les objets sacrés au camp pour y célébrer la messe, comme le faisaient les prêtres Géorgiens. Le pieux Sebassalar demanda la permission à son confesseur, le plus célèbre homme du temps parmi les Vartabieds (Docteurs) de l'Orient, Mékhithar Koche. Celui-ci accéda à sa demande qu'il trouva raisonnable, mais comme cet usage avait été abandonné depuis longtemps parmi les Arméniens, il ne voulut pas l'autoriser de son chef. Alors Zacharie écrivit au Catholicos Jean, ne sachant pas qu'il avait été déposé, en même temps qu'il écrivit aussi à Léon. Le roi convoqua un concile à Sis et y appela le Catholicos David avec tous ses évêques, les Docteurs et les Abbés. Ce fut le premier concile tenu à Sis. Les Pères admirent la demande du Sebassalar et dictèrent huit articles (chapitres) que le docteur Vanagan, alors élève de Mékhithar Koche avait cité dans son ouvrage, et que l'historien Guiragos relate brièvement. Nous renvoyons au livre de ce dernier les lecteurs qui trouveraient intéressant de lire ces articles, car il serait hors de propos de les citer ici. Ils y trouveront encore tout ce qui se passa à ce concile et à d'autres qui se tinrent à Lori et à Ani, à cette même époque, pour les affaires d'Orient, les discussions et les querelles des docteurs; ils y verront enfin comment Zacharie, qui n'était qu'un général et n'avait aucun pouvoir au-delà, réprima les mécontents qu'il bannit contre la volonté de son confesseur Mékhithar Koche.

Nous dirons seulement, parce que cela s'enchaîne à notre récit, que David et Léon écrivirent des lettres à Zacharie qu'ils lui envoyèrent avec des présents par des ambassadeurs. Mais un autre avait pris adroitement les devants, c'était « le Catholicos Jean, qui résidait à Romcla. Afin de se gagner les princes de l'Orient, il envoya à Zacharie une tente semblable par sa forme au dôme d'une église et tous les accessoires, un autel en marbre, tous les objets sacrés et les vêtements nécessaires pour la célébration de la messe, en même temps qu'il lui manda un évêque nommé Minas et des diacres et des enfants de chœur, des prêtres et des chanteurs célèbres pour (chanter) la messe. Ceux-ci arrivèrent et furent introduits auprès du Sebassalar, à Lori; ils lui présentèrent les ordres du Catholicos accompagnés de sa lettre et de ses présents » 3.

Voici donc ce qu'était ce Magnanime Catholicos, trop généreux et plutôt pour s'asseoir sur le trône d'un prince que pour occuper un siège de patriarche.

Nous avons parlé de ses lettres, dont la dernière qui nous soit connue, est la réponse à l'invitation du Pape, faite en 1213 à Jean et à d'autres archevêques et évêques de se rendre au quatrième Concile tenu à Lyon, en France, pour préparer et entreprendre la cinquième Croisade. Ce concile fut tenu le 11 Nov. 1215. Le Pape y présidait, mais on ne cite le nom d'aucun arménien y assistant. Cependant il est bien probable que des Arméniens ont du s'y trouver, parce que des ambassades continuelles de nos compatriotes allaient et venaient dans l'Occident.

Le Catholices Jean, après s'être réconcilié avac Léon, lui montra autant de dévouement et de fidélité qu'auparavant et lui rendit même de grands services.

1 Passage de l'historien Vartan (Chap. 83), par lequel il fait allusion au massacre des Religieux du Couvent de S. Jean-Baptiste, par le gouverneur Jézid.

2 Passage de l'historien Vartan.

3 Passage de l'historien Guiragos, élève du docteur Vanagan.