Dans 
    
     le 
    
     cours 
    
     de 
    
     notre 
    
     récit, 
    
     nous 
    
     avons 
    
     cité 
    
     plusieurs 
    
     fois 
    
     et 
    
     donné 
    
     comme 
    
     un 
    
     des 
    
     plus 
    
     grands 
    
     et 
    
     des 
    
     plus 
    
     habiles 
    
     barons 
    
     et 
    
     vassaux 
    
     de 
    
     Léon, 
     
      Constance 
     
      Gamardias. 
    
     C'est 
    
     lui 
    
     qui 
    
     fut 
    
     mandé 
    
     dans 
    
     deux 
    
     importantes 
    
     ambassades 
    
     aux 
    
     plus 
    
     grands 
    
     souverains 
    
     de 
    
     l'époque, 
    
     à 
    
     l'empereur 
    
     d'Allemagne, 
    
     en 
    
     Isaurie, 
    
     et 
    
     aux 
    
     légats 
    
     du 
    
     Pape 
    
     et 
    
     aux 
    
     Princes 
    
     croisés, 
    
     à 
    
     Ptolémaïs. 
    
     Il 
    
     avait 
    
     deux 
    
     frères 
    
     plus 
    
     jeunes 
    
     que 
    
     lui 
     
      Josselin 
    
     et 
     
      Baudouin; 
    
     tous 
    
     trois 
    
     étaient 
    
     fils 
    
     du 
    
     Sébaste 
    
     Henri, 
    
     dont 
    
     le 
    
     titre 
    
     fait 
    
     voir 
    
     qu'il 
    
     fut 
    
     honoré 
    
     de 
    
     cette 
    
     dignité 
    
     par 
   
    l'
    
     empereur 
    
     des 
    
     Grecs 
    
     avant 
    
     qu'il 
    
     fût 
    
     venu 
    
     se 
    
     fixer 
    
     dans 
    
     le 
    
     pays 
    
     des 
    
     Arméniens. 
    
     Il 
    
     devait 
    
     être 
    
     grec 
    
     ou 
    
     latin 
    
     de 
    
     nationalité. 
    
     Il 
    
     est 
    
     classé 
    
     parmi 
    
     les 
    
     plus 
    
     grands 
    
     Barons 
    
     de 
    
     la 
    
     Cour 
    
     de 
    
     Léon, 
    
     comme 
    
     seigueur 
    
     des 
    
     châteaux 
    
     de 
    
     Camardias 
    
     et 
    
     de 
    
     Nor-perte 
    
     (Château-neuf), 
    
     dans 
    
     la 
    
     vallée 
    
     de 
    
     Séleucie. 
    
     Il 
    
     paraît 
    
     que 
    
     ce 
    
     Constance, 
    
     le 
    
     fils 
    
     aîné, 
    
     commandait 
    
     la 
    
     grande 
    
     ville 
    
     de 
    
     Séleucie 
    
     et 
    
     la 
    
     forteresse 
    
     de 
    
     Bounar. 
    
     Les 
    
     Camardias 
    
     ou 
    
     Goumardias, 
    
     outre 
    
     les 
    
     grandeurs 
    
     et 
    
     l'opulence, 
    
     avaient 
    
     encore 
    
     cet 
    
     insigne 
    
     avantage 
    
     d'être 
    
     des 
    
     alliés 
    
     du 
    
     Roi 
    
     et 
    
     du 
    
     Catholicos. 
    
     Léon 
    
     lui-même, 
    
     dans 
    
     sa 
    
     lettre 
    
     à 
    
     Innocent, 
    
     désigne 
    
     Constance 
    
     comme 
    
     son 
    
     parent.
 
    
     Henri 
    
     ou 
    
     Héri 
    
     était 
    
     le 
    
     beau-frère 
    
     du 
    
     Catholicos 
    
     Jean; 
    
     les 
    
     fils 
    
     de 
    
     Héri 
    
     étaient 
    
     donc 
    
     les 
    
     enfants 
    
     de 
    
     la 
    
     sœur 
    
     de 
    
     Jean. 
    
     Honorés 
    
     grandement, 
    
     chargés 
    
     en 
    
     même 
    
     temps 
    
     des 
    
     plus 
    
     hautes 
    
     fonctions 
    
     du 
    
     gouvernement 
    
     par 
    
     Léon, 
    
     j'ignore 
    
     comment 
    
     il 
    
     arriva 
    
     que 
    
     celui-ci 
    
     se 
    
     prit 
    
     à 
    
     se 
    
     méfier 
    
     d'eux, 
    
     les 
    
     fit 
    
     saisir 
    
     tous, 
    
     le 
    
     père 
    
     et 
    
     les 
    
     fils, 
    
     et 
    
     emprisonner, 
    
     l'an 
   
    1207. 
    
     Ils 
    
     durent 
    
     avoir 
    
     commis 
    
     une 
    
     faute 
    
     bien 
    
     grande, 
    
     ou 
    
     de 
    
     graves 
    
     soupçons 
    
     durent 
    
     peser 
    
     sur 
    
     eux, 
    
     car 
    
     Léon 
    
     les 
    
     tint 
    
     en 
    
     prison 
    
     toute 
    
     une 
    
     année, 
    
     sans 
    
     vouloir 
    
     prêter 
    
     l'oreille 
    
     aux 
    
     suppliques 
    
     de 
    
     leur 
    
     proche 
    
     parent 
    
     et 
    
     de 
    
     son 
    
     conseiller 
    
     le 
    
     Catholicos 
    
     Jean, 
    
     dont 
    
     le 
    
     titre 
    
     seul 
    
     de 
    
     Catholicos 
    
     et 
    
     ses 
    
     liens 
    
     de 
    
     parenté 
    
     devaient 
    
     pourtant 
    
     exercer 
    
     une 
    
     grande 
    
     influence 
    
     en 
    
     pareille 
    
     circonstance.
  
 
    
     Le 
    
     Catholicos 
    
     s'en 
    
     affecta 
    
     et 
    
     ne 
    
     voulut 
    
     plus 
    
     voir 
    
     le 
    
     roi 
    
     qui 
    
     lui 
    
     tourna 
    
     le 
    
     dos 
    
     également. 
    
     Du 
    
     reste, 
    
     Léon, 
    
     était 
    
     inflexible; 
    
     il 
    
     ne 
    
     cédait 
    
     jamais 
    
     à, 
    
     ses 
    
     adversaires. 
    
     Jean 
    
     voulut, 
    
     cette 
    
     fois, 
    
     tenir 
    
     tête 
    
     au 
    
     Roi, 
    
     et 
    
     ces 
    
     deux 
    
     illustres 
    
     personnages, 
    
     s'obstinant 
    
     et 
    
     devant 
    
     se 
    
     heurter 
    
     à 
    
     un 
    
     certain 
    
     moment 
   
    l'
    
     un 
    
     contre 
    
     l'autre, 
    
     ressemblaient 
    
     à 
    
     deux 
    
     nuages 
    
     chargés 
    
     d'électricité 
    
     qui, 
    
     dans 
    
     leur 
    
     rencontre 
    
     et 
    
     leur 
    
     choc, 
    
     enfantent 
    
     la 
    
     foudre 
    
     et 
    
     le 
    
     tonnerre 
    
     qui 
    
     jettent 
    
     la 
    
     consternation 
    
     au 
    
     milieu 
    
     des 
    
     contrées 
    
     audessus 
    
     desquelles 
    
     ces 
    
     nuages 
    
     passent. 
    
     Tous 
    
     les 
    
     deux, 
    
     le 
    
     roi 
    
     et 
    
     le 
    
     Catholicos, 
    
     forts 
    
     de 
    
     leur 
    
     autorité, 
    
     se 
    
     bravaient 
    
     l'un 
   
    l'
    
     autre. 
    
     On 
    
     ne 
    
     raconte 
    
     rien 
    
     en 
    
     détail 
    
     de 
    
     ce 
    
     qui 
    
     arriva 
    
     entre 
    
     eux, 
    
     mais 
    
     les 
    
     paroles 
    
     de 
   
    l'
    
     historien 
    
     ne 
    
     manquent 
    
     pas 
    
     de 
    
     gravité, 
    
     lorsqu'il 
    
     dit: 
   
    «
    
     Il 
    
     y 
    
     eut 
    
     une 
    
     si 
    
     grande 
    
     haine 
    
     entre 
    
     eux 
    
     que 
    
     le 
    
     roi 
    
     le 
    
     déposa 
    
     (le 
    
     Catholicos) 
    
     et 
    
     que 
    
     les 
    
     Prélats 
    
     et 
    
     les 
    
     Barons 
    
     de 
    
     la 
    
     Cilicie 
    
     y 
    
     consentirent». 
    
     Ce 
    
     qui 
    
     fait 
    
     supposer 
    
     que 
    
     ceux 
    
     qui 
    
     se 
    
     tenaient 
    
     éloignés 
    
     de 
    
     ce 
    
     pays 
    
     et 
    
     que 
    
     ces 
    
     querelles 
    
     ne 
    
     regardaient 
    
     pas, 
    
     avaient 
    
     à 
    
     cœur 
    
     de 
    
     ne 
    
     pas 
    
     s'ingérer 
    
     dans 
    
     une 
    
     affaire 
    
     si 
    
     étrange 
    
     qu'on 
    
     n'en 
    
     avait 
    
     vu 
    
     que 
    
     rarement 
    
     de 
    
     semblable 
    
     avant 
    
     cette 
    
     époque. 
    
     Le 
    
     patriarche 
    
     Pierre 
    
     Kédatarze 
    
     avait 
    
     été 
    
     déposé 
    
     de 
    
     son 
    
     siège 
    
     par 
    
     le 
    
     roi 
    
     Bagratide 
    
     Jean-Sempad, 
    
     mais 
    
     ce 
    
     fait, 
    
     connu 
    
     de 
    
     tous, 
    
     était 
    
     encore 
    
     regardé 
    
     d'un 
    
     mauvais 
    
     œil. 
    
     Toutefois 
    
     personne 
    
     n'osait 
    
     intervenir 
    
     ni 
    
     blâmer 
    
     le 
    
     roi. 
    
     Les 
    
     historiens 
    
     disent 
    
     simplement 
    
     que 
    
     Léon 
    
     fit 
    
     élire 
    
     un 
    
     autre 
    
     Catholicos, 
    
     Mons. 
    
     David, 
    
     archevêque 
    
     de 
    
     Messis 
    
     et 
    
     Abbé 
    
     d'Arkagaghni, 
    
     le 
    
     prélat 
    
     qui, 
    
     selon 
    
     la 
    
     hiérarchie 
    
     de 
    
     l'Église, 
    
     venait 
    
     le 
    
     second 
    
     après 
    
     le 
    
     Catholicos 
    
     Jean, 
    
     au 
    
     sacre 
    
     de 
    
     Léon.
  
 
    
     Alors 
    
     Ananie, 
   
    l'
    
     évêque 
    
     de 
    
     Sébaste, 
    
     qui, 
    
     prétend-on, 
    
     aspirait 
    
     depuis 
    
     longtemps 
    
     à 
    
     s'asseoir 
    
     sur 
    
     le 
    
     siège 
    
     du 
    
     Catholicos, 
   
    — 
    
     on 
    
     avait 
    
     déjà 
    
     tenu 
    
     le 
    
     même 
    
     propos 
    
     pour 
    
     le 
    
     Catholicos 
    
     Jean 
    
     et 
    
     quelques-uns 
    
     affirment 
    
     que 
    
     ce 
    
     sont 
    
     ces 
    
     trois 
    
     prélats, 
    
     Jean, 
    
     David 
    
     et 
    
     Ananie, 
    
     qui 
    
     firent 
    
     déposer 
    
     le 
    
     jeune 
    
     Catholicos 
    
     Grégoire 
    
     et 
    
     que 
    
     ce 
    
     sont 
    
     eux 
    
     qui 
    
     le 
    
     jetèrent 
    
     au 
    
     bas 
    
     du 
    
     Château, 
    
     cependant 
    
     il 
    
     est 
    
     impossible 
    
     qu'ils 
    
     aient 
    
     poussé 
    
     l'audace 
    
     jusqu'à 
    
     ce 
    
     point; 
   
    — 
    
     Ananie, 
    
     disons 
    
     nous, 
    
     profitant 
    
     de 
    
     ces 
    
     conflits, 
    
     demanda 
    
     protection 
    
     au 
    
     Sultan 
    
     turc 
    
     et, 
    
     feignant 
    
     d'être 
    
     de 
    
     la 
    
     famille 
    
     du 
    
     Kédatarze 
    
     et 
    
     gardien 
    
     de 
    
     son 
    
     trône, 
    
     se 
    
     proclama 
    
     Catholicos 
    
     et 
    
     alla 
    
     sièger 
    
     à 
    
     Sébaste. 
    
     Jean, 
    
     sans 
    
     prendre 
    
     en 
    
     considération 
    
     ni 
    
     David, 
    
     ni 
    
     Ananie, 
    
     ni 
    
     même 
    
     le 
    
     roi, 
   
    «
    
     se 
    
     rendit 
    
     à 
    
     Romcla, 
   
    — 
    
     selon 
    
     l'historien, 
   
    — 
    
     et 
    
     y 
    
     passa 
    
     ses 
    
     jours 
    
     en 
    
     guerrier 
    
     et 
    
     en 
    
     homme 
    
     prudent, 
    
     et 
    
     sut 
    
     se 
    
     garantir 
    
     des 
    
     manèges 
    
     et 
    
     des 
    
     intrigues 
    
     du 
    
     roi
   
    ». 
    
     Mais 
    
     les 
    
     ruses 
    
     qu'il 
    
     employa 
    
     d'abord 
    
     et 
    
     les 
    
     hostilités 
    
     qu'il 
    
     déclara 
    
     ensuite, 
    
     causèrent 
    
     un 
    
     réel 
    
     préjudice 
    
     au 
    
     Roi. 
    
     Voici 
    
     ce 
    
     qu'il 
    
     fit: 
    
     il 
    
     excita 
    
     le 
    
     sultan 
    
     d'Iconie 
    
     Kkosrovchah 
    
     ou 
    
     Keï-Khosrow 
    
     qui 
    
     fondit 
    
     sur 
    
     le 
    
     fort 
    
     de 
    
     Pertouce, 
    
     le 
    
     surprit 
    
     avec 
    
     une 
    
     armée 
    
     formidable, 
    
     s'en 
    
     empara 
    
     et 
    
     fit 
    
     prisonnier 
    
     le 
    
     Seigneur 
    
     et 
    
     commandant 
    
     du 
    
     fort 
    
     nommé 
    
     Grégoire, 
    
     fils 
    
     d'un 
    
     Léon 
    
     dont 
    
     je 
    
     ne 
    
     connais 
    
     pas 
    
     la 
    
     famille, 
    
     Ce 
    
     fait 
    
     eut 
    
     lieu 
    
     la 
    
     seconde 
    
     année 
    
     des 
    
     dissensions 
    
     du 
    
     Catholicos 
    
     avec 
    
     le 
    
     roi, 
    
     en 
   
    1208. 
    
     La 
    
     discorde 
    
     dura 
    
     encore 
    
     deux 
    
     ou 
    
     trois 
    
     ans, 
    
     jusqu'à 
    
     la 
    
     mort 
    
     du 
    
     Catholicos 
    
     David. 
    
     Alors, 
    
     pour 
    
     empêcher 
    
     le 
    
     scandale 
    
     que 
    
     produirait 
    
     l'élection 
    
     d'un 
    
     nouveau 
    
     Catholicos, 
    
     Héthoum-Elie, 
    
     l'Abbé 
    
     du 
    
     Couvent 
    
     de 
    
     Trazargue, 
    
     s'empressa 
    
     d'aller 
    
     trouver 
    
     son 
    
     parent 
    
     le 
    
     Catholicos 
    
     Jean, 
    
     à 
    
     Romcla, 
    
     et 
    
     par 
    
     sa 
    
     douceur 
    
     finit 
    
     par 
    
     lui 
    
     faire 
    
     entendre 
    
     raison. 
    
     Ensuite 
    
     il 
    
     se 
    
     rendit 
    
     auprès 
    
     de 
    
     Léon 
    
     et 
    
     réconcilia 
    
     les 
    
     deux 
    
     adversaires, 
    
     en 
    
     imposant 
    
     des 
    
     conditions 
    
     à 
    
     l'un 
    
     comme 
    
     à 
    
     l'autre, 
    
     paraît-il; 
    
     car 
    
     Léon 
    
     ordonna 
    
     immédiatement 
    
     de 
    
     mettre 
    
     en 
    
     liberté 
    
     les 
    
     Camardias, 
    
     neveux 
    
     du 
    
     Catholicos. 
    
     Mais 
    
     l'aîné 
    
     et 
    
     le 
    
     plus 
    
     célèbre 
    
     était 
    
     mort 
    
     pendant 
    
     sa 
    
     détention 
    
     et 
    
     peut-être 
    
     même 
    
     Héri 
    
     leur 
    
     père, 
    
     car 
    
     il 
    
     n'est 
    
     pas 
    
     cité 
    
     avec 
    
     Josselin 
    
     et 
    
     Baudouin 
    
     qui 
    
     sortirent 
    
     de 
    
     prison. 
    
     Toutefois, 
    
     le 
    
     roi 
    
     refusa 
    
     de 
    
     voir 
    
     le 
    
     Catholicos 
    
     pendant 
    
     quelque 
    
     temps, 
    
     c'est-à-dire 
    
     jusqu'à 
    
     l'année 
    
     suivante, 
    
     après 
    
     quoi 
    
     l'accord 
    
     devint 
    
     parfait 
    
     entre 
    
     eux. 
    
     L'historien 
    
     ajoute: 
   
    «
    
     Le 
    
     Roi 
    
     rendit 
    
     au 
    
     Catholicos 
    
     toutes 
    
     les 
    
     propriétés 
    
     et 
    
     les 
    
     biens 
    
     qu'il 
    
     lui 
    
     avait 
    
     retirés 
    
     et 
    
     tous 
    
     s'en 
    
     réjouirent, 
    
     ceux 
    
     du 
    
     loin 
    
     et 
    
     les 
    
     voisins
   
    ».