Léon 
   
    eut 
   
    plus 
   
    de 
   
    peine, 
   
    cela 
   
    va 
   
    sans 
   
    dire, 
   
    à 
   
    unir 
   
    les 
   
    Arméniens 
   
    entre 
   
    eux 
   
    pour 
   
    le 
   
    bien 
   
    de 
   
    la 
   
    patrie 
   
    qu'il 
   
    n'en 
   
    eût 
   
    à 
   
    assujettir 
   
    les 
   
    étrangers. 
   
    Bien 
   
    des 
   
    seigneurs 
   
    arméniens, 
   
    présomptueux 
   
    et 
   
    indociles 
   
    envers 
   
    leur 
   
    souverain, 
   
    se 
   
    soumettaient 
   
    plus 
   
    aisément 
   
    au 
   
    joug 
   
    pesant 
   
    d'un 
   
    ennemi 
   
    qu'à 
   
    l'autorité 
   
    paternelle 
   
    de 
   
    Léon. 
   
    Un 
   
    prince 
   
    venait-il 
   
    à 
   
    s'ériger 
   
    en 
   
    chef, 
   
    faisait-il 
   
    éclater 
   
    des 
   
    mérites 
   
    et 
   
    valoir 
   
    des 
   
    droits 
   
    quelconques, 
   
    que 
   
    les 
   
    autres 
   
    se 
   
    regardaient, 
   
    eux 
   
    aussi, 
   
    comme 
   
    devant 
   
    se 
   
    soulever 
   
    et 
   
    se 
   
    livraient 
   
    combat. 
   
    Mais, 
   
    cette 
   
    fois, 
   
    Léon 
   
    eut 
   
    le 
   
    dessus, 
   
    grâce 
   
    à 
   
    son 
   
    habileté 
   
    et 
   
    à 
   
    son 
   
    énergie 
   
    et 
   
    parce 
   
    qu'il 
   
    était 
   
    dans 
   
    son 
   
    droit. 
   
    Il 
   
    était 
   
    dans 
   
    son 
   
    droit 
   
    parce 
   
    que 
   
    le 
   
    pays 
   
    qu'il 
   
    possédait, 
   
    il 
   
    l'avait 
   
    acquis 
   
    au 
   
    prix 
   
    de 
   
    flots 
   
    de 
   
    sang 
   
    versés 
   
    par 
   
    ses 
   
    ancêtres 
   
    dans 
   
    les 
   
    luttes 
   
    qu'ils 
   
    avaient 
   
    eu 
   
    à 
   
    soutenir 
   
    pour 
   
    arracher 
   
    aux 
   
    musulmans 
   
    et 
   
    surtout 
   
    aux 
   
    Grecs, 
   
    les 
   
    terres 
   
    qu'il 
   
    avait 
   
    réparties 
   
    entre 
   
    des 
   
    gens 
   
    dignes 
   
    de 
   
    les 
   
    posséder; 
   
    et 
   
    ceux-ci, 
   
    selon 
   
    les 
   
    lois 
   
    de 
   
    vasselagc 
   
    devaient 
   
    se 
   
    montrer 
   
    fidèles 
   
    et 
   
    reconnaissants 
   
    envers 
   
    leur 
   
    bienfaiteur, 
   
    qui 
   
    leur 
   
    avait 
   
    confié 
   
    ces 
   
    terres, 
   
    car 
   
    autrement 
   
    ils 
   
    étaient 
   
    coupables 
   
    et 
   
    Léon 
   
    n'avait 
   
    plus 
   
    à 
   
    les 
   
    considérer 
   
    que 
   
    comme 
   
    des 
   
    révoltés.
 
   
    De 
   
    ce 
   
    côté, 
   
    Léon 
   
    n'eut 
   
    pas 
   
    de 
   
    grands 
   
    obstacles 
   
    à 
   
    surmonter: 
   
    les 
   
    barons 
   
    acceptèrent 
   
    volontiers 
   
    sa 
   
    suzeraineté 
   
    comme 
   
    ils 
   
    avaient 
   
    accepté 
   
    celle 
   
    de 
   
    Roupin. 
   
    D'ailleurs, 
   
    lequel 
   
    d'entre 
   
    eux, 
   
    tous 
   
    inférieurs 
   
    en 
   
    forces, 
   
    eût 
   
    pu 
   
    s'opposer 
   
    à 
   
    la 
   
    puissance 
   
    d'un 
   
    si 
   
    fort 
   
    souverain! 
   
    Et 
   
    pourtant, 
   
    il 
   
    y 
   
    en 
   
    avait 
   
    parmi 
   
    eux 
   
    qui 
   
    se 
   
    considérait 
   
    comme 
   
    libres 
   
    de 
   
    toute 
   
    obligation 
   
    envers 
   
    les 
   
    princes 
   
    de 
   
    la 
   
    dynastie 
   
    de 
   
    Roupin. 
   
    C'étaient 
   
    les 
   
    grands 
   
    Barons 
   
    et 
   
    les 
   
    seigneurs 
   
    des 
   
    châteaux-forts 
   
    comme 
   
    nous 
   
    le 
   
    disent 
   
    certains 
   
    passages 
   
    de 
   
    nos 
   
    historiens. 
   
    Ceux-là 
   
    tenaient 
   
    leurs 
   
    territoire 
   
    ou 
   
    leurs 
   
    châteaux 
   
    non 
   
    point 
   
    des 
   
    Roupéniens, 
   
    mais 
   
    des 
   
    autres 
   
    maîtres 
   
    du 
   
    pays, 
   
    c'est-à-dire 
   
    des 
   
    empereurs 
   
    de 
   
    Byzance, 
   
    ou 
   
    ils 
   
    les 
   
    avaient 
   
    gagnés 
   
    par 
   
    eux-mêmes, 
   
    de 
   
    leurs 
   
    propres 
   
    mains 
   
    et 
   
    par 
   
    leurs 
   
    seules 
   
    forces. 
   
    Les 
   
    plus 
   
    célèbres 
   
    étaient 
   
    les 
   
    Aboulgharibiens 
   
    et 
   
    les 
   
    Héthoumiens, 
   
    seigneurs 
   
    de 
   
    Babéron 
   
    et 
   
    de 
   
    Lambroun, 
   
    les 
   
    Nathanaëliens, 
   
    seigneurs 
   
    d'Asgouras. 
   
    Mais 
   
    il 
   
    y 
   
    en 
   
    avait 
   
    probablement 
   
    d'autres 
   
    encore. 
   
    Il 
   
    se 
   
    fiaient 
   
    à 
   
    leurs 
   
    forces, 
   
    ou 
   
    ils 
   
    avaient 
   
    recours 
   
    à 
   
    l'empereur 
   
    grec 
   
    et 
   
    ils 
   
    espéraient 
   
    rester 
   
    seuls 
   
    maîtres 
   
    de 
   
    leurs 
   
    possessions. 
   
    Comme 
   
    ils 
   
    mettaient 
   
    une 
   
    barrière 
   
    infranchissable 
   
    à 
   
    l'extension 
   
    de 
   
    la 
   
    puissance 
   
    de 
   
    Léon, 
   
    que 
   
    celui-ci 
   
    voulait 
   
    agrandir 
   
    toujours, 
   
    Léon, 
   
    pour 
   
    atteindre 
   
    le 
   
    but 
   
    qu'il 
   
    s'était 
   
    proposé, 
   
    devait 
   
    les 
   
    abattre 
   
    tous. 
   
    Il 
   
    lui 
   
    fallut 
   
    donc 
   
    employer 
   
    l'artifice, 
   
    déployer 
   
    la 
   
    plus 
   
    énergique 
   
    persévérance 
   
    pour 
   
    en 
   
    venir 
   
    à 
    
     bout.
  
 
   
    L'histoire 
   
    ne 
   
    nous 
   
    dit 
   
    pas 
   
    leurs 
   
    noms, 
   
    mais 
   
    il 
   
    dut 
   
    y 
   
    avoir 
   
    plus 
   
    d'un 
   
    ou 
   
    deux 
   
    de 
   
    ces 
   
    grands 
   
    barons 
   
    qui 
   
    vinrent 
   
    apporter 
   
    leur 
   
    soumission 
   
    à 
   
    Léon 
   
    et 
   
    lui 
   
    jurer 
   
    obéissance 
   
    plutôt 
   
    qu'à 
   
    l'empereur, 
   
    parce 
   
    que 
   
    celui-ci 
   
    n'enverrait 
   
    pour 
   
    les 
   
    protéger 
   
    que 
   
    des 
   
    troupes 
   
    peu 
   
    nombreuses 
   
    et 
   
    qu'ils 
   
    auraient 
   
    à 
   
    attendre, 
   
    car 
   
    l'empereur 
   
    était 
   
    loin 
   
    d'eux, 
   
    tandis 
   
    que 
   
    Léon 
   
    était 
   
    tout 
   
    proche, 
   
    que 
   
    son 
   
    armée 
   
    était 
   
    puissante 
   
    et 
   
    qu'elle 
   
    serait 
   
    prompte 
   
    à 
   
    venir 
   
    à 
   
    leur 
   
    défense.
  
 
   
    Il 
   
    n'y 
   
    eut 
   
    que 
   
    le 
   
    château-fort 
   
    de 
   
    Lambroun 
   
    qui 
   
    résista 
   
    longtemps 
   
    à 
   
    la 
   
    puissance 
   
    des 
   
    Roupéniens 
   
    et 
   
    qui, 
   
    sans 
   
    céder, 
   
    soutint, 
   
    à 
   
    plusieurs 
   
    reprises, 
   
    sièges 
   
    et 
   
    assauts. 
   
    Léon 
   
    comprit 
   
    enfin 
   
    que 
   
    ce 
   
    n'était 
   
    pas 
   
    par 
   
    les 
   
    armes 
   
    qu'il 
   
    réduirait 
   
    cette 
   
    place. 
   
    Des 
   
    pourparlers 
   
    eurent 
   
    alors 
   
    lieu 
   
    des 
   
    deux 
   
    côtés. 
   
    Par 
   
    convenance 
   
    le 
   
    Baron 
   
    d'Arménie 
   
    se 
   
    réconcilia 
   
    avec 
   
    le 
   
    plus 
   
    noble 
   
    de 
   
    tous 
   
    les 
   
    barons, 
   
    avec 
   
    Héthoum, 
   
    seigneur 
   
    de 
   
    Lambroun, 
   
    dont 
   
    le 
   
    frère 
   
    S.
    
     t 
   
    Nersès 
   
    de 
   
    Lambroun, 
   
    cette 
   
    haute 
   
    et 
   
    fine 
   
    intelligence, 
   
    reconnaissait 
   
    déjà 
   
    Léon 
   
    pour 
   
    souverain 
   
    et 
   
    roi 
   
    des 
   
    Arméniens 
   
    et 
   
    ne 
   
    craignait 
   
    pas 
   
    de 
   
    le 
   
    dire 
   
    dans 
   
    ses 
   
    lettres 
   
    et 
   
    ses 
   
    écrits. 
   
    De 
   
    la 
   
    part 
   
    donc 
   
    de 
   
    Lambroun, 
   
    tout 
   
    obstacle 
   
    était 
   
    surmonté, 
   
    le 
   
    temps 
   
    devait 
   
    faire 
   
    le 
   
    reste, 
   
    c'est-à-dire 
   
    dissiper 
   
    tout 
   
    malentendu, 
   
    applanir 
   
    toute 
   
    difficulté 
   
    et 
   
    resserer 
   
    les 
   
    liens 
   
    d'amitié. 
   
    C'est 
   
    ce 
   
    que 
   
    Léon 
   
    prit 
   
    à 
   
    tâche 
   
    de 
   
    réaliser, 
   
    comme 
   
    nous 
   
    le 
   
    verrons 
   
    plus 
   
    loin.
  
 
   
    Nous 
   
    pouvons 
   
    donc 
   
    dire 
   
    que, 
   
    dès 
   
    les 
   
    premières 
   
    années 
   
    de 
   
    sa 
   
    souveraineté, 
   
    Léon 
   
    étendit, 
   
    avec 
   
    une 
   
    autorité 
   
    absolue, 
   
    ses 
   
    frontières 
   
    des 
   
    portes 
   
    de 
   
    Séleucie 
   
    aux 
   
    portes 
   
    d'Antioche, 
   
    et 
   
    du 
   
    littoral 
   
    de 
   
    Tarse 
   
    jusqu'aux 
   
    régions 
   
    du 
   
    Taurus 
   
    et 
   
    de 
   
    l'Anti-Taurus, 
   
    embrassant 
   
    les 
   
    pays 
   
    de 
   
    Pamphylie, 
   
    d'Isaurie, 
   
    une 
   
    partie 
   
    de 
   
    Lycaonie, 
   
    de 
   
    Cataonie 
   
    et 
   
    de 
   
    Germanicée 
   
    (Marache). 
   
    Tous 
   
    les 
   
    princes 
   
    et 
   
    seigneurs, 
   
    grands 
   
    et 
   
    petits, 
   
    de 
   
    ces 
   
    contrées 
   
    lui 
   
    obéissaient 
   
    plus 
   
    ou 
   
    moins 
   
    et 
   
    le 
   
    reconnaissaient 
   
    pour 
   
    leur 
   
    souverain. 
   
    Dans 
   
    leur 
   
    nombre, 
   
    il 
   
    faut 
   
    compter 
   
    aussi 
   
    les 
   
    chefs 
   
    des 
   
    églises 
   
    et 
   
    les 
   
    évêques, 
   
    s'il 
   
    y 
   
    en 
   
    avait, 
   
    comme 
   
    dans 
   
    les 
   
    temps 
   
    suivants, 
   
    des 
   
    maîtres 
   
    des 
   
    cantons 
   
    et 
   
    des 
   
    châteaux. 
   
    La 
   
    loi 
   
    était 
   
    pour 
   
    tous 
   
    indistinctement. 
   
    Comme 
   
    à 
   
    l'époque 
   
    de 
   
    la 
   
    royauté 
   
    des 
   
    Bagratides, 
   
    le 
   
    roi 
   
    devait 
   
    introniser 
   
    l'évêque 
   
    et 
   
    le 
   
    patriarche 
   
    et 
   
    s'interposer 
   
    dans 
   
    les 
   
    grandes 
   
    questions 
   
    religieuses: 
   
    ainsi 
   
    Léon, 
   
    avant 
   
    même 
   
    d'être 
   
    couronné 
   
    roi, 
   
    s'attribua-t-il 
   
    cette 
   
    prérogative, 
   
    bien 
   
    que 
   
    son 
   
    territoire 
   
    ne 
   
    fût 
   
    qu'une 
   
    très 
   
    minime 
   
    partie 
   
    du 
   
    vaste 
   
    pays 
   
    où 
   
    les 
   
    évêques 
   
    et 
   
    le 
   
    peuple 
   
    arméniens 
   
    s'étaient 
   
    répandus 
   
    sous 
   
    divers 
   
    gouvernements, 
   
    mais 
   
    Léon 
   
    était 
   
    le 
   
    plus 
   
    puissant 
   
    prince 
   
    des 
   
    Arméniens 
   
    de 
   
    l'époque; 
   
    en 
   
    outre 
   
    le 
   
    siège 
   
    du 
   
    Catholicos 
   
    se 
   
    trouvait 
   
    près 
   
    des 
   
    frontières 
   
    de 
   
    ses 
   
    Etats, 
   
    à 
   
    Romcla. 
   
    En 
   
    un 
   
    mot, 
   
    comme 
   
    il 
   
    était 
   
    puissant, 
   
    tous 
   
    le 
   
    respectèrent 
   
    et 
   
    il 
   
    sut 
   
    agir 
   
    avec 
   
    dignité 
   
    en 
   
    traitant 
   
    les 
   
    affaires 
   
    du 
   
    patriarche 
   
    et 
   
    des 
   
    évêques.
  
 
   
    On 
   
    a 
   
    vu, 
   
    dans 
   
    le 
   
    courant 
   
    de 
   
    ce 
   
    récit, 
   
    qu'à 
   
    l'arrivée 
   
    de 
   
    Frédéric, 
   
    le 
   
    chef 
   
    de 
   
    l'église 
   
    arménienne, 
   
    invité 
   
    par 
   
    Léon, 
   
    se 
   
    rendit 
   
    avec 
   
    lui 
   
    à 
   
    la 
   
    rencontre 
   
    de 
   
    l'empereur. 
   
    Puis 
   
    nous 
   
    l'avons 
   
    vu 
   
    envoyé 
   
    encore 
   
    auprès 
   
    du 
   
    fils 
   
    de 
   
    l'empereur 
   
    quand 
   
    ce 
   
    prince 
   
    était 
   
    malade. 
   
    Plus 
   
    tard, 
   
    nous 
   
    l'avons 
   
    vu 
   
    recevoir 
   
    des 
   
    missives 
   
    du 
   
    Pape 
   
    en 
   
    même 
   
    temps 
   
    que 
   
    Léon. 
   
    Ce 
   
    patriarche 
   
    (Grégoire 
   
    IV 
   
    Degha) 
   
    paraît 
   
    avoir 
   
    toujours 
   
    partagé 
   
    les 
   
    manières 
   
    de 
   
    voir 
   
    de 
   
    Léon 
   
    et 
   
    avoir 
   
    agi 
   
    dans 
   
    le 
   
    même 
   
    sens. 
   
    Il 
   
    avait 
   
    succédé 
   
    à 
   
    S.
    
     t 
   
    Nersès 
   
    Chenorhali 
   
    (le 
   
    Gracieux) 
   
    du 
   
    temps 
   
    de 
   
    la 
   
    tyrannie 
   
    de 
   
    Melèh. 
   
    Quand 
   
    il 
   
    mourut, 
   
    Léon 
   
    et 
   
    S.
    
     t 
   
    Nersès 
   
    de 
   
    Lambroun 
   
    l'ensevelirent 
   
    et 
   
    le 
   
    firent 
   
    inhumer 
   
    au 
   
    couvent 
   
    de 
   
    Trasargue 
   
    où 
   
    il 
   
    avait 
   
    rendu 
   
    le 
   
    dernier 
   
    soupir, 
   
    le 
   
    16 
   
    ou 
   
    le 
   
    25 
   
    Mai, 
   
    1193.
  
 
   
    On 
   
    voit 
   
    encore 
   
    une 
   
    preuve 
   
    de 
   
    la 
   
    souveraineté 
   
    de 
   
    Léon 
   
    quand 
   
    il 
   
    désigna 
   
    pour 
   
    succéder 
   
    au 
   
    patriarche 
   
    défunt, 
   
    le 
   
    neveu 
   
    même 
   
    de 
   
    celui-ci, 
   
    Vahram 
   
    Grégoire 
   
    V. 
   
    Car 
   
    Nersès 
   
    de 
   
    Lambroun 
   
    écrivait 
   
    à 
   
    Léon: 
   
    «Votre 
   
    piété 
   
    nous 
   
    a 
   
    appelé 
   
    pour 
   
    nommer 
   
    le 
   
    jeune 
   
    Catholicos». 
   
    Mais 
   
    où 
   
    la 
   
    souveraineté 
   
    de 
   
    Léon 
   
    fut 
   
    manifeste 
   
    et 
   
    plus 
   
    éclatante 
   
    c'est 
   
    quand 
   
    il 
   
    déposa 
   
    ce 
   
    même 
   
    dernier 
   
    Catholicos. 
   
    D'après 
   
    notre 
   
    historien 
   
    «lorsqu'il 
   
    (Vahram 
   
    Grégoire) 
   
    fut 
   
    nommé 
   
    catholicos, 
   
    il 
   
    ne 
   
    voulut 
   
    plus 
   
    obéir 
   
    aux 
   
    ordres 
   
    de 
   
    ses 
   
    précepteurs 
   
    comme 
   
    auparavant, 
   
    au 
   
    contraire, 
   
    il 
   
    agit 
   
    en 
   
    toute 
   
    liberté 
   
    et 
   
    selon 
   
    son 
   
    gré 
   
    comme 
   
    il 
   
    avait 
   
    vu 
   
    faire 
   
    à 
   
    son 
   
    oncle. 
   
    Alors 
   
    les 
   
    hauts 
   
    personnages 
   
    le 
   
    prirent 
   
    en 
   
    haine, 
   
    ils 
   
    allèrent 
   
    à 
   
    Léon 
   
    et 
   
    lui 
   
    dirent: 
   
    II 
   
    n'a 
   
    pas 
   
    la 
   
    sagesse 
   
    qu'exige 
   
    la 
   
    charge 
   
    du 
   
    patriarcat. 
   
    Ils 
   
    le 
   
    couvrirent 
   
    de 
   
    toutes 
   
    les 
   
    calomnies, 
   
    et, 
   
    après 
   
    deux 
   
    ou 
   
    trois 
   
    reprises, 
   
    ils 
   
    animèrent 
   
    Léon 
   
    contre 
   
    lui. 
   
    Celui-ci 
   
    manda 
   
    aussitôt 
   
    l'archevêque 
   
    Jean 
   
    au 
   
    fort 
   
    de 
   
    Romcla 
   
    pour 
   
    y 
   
    agir 
   
    selon 
   
    sa 
   
    sagesse. 
   
    Ce 
   
    dernier 
   
    s'y 
   
    rendit 
   
    et 
   
    fut 
   
    présenté 
   
    en 
   
    grande 
   
    cérémonie 
   
    au 
   
    Catholicos, 
   
    qui 
   
    accueillit 
   
    son 
   
    hôte 
   
    avec 
   
    considération 
   
    et 
   
    en 
   
    compatriote. 
   
    Mais 
   
    l'archevêque 
   
    Jean, 
   
    pendant 
   
    qu'ils 
   
    étaient 
   
    à 
   
    table, 
   
    fit 
   
    avec 
   
    l'aide 
   
    de 
   
    ses 
   
    serviteurs, 
   
    fermer 
   
    les 
   
    portes 
   
    du 
   
    château. 
   
    Il 
   
    s'éleva 
   
    une 
   
    grande 
   
    rumeur, 
   
    et 
   
    le 
   
    patriarche, 
   
    effrayé, 
   
    demanda 
   
    à 
   
    Jean: 
   
    Qu'est-ce 
   
    que 
   
    j'entends? 
   
    Jean 
   
    lui 
   
    répondit: 
   
    Tu 
   
    es 
   
    en 
   
    mon 
   
    pouvoir! 
   
    Aussitôt 
   
    il 
   
    le 
   
    fit 
   
    enfermer 
   
    dans 
   
    une 
   
    chambre 
   
    autour 
   
    de 
   
    laquelle 
   
    il 
   
    mit 
   
    des 
   
    gardes. 
   
    La 
   
    nouvelle 
   
    s'en 
   
    répandit 
   
    au 
   
    dehors 
   
    du 
   
    château 
   
    et 
   
    aux 
   
    alentours; 
   
    le 
   
    peuple 
   
    s'arma 
   
    alors 
   
    et 
   
    assaillit 
   
    la 
   
    forteresse, 
   
    contre 
   
    laquelle 
   
    il 
   
    combattit 
   
    trois 
   
    jours 
   
    avec 
   
    des 
   
    flèches, 
   
    mais 
   
    comme 
   
    ces 
   
    hommes 
   
    ne 
   
    purent 
   
    rien 
   
    faire, 
   
    ils 
   
    finirent 
   
    par 
   
    se 
   
    retirer. 
   
    Jean 
   
    amena 
   
    alors 
   
    le 
   
    patriarche 
   
    inculpé 
   
    à 
   
    Léon 
   
    qui 
   
    le 
   
    fit 
   
    enfermer 
   
    dans 
   
    le 
   
    fort 
   
    de 
   
    Gobidara 
   
    pour 
   
    y 
   
    rester 
   
    quelque 
   
    temps».
  
 
   
    Nous 
   
    ne 
   
    nous 
   
    occuperons 
   
    pas 
   
    ici 
   
    des 
   
    actes 
   
    du 
   
    patriarche, 
   
    mais 
   
    de 
   
    ceux 
   
    de 
   
    Léon, 
   
    qui 
   
    d'après 
   
    les 
   
    dernières 
   
    paroles 
   
    de 
   
    l'historien, 
   
    fit 
   
    enfermer 
   
    pour 
   
    quelque 
   
    temps 
   
    le 
   
    jeune 
   
    Catholicos 
   
    pour 
   
    le 
   
    mettre 
   
    en 
   
    pénitence 
   
    et 
   
    le 
   
    faire 
   
    juger 
   
    par 
   
    un 
   
    concile, 
   
    selon 
   
    le 
   
    droit 
   
    canonique. 
   
    Parmi 
   
    ceux 
   
    qui 
   
    furent 
   
    désignés 
   
    pour 
   
    faire 
   
    partie 
   
    de 
   
    ce 
   
    concile, 
   
    se 
   
    trouvait 
   
    l'indispensable 
   
    S.
    
     t 
   
    Nersès 
   
    de 
   
    Lambroun. 
   
    Celui-ci 
   
    blâmait 
   
    les 
   
    actes 
   
    du 
   
    Catholicos 
   
    sans 
   
    expérience 
   
    et 
   
    désapprouvait 
   
    son 
   
    élection, 
   
    mais 
   
    il 
   
    désapprouvait 
   
    bien 
   
    plus 
   
    la 
   
    manière 
   
    dont 
   
    on 
   
    l'avait 
   
    déposé 
   
    et, 
   
    prévoyant 
   
    les 
   
    conséquences 
   
    qui 
   
    devaient 
   
    s'en 
   
    suivre 
   
    il 
   
    refusa 
   
    de 
   
    prendre 
   
    part 
   
    au 
   
    conseil 
   
    qui 
   
    allait 
   
    condamner 
   
    le 
   
    chef 
   
    de 
   
    son 
   
    église. 
   
    Léon 
   
    dut 
   
    lui 
   
    écrire 
   
    cinq 
   
    fois 
   
    et 
   
    le 
   
    contraindre 
   
    à 
   
    participer 
   
    au 
   
    Concile. 
   
    Là, 
   
    Léon 
   
    convainquit 
   
    la 
   
    multitude 
   
    des 
   
    évêques 
   
    présents 
   
    qu'il 
   
    fallait 
   
    déposer 
   
    le 
   
    Catholicos, 
   
    trop 
   
    jeune 
   
    d'âge 
   
    et 
   
    d'esprit: 
   
    ce 
   
    que 
   
    Vahram 
   
    Grégoire 
   
    fit 
   
    bien 
   
    voir 
   
    en 
   
    effet. 
   
    Il 
   
    avait 
   
    écouté 
   
    ses 
   
    partisans 
   
    qui 
   
    lui 
   
    conseillèrent 
   
    de 
   
    s'évader 
   
    de 
   
    la 
   
    forteresse, 
   
    où 
   
    «il 
   
    se 
   
    rendit 
   
    comme 
   
    un 
   
    enfant. 
   
    Prenant 
   
    un 
   
    drap, 
   
    il 
   
    l'accrocha 
   
    à 
   
    la 
   
    fenêtre 
   
    pendant 
   
    la 
   
    nuit, 
   
    afin 
   
    de 
   
    pouvoir 
   
    descendre 
   
    le 
   
    mur. 
   
    Mais 
   
    le 
   
    drap 
   
    vint 
   
    à 
   
    se 
   
    déchirer, 
   
    Vahram 
   
    tomba 
   
    et 
   
    se 
   
    tua. 
   
    On 
   
    transporta 
   
    son 
   
    corps 
   
    à 
   
    Trasargue 
   
    et 
   
    on 
   
    l'y 
   
    enterra 
   
    près 
   
    de 
   
    son 
   
    oncle, 
   
    en 
   
    1194». 
   
    C'est 
   
    pour 
   
    cela 
   
    que 
   
    Vahram 
   
    fut 
   
    appelé 
   
    Karavèje, 
   
    (précipité 
   
    du 
   
    rocher). 
   
    On 
   
    ne 
   
    peut 
   
    mettre 
   
    en 
   
    doute 
   
    que 
   
    ce 
   
    fut 
   
    à 
   
    l'instigation 
   
    de 
   
    Léon 
   
    et 
   
    avec 
   
    son 
   
    approbation, 
   
    que, 
   
    dans 
   
    le 
   
    même 
   
    conseil, 
   
    qui 
   
    allait 
   
    déposer 
   
    le 
   
    Catholicos, 
   
    on 
   
    choisit 
   
    pour 
   
    succéder 
   
    à 
   
    Vahram 
   
    Grégoire, 
   
    le 
   
    vieux 
   
    Grégoire 
   
    VI 
   
    Abirad, 
   
    neveu 
   
    de 
   
    Grégoire 
   
    III. 
   
    et 
   
    de 
   
    S.
    
     t 
   
    Nersès 
   
    de 
   
    Chenorhali 
   
    (le 
   
    Gracieux).