La 
   
    mort 
   
    de 
   
    Salaheddin, 
   
    loin 
   
    de 
   
    donner 
   
    à 
   
    Léon 
   
    plus 
   
    de 
   
    sécurité 
   
    du 
   
    côté 
   
    du 
   
    prince 
   
    d'Antioche, 
   
    le 
   
    rendit 
   
    au 
   
    contraire 
   
    plus 
   
    méfiant 
   
    à 
   
    l'égard 
   
    de 
   
    ce 
   
    dernier. 
   
    Le 
   
    prince 
   
    d'Antioche 
   
    comptait 
   
    beaucoup 
   
    sur 
   
    le 
   
    sultan 
   
    qui 
   
    aurait 
   
    placé 
   
    Léon 
   
    sous 
   
    sa 
   
    suzeraineté, 
   
    comme 
   
    il 
   
    avait 
   
    fait 
   
    de 
   
    Roupin. 
   
    Il 
   
    y 
   
    eut 
   
    toujours, 
   
    entre 
   
    ces 
   
    deux 
   
    principautés 
   
    limitrophes 
   
    des 
   
    Arméniens 
   
    et 
   
    des 
   
    Antiochiens, 
   
    des 
   
    contestations 
   
    graves 
   
    qui 
   
    amenèrent 
   
    des 
   
    faits 
   
    importants. 
   
    Il 
   
    est 
   
    bon 
   
    de 
   
    faire 
   
    concevoir 
   
    une 
   
    idée 
   
    de 
   
    nos 
   
    voisins, 
   
    les 
   
    plus 
   
    puissants 
   
    parmi 
   
    les 
   
    principautés 
   
    occidentales 
   
    de 
   
    l'Orient, 
   
    après 
   
    celle 
   
    de 
   
    Jérusalem, 
   
    car 
   
    le 
   
    royaume 
   
    de 
   
    Chypre 
   
    venait 
   
    à 
   
    peine 
   
    d'éclore.
 
   
    Antioche 
   
    avait 
   
    la 
   
    prééminence 
   
    sur 
   
    toutes 
   
    les 
   
    villes 
   
    de 
   
    l'Asie, 
   
    parce 
   
    qu'elle 
   
    avait 
   
    servi, 
   
    au 
   
    temps 
   
    des 
   
    successeurs 
   
    d'Alexandre 
   
    de 
   
    Macédoine, 
   
    de 
   
    capitale 
   
    au 
   
    puissant 
   
    royaume 
   
    des 
   
    Séleucides; 
   
    elle 
   
    conserva 
   
    cette 
   
    supériorité 
   
    sous 
   
    la 
   
    domination 
   
    des 
   
    Romains. 
   
    À 
   
    cette 
   
    époque 
   
    elle 
   
    fut 
   
    regardée 
   
    comme 
   
    la 
   
    deuxième 
   
    ville 
   
    de 
   
    leur 
   
    vaste 
   
    empire. 
   
    Il 
   
    en 
   
    fut 
   
    de 
   
    même 
   
    sous 
   
    les 
   
    empereurs 
   
    byzantins, 
   
    jusqu'au 
   
    jour 
   
    où 
   
    les 
   
    Arabes 
   
    s'en 
   
    emparèrent. 
   
    Vers 
   
    le 
   
    milieu 
   
    du 
   
    X 
   
    siècle, 
   
    les 
   
    empereurs 
   
    la 
   
    reprirent 
   
    et 
   
    y 
   
    envoyèrent 
   
    un 
   
    haut 
   
    personnage, 
   
    un 
   
    Duc, 
   
    pour 
   
    la 
   
    gouverner.
  
 
   
    Quelques 
   
    princes 
   
    de 
   
    notre 
   
    nation, 
   
    Khatchadour 
   
    entre 
   
    autres 
   
    furent 
   
    élevés 
   
    à 
   
    cette 
   
    dignité 
   
    sous 
   
    le 
   
    règne 
   
    de 
   
    l'infortuné 
   
    Diogène 
   
    Romanos 
   
    (1068-1071). 
   
    Peu 
   
    de 
   
    temps 
   
    après, 
   
    l'impie 
   
    Philarete 
   
    s'empara 
   
    d'Antioche 
   
    pour 
   
    venger 
   
    Romanos 
   
    qui, 
   
    avait 
   
    été 
   
    chassé 
   
    du 
   
    trône 
   
    et 
   
    pour 
   
    garder 
   
    cette 
   
    ville 
   
    dans 
   
    ses 
   
    mains 
   
    il 
   
    renia 
   
    sa 
   
    foi. 
   
    Son 
   
    fils, 
   
    affligé 
   
    de 
   
    cette 
   
    apostasie, 
   
    livra 
   
    la 
   
    ville 
   
    à 
   
    Suleiman, 
   
    sultan 
   
    d'Iconie; 
   
    d'où 
   
    l'arracha 
   
    Toutouche, 
   
    plus 
   
    fort 
   
    encore, 
   
    qui 
   
    y 
   
    mit 
   
    un 
   
    sous- 
   
    gouverneur.
  
 
   
    Lorsque 
   
    la 
   
    première 
   
    Croisade 
   
    arriva, 
   
    elle 
   
    passa 
   
    par 
   
    le 
   
    pays 
   
    de 
   
    montagnes 
   
    de 
   
    nos 
   
    Barons. 
   
    Après 
   
    avoir 
   
    franchi 
   
    ces 
   
    montagnes, 
   
    les 
   
    Croisés 
   
    trouvèrent 
   
    pour 
   
    gouverneur 
   
    d'Antioche 
   
    un 
   
    certain 
   
    Akoussian. 
   
    Antioche 
   
    fut 
   
    alors 
   
    assiégée 
   
    pendant 
   
    trois 
   
    mois 
   
    par 
   
    les 
   
    Croisés 
   
    qui 
   
    s'en 
   
    emparèrent 
   
    le 
   
    3 
   
    Juin 
   
    1098, 
   
    pendant 
   
    la 
   
    principauté 
   
    de 
   
    Constance, 
   
    fils 
   
    de 
   
    Roupin 
   
    I. 
   
    Comme 
   
    le 
   
    chef 
   
    de 
   
    la 
   
    Croisade, 
   
    Bohémond, 
   
    fils 
   
    de 
   
    Robert 
   
    Guiscard, 
   
    duc 
   
    de 
   
    de 
   
    Pouille, 
   
    avait 
   
    déployé 
   
    durant 
   
    le 
   
    siège, 
   
    un 
   
    courage 
   
    et 
   
    une 
   
    intrépidité 
   
    extraordinaire, 
   
    on 
   
    lui 
   
    donna 
   
    le 
   
    gouvernement 
   
    d'Antioche. 
   
    Il 
   
    garda 
   
    son 
   
    titre 
   
    de 
   
    Prince, 
   
    titre 
   
    que 
   
    prirent 
   
    aussi 
   
    ses 
   
    successeurs, 
   
    et 
   
    Antioche 
   
    devint, 
   
    dès 
   
    lors 
   
    une 
   
    principauté. 
   
    Son 
   
    fils 
   
    et 
   
    successeur 
   
    Bohémond 
   
    II, 
   
    était 
   
    encore 
   
    enfant, 
   
    ce 
   
    fut 
   
    Tancrède 
   
    et 
   
    ses 
   
    autres 
   
    tuteurs 
   
    qui 
   
    gouvernèrent 
   
    la 
   
    principauté 
   
    pendant 
   
    ce 
   
    temps. 
   
    Bohémond 
   
    II, 
   
    ne 
   
    laissa 
   
    pas 
   
    de 
   
    fils, 
   
    alors 
   
    Raymond, 
   
    de 
   
    la 
   
    famille 
   
    des 
   
    comtes 
   
    de 
   
    Poitiers, 
   
    ayant 
   
    épousé 
   
    sa 
   
    fille 
   
    Constance, 
   
    lui 
   
    succéda. 
   
    Celui-ci 
   
    légua 
   
    sa 
   
    dignité 
   
    et 
   
    son 
   
    gouvernement 
   
    à 
   
    ses 
   
    fils 
   
    jusqu'à 
   
    la 
   
    fin.
  
 
   
    Avant 
   
    que 
   
    les 
   
    Roupéniens 
   
    ne 
   
    fussent 
   
    passés, 
   
    au-delà 
   
    des 
   
    monts 
   
    du 
   
    Taurus, 
   
    dans 
   
    les 
   
    plaines 
   
    de 
   
    la 
   
    Cilicie, 
   
    Tancrède 
   
    et 
   
    ses 
   
    compagnons 
   
    avaient 
   
    sous 
   
    leur 
   
    domination 
   
    les 
   
    villes 
   
    de 
   
    cette 
   
    province, 
   
    dont 
   
    Jean 
   
    Comnène 
   
    s'en 
   
    était 
   
    emparé 
   
    avant 
   
    d'entrer 
   
    dans 
   
    Antioche, 
   
    comme 
   
    le 
   
    fit 
   
    aussi 
   
    plus 
   
    tard 
   
    son 
   
    successeur 
   
    Manuel. 
   
    Le 
   
    prince 
   
    d'Antioche, 
   
    resta 
   
    quelque 
   
    temps 
   
    vassal 
   
    des 
   
    empereurs. 
   
    Quand 
   
    les 
   
    Grecs 
   
    se 
   
    retirèrent 
   
    et 
   
    que 
   
    nos 
   
    barons 
   
    s'emparèrent 
   
    des 
   
    villes 
   
    de 
   
    la 
   
    Cilicie, 
   
    ceux-ci 
   
    n'en 
   
    restèrent 
   
    pas 
   
    les 
   
    maîtres 
   
    absolus, 
   
    mais 
   
    ils 
   
    dépendirent 
   
    des 
   
    princes 
   
    d'Antioche, 
   
    non 
   
    comme 
   
    vassaux, 
   
    mais 
   
    comme 
   
    leur 
   
    devant 
   
    hommage. 
   
    C'est 
   
    à 
   
    cause 
   
    de 
   
    ce 
   
    droit 
   
    ou 
   
    cette 
   
    prétention 
   
    à 
   
    l'hommage 
   
    que 
   
    Bohémond 
   
    III, 
   
    fils 
   
    de 
   
    Raymond 
   
    et 
   
    de 
   
    Constance 
   
    et 
   
    successeur 
   
    de 
   
    son 
   
    père, 
   
    croyait 
   
    que 
   
    la 
   
    ville 
   
    de 
   
    Tarse 
   
    lui 
   
    était 
   
    toujours 
   
    redevable, 
   
    bien 
   
    qu'il 
   
    eût 
   
    vendu 
   
    volontairement 
   
    cette 
   
    ville 
   
    à 
   
    Roupin. 
   
    Ayant 
   
    surpris 
   
    ce 
   
    dernier 
   
    par 
   
    trahison, 
   
    il 
   
    ne 
   
    lui 
   
    rendit 
   
    la 
   
    liberté 
   
    qu'après 
   
    lui 
   
    avoir 
   
    extorqué 
   
    des 
   
    châteaux-forts 
   
    et 
   
    des 
   
    provinces 
   
    et 
   
    l'avoir 
   
    contraint 
   
    à 
   
    lui 
   
    rendre 
   
    le 
   
    même 
   
    hommage. 
   
    Lorsqu'il 
   
    succéda 
   
    à 
   
    Roupin, 
   
    Léon 
   
    se 
   
    trouva 
   
    sous 
   
    le 
   
    coup 
   
    de 
   
    ces 
   
    conditions, 
   
    et, 
   
    bien 
   
    qu'il 
   
    agît 
   
    en 
   
    toute 
   
    liberté 
   
    et 
   
    comme 
   
    maître 
   
    absolu 
   
    de 
   
    son 
   
    pays, 
   
    bien 
   
    qu'il 
   
    reculât 
   
    ses 
   
    frontières 
   
    jusqu'à 
   
    pénétrer 
   
    dans 
   
    le 
   
    territoire 
   
    du 
   
    prince 
   
    d'Antioche, 
   
    au-dessus 
   
    de 
   
    lui 
   
    comme 
   
    souverain, 
   
    cependant, 
   
    selon 
   
    les 
   
    lois 
   
    politiques 
   
    d'alors 
   
    et 
   
    aux 
   
    yeux 
   
    des 
   
    autres 
   
    Chrétiens 
   
    seigneurs 
   
    de 
   
    provinces 
   
    de 
   
    la 
   
    Syrie, 
   
    le 
   
    prince 
   
    d'Antioche 
   
    n'en 
   
    était 
   
    pas 
   
    moins 
   
    consideré 
   
    comme 
   
    le 
   
    suzerain 
   
    du 
   
    baron 
   
    d'Arménie. 
   
    Léon 
   
    paraît 
   
    lui 
   
    avoir 
   
    rendu 
   
    son 
   
    devoir 
   
    d'hommage 
   
    au 
   
    commencement 
   
    de 
   
    sa 
   
    principauté 
   
    jusqu'au 
   
    moment 
   
    où 
   
    il 
   
    étendit 
   
    son 
   
    autorité 
   
    sur 
   
    diverses 
   
    provinces 
   
    voisines 
   
    et 
   
    où 
   
    Salaheddin 
   
    entré 
   
    dans 
   
    le 
   
    territoire 
   
    d'Antioche, 
   
    affaiblit 
   
    la 
   
    puissance 
   
    du 
   
    prince 
   
    de 
   
    ce 
   
    pays. 
   
    Il 
   
    est 
   
    dit 
   
    même 
   
    que 
   
    Léon, 
   
    par 
   
    respect 
   
    ou 
   
    pour 
   
    gagner 
   
    les 
   
    bonnes 
   
    grâces 
   
    de 
   
    ce 
   
    dernier, 
   
    épousa 
   
    une 
   
    de 
   
    ses 
   
    parentes 
   
    qui 
   
    portait 
   
    le 
   
    nom 
   
    de 
   
    Sibille 
   
    comme 
   
    la 
   
    propre 
   
    épouse 
   
    du 
   
    prince.
  
 
   
    Pour 
   
    l'intelligence 
   
    de 
   
    ce 
   
    que 
   
    nous 
   
    allons 
   
    raconter, 
   
    nous 
   
    devons 
   
    faire 
   
    savoir 
   
    que 
   
    cette 
   
    dernière 
   
    (Sibille), 
   
    troisième 
   
    ou 
   
    quatrième 
   
    femme 
   
    de 
   
    Bohémond, 
   
    était 
   
    antiochienne 
   
    d'origine 
   
    et 
   
    devait 
   
    appartenir 
   
    à 
   
    une 
   
    grande 
   
    famille, 
   
    mais 
   
    l'histoire 
   
    ne 
   
    nous 
   
    dit 
   
    rien 
   
    à 
   
    ce 
   
    sujet. 
   
    Cette 
   
    princesse 
   
    était 
   
    donc 
   
    dejà 
   
    la 
   
    belle-sœur 
   
    de 
   
    notre 
   
    baron. 
   
    Elle 
   
    était 
   
    réputée 
   
    sorcière 
   
    et 
   
    c'est 
   
    elle 
   
    qui 
   
    présenta 
   
    l'autre 
   
    Sibille 
   
    à 
   
    Léon 
   
    qui 
   
    semble 
   
    n'avoir 
   
    épousé 
   
    celle-ci 
   
    que 
   
    pour 
   
    des 
   
    raisons 
   
    purement 
   
    politiques 
   
    et 
   
    non 
   
    de 
   
    bon 
   
    gré 
   
    ou 
   
    par 
   
    amour. 
   
    Il 
   
    ne 
   
    connaissait 
   
    même 
   
    pas 
   
    bien 
   
    cette 
   
    femme 
   
    qui 
   
    se 
   
    montra 
   
    bientôt 
   
    de 
   
    mauvaises 
   
    mœurs.
  
 
    
     Quant 
    
     à 
    
     Bohémond 
   
    III, 
    
     surnommé 
     
      le 
     
      Bègue 
    
     ou 
     
      le 
     
      Bambe, 
    
     c'est 
   
    lui 
   
    que 
   
    nous 
   
    avons 
   
    vu, 
   
    un 
   
    peu 
   
    avant 
   
    la 
   
    mort 
   
    de 
   
    Salaheddin, 
    
     aller 
    
     trouver 
    
     ce 
    
     dernier 
    
     pour 
    
     qu'il 
    
     lui 
    
     fit 
    
     restituer 
    
     ses 
    
     anciennes 
    
     frontières. 
    
     Il 
    
     avait 
    
     su 
    
     plaire 
    
     au 
    
     sultan, 
    
     et 
    
     il 
    
     est 
    
     fort 
   
    probable 
   
    qu'il 
   
    l'excita 
   
    contre 
   
    Léon. 
   
    Auparavant 
   
    déjà 
   
    il 
   
    avait 
   
    fait 
   
    de 
   
    même 
   
    vis-à-vis 
   
    de 
   
    Roupin, 
   
    et, 
   
    de 
   
    connivence 
   
    avec 
   
    Salaheddin, 
    
     avait 
    
     machiné 
    
     un 
    
     complot 
    
     contre 
    
     lui.
  
 
   
    Quand 
   
    Bohémond 
   
    connut 
   
    la 
   
    mort 
   
    du 
   
    Sultan 
   
    et 
   
    qu'il 
   
    vit 
   
    son 
   
    espérance 
   
    déçue, 
   
    il 
   
    revint 
   
    à 
   
    sa 
   
    première 
   
    idée 
   
    d'attenter 
   
    à 
   
    la 
   
    vie 
   
    de 
   
    Léon, 
   
    comme 
   
    encore 
   
    il 
   
    en 
   
    avait 
   
    eu 
   
    auparavant 
   
    la 
   
    pensée 
   
    pour 
   
    se 
   
    défaire 
   
    de 
   
    Roupin. 
   
    Il 
   
    manda 
   
    des 
   
    ambassadeurs 
   
    au 
   
    Baron 
   
    pour 
   
    l'inviter 
   
    à 
   
    se 
   
    rendre 
   
    sur 
   
    les 
   
    frontières, 
   
    afin 
   
    d'établir 
   
    définitivement 
   
    les 
   
    limites 
   
    de 
   
    leurs 
   
    Etats, 
   
    et 
   
    faire 
   
    cesser 
   
    tout 
   
    motif 
   
    de 
   
    querelles 
   
    et 
   
    de 
   
    disputes. 
   
    Il 
   
    ne 
   
    voulait 
   
    en 
   
    réalité 
   
    que 
   
    surprendre 
   
    Léon 
   
    et 
   
    se 
   
    saisir 
   
    de 
   
    sa 
   
    personne. 
   
    Cette 
   
    manière 
   
    d'appeler 
   
    celui-ci 
   
    à 
   
    la 
   
    hâte 
   
    suffisait 
   
    seule 
   
    pour 
   
    faire 
   
    suspecter 
   
    une 
   
    trahison. 
   
    La 
   
    princesse 
   
    sorcière, 
   
    le 
   
    lui 
   
    déclara 
   
    nettement, 
   
    mais 
   
    ne 
   
    pouvant 
   
    le 
   
    détourner 
   
    de 
   
    sa 
   
    perfide 
   
    résolution, 
   
    elle 
   
    trahit, 
   
    à 
   
    son 
   
    tour, 
   
    son 
   
    mari, 
   
    et 
   
    envoya 
   
    secrètement 
   
    des 
   
    émissaires 
   
    à 
   
    Léon.
  
 
   
    Si 
   
    le 
   
    prince 
   
    d'Antioche 
   
    n'était 
   
    pas 
   
    sain 
   
    d'esprit, 
   
    sa 
   
    femme 
   
    avait 
   
    des 
   
    mœurs 
   
    dissolues. 
   
    Elle 
   
    était 
   
    éprise 
   
    ardemment 
   
    de 
   
    Léon, 
   
    — 
   
    au 
   
    dire 
   
    de 
   
    quelques 
   
    historiens 
   
    étrangers. 
   
    Il 
   
    est 
   
    vrai 
   
    que 
   
    cette 
   
    époque 
   
    n'était 
   
    pas 
   
    réputée 
   
    comme 
   
    un 
   
    temps 
   
    de 
   
    chasteté. 
   
    Les 
   
    mœurs 
   
    des 
   
    Occidentaux 
   
    qui 
   
    avaient 
   
    d'abord 
   
    répugné 
   
    les 
   
    Orientaux, 
   
    avaient 
   
    fini 
   
    par 
   
    corrompre 
   
    les 
   
    mœurs 
   
    de 
   
    ces 
   
    derniers. 
   
    Quant 
   
    aux 
   
    manèges 
   
    et 
   
    aux 
   
    ruses 
   
    dont 
   
    usaient 
   
    les 
   
    princes 
   
    et 
   
    ceux 
   
    qui 
   
    aspiraient 
   
    à 
   
    quelque 
   
    pouvoir, 
   
    on 
   
    les 
   
    considérait 
   
    alors 
   
    comme 
   
    de 
   
    l'habilité 
   
    politique 
   
    souvent 
   
    louable 
   
    et 
   
    quelquefois 
   
    même 
   
    nécessaire. 
   
    Léon 
   
    ne 
   
    se 
   
    fit 
   
    donc 
   
    aucun 
   
    scrupule 
   
    de 
   
    tendre 
   
    un 
   
    piège 
   
    à 
   
    celui 
   
    qui 
   
    lui 
   
    en 
   
    tendait 
   
    un 
   
    et 
   
    de 
   
    se 
   
    servir 
   
    de 
   
    la 
   
    ruse 
   
    contre 
   
    la 
   
    ruse. 
   
    Il 
   
    se 
   
    rendit 
   
    à 
   
    l'invitation 
   
    de 
   
    Bohémond 
   
    et 
   
    comme 
   
    pour 
   
    lui 
   
    témoigner 
   
    plus 
   
    de 
   
    déférence 
   
    et 
   
    de 
   
    respect 
   
    encore, 
   
    il 
   
    le 
   
    pria, 
   
    lui 
   
    et 
   
    la 
   
    princesse, 
   
    de 
   
    venir 
   
    d'abord 
   
    dans 
   
    le 
   
    voisinage 
   
    de 
   
    Paghras, 
   
    ou 
   
    à 
   
    la 
   
    fontaine 
   
    de 
   
    Gaston, 
   
    où 
   
    il 
   
    voulait 
   
    leur 
   
    donner 
   
    un 
   
    grand 
   
    festin 
   
    et 
   
    s'en 
   
    aller 
   
    ensuite 
   
    ensemble 
   
    à 
   
    Antioche. 
   
    Sibille, 
   
    de 
   
    son 
   
    côté, 
   
    engagea 
   
    son 
   
    mari 
   
    à 
   
    accepter 
   
    cette 
   
    invitation. 
   
    Bohémond 
   
    s'y 
   
    rendit 
   
    donc 
   
    avec 
   
    la 
   
    princesse 
   
    et 
   
    les 
   
    grands 
   
    ministres, 
   
    le 
   
    connétable 
   
    Raoul 
   
    de 
   
    Mons, 
   
    le 
   
    maréchal 
   
    Barthélemy, 
   
    le 
   
    chancellier 
   
    Olivier 
   
    et 
   
    beaucoup 
   
    d'autres 
   
    notables 
   
    de 
   
    sa 
   
    cour. 
   
    Il 
   
    ne 
   
    laissa 
   
    à 
   
    la 
   
    ville 
   
    que 
   
    le 
   
    patriarche 
   
    et 
   
    son 
   
    fils 
   
    aîné 
   
    Raymond. 
   
    Léon 
   
    vint 
   
    au-devant 
   
    du 
   
    prince 
   
    avec 
   
    quelques 
   
    hommes, 
   
    mais 
   
    un 
   
    peu 
   
    plus 
   
    loin 
   
    il 
   
    posa 
   
    en 
   
    embuscade 
   
    deux 
   
    cents 
   
    cavaliers. 
   
    Quand 
   
    il 
   
    vit 
   
    la 
   
    nombreuse 
   
    escorte 
   
    du 
   
    prince 
   
    d'Antioche, 
   
    il 
   
    n'osa 
   
    pas 
   
    mettre 
   
    immédiatement 
   
    les 
   
    mains 
   
    sur 
   
    eux, 
   
    mais 
   
    protestant 
   
    que 
   
    l'endroit 
   
    où 
   
    ils 
   
    se 
   
    trouvaient 
   
    n'était 
   
    pas 
   
    convenable, 
   
    il 
   
    pria 
   
    le 
   
    prince 
   
    et 
   
    les 
   
    seigneurs 
   
    qui 
   
    l'accompagnèrent, 
   
    de 
   
    venir 
   
    avec 
   
    lui 
   
    au 
   
    château-fort 
   
    de 
   
    Gaston 
   
    où 
   
    il 
   
    avait 
   
    fait 
   
    préparer 
   
    le 
   
    festin. 
   
    Il 
   
    les 
   
    conduisit 
   
    à 
   
    ce 
   
    fort 
   
    et 
   
    les 
   
    y 
   
    fit 
   
    entrer. 
   
    Lorsqu'ils 
   
    eurent 
   
    fini 
   
    de 
   
    dîner 
   
    et 
   
    qu'il 
   
    se 
   
    trouvèrent 
   
    en 
   
    belle 
   
    humeur, 
   
    le 
   
    prince 
   
    d'Antioche 
   
    donna 
   
    l'ordre 
   
    à 
   
    ses 
   
    gens 
   
    d'apprêter 
   
    les 
   
    chevaux 
   
    pour 
   
    leur 
   
    retour 
   
    à 
   
    la 
   
    ville. 
   
    Ses 
   
    serviteurs 
   
    confus 
   
    vinrent 
   
    alors 
   
    lui 
   
    annoncer 
   
    que 
   
    les 
   
    chevaux 
   
    avaient 
   
    été 
   
    pris 
   
    et 
   
    les 
   
    guides 
   
    fait 
   
    prisonniers 
   
    par 
   
    les 
   
    hommes 
   
    du 
   
    baron 
   
    d'Arménie 
   
    qu'il 
   
    avait 
   
    fait 
   
    revenir 
   
    au 
   
    Château. 
   
    Le 
   
    prince, 
   
    tout 
   
    étonné, 
   
    s'écria: 
   
    Qu'est-ce 
   
    Léon? 
   
    voudrais 
   
    tu 
   
    me 
   
    prendre? 
   
    Léon 
   
    lui 
   
    dit: 
   
    Tu 
   
    es 
   
    pris 
   
    déjà. 
   
    — 
   
    Et 
   
    pour 
   
    quelle 
   
    raison 
   
    fais-tu 
   
    ceci? 
   
    — 
   
    Parce 
   
    que 
   
    tu 
   
    as 
   
    trahi 
   
    mon 
   
    frère 
   
    Roupin, 
   
    lorsque 
   
    tu 
   
    l'as 
   
    appelé 
   
    chez 
   
    toi 
   
    par 
   
    trahison, 
   
    que 
   
    tu 
   
    l'as 
   
    fait 
   
    jeter 
   
    en 
   
    prison 
   
    et 
   
    ne 
   
    lui 
   
    as 
   
    rendu 
   
    sa 
   
    liberté 
   
    qu'après 
   
    l'avoir 
   
    contraint 
   
    à 
   
    t'abandonner 
   
    la 
   
    grande 
   
    partie 
   
    de 
   
    son 
   
    pays 
   
    qui 
   
    s'étend 
   
    du 
   
    fleuve 
   
    Tchahan 
   
    jusqu'à 
   
    la 
   
    forteresse 
   
    de 
   
    Gaston, 
   
    et 
   
    après 
   
    avoir 
   
    exigé 
   
    de 
   
    lui 
   
    de 
   
    fortes 
   
    rançons. 
   
    Or 
   
    je 
   
    ne 
   
    te 
   
    remettrai 
   
    en 
   
    liberté, 
   
    moi, 
   
    que 
   
    lorsque 
   
    tu 
   
    m'auras 
   
    restitué 
   
    la 
   
    somme 
   
    de 
   
    sa 
   
    rançon 
   
    et 
   
    le 
   
    territoire 
   
    que 
   
    tu 
   
    lui 
   
    as 
   
    extorqué 
   
    et, 
   
    en 
   
    outre, 
   
    la 
   
    ville 
   
    d'Antioche 
   
    que 
   
    tu 
   
    nous 
   
    as 
   
    promis 
   
    de 
   
    donner.
  
 
   
    Quand 
   
    Bohémond 
   
    vit 
   
    qu'il 
   
    lui 
   
    était 
   
    de 
   
    toute 
   
    impossibilité 
   
    de 
   
    sortir 
   
    de 
   
    la 
   
    forteresse, 
   
    il 
   
    promit 
   
    la 
   
    ville 
   
    à 
   
    Léon, 
   
    à 
   
    condition 
   
    qu'il 
   
    les 
   
    laissât 
   
    y 
   
    aller 
   
    pour 
   
    s'entendre 
   
    avec 
   
    les 
   
    habitants 
   
    et 
   
    les 
   
    convaincre 
   
    de 
   
    se 
   
    rendre. 
   
    Léon, 
   
    lui 
   
    répondit 
   
    qu'il 
   
    lui 
   
    était 
   
    impossible 
   
    de 
   
    sortir 
   
    de 
   
    la 
   
    forteresse, 
   
    mais 
   
    que, 
   
    s'il 
   
    voulait, 
   
    il 
   
    pouvait 
   
    envoyer 
   
    quelques 
   
    personnages 
   
    de 
   
    son 
   
    escorte, 
   
    en 
   
    compagnie 
   
    d'envoyés 
   
    arméniens 
   
    auxquels 
   
    les 
   
    premiers 
   
    feraient 
   
    remise 
   
    de 
   
    la 
   
    ville, 
   
    et 
   
    qu'après 
   
    cela 
   
    il 
   
    pourrait, 
   
    lui 
   
    Bohémond, 
   
    aller 
   
    où 
   
    il 
   
    lui 
   
    plairait. 
   
    Alors 
   
    celui-ci 
   
    ordonna 
   
    à 
   
    son 
   
    maréchal 
   
    et 
   
    à 
   
    quelques 
   
    autres 
   
    grands 
   
    personnages 
   
    d'aller 
   
    s'en 
   
    entendre 
   
    avec 
   
    les 
   
    habitants. 
   
    Léon 
   
    envoya 
   
    avec 
   
    eux 
   
    son 
   
    gendre 
   
    Héthoum 
   
    de 
   
    Sassoun 
   
    accompagné 
   
    de 
   
    seigneurs 
   
    arméniens.
  
 
   
    Lorsqu'ils 
   
    furent 
   
    près 
   
    d'Antioche, 
   
    Héthoum 
   
    ordonna 
   
    aux 
   
    envoyés 
   
    du 
   
    prince 
   
    de 
   
    le 
   
    précéder 
   
    et 
   
    d'aller 
   
    dire 
   
    aux 
   
    habitants 
   
    de 
   
    la 
   
    ville 
   
    de 
   
    lui 
   
    apporter 
   
    les 
   
    clefs 
   
    de 
   
    la 
   
    cité, 
   
    celles 
   
    du 
   
    château 
   
    et 
   
    celles 
   
    des 
   
    autres 
   
    forteresses 
   
    des 
   
    alentours, 
   
    et 
   
    leur 
   
    dire 
   
    qu'après 
   
    il 
   
    entrerait 
   
    en 
   
    personne 
   
    dans 
   
    Antioche. 
   
    Il 
   
    s'arrêta 
   
    à 
   
    l'endroit 
   
    appelé 
   
    S.
    
     t 
   
    Julien 
   
    et 
   
    commit 
   
    un 
   
    de 
   
    ses 
   
    hommes 
   
    pour 
   
    aller 
   
    voir 
   
    ce 
   
    qui 
   
    se 
   
    passerait 
   
    et 
   
    lui 
   
    rapporter 
   
    ce 
   
    qu'on 
   
    lui 
   
    donnerait. 
   
    Cet 
   
    homme 
   
    partit 
   
    donc: 
   
    il 
   
    était 
   
    près 
   
    des 
   
    portes 
   
    de 
   
    la 
   
    ville 
   
    lorsqu'il 
   
    aperçut 
   
    une 
   
    chapelle 
   
    que 
   
    le 
   
    père 
   
    de 
   
    Bohémond 
   
    avait 
   
    fait 
   
    ériger 
   
    en 
   
    l'honneur 
   
    de 
   
    S.
    
     t 
   
    Hilaire, 
   
    protecteur 
   
    de 
   
    son 
   
    pays 
   
    de 
   
    Poitiers. 
   
    Il 
   
    demanda 
   
    ce 
   
    que 
   
    c'était; 
   
    lorsqu'on 
   
    le 
   
    lui 
   
    eût 
   
    appris, 
   
    il 
   
    s'écria 
   
    avec 
   
    grossiéreté 
   
    et 
   
    peut-être 
   
    par 
   
    raillerie: 
   
    Nous 
   
    ne 
   
    connaissons 
   
    pas 
   
    cet 
   
    Hilaire, 
   
    nous 
   
    dédierons 
   
    cette 
   
    chapelle 
   
    à 
   
    S.
    
     t 
   
    Sarkis. 
   
    Les 
   
    gens 
   
    présents 
   
    furent 
   
    scandalisés 
   
    de 
   
    ces 
   
    paroles 
   
    de 
   
    mépris, 
   
    et 
   
    comme 
   
    ils 
   
    avaient 
   
    entendu 
   
    parler 
   
    de 
   
    l'emprisonnement 
   
    de 
   
    leur 
   
    prince, 
   
    ils 
   
    furent 
   
    exaspérés. 
   
    Un 
   
    muletier 
   
    qui 
   
    se 
   
    trouvait 
   
    là, 
   
    se 
   
    mit 
   
    à 
   
    les 
   
    blâmer 
   
    vertement 
   
    de 
   
    ce 
   
    qu'ils 
   
    supportaient 
   
    de 
   
    pareilles 
   
    paroles, 
   
    il 
   
    leur 
   
    reprocha 
   
    d'avoir 
   
    lâchement 
   
    laissé 
   
    surprendre 
   
    Bohémond 
   
    et 
   
    d'aller 
   
    maintenant 
   
    remettre 
   
    leur 
   
    ville 
   
    dans 
   
    les 
   
    mains 
   
    d'hommes 
   
    plus 
   
    lâches. 
   
    Ensuite 
   
    il 
   
    ramassa 
   
    une 
   
    pierre, 
   
    la 
   
    lança 
   
    à 
   
    la 
   
    tête 
   
    de 
   
    l'homme 
   
    envoyé 
   
    par 
   
    Héthoum 
   
    et 
   
    l'etendit 
   
    raide-mort. 
   
    Les 
   
    Arméniens, 
   
    compagnons 
   
    de 
   
    celui-ci, 
   
    qui 
   
    se 
   
    trouvaient 
   
    près 
   
    de 
   
    la 
   
    porte 
   
    du 
   
    pont 
   
    conduisant 
   
    à 
   
    Antioche, 
   
    poussèrent 
   
    des 
   
    cris 
   
    d'alarmes; 
   
    aussitôt 
   
    les 
   
    gardiens 
   
    de 
   
    la 
   
    porte 
   
    et 
   
    beaucoup 
   
    d'autres 
   
    personnes 
   
    sortirent 
   
    et 
   
    se 
   
    saisirent 
   
    des 
   
    Arméniens. 
   
    On 
   
    fit 
   
    crier 
   
    dans 
   
    toute 
   
    la 
   
    ville 
   
    aux 
   
    habitants 
   
    de 
   
    se 
   
    convoquer 
   
    dans 
   
    l'Église 
   
    de 
   
    S.
    
     t 
   
    Pierre 
   
    avec 
   
    le 
   
    patriarche. 
   
    C'est 
   
    là 
   
    qu'on 
   
    prit 
   
    le 
   
    parti 
   
    de 
   
    mettre 
   
    sur 
   
    le 
   
    trône, 
   
    Raymond 
   
    fils 
   
    ainé 
   
    du 
   
    prince, 
   
    jusqu'à 
   
    ce 
   
    que 
   
    son 
   
    père 
   
    fût 
   
    remis 
   
    en 
   
    liberté.
  
 
   
    Héthoum 
   
    qui 
   
    avait 
   
    entendu 
   
    les 
   
    cris 
   
    de 
   
    la 
   
    foule 
   
    et 
   
    qui 
   
    s'était 
   
    informé 
   
    du 
   
    parti 
   
    pris 
   
    par 
   
    les 
   
    Antiochiens, 
   
    eut 
   
    peur 
   
    qu'ils 
   
    ne 
   
    se 
   
    jetassent 
   
    sur 
   
    lui 
   
    et 
   
    ne 
   
    le 
   
    fissent 
   
    prisonnier, 
   
    il 
   
    s'enfuit 
   
    donc 
   
    aussitôt 
   
    avec 
   
    tous 
   
    ses 
   
    compagnons 
   
    et 
   
    revint 
   
    à 
   
    Gaston 
   
    auprès 
   
    de 
   
    Léon, 
   
    à 
   
    qui 
   
    il 
   
    apprit 
   
    ce 
   
    qui 
   
    venait 
   
    de 
   
    se 
   
    passer. 
   
    Ce 
   
    dernier, 
   
    voyant 
   
    qu'il 
   
    avait 
   
    perdu 
   
    la 
   
    belle 
   
    occasion 
   
    qui 
   
    s'était 
   
    présentée 
   
    pour 
   
    prendre 
   
    Antioche 
   
    dont 
   
    il 
   
    tenait 
   
    captifs 
   
    le 
   
    prince 
   
    et 
   
    ses 
   
    grands 
   
    dignitaires, 
   
    fit 
   
    sortir 
   
    ceux-ci 
   
    du 
   
    château 
   
    où 
   
    ils 
   
    se 
   
    trouvaient, 
   
    les 
   
    emmena 
   
    avec 
   
    lui 
   
    dans 
   
    son 
   
    pays 
   
    et 
   
    les 
   
    fit 
   
    enfermer 
   
    dans 
   
    le 
   
    fort 
   
    de 
   
    Sis, 
   
    où 
   
    il 
   
    les 
   
    garda 
   
    pendant 
   
    un 
   
    an, 
   
    mais 
   
    les 
   
    traita 
   
    dignement. 
   
    Il 
   
    comptait 
   
    par 
   
    là 
   
    humilier 
   
    les 
   
    Antiochiens 
   
    ou 
   
    en 
   
    recevoir 
   
    des 
   
    rançons 
   
    plus 
   
    considérables.
  
 
   
    Les 
   
    Antiochiens, 
   
    après 
   
    avoir 
   
    tenu 
   
    plusieurs 
   
    conseils 
   
    sans 
   
    avoir 
   
    trouvé 
   
    un 
   
    moyen 
   
    pour 
   
    délivrer 
   
    leurs 
   
    captifs, 
   
    se 
   
    mirent 
   
    d'accord 
   
    avec 
   
    le 
   
    patriarche 
   
    et 
   
    le 
   
    fils 
   
    du 
   
    prince, 
   
    et 
   
    allèrent 
   
    implorer 
   
    le 
   
    Comte 
   
    Henri 
   
    de 
   
    Champagne, 
   
    alors 
   
    nommé 
   
    roi 
   
    de 
   
    Jérusalem, 
   
    d'intercéder 
   
    auprès 
   
    de 
   
    Léon 
   
    pour 
   
    la 
   
    délivrance 
   
    du 
   
    prince. 
   
    Le 
   
    Comte 
   
    Henri, 
   
    ami 
   
    des 
   
    deux 
   
    partis, 
   
    accepta 
   
    de 
   
    se 
   
    faire 
   
    leur 
   
    intermédiaire. 
   
    II 
   
    partit 
   
    de 
   
    Ptolémais 
   
    et 
   
    vint 
   
    à 
   
    Tripolis. 
   
    Il 
   
    s'était 
   
    fait 
   
    accompagner 
   
    par 
   
    le 
   
    comte 
   
    Bohémond 
   
    IV, 
   
    fils 
   
    cadet 
   
    du 
   
    prince 
   
    d'Antioche.
  
 
   
    Henri 
   
    tenta 
   
    d'abord 
   
    de 
   
    vider 
   
    la 
   
    question 
   
    par 
   
    la 
   
    force, 
   
    mais 
   
    à 
   
    la 
   
    fin 
   
    il 
   
    envoya 
   
    à 
   
    Léon 
   
    un 
   
    messager 
   
    de 
   
    paix, 
   
    qui 
   
    fut 
   
    accueilli. 
   
    Ensuite 
   
    il 
   
    emmena 
   
    avec 
   
    lui 
   
    des 
   
    personnages 
   
    à 
   
    sa 
   
    convenance 
   
    et 
   
    vint 
   
    avec 
   
    eux 
   
    à 
   
    Sis. 
   
    C'était 
   
    en 
   
    1194. 
   
    Léon 
   
    vint 
   
    avec 
   
    un 
   
    grand 
   
    cortège 
   
    à 
   
    sa 
   
    rencontre, 
   
    écouta 
   
    ses 
   
    instances, 
   
    fit 
   
    venir 
   
    le 
   
    prince 
   
    d'Antioche 
   
    et 
   
    tous 
   
    ensemble 
   
    conclurent 
   
    le 
   
    traité 
   
    que:
  
 
   
    1. 
   
    Le 
   
    Prince 
   
    sera 
   
    mis 
   
    en 
   
    liberté, 
   
    — 
   
    sans 
   
    rançon, 
   
    paraît-il, 
   
    mais 
   
    il 
   
    n'aura 
   
    plus 
   
    le 
   
    droit 
   
    d'exiger 
     
      l'hommage 
   
    de 
   
    la 
   
    part 
   
    de 
   
    Léon; 
   
    au 
   
    contraire,
  
 
   
    2. 
   
    Le 
   
    Prince 
   
    d'Antioche 
   
    devra 
   
    dorénavant 
   
    rendre 
     
      l'hommage 
     
      à 
   
    Léon, 
   
    comme 
   
    à 
   
    son 
   
    suzerain.
  
 
   
    3. 
   
    Bohémond 
   
    rendra 
   
    tout 
   
    le 
   
    territoire 
   
    qu'il 
   
    a 
   
    enlevé 
   
    à 
   
    Roupin 
   
    jusqu'au 
   
    château-fort 
   
    de 
   
    la 
   
    «Portelle».
  
 
   
    4. 
   
    Héthoum 
   
    de 
   
    Sassoun 
   
    étant 
   
    décédé 
   
    pendant 
   
    la 
   
    captivité 
   
    de 
   
    Bohémond, 
   
    sa 
   
    veuve, 
   
    Alice, 
   
    devra 
   
    être 
   
    épousée 
   
    par 
   
    le 
   
    fils 
   
    aîné 
   
    du 
   
    prince 
   
    d'Antioche, 
   
    Raymond, 
   
    comme 
   
    garantie 
   
    de 
   
    l'exécution 
   
    des 
   
    traités, 
   
    et 
   
    les 
   
    fils 
   
    qui 
   
    naîtront 
   
    de 
   
    ce 
   
    mariage 
   
    hériteront 
   
    de 
   
    la 
   
    principauté 
   
    d'Antioche.
  
 
   
    Ce 
   
    traité 
   
    fut 
   
    écrit, 
   
    scellé, 
   
    signé 
   
    et 
   
    confirmé 
   
    par 
   
    serment, 
   
    après 
   
    quoi, 
   
    le 
   
    prince 
   
    d'Antioche, 
   
    la 
   
    princesse 
   
    son 
   
    épouse, 
   
    et 
   
    tous 
   
    les 
   
    nobles 
   
    personnages 
   
    de 
   
    leur 
   
    suite 
   
    et 
   
    leurs 
   
    serviteurs 
   
    furent 
   
    mis 
   
    en 
   
    liberté.
  
 
   
    Alice 
   
    n'avait 
   
    que 
   
    quatorze 
   
    ans, 
   
    quand 
   
    elle 
   
    eut 
   
    achevé 
   
    son 
   
    deuil. 
   
    Raymond 
   
    fut 
   
    invité 
   
    à 
   
    venir 
   
    l'épouser. 
   
    Leur 
   
    union 
   
    fut 
   
    célébrée 
   
    pompeusement 
   
    la 
   
    même 
   
    année, 
   
    en 
   
    1194, 
   
    semble-t-il, 
   
    Raymond 
   
    dût 
   
    rester 
   
    comme 
   
    otage 
   
    auprès 
   
    de 
   
    Léon. 
   
    D'après 
   
    notre 
   
    historien, 
   
    il 
   
    allait 
   
    et 
   
    venait 
   
    librement 
   
    avec 
   
    Léon, 
   
    mais 
   
    peu 
   
    de 
   
    temps 
   
    après 
   
    il 
   
    fut 
   
    pris 
   
    par 
   
    une 
   
    grave 
   
    maladie 
   
    et 
   
    mourut 
   
    très-jeune, 
   
    en 
   
    1196 
   
    ou 
   
    1197, 
   
    laissant 
   
    sa 
   
    femme 
   
    enceinte 
   
    qui 
   
    mit 
   
    au 
   
    monde 
   
    un 
   
    fils 
   
    beau 
   
    et 
   
    vigoureux, 
   
    selon 
   
    l'historien.
  
 
   
    Un 
   
    an 
   
    ou 
   
    deux 
   
    ans 
   
    plus 
   
    tard, 
   
    lorsque 
   
    ce 
   
    prince 
   
    nouveau-né 
   
    fut 
   
    baptizé 
   
    par 
   
    le 
   
    grand 
   
    archevêque 
   
    latin 
   
    qui 
   
    apporta 
   
    la 
   
    couronne 
   
    royale 
   
    et 
   
    la 
   
    mit 
   
    au 
   
    front 
   
    de 
   
    Léon, 
   
    il 
   
    reçut 
   
    les 
   
    noms 
   
    de 
   
    son 
   
    père 
   
    et 
   
    de 
   
    son 
   
    aïeul 
   
    maternel 
   
    et 
   
    fut 
   
    appelé 
   
    Roupin-Raymond. 
   
    Léon 
   
    qui 
   
    n'avait 
   
    pas 
   
    d'enfant 
   
    mâle, 
   
    résolut 
   
    d'en 
   
    faire 
   
    son 
   
    héritier 
   
    et 
   
    son 
   
    successeur 
   
    et 
   
    de 
   
    réunir 
   
    ainsi 
   
    en 
   
    un 
   
    seul 
   
    et 
   
    grand 
   
    royaume, 
   
    l'Arménie 
   
    et 
   
    la 
   
    principauté 
   
    d'Antioche. 
   
    Aussi, 
   
    pendant 
   
    bien 
   
    des 
   
    années, 
   
    il 
   
    garda 
   
    auprès 
   
    de 
   
    lui 
   
    cet 
   
    enfant, 
   
    son 
   
    petit 
   
    neveu, 
   
    et 
   
    l'éleva 
   
    avec 
   
    le 
   
    plus 
   
    grand 
   
    soin.
  
 
   
    Pourtant, 
   
    cet 
   
    enfant 
   
    qui 
   
    semblait 
   
    alors 
   
    le 
   
    trait 
   
    d'union 
   
    entre 
   
    les 
   
    deux 
   
    Etats, 
   
    devait, 
   
    peu 
   
    de 
   
    temps 
   
    après, 
   
    engendrer 
   
    leur 
   
    inimitié: 
   
    il 
   
    devait 
   
    allumer 
   
    des 
   
    troubles 
   
    désastreux 
   
    et 
   
    causer 
   
    bon 
   
    gré 
   
    mal 
   
    gré, 
   
    à 
   
    Léon 
   
    des 
   
    embarras 
   
    cruels.
  
 
   
    Après 
   
    la 
   
    mort 
   
    prématurée 
   
    de 
   
    Raymond 
   
    son 
   
    frère 
   
    cadet 
   
    surnommé 
   
    le 
   
    Borgne, 
   
    qui 
   
    s'était 
   
    déjà 
   
    approprié 
   
    arbitrairement 
   
    la 
   
    Comté 
   
    de 
   
    Tripoli, 
   
    sans 
   
    tenir 
   
    compte 
   
    des 
   
    traités 
   
    conclus, 
   
    sans 
   
    égards 
   
    pour 
   
    les 
   
    serments 
   
    prononcés 
   
    au 
   
    sujet 
   
    de 
   
    la 
   
    succession 
   
    au 
   
    trône 
   
    d'Antioche 
   
    réservée 
   
    au 
   
    fils 
   
    de 
   
    son 
   
    frère 
   
    aîné, 
   
    sans 
   
    respect 
   
    pour 
   
    le 
   
    grande 
   
    âge 
   
    de 
   
    son 
   
    père 
   
    qui 
   
    vivait 
   
    encore, 
   
    osa 
   
    s'emparer 
   
    du 
   
    trône 
   
    sur 
   
    lequel 
   
    Roupin-Raymond 
   
    devait 
   
    seul 
   
    monter, 
   
    et 
   
    où 
   
    se 
   
    tenait 
   
    encore 
   
    son 
   
    vieux 
   
    père, 
   
    qu'il 
   
    força 
   
    par 
   
    ce 
   
    fait 
   
    à 
   
    aller 
   
    demander 
   
    aide 
   
    et 
   
    secours 
   
    à 
   
    Léon 
   
    son 
   
    adversaire 
   
    d'autrefois. 
   
    Léon 
   
    plutôt 
   
    dans 
   
    l'intérêt 
   
    de 
   
    son 
   
    neveu 
   
    que 
   
    dans 
   
    celui 
   
    du 
   
    vieillard, 
   
    s'empressa 
   
    de 
   
    venir 
   
    défendre 
   
    ce 
   
    dernier. 
   
    Il 
   
    chassa 
   
    le 
   
    fils 
   
    dénaturé 
   
    et 
   
    rendit 
   
    le 
   
    trône 
   
    au 
   
    vieillard 
   
    qui 
   
    mourut 
   
    quelques 
   
    années 
   
    après, 
   
    en 
   
    1201.
  
 
   
    C'est 
   
    alors 
   
    que 
   
    s'ouvrirent 
   
    ces 
   
    querelles 
   
    et 
   
    ces 
   
    contestations 
   
    interminables 
   
    entre 
   
    Léon 
   
    et 
   
    Bohémond 
   
    IV, 
   
    comme 
   
    on 
   
    le 
   
    verra 
   
    dans 
   
    la 
   
    suite. 
   
    Mais 
   
    pour 
   
    le 
   
    moment 
   
    nous 
   
    ne 
   
    voulons 
   
    nous 
   
    occuper 
   
    que 
   
    des 
   
    affaires 
   
    intérieures 
   
    de 
   
    Léon 
   
    et 
   
    dire 
   
    avec 
   
    quelle 
   
    adresse 
   
    et 
   
    quel 
   
    succès 
   
    il 
   
    arriva 
   
    à 
   
    l'accomplissement 
   
    du 
   
    rêve 
   
    qu'il 
   
    faisait 
   
    depuis 
   
    tant 
   
    d'années; 
   
    comment 
   
    il 
   
    fut 
   
    crée 
   
    Roi.