Si 
   
    jamais 
   
    le 
   
    noble 
   
    cœur 
   
    d'un 
   
    Arménien 
   
    a 
   
    regretté 
   
    la 
   
    mort 
   
    d'un 
   
    souverain 
   
    qu'il 
   
    puisse 
   
    appeler 
   
    le 
   
    bienfaiteur 
   
    de 
   
    son 
   
    pays, 
   
    ce 
   
    dût 
   
    être, 
   
    j'imagine, 
   
    la 
   
    mort 
   
    de 
   
    Léon. 
   
    Quelle 
   
    perte 
   
    peut 
   
    être 
   
    aussi 
   
    grande, 
   
    si 
   
    l'on 
   
    considère 
   
    comme 
   
    perte 
   
    l'absence 
   
    de 
   
    celui 
   
    qui, 
   
    toute 
   
    sa 
   
    vie, 
   
    se 
   
    montra 
   
    magnifique 
   
    et 
   
    qui 
   
    nous 
   
    légua 
   
    une 
   
    gloire 
   
    immortelle; 
   
    si 
   
    Léon 
   
    nous 
   
    apparaît 
   
    en 
   
    face 
   
    de 
   
    ses 
   
    contemporains, 
   
    en 
   
    face 
   
    de 
   
    ceux 
   
    qui 
   
    le 
   
    regardèrent 
   
    avec 
   
    émerveillement 
   
    jouissant 
   
    de 
   
    sa 
   
    gloire 
   
    et 
   
    y 
   
    participant, 
   
    qui 
   
    connurent 
   
    sa 
   
    sagesse 
   
    et 
   
    furent 
   
    comblés 
   
    de 
   
    ses 
   
    générosités 
   
    et 
   
    de 
   
    ses 
   
    bienfaits!
 
    
     En 
    
     général, 
    
     tous 
    
     ses 
    
     sujets 
    
     lui 
    
     adressèrent 
    
     des 
    
     louanges. 
    
     Les 
    
     historiens 
    
     font 
    
     son 
    
     éloge 
    
     d'une 
    
     voix 
    
     unanime, 
    
     personne 
    
     ne 
    
     formula 
    
     une 
    
     plainte 
    
     contre 
    
     lui, 
    
     tout 
    
     le 
    
     monde 
    
     pleurait 
    
     et 
    
     c'est 
    
     pourquoi 
    
     sa 
    
     mort 
    
     répandit 
    
     la 
    
     consternation 
    
     partout; 
    
     ce 
    
     fut 
    
     un 
    
     deuil 
    
     pour 
    
     tous, 
    
     grands 
    
     et 
    
     petits 
    
     une 
    
     calamité 
    
     publique. 
    
     Un 
    
     historien 
    
     dit 
    
     tout 
    
     cela 
    
     en 
    
     quelques 
    
     mots. 
   
    «
    
     Tout 
    
     son 
    
     pays 
    
     le 
    
     pleura 
    
     amèrement
   
    ». 
    
     Tous 
    
     les 
    
     étrangers 
    
     furent 
    
     émus 
    
     à 
    
     la 
    
     nouvelle 
    
     que 
    
     Léon 
    
     n'était 
    
     plus. 
    
     Les 
    
     Chevaliers 
    
     surtout 
    
     qui 
    
     l'avaient 
    
     approché, 
    
     à 
    
     qui 
    
     il 
    
     avait 
    
     accordé 
    
     tant 
    
     de 
    
     bénéfices 
    
     et 
    
     qui 
    
     pouvaient 
    
     tout 
    
     espérer 
    
     de 
    
     sa 
    
     générosité.
  
 
   
    On 
   
    ne 
   
    doit 
   
    pas 
   
    mettre 
   
    en 
   
    doute 
   
    que 
   
    tout 
   
    ce 
   
    monde 
   
    que 
   
    Léon 
   
    avait 
   
    comblé 
   
    de 
   
    faveurs 
   
    et 
   
    de 
   
    bienfaits, 
   
    qui 
   
    le 
   
    chérissait 
   
    et 
   
    se 
   
    glorifiait 
   
    de 
   
    posséder 
   
    un 
   
    pareil 
   
    Roi 
   
    et 
   
    maître 
   
    dut 
   
    nécessairement 
   
    lui 
   
    préparer 
   
    des 
   
    funérailles 
   
    splendides. 
   
    Nos 
   
    ancêtres 
   
    avaient 
   
    donné 
   
    l'exemple 
   
    à 
   
    l'enterrement 
   
    de 
   
    Tiridate 
   
    et 
   
    avant 
   
    lui 
   
    d'Ardachès 
   
    II.
  
 
   
    Celui 
   
    qui, 
   
    après 
   
    Dieu, 
   
    connaissait 
   
    le 
   
    mieux 
   
    les 
   
    secrets 
   
    du 
   
    cœur 
   
    de 
   
    Léon, 
   
    Grégoire 
   
    de 
   
    Skévra, 
   
    le 
   
    panégyriste 
   
    de 
   
    S. 
   
    Nersès 
   
    de 
   
    Lambroun, 
   
    n'a-t-il 
   
    pas 
   
    fait 
   
    entendre 
   
    sa 
   
    voix 
   
    gémissante 
   
    dans 
   
    une 
   
    oraison 
   
    funèbre 
   
    de 
   
    Léon! 
   
    N'a-t'il 
   
    pas 
   
    raconté 
   
    sa 
   
    vie; 
   
    n'a-t'il 
   
    pas 
   
    rappelé 
   
    ses 
   
    succès, 
   
    n'a-t'il 
   
    pas 
   
    proclamé 
   
    sa 
   
    vaillance! 
   
    N'a-t'il 
   
    pas 
   
    fait 
   
    voir 
   
    à 
   
    ceux 
   
    qui 
   
    l'entendirent 
   
    comment 
   
    Léon 
   
    fit 
   
    d'un 
   
    peuple 
   
    désespéré, 
   
    une 
   
    nation 
   
    glorieuse, 
   
    un 
   
    royaume 
   
    illustre! 
   
    Léon, 
   
    à 
   
    qui 
   
    rendirent 
   
    honneur 
   
    les 
   
    Empereurs 
   
    et 
   
    le 
   
    Pape; 
   
    Léon, 
   
    qui 
   
    fut 
   
    l'ami 
   
    et 
   
    l'allié 
   
    des 
   
    souverains 
   
    éloignés 
   
    et 
   
    voisins; 
   
    Léon, 
   
    qui 
   
    attira 
   
    de 
   
    l'Occident 
   
    comme 
   
    de 
   
    l'Orient 
   
    à 
   
    sa 
   
    cour 
   
    et 
   
    en 
   
    Sissouan, 
   
    dans 
   
    l'intérêt 
   
    du 
   
    commerce, 
   
    les 
   
    caravanes 
   
    et 
   
    les 
   
    flottes, 
   
    qui 
   
    enrichit 
   
    de 
   
    bénéfices 
   
    les 
   
    églises 
   
    et 
   
    les 
   
    couvents 
   
    par 
   
    des 
   
    revenus, 
   
    des 
   
    taxes 
   
    de 
   
    terre 
   
    et 
   
    de 
   
    mer, 
   
    et 
   
    des 
   
    dons 
   
    prélevés 
   
    sur 
   
    le 
   
    trésor 
   
    royal! 
   
    Leur 
   
    a-t'il 
   
    dit 
   
    quelle 
   
    adresse 
   
    Léon 
   
    avait 
   
    fait 
   
    acquérir 
   
    à 
   
    ses 
   
    jeunes 
   
    chevaliers; 
   
    et, 
   
    selon 
   
    le 
   
    passage 
   
    de 
   
    David, 
   
    de 
   
    quelles 
   
    coquettes 
   
    parures, 
   
    les 
   
    gracieuses 
   
    filles 
   
    de 
   
    Sissouan, 
   
    sous 
   
    le 
   
    règne 
   
    de 
   
    Léon, 
   
    s'étaient 
   
    embellies, 
   
    lorsqu'elles 
   
    allaient 
   
    vêtues 
   
    de 
   
    pourpre 
   
    et 
   
    d'or! 
   
    L'histoire 
   
    ne 
   
    nous 
   
    répéte 
   
    rien 
   
    à 
   
    ce 
   
    sujet, 
   
    mais 
   
    je 
   
    ne 
   
    pense 
   
    pas 
   
    que 
   
    le 
   
    vieux 
   
    Catholicos 
   
    Jean, 
   
    non 
   
    plus 
   
    que 
   
    les 
   
    autres, 
   
    auraient 
   
    oublié 
   
    de 
   
    reconnaître 
   
    et 
   
    de 
   
    proclamer 
   
    ces 
   
    derniers 
   
    bienfaits 
   
    de 
   
    notre 
   
    roi 
   
    magnifique!
  
 
    
     Ce 
    
     qui 
    
     suit 
    
     et 
    
     qui 
    
     nous 
    
     est 
    
     donné 
    
     par 
    
     écrit 
    
     atteste 
    
     suffisamment 
    
     quels 
    
     profonds 
    
     sentiments 
    
     d'amour 
    
     et 
    
     de 
    
     respect 
    
     ses 
    
     sujets 
    
     avaient 
    
     pour 
    
     Léon. 
    
     Tant 
    
     que 
    
     le 
    
     roi 
    
     resta 
    
     en 
    
     agonie, 
    
     tant 
    
     qu'il 
    
     n'eut 
    
     pas 
    
     rendu 
    
     son 
    
     dernier 
    
     soupir, 
    
     le 
    
     peuple 
    
     qui 
    
     se 
    
     tenait 
    
     au 
    
     dehors, 
    
     les 
    
     princes 
    
     et 
    
     les 
    
     prêtres, 
    
     se 
    
     disputaient 
    
     le 
    
     lieu 
    
     où 
    
     l'on 
    
     devait 
    
     déposer 
    
     ses 
    
     restes. 
    
     Chacun 
    
     le 
    
     voulait 
    
     dans 
    
     sa 
    
     ville 
    
     et 
    
     émettait 
    
     ses 
    
     raisons 
    
     pour 
    
     cela. 
    
     Le 
    
     Catholicos 
    
     prétendait 
    
     qu'il 
    
     devait 
    
     être 
    
     enterré 
    
     dans 
    
     son 
    
     couvent, 
    
     qui 
    
     servait 
    
     de 
    
     résidence 
    
     au 
    
     Patriarche, 
    
     c'est-à-dire, 
    
     au 
    
     monastère 
    
     de 
    
     Trazargue. 
    
     Les 
    
     Barons, 
    
     les 
    
     fidèles 
    
     ministres, 
    
     insistaient 
    
     pour 
    
     qu'il 
    
     fût 
    
     inhunié, 
    
     selon 
    
     sa 
    
     dernière 
    
     volonté, 
    
     dans 
    
     le 
    
     monastère 
    
     qui 
    
     avait 
    
     été 
    
     son 
    
     lieu 
    
     de 
    
     prédilection, 
    
     le 
    
     couvent 
    
     d'Aguenère, 
    
     où 
    
     il 
    
     avait 
    
     voulu 
    
     venir 
    
     lors 
    
     de 
    
     sa 
    
     maladie, 
    
     et 
    
     en 
    
     faveur 
    
     du 
    
     quel 
    
     il 
    
     avait 
    
     refusé 
    
     à 
    
     Sis, 
    
     les 
    
     dernières 
    
     heures 
    
     de 
    
     sa 
    
     vie. 
    
     La 
    
     Capitale, 
    
     protestait 
    
     par 
    
     la 
    
     bouche 
    
     de 
    
     ses 
    
     habitants, 
    
     disant 
    
     que 
    
     c'était 
    
     dans 
    
     ses 
    
     murs 
    
     que 
    
     se 
    
     trouvaient 
    
     le 
    
     trône 
    
     royal 
    
     et 
    
     la 
    
     cathédrale 
    
     et 
    
     que 
    
     c'était 
    
     elle 
    
     qui 
    
     devait 
    
     recevoir 
    
     les 
    
     cendres 
    
     de 
    
     Léon. 
    
     L'avis 
    
     du 
    
     peuple 
    
     et 
    
     des 
    
     princes 
    
     prévalut; 
    
     la 
    
     dernière 
    
     volonté 
    
     du 
    
     roi 
    
     fut 
    
     satisfaite, 
    
     en 
    
     même 
    
     temps 
    
     qu'on 
    
     tint 
    
     à 
    
     donner 
    
     satisfaction 
    
     aux 
    
     autres. 
    
     Le 
    
     cœur 
    
     et 
    
     les 
    
     entrailles 
    
     du 
    
     roi 
    
     reposèrent 
    
     au 
    
     couvent 
    
     d'Aguenère 
    
     ainsi 
    
     que 
    
     Léon 
    
     l'avait 
    
     toujours 
    
     désiré, 
    
     et 
    
     le 
    
     reste 
    
     de 
    
     son 
    
     corps 
    
     fut 
    
     emporté 
    
     au 
    
     centre 
    
     du 
    
     pays, 
    
     à 
    
     Sis, 
    
     et 
    
     déposé 
    
     dans 
    
     la 
    
     cathédrale 
    
     que 
    
     le 
    
     royal 
    
     défunt 
    
     avait 
    
     lui-même 
    
     fait 
    
     ériger.
  
 
   
    Le 
   
    marbre 
   
    couvrit 
   
    les 
   
    derniers 
   
    restes 
   
    de 
   
    Léon, 
   
    et 
   
    cependant 
   
    son 
   
    âme 
   
    parut 
   
    planer 
   
    longtemps 
   
    encore 
   
    sur 
   
    le 
   
    pays 
   
    et 
   
    le 
   
    palais. 
   
    Ceux 
   
    qui 
   
    l'avaient 
   
    vu, 
   
    ne 
   
    pouvaient 
   
    oublier 
   
    les 
   
    traits 
   
    de 
   
    ce 
   
    roi, 
   
    et 
   
    son 
   
    souvenir 
   
    se 
   
    maintint 
   
    jusqu'à 
   
    la 
   
    fin 
   
    de 
   
    la 
   
    dynastie 
   
    des 
   
    Roupéniens. 
   
    On 
   
    se 
   
    le 
   
    rappelait 
   
    de 
   
    père 
   
    en 
   
    fils. 
   
    Son 
   
    nom 
   
    fut 
   
    donné 
   
    par 
   
    les 
   
    gens 
   
    du 
   
    pays 
   
    et 
   
    par 
   
    les 
   
    étrangers 
   
    à 
   
    leurs 
   
    enfants. 
   
    Grand 
   
    pendant 
   
    sa 
   
    vie, 
   
    Léon 
   
    fut 
   
    grand 
   
    encore 
   
    après 
   
    son 
   
    trépas. 
   
    Il 
   
    avait 
   
    laissé 
   
    son 
   
    royaume 
   
    en 
   
    pleine 
   
    prospérité, 
   
    royaume 
   
    qu'il 
   
    avait 
   
    eu 
   
    tant 
   
    de 
   
    peine 
   
    à 
   
    fonder. 
   
    Ses 
   
    ministres 
   
    l'avaient 
   
    aidé 
   
    aussi 
   
    de 
   
    toutes 
   
    leurs 
   
    forces 
   
    et 
   
    c'était 
   
    la 
   
    volonté 
   
    de 
   
    Dieu. 
   
    Sa 
   
    succession 
   
    restée 
   
    en 
   
    litige, 
   
    était 
   
    une 
   
    ombre 
   
    aux 
   
    rayons 
   
    de 
   
    l'astre 
   
    de 
   
    Léon 
   
    arrivé 
   
    à 
   
    son 
   
    déclin, 
   
    et 
   
    il 
   
    faut 
   
    que 
   
    nous 
   
    tâchions 
   
    de 
   
    la 
   
    dissiper 
   
    pour 
   
    faire 
   
    en 
   
    même 
   
    temps 
   
    mieux 
   
    apprécier 
   
    le 
   
    tableau 
   
    de 
   
    sa 
   
    vie, 
   
    ou 
   
    le 
   
    reste 
   
    de 
   
    son 
   
    histoire.