Léon 
   
    qui 
   
    fut 
   
    si 
   
    longtemps 
   
    le 
   
    défenseur 
   
    passionné 
   
    des 
   
    droits 
   
    de 
   
    son 
   
    neveu 
   
    et 
   
    qui 
   
    résista 
   
    tant 
   
    d'années 
   
    à 
   
    tant 
   
    de 
   
    hauts 
   
    et 
   
    puissants 
   
    personnages, 
   
    devait 
   
    être 
   
    bien 
   
    plus 
   
    ardent, 
   
    ce 
   
    semble, 
   
    à 
   
    défendre 
   
    et 
   
    à 
   
    protéger 
   
    son 
   
    pays 
   
    qu'il 
   
    avait 
   
    acquis 
   
    au 
   
    prix 
   
    de 
   
    tant 
   
    d'adresses 
   
    et 
   
    à 
   
    d'efforts. 
   
    Il 
   
    n'épargna 
   
    rien 
   
    pour 
   
    le 
   
    rendre 
   
    prospère 
   
    et 
   
    fort. 
   
    Mais 
   
    pour 
   
    y 
   
    réussir, 
   
    ce 
   
    n'était 
   
    plus 
   
    avec 
   
    des 
   
    étrangers 
   
    qu'il 
   
    avait 
   
    à 
   
    faire, 
   
    c'était 
   
    avec 
   
    ses 
   
    compatriotes 
   
    dont 
   
    la 
   
    jalousie 
   
    et 
   
    la 
   
    défiance 
   
    excessives 
   
    et 
   
    rarement 
   
    fondées 
   
    lui 
   
    suscitaient 
   
    de 
   
    graves 
   
    embarras.
 
    
     La 
    
     première 
    
     maison 
    
     seigneuriale 
    
     à 
    
     laquelle 
    
     il 
    
     porta 
    
     ombrage 
    
     fut 
    
     la 
    
     famille 
    
     des 
    
     Lambrouniens, 
    
     la 
    
     noble 
    
     famille 
    
     des 
    
     Héthoumiens, 
    
     plus 
    
     ancienne 
    
     dans 
    
     le 
    
     pays 
    
     de 
    
     Sissouan 
    
     que 
    
     la 
    
     famille 
    
     même 
    
     de 
    
     Léon. 
    
     La 
    
     superbe 
    
     forteresse 
    
     de 
    
     Lambroun, 
    
     située 
    
     au 
    
     milieu 
    
     et 
    
     sur 
    
     la 
    
     crête 
    
     des 
    
     monts 
    
     du 
    
     Taurus, 
    
     avait 
    
     toujours 
    
     résisté 
    
     aux 
    
     fils 
    
     de 
    
     Roupin 
    
     et 
    
     menaçait 
    
     de 
    
     devenir 
    
     la 
    
     rivale 
    
     de 
    
     la 
    
     ville 
    
     de 
    
     Sis 
    
     nouvellement 
    
     fondée. 
    
     On 
    
     a 
    
     vu 
    
     tout 
    
     ce 
    
     que 
    
     firent 
    
     les 
    
     oncles, 
    
     le 
    
     frère 
    
     et 
    
     Léon 
    
     lui-même, 
    
     avant 
    
     sa 
    
     principauté, 
    
     contre 
    
     Lambroun 
    
     et 
    
     les 
    
     Lambrouniens, 
    
     et 
    
     l'on 
    
     sait 
    
     qu'ils 
    
     ne 
    
     réussirent 
    
     jamais 
    
     à 
    
     se 
    
     rendre 
    
     maîtres 
    
     de 
    
     cet 
    
     orgueilleux 
    
     Château-fort, 
    
     bien 
    
     qu'ils 
    
     vinssent 
    
     l'assiéger 
    
     bien 
    
     des 
    
     fois. 
    
     Bon 
    
     gré 
    
     mal 
    
     gré 
    
     il 
    
     leur 
    
     fallut 
    
     en 
    
     venir 
   
    à 
    
     passer 
    
     des 
    
     traités 
    
     d'alliance. 
    
     Léon, 
    
     quand 
    
     il 
    
     n'était 
    
     encore 
    
     que 
    
     Baron, 
    
     fut 
    
     forcé 
    
     de 
    
     faire 
    
     de 
    
     même. 
    
     Lors 
    
     de 
    
     la 
    
     cérémonie 
    
     de 
    
     la 
    
     consécration 
    
     des 
    
     Eaux 
    
     de 
    
     l'Epiphanie, 
    
     parmi 
    
     les 
    
     barons 
    
     qui 
    
     y 
    
     assistaient 
    
     se 
    
     trouvaient 
    
     les 
    
     deux 
    
     frères 
    
     de 
    
     S. 
    
     Nersès, 
    
     les 
    
     seigneurs 
    
     de 
    
     Lambroun 
    
     et 
    
     de 
    
     Loulou. 
    
     Le 
    
     premier, 
    
     Héthoum, 
    
     l'aîné 
    
     de 
    
     la 
    
     famille 
    
     et 
    
     le 
    
     prince 
    
     du 
    
     domaine 
    
     de 
    
     Lambroun 
    
     était 
    
     parent 
    
     de 
    
     Léon; 
    
     il 
    
     était 
    
     neveu, 
    
     par 
    
     sa 
    
     mère, 
    
     de 
    
     l'oncle 
    
     de 
    
     Léon. 
    
     Les 
    
     Grecs 
    
     l'avaient 
    
     honoré 
    
     du 
    
     titre 
    
     de 
    
     Sébaste. 
    
     Mais 
    
     sa 
    
     véritable 
    
     grandeur 
    
     venait 
    
     de 
    
     sa 
    
     remarquable 
    
     prudence 
    
     et 
    
     de 
    
     la 
    
     magnificence 
    
     qu'il 
    
     développait. 
    
     A 
    
     tout 
    
     cela 
    
     s'ajoutait 
    
     le 
    
     prestige 
    
     d'être 
    
     le 
    
     frère 
    
     du 
    
     si 
    
     célèbre 
    
     et 
    
     saint 
    
     archevêque 
    
     de 
    
     Tarse. 
    
     Cela 
    
     lui 
    
     valut 
    
     encore 
    
     d'être 
    
     assuré 
    
     de 
    
     vivre 
    
     en 
    
     paix 
    
     même 
    
     après 
    
     l'élévation 
    
     au 
    
     trône 
    
     royal 
    
     de 
    
     Léon. 
    
     Après 
    
     la 
    
     mort 
    
     de 
    
     S. 
    
     Nersès, 
    
     la 
    
     politique 
    
     et 
    
     les 
    
     relations 
    
     de 
    
     Léon 
    
     et 
    
     de 
    
     Héthoum 
    
     changèrent 
    
     complétement, 
    
     nous 
    
     ne 
    
     savons 
    
     pas 
    
     pour 
    
     quel 
    
     motif. 
    
     Fut-ce 
    
     parce 
    
     que 
    
     Héthoum 
    
     donna 
    
     lieu 
    
     à 
    
     Léon 
    
     de 
    
     se 
    
     méfier 
    
     de 
    
     lui, 
    
     ou 
    
     que 
    
     celui-ci 
    
     sentit 
    
     se 
    
     raviver 
    
     les 
    
     vieilles 
    
     rancunes 
    
     qu'il 
    
     avait 
    
     contre 
   
    l'
    
     autre, 
    
     ou, 
    
     enfin, 
    
     parce 
    
     que 
    
     Héthoum 
    
     était 
    
     le 
    
     voisin 
    
     du 
    
     Sultan 
    
     d'Iconie 
    
     avec 
    
     lequel 
    
     Ochine, 
    
     son 
    
     père, 
    
     s'était 
    
     allié 
    
     jadis 
    
     contre 
    
     les 
    
     Roupéniens
   
    ? 
    
     C'est 
    
     cette 
    
     dernière 
    
     raison 
    
     que 
    
     font 
    
     prévaloir 
    
     notre 
    
     Historien-royal 
    
     et 
    
     Guiragos. 
   
    «
    
     Cest 
    
     pour 
    
     cela, 
    
     dit 
    
     le 
    
     premier, 
    
     que 
    
     Léon 
    
     résolut 
    
     sagement 
    
     de 
    
     lui 
    
     couper 
    
     les 
    
     ailes 
    
     et 
    
     d'abattre 
    
     sa 
    
     haute 
    
     fierté
   
    ». 
    
     Nous 
    
     ignorons 
    
     en 
    
     quoi 
    
     consistait 
    
     cette 
    
     haute 
    
     fierté 
    
     de 
    
     Héthoum. 
    
     C'est 
    
     peut-être 
    
     sa 
    
     rebellion 
    
     contre 
    
     Léon 
    
     qui 
    
     donna 
    
     lieu 
    
     à 
    
     cette 
    
     expression, 
    
     comme 
    
     nous 
    
     le 
    
     donne 
    
     à 
    
     croire 
    
     Guiragos, 
    
     lorsqu'il 
    
     dit: 
   
    «
    
     (Léon), 
    
     après 
   
    l'
    
     avoir 
    
     essayé 
    
     à 
    
     plusieurs 
    
     reprises, 
    
     ne 
    
     put 
    
     pas 
    
     vaincre 
    
     le 
    
     révolté
   
    », 
    
     ni 
    
     même 
    
     prendre 
    
     le 
    
     fort 
    
     où 
    
     il 
    
     l'avait 
    
     traqué, 
    
     ni 
    
     soutenir 
    
     un 
    
     long 
    
     siège 
    
     par 
    
     ce 
    
     que 
    
     les 
    
     affaires 
    
     de 
    
     son 
    
     royaume 
    
     ne 
    
     le 
    
     lui 
    
     permirent 
    
     pas. 
    
     Alors, 
    
     «il 
    
     essaya 
    
     de 
    
     le 
    
     tromper 
    
     par 
    
     des 
    
     promesses 
    
     d'alliances 
    
     de 
    
     parentés
   
    » 
    
     et 
    
     parla 
    
     à 
    
     Héthoum 
    
     en 
    
     termes 
    
     bienveillants 
    
     et 
    
     flatteurs: 
   
    «
    
     Je 
    
     pense, 
    
     lui, 
    
     dit-il, 
    
     conclure 
    
     avec 
    
     toi 
    
     une 
    
     alliance 
    
     d'amitié 
    
     et 
    
     donner 
    
     la 
    
     fille 
    
     de 
    
     mon 
    
     frère 
    
     Roupin, 
    
     Philippine, 
    
     en 
    
     mariage 
    
     à 
    
     ton 
    
     fils 
    
     aîné 
    
     Ochine. 
    
     Héthoum 
    
     accueillit 
    
     ces 
    
     paroles 
    
     en 
    
     le 
    
     remerciant 
    
     et 
    
     tressaillit 
    
     de 
    
     joie. 
    
     Ensuite 
    
     ils 
    
     préparèrent 
    
     les 
    
     fêtes 
    
     de 
    
     la 
    
     célébration 
    
     du 
    
     mariage 
    
     à 
    
     Tarse. 
    
     Héthoum 
    
     s'y 
    
     rendit 
    
     avec 
    
     toute 
    
     sa 
    
     famille 
    
     et 
    
     ses 
    
     enfants 
    
     et 
    
     tous 
    
     ses 
    
     bagages. 
    
     Alors 
    
     Léon 
    
     le 
    
     fit 
    
     saisir 
    
     et 
    
     envoya 
    
     des 
    
     troupes 
    
     qui 
    
     s'emparèrent 
    
     de 
    
     Lambroun 
    
     sans 
    
     livrer 
    
     de 
    
     combat
   
    », 
    
     et 
    
     sans 
    
     y 
    
     causer 
    
     de 
    
     troubles, 
    
     puisqu'il 
    
     y 
    
     avait 
    
     là 
    
     quelques-uns 
    
     des 
    
     fils 
    
     de 
    
     Héthoum 
    
     qui, 
    
     quoique 
    
     tout 
    
     jeunes 
    
     encore, 
    
     lorsqu'ils 
    
     apprirent 
    
     que 
    
     leur 
    
     père 
    
     et 
    
     leurs 
    
     frères 
    
     étaient 
    
     prisonniers 
    
     de 
    
     Léon, 
    
     se 
    
     hâtèrent 
    
     de 
    
     livrer 
    
     le 
    
     fort 
    
     en 
    
     échange 
    
     de 
    
     leur 
    
     délivrance. 
    
     Léon, 
    
     à 
    
     la 
    
     nouvelle 
    
     de 
    
     la 
    
     prise 
    
     de 
    
     Lambroun, 
    
     appropria 
    
     cette 
    
     forteresse 
    
     à 
    
     la 
    
     couronne, 
    
     et 
    
     la 
    
     donna 
    
     à 
    
     sa 
    
     mère 
    
     Rita, 
    
     la 
    
     princesse 
    
     des 
    
     princesses, 
    
     jurant, 
    
     ou, 
    
     selon 
    
     les 
    
     expressions 
    
     de 
    
     Guiragos, 
   
    «
    
     écrivant 
    
     le 
    
     serment 
    
     sous 
    
     anathème 
    
     de 
    
     ne 
    
     plus 
    
     rendre 
    
     le 
    
     château 
    
     de 
    
     Lambroun 
    
     à 
    
     un 
    
     prince 
    
     quelconque, 
    
     mais 
    
     d'en 
    
     faire 
    
     la 
    
     propriété 
    
     du 
    
     roi, 
    
     car 
    
     ajoute-t-il, 
    
     tous 
    
     les 
    
     seigneurs 
    
     de 
    
     ce 
    
     château 
    
     se 
    
     révoltent 
    
     parce 
    
     qu'ils 
    
     le 
    
     savent 
    
     imprenable
   
    ». 
    
     Ensuite 
    
     il 
    
     mit 
    
     Héthoum 
    
     en 
    
     liberté: 
   
    «
    
     il 
    
     le 
    
     délivra 
    
     de 
    
     sa 
    
     prison, 
    
     lui 
    
     donna 
    
     beaucoup 
    
     de 
    
     villages 
    
     et 
    
     le 
    
     recevait 
    
     ensuite 
    
     avec 
    
     tous 
    
     les 
    
     honneurs. 
    
     Héthoum, 
    
     de 
    
     son 
    
     côté, 
    
     le 
    
     servit 
    
     fidèlement 
    
     et 
    
     avec 
    
     sa 
    
     prudence 
    
     éprouvée
   
    ». 
    
     Il 
    
     était 
    
     plus 
    
     facile 
    
     à 
    
     celui 
    
     qui 
    
     avait 
    
     été 
    
     dépouillé 
    
     de 
    
     se 
    
     conduire 
    
     avec 
    
     loyauté 
    
     qu'à 
    
     celui 
    
     qui 
    
     avait 
    
     fait 
    
     le 
    
     dommage 
    
     de 
    
     ne 
    
     pas 
    
     garder 
    
     de 
    
     la 
    
     méfiance 
    
     vis-à-vis 
    
     de 
    
     sa 
    
     victime. 
    
     Léon 
    
     n'eut 
    
     pas 
    
     confiance 
    
     en 
    
     Héthoum 
    
     et 
    
     il 
    
     paraît 
    
     que, 
    
     plutôt 
    
     agité 
    
     par 
    
     le 
    
     remords 
    
     de 
    
     ce 
    
     qu'il 
    
     avait 
    
     fait 
    
     qu'exaspéré 
    
     par 
    
     quelque 
    
     indiscrétion 
    
     de 
    
     la 
    
     part 
    
     de 
    
     celui-ci, 
    
     il 
    
     le 
    
     fit 
    
     saisir 
    
     encore 
    
     une 
    
     fois 
    
     et 
    
     emprisonner 
    
     dans 
    
     le 
    
     fort 
    
     de 
    
     Vahga, 
    
     vers 
    
     l'an 
   
    1202. 
    
     L'oncle 
    
     maternel 
    
     de 
    
     Héthoum, 
    
     le 
    
     vieux 
    
     Catholicos 
    
     Grégoire 
    
     Abirad, 
    
     l'ayant 
    
     appris, 
    
     partit 
    
     de 
    
     Romcla 
    
     et 
    
     fit 
    
     tout 
    
     le 
    
     long 
    
     chemin 
    
     jusqu'à 
    
     Sis, 
    
     pour 
    
     venir 
    
     supplier 
    
     le 
    
     roi 
    
     de 
    
     faire 
    
     sortir 
    
     son 
    
     neveu 
    
     de 
    
     prison 
    
     et 
    
     d'apaiser 
    
     ainsi 
    
     le 
    
     scandale 
    
     que 
    
     sa 
    
     rancune 
    
     causait. 
    
     Léon 
    
     céda 
    
     aux 
    
     instances 
    
     du 
    
     Patriarche 
    
     et 
    
     résolut 
    
     d'aller 
    
     en 
    
     personne 
    
     rendre 
    
     la 
    
     liberté 
    
     à 
    
     Héthoum. 
    
     Mais 
    
     avant 
    
     que 
    
     Léon 
    
     et 
    
     Abirad 
    
     ne 
    
     se 
    
     fussent 
    
     rendus 
    
     au 
    
     lieu 
    
     de 
    
     la 
    
     prison, 
    
     Héthoum 
    
     avait 
    
     déjà 
    
     résolu 
    
     de 
    
     se 
    
     dépouiller 
    
     de 
    
     toute 
    
     autorité 
    
     et 
    
     d'abandonner 
    
     la 
    
     magnificence 
    
     mondaine 
    
     dont 
    
     il 
    
     était 
    
     entouré 
    
     depuis 
    
     son 
    
     berceau; 
    
     car, 
    
     tout 
    
     jeune, 
    
     il 
    
     avait 
    
     été 
    
     fiancé 
    
     à 
    
     la 
    
     fille 
    
     de 
    
     Thoros 
    
     II; 
    
     c'est 
    
     lui 
    
     encore 
    
     qui 
    
     avait 
    
     tenu 
    
     tête 
    
     à 
    
     Melèh, 
    
     à 
    
     Roupin 
    
     et 
    
     à 
    
     Léon, 
    
     lui-même, 
    
     lorsque 
    
     ces 
    
     derniers 
    
     étaient 
    
     venus 
    
     assiéger 
    
     Lambroun. 
    
     Maintenant 
    
     que 
    
     tout 
    
     son 
    
     domaine 
    
     patrimonial 
    
     et 
    
     le 
    
     couvent 
    
     de 
    
     Skévra 
    
     qui 
    
     renfermait 
    
     les 
    
     tombeaux 
    
     de 
    
     ses 
    
     aïeux, 
    
     étaient 
    
     tombés 
    
     aux 
    
     mains 
    
     de 
    
     Léon, 
    
     Héthoum 
    
     les 
    
     abandonna 
    
     volontairement 
    
     à 
    
     ses 
    
     héritiers. 
    
     Il 
    
     se 
    
     souvint 
    
     de 
    
     sa 
    
     mère 
    
     Chahantoughte 
    
     et 
    
     de 
    
     ses 
    
     tendres 
    
     sœurs 
    
     Talitha 
    
     et 
    
     Suzaine, 
    
     qui 
    
     s'étaient 
    
     empressées 
    
     de 
    
     quitter 
    
     le 
    
     luxe 
    
     de 
    
     ce 
    
     monde 
    
     pour 
    
     prendre 
   
    l'
    
     habit 
    
     de 
    
     pénitence. 
    
     Il 
    
     se 
    
     souvint 
    
     encore 
    
     plus 
    
     de 
    
     son 
    
     vénérable 
    
     frère 
    
     S. 
    
     Nersès 
    
     à 
    
     qui 
    
     la 
    
     solitude 
    
     et 
    
     le 
    
     désert 
    
     étaient 
    
     si 
    
     chers. 
    
     Il 
    
     ordonna 
    
     donc 
    
     qu'on 
    
     lui 
    
     apportât 
    
     l'habit 
    
     religieux, 
    
     le 
    
     vêtit 
    
     et 
    
     en 
    
     couvrit 
    
     les 
    
     restes 
    
     de 
    
     sa 
    
     splendeur 
    
     princière. 
    
     Il 
    
     se 
    
     livra 
    
     assidûment 
    
     à 
    
     la 
    
     lecture 
    
     des 
    
     Saintes-Ecritures, 
    
     et 
    
     élevant 
    
     sa 
    
     pensée 
    
     à 
    
     Dieu 
    
     il 
    
     passait 
    
     ainsi 
    
     tranquillement 
    
     ses 
    
     jours, 
    
     aussi 
    
     heureux 
    
     que 
    
     s'il 
    
     se 
    
     fût 
    
     trouvé 
    
     au 
    
     milieu 
    
     de 
    
     sa 
    
     cour 
    
     au 
    
     château 
    
     de 
    
     Lambroun. 
    
     Quel 
    
     ne 
    
     fut 
    
     pas 
    
     l'étonnement 
    
     et 
    
     quels 
    
     ne 
    
     furent 
    
     pas 
    
     surtout 
    
     les 
    
     remords 
    
     de 
    
     Léon, 
    
     lorsqu'il 
    
     vit 
    
     celui 
    
     qu'il 
    
     croyait 
    
     son 
    
     rival 
    
     revêtu 
    
     de 
   
    l'
    
     habit 
    
     de 
    
     pénitence
   
    ? 
    
     Toutes 
    
     ses 
    
     idées 
    
     de 
    
     gloire 
    
     s'évanouirent 
    
     devant 
    
     la 
    
     pureté 
    
     des 
    
     vertus 
    
     du 
    
     patient, 
    
     et 
    
     je 
    
     crois 
    
     que 
    
     si 
    
     jamais 
    
     Léon 
    
     fut 
    
     vaincu 
    
     par 
    
     quelqu'un, 
    
     ce 
    
     fut 
    
     ce 
    
     jour-là 
    
     par 
    
     son 
    
     noble 
    
     prisonnier. 
    
     Il 
    
     se 
    
     jeta 
    
     au 
    
     cou 
    
     de 
    
     celui 
    
     qui 
    
     s'était 
    
     humilié 
    
     pour 
    
     lui 
    
     et 
    
     pour 
    
     le 
    
     maître 
    
     de 
    
     toute 
    
     humilité, 
    
     Jesus 
    
     Christ. 
    
     Tous 
    
     deux 
    
     s'embrassèrent, 
    
     se 
    
     pardonnèrent 
    
     et, 
    
     se 
    
     tenant 
    
     par 
    
     la 
    
     main, 
    
     sortirent 
    
     de 
    
     cette 
    
     vieille 
    
     résidence 
    
     des 
    
     Roupéniens 
    
     (le 
    
     château 
    
     de 
    
     Vahga).
  
 
    
     Héthoum 
    
     avait 
    
     fait 
    
     vœu 
    
     de 
    
     ne 
    
     plus 
    
     mettre 
    
     le 
    
     pied 
    
     dans 
    
     un 
    
     palais 
    
     et 
    
     de 
    
     finir 
    
     les 
    
     jours 
    
     qu'il 
    
     avait 
    
     encore 
    
     à 
    
     vivre 
    
     dans 
    
     un 
    
     monastère. 
    
     Léon 
    
     lui 
    
     offrit 
    
     le 
    
     plus 
    
     célébre 
    
     et 
    
     le 
    
     premier 
    
     des 
    
     couvents 
    
     de 
    
     Sissouan, 
    
     celui 
    
     de 
    
     S.
     
      te 
    
     Marie-Trium-Arcium 
   
    (
    
     Trazargue), 
    
     et 
    
     l'en 
    
     fit 
    
     l'Abbé. 
    
     Héthoum 
    
     y 
    
     resta 
    
     jusqu'à 
    
     la 
    
     fin 
    
     de 
    
     sa 
    
     vie. 
    
     C'est 
    
     là 
    
     qu'en 
    
     même 
    
     temps 
    
     qu'il 
    
     échangea 
    
     ses 
    
     habits 
    
     de 
    
     prince 
    
     contre 
    
     le 
    
     costume 
    
     de 
    
     moine, 
    
     il 
    
     laissa 
    
     son 
    
     nom 
    
     de 
    
     Héthoum 
    
     pour 
    
     prendre 
    
     celui 
    
     d'Elie, 
    
     sans 
    
     que 
    
     nous 
    
     sachions 
    
     dans 
    
     quel 
    
     but 
    
     il 
    
     choisit 
    
     ce 
    
     vieux 
    
     nom. 
    
     Personne 
    
     ne 
    
     dit 
    
     s'il 
    
     fut 
    
     ordonné 
    
     prêtre 
    
     et 
    
     s'il 
    
     passa 
    
     à 
    
     un 
    
     degré 
    
     supérieur. 
    
     Cela 
    
     paraît 
    
     probable 
    
     cependant. 
    
     Innocent 
    
     III, 
    
     dans 
    
     une 
    
     de 
    
     ses 
    
     lettres, 
    
     cite 
    
     Héthoum-Elie 
    
     comme 
    
     lui 
    
     ayant 
    
     été 
    
     envoyé 
    
     en 
    
     ambassade, 
    
     en 
   
    1210-1211; 
    
     et 
    
     le 
    
     nomme: 
     
      Abbas 
     
      S. 
     
      Mariœ-Trium-Arcium.
  
 
    
     Bien 
    
     que 
    
     Héthoum 
    
     ne 
    
     désirât 
    
     plus 
    
     désormais 
    
     que 
    
     de 
    
     passer 
    
     sa 
    
     vie 
    
     dans 
    
     la 
    
     retraite, 
    
     Léon 
    
     qui 
    
     le 
    
     savait 
    
     versé 
    
     dans 
    
     les 
    
     langues 
    
     et 
    
     les 
    
     études 
    
     et 
    
     qui 
    
     connaissait 
    
     sa 
    
     prudente 
    
     sagesse, 
    
     le 
    
     fit 
    
     participer, 
    
     comme 
    
     les 
    
     autres 
    
     grands 
    
     personnages 
    
     de 
    
     ses 
    
     Etats, 
    
     les 
    
     évêques 
    
     et 
    
     les 
    
     Barons, 
    
     aux 
    
     affaires 
    
     du 
    
     gouvernement 
    
     de 
    
     son 
    
     royaume. 
    
     Héthoum 
    
     lui 
    
     rendit 
    
     plus 
    
     de 
    
     sérvices 
    
     en 
    
     son 
    
     état 
    
     de 
    
     religieux, 
    
     que 
    
     les 
    
     autres 
    
     princes 
    
     dans 
    
     tout 
    
     leur 
    
     éclat. 
    
     Nous 
    
     l'avons 
    
     vu 
    
     accomplissant 
    
     sa 
    
     difficile 
    
     mission 
    
     d'ambassadeur 
    
     pendant 
    
     que 
    
     la 
    
     question 
    
     d'Antioche 
    
     tenait 
    
     au 
    
     cœur 
    
     du 
    
     Pontife 
    
     de 
    
     Rome; 
    
     nous 
    
     allons 
    
     le 
    
     voir 
    
     maintenant 
    
     au 
    
     milieu 
    
     des 
    
     dissensions 
    
     qui 
    
     éclatèrent 
    
     entre 
    
     le 
    
     roi 
    
     et 
    
     le 
    
     Catholicos 
    
     arménien 
    
     Jean, 
    
     car 
    
     nous 
    
     en 
    
     sommes 
    
     à 
    
     ce 
    
     point 
    
     de 
    
     notre 
    
     histoire.