ԵՐԿԵՐԻ ԺՈՂՈՎԱԾՈՒ, Հատոր Ա

Հեղինակ

Բաժին

Թեմա

LE TRAIT É D'HIPPIATRIE DU XVIII e SI È CLE !

Hra č ʻ ya A č a ř yan, arm é niste é minent, avait d é couvert en 1906 à Tabriz (Iran) et d é crit un singulier ouvrage manuscrit du XVIII e si è cle traitant de zooth é rapie, dont il avait not é avec admiration «l'excellence de la mati è re et de l' é criture». Ainsi que nous rapportent ses M é moires [1], faute de temps, A č a ř yan, apr è s un examen sommaire du monument de la litt é rature arm é nienne qu'est ce Trait é d'hippiatrie et des animaux en g é n é ral (B ž škaran jioy ew a ř hasarak grastnoy), n'avait pu en donner qu'une description succincte et copi é le colophon. Il ajoutait à ce propos: «Cet excellent et curieux manuscrit est un tr é sor de mots arm é niens concernant l' é levage et la zooth é rapie, et son é tude compl è te fournira non seulement d'amples renseignements sur les sciences, mais aussi de nouveaux termes pour notre Dictionnaire» [2].

Par la suite, A č a ř yan, qui a pourtant v é cu et enseigné à Tabriz dans les ann é es 1920, ne s'est plus occup é de cet important ouvrage pour des raisons qui nous sont inconnues.

A la parution des M é moires d'A č a ř yan, P. Muradyan, le sp é cialiste bien connu des é tudes philologiques arm é no-g é orgiennes, dans un article paru au Sovetakan Hayastan, et intitul é «O ù se trouve le manuscrit excellent par la mati è re et l' é criture?», nous fit part de l'existence d'une traduction du Trait é d'hippiatrie en question de l'arm é nien en g é orgien faite au XVIII e si è cle, dont le manuscrit se trouve à l'Institut de manuscrits K. Kekelije de Tbilissi (n ° S-3467).

Consid é rant le manuscrit de la traduction arm é nienne comme perdu, l'honorable philologue proposait sa retraduction du g é orgien en arm é nien [3]

Vers 1950, d é j à, la direction du Matenadaran s' é tait inqui é t é e du sort du Trait é d'hippiatrie, et divers renseignements laissaient supposer que le manuscrit se trouvait aux Etats-Unis. Et voici que Avedis Sanjian de l'Universit é de Californie, lors de son s é jour à Er é van en 1971, nous apprenait que le Trait é d'hippiatrie se trouvait actuellement chez Zareh Sara ĵ ian, à Los Angeles, et c'est ainsi que l'auteur lors d'un s é jour en Californie, eut le bonheur de voir le manuscrit et d'en obtenir le microfilm. Ainsi que nous l'a confirm é Z. Sara ĵ ian, son p è re, Xa č ‘ik A ł a Sara ĵ ian, l'avait achet é à Tabriz, il y a de cela de nombreuses ann é es - lorsque sa famille y demeurait - à Širmazan, tailleur de son é tat. Le manuscrit é tait conserv é soigneusement et se trouvait en l' é tat d é crit dans le Catalogue des manuscrits de Tabriz

Le cheval dans l'Arm é nie ancienne et au Moyen Age.

Il est notoirement connu que le cheval vivait sur le plateau d'Arm é nie depuis les temps les plus anciens. Selon le biologiste S. Me ž lumyan, «les t é moignages les plus s û rs de la pr é sence du cheval à l'est de l'Asie Mineure remontent aux environs de l'an 2000 av. J. -C. Vers 1900-1700, le cheval é tait d é j à employ é avec les chars de guerre; on le trouve au service de l'homme dans les r é gions montagneuses de l'Asie Mineure, de la Syrie, de l'Arm é nie et du Caucase comme animal de trait au m ê me titre que les bovins [4]. L'Arm é nie fut r é put é e durant les dix si è cles de notre è re pour la qualit é de ses chevaux, de ses b ê tes de somme et de trait; son é levage é tait un des plus importants é l é ments de son é conomie. Selon N. Harut‘unyan, historien de l'Urartu, «des t é moignages é crits assurent que l' é levage du cheval a é t é l'occupation favorite des habitants de l'Urartu et d'un grand nombre de provinces qui se trouvaient sous son joug…. L' é levage des mulets et des â nes tenait une place à part dans l' é levage en Urartu et chez ses vassaux» [5]. «Les chevaux é taient utilis é s en Urartu pour les travaux des champs et du vignoble, ainsi que pour l' é levage. Ils é taient utilis é s aussi dans un but guerrier, particuli è rement lors des incursions que les Urartiens entreprenaient contre certains Etats et certaines tribus» [6]

X é nophon (ca 430-ca 354 av. J. -C. ) et Strabon (ca 58 av. et 25 ap. J. -C. ) attestent de l' é tat florissant de l' é levage dans l'Arm é nie ancienne. X é nophon, dans son livre bien connu, l'Anabase, dit qu'on é levait des chevaux en Arm é nie pour le tribut de la Perse [7]. L'auteur grec, qui a é t é l'un des premiers hippologues du monde ancien (voir son Equitation) [8], ajoute que les chevaux d'Arm é nie « é taient beaucoup plus petits que les chevaux de Perse, mais leur é levage é tait de plus grande qualit é » [9]. Trois si è cles plus tard, Strabon fournit des d é tails encore plus int é ressants: selon lui, «l'Arm é nie poss è de d'admirables prairies qui ne le c è dent en rien à celles de la M é die, ce qui fait que les chevaux n é s é iens du roi de Perse sont dress é s ici, et que le gouverneur d'Arm é nie envoie 20. 000 poulains pour les f ê tes de Mithra. Par ailleurs, lorsque Artavazd est entr é en M é die en compagnie d'Antoine, il lui a fourni 6. 000 chevaux en plus de la participation de sa cavalerie» [10]

Dans la Bible on rapporte que les chevaux et les mulets «de Tirogorma» é taient vendus dans les villes ph é niciennes (Ez é chiel, XXVII, 14)

Le zoologue G. K. Ap ʻ inyan, dans une étude int é ressante sur l'Elevage du cheval dans l'Arm é nie ancienne [11], o ù il a r é uni de nombreux t é moignages arm é niens et é trangers, rapporte que jusqu'aux invasions arabes, particuli è rement à l' é poque de la dynastie des Arsacides, l'Arm é nie avait poss é d é une importante cavalerie. Il en conclut que «lors de la formation de leur Etat les Arm é niens é taient d é j à en possession d'un é levage de chevaux bien d é velopp é » [12]

Plus tard, au X e si è cle, Ibn-Haw ķ al dit que les shahris (b ê tes de somme noires de belle race) d'Arm é nie é taient r é put é s en Irak, en Syrie ct au Kh ū r ā s ā n pour leur robustesse, leur beaut é, leur vivacit é et leur endurance [13]

Les traditions arm é niennes de l' é levage du cheval ont é t é maintenues par la suite. Les chevaux de Cilicie, de m ê me, é taient appr é ci é s aussi bien sur les march é s int é rieurs qu' à l' é tranger, et cela se comprend ais é ment car la cavalerie arm é nienne avait grand besoin de chevaux, de b ê tes de somme et de trait robustes, et leur exportation é tait une source importante de revenus

A ce sujet, rappelons qu'en 1263 le roi Het‘um (Hayton) I er avait align é 18. 000 cavaliers [14] (12. 000 selon Ališan) [15], et que T‘oros II avait offert des «chevaux de noble race» à l'empereur Manuel I er Comn è ne; quant à L é on II, selon un acte sign é en 1288 avec le sultan d'Egypte, il s' é tait engag é à lui fournir 25 chevaux et 25 mulets de qualit é [16]; le m ê me L é on II, par d é cret pris en 1288, autorisait les G ê nois à exporter des chevaux et des mulets par le port d'Ayas (Lajaccio) [17]

Dans ces conditions, on comprend l'int é r ê t port é en Arm é nie cilicienne à l'extension de l' é levage et les ordres donn é s par Het‘um I er de traduire Pour la m é decine des chevaux (Vasn jioy payt‘arnman) et ceux donnés par Smbat III de traduire le Trait é d'hippiatrie (B ž škaran vasn jioy ew a ř hasarak grastnoy) et la raison pour laquelle dans le Livre des travaux [des champs] (Girk‘ vastakoc‘) on trouve la traduction des passages relatifs à l' é levage, à la m é decine et aux soins à donner aux chevaux parmi d'autres branches de l'agriculture

La renomm é e traditionnelle des chevaux arm é niens s'est poursuivie au cours des si è cles suivants et le t é moignage de l'ambassadeur d'Espagne Ruy Gonzalez di Clavijo (1403-1406), qui s'est rendu en Perse en passant par l'Arm é nie, est tr è s int é ressant à ce sujet. Dans  la relation de son voyage, l'ambassadeur rappporte que N ü r al-D ī n, seigneur arm é nien de la forteresse de Mak ü, avait envoy é son fils accompagn é de «trois chevaux bien sell é [18] au-devant de Tamerlan lorsque ce dernier s' é tait approch é de la forteresse et l'avait menac é e. Le petit nombre de chevaux laisse supposer que ceux-ci é taient extraordinairement beaux pour plaire au despote et pour ne pas blesser son amour propre

L'int é r ê t port é à l'hippologie n'a pas cess é avec la disparition de la souverainet é nationale lorsque le pays s'est trouv é sous la domination turcopersane vers la fin du Moyen Age. La preuve en est le livre concernant les chevaux et qui a pour titre Livre de m é decine des chevaux, des mulets ou des â nes é crit à la demande du roi Xosrov (B ž škaran vasn jioy ew ĵ oroy ew kam išu, or Xosrov ark‘ayn grel et) [19], écrit en 1696 au couvent du Saint-Esprit de Van par Ł azar vardapet

La r é alisation d'un tel ouvrage r é pondait sans doute à un besoin, et seule la pr é sence de grands centres d' é levage pouvait en d é cider l'entreprise

***

Les premiers t é moignages é crits concernant la m é decine animale nous sont parvenus de l’Egypte ancienne et de Babylone; des hippiatres exerçaient aussi en Inde, en Iran dans la Gr è ce ancienne et tr è s probablement en Urartu. Les sources grecques citent comme auteurs hippologiques et hippiatriques X é nophon, Hi é rocl è s (III e si è cle), Apsirtos (IV e si è cle), Th é omnestis (s. d. ) [20], au X e si è cle, l'empereur Constantin Porphyrog é n è te est à l'origine de grands ouvrages d'agriculture et d'hippiatrie telles que la G é oponique et l'Hippiatrique, o ù sont rassembl é es les connaissances agricoles et hippiatriques du monde ancien. On trouve aussi des é tudes sp é ciales sur l' é levage et l'hippiatrie dans les litt é ratures indienne, arabe et persane

La litt é rature arabe est particuli è rement riche en ouvrages hippologiques. Ibn al-Nad ï m, dans son Kitab al-Fihrist (vers 988) é num è re de nombreux titres de livres du genre [21]; de nombreuses biblioth è ques de par le monde conservent des ouvrages hippologiques en arabe [22] dont quelques-uns seulement ont é t é publi é s. Le livre d'hippologie arabe le plus ancien est le Livre des chevaux d'Asma ï (publi é en 1895) [23]; on trouve plus tard les travaux de Hish ā m al-Kalbi et d'Ibn al-‘Arabi (publi é s en 1928) [24]. L'Abr é g é d'hippiatrie é crit en l'an de l'H é gire 605 (1208/9) conserv é à l' é cole Ahmed III du Caire [25] ainsi que le manuscrit persan Or. 3483 du British Museum [26], qui est une traduction de l'œuvre en arabe d'al-Mudjahid ‘Ali ibn al-Malik al-Mu‘ayyad D ā w ū d (XIV e si è cle) ressemblent aux autres ouvrages hippologiques arabes conserv é s

Le chapitre XXV du Q ā b ū s-n ā m ā [27], l'une des oeuvres les plus anciennes en prose de la litt é rature persane d’Unsur al-Ma‘ ā l ï Kai K ā ū s (XI e si è cle) contient d'int é ressants renseignements hippologiques; l'auteur donne d'abord plusieurs conseils sur la fa ç on d'acheter les chevaux, ensuite il é num è re bri è vement une s é rie de maladies qui sont autant de tares et qui en diminuent la valeur. La description des défauts et des qualit é s des chevaux, l' é num é ration des robes et des maladies t é moignent de l' é tendue des connaissances hippologiques et hippiatriques de l'auteur, tandis que l'emploi de termes essentiellement arabes indique que le niveau atteint par les sciences hippologiques arabes é tait tel au XI e si è cle qu'on s'en servait largement dans les pays voisins, comme la Perse, jusqu' à en emprunter le vocabulaire. Par la suite, ces traditions se sont perp é tu é es dans la litt é rature persane Parall è lement aux livres hippologiques traduits de l'arabe et du sanscrit, les Persans ont é crit des ouvrages semblables; mais ceux-ci restent à l' é tat de manuscrit

A notre connaissance, des cinq hippologies in é dites conservées au British Museum [28], deux (Add. 14057 et Add. 16854) sont traduites du sanscrit (la premi è re au XV e si è cle, la deuxi è me au XVIII e si è cle); une (Or. 3483) de l'arabe; les deux autres (Add. 7716, 23562) sont des œuvres originales (XVIII e si è cle). Les termes employ é s dans les traductions des textes sanscrits sont essentiellement indiens et arabes ceux traduits de l'arabe

D. S. Phillot a publi é en 1911 deux hippologies é crites en Inde: la premi è re, le Livre des chevaux de Rangin, traduit de l'hindustani en anglais; la seconde, le texte hippologique persan de Tuhfat-us-Sadr (Hommage au dauphin) de Zabardast Khan (XVIII e si è cle), accompagn é e d'une courte explication en anglais de certains mots [29]

Dans les hippologies cit é es plus haut, pour des motifs utilitaires, on donne la description des diff é rentes vari é t é s de chevaux, la fa ç on de les distinguer selon leur constitution et leur robe, la fa ç on de les soigner, de reconna î tre leurs maladies et de les gu é rir, et parfois des conseils hippiques

L'hippologie dans la litt é rature arm é nienne.

Tout en constatant l'absence d'ouvrages hippologiques originaux r é dig é s par des auteurs arméniens, on peut admettre n é anmoins que les milliers de chevaux naissant dans les riches prairies arm é niennes ont pu ê tre soign é s et gu é ris par des palefreniers et des hippiatres ayant des connaissances pratiques

Les ouvrages hippologiques et les œuvres mineures retenus par la litt é rature arm é nienne sont les suivants, par ordre chronologique

1. Vasn jioc‘ azgac‘ ew c ʻ elic‘ matakac', yovtakac‘ ew k‘urakac‘ xratk‘ ew b ž škut ʻ iwnk ʻ (Conseils et m é decines pour les esp è ces et races des chevaux, des juments et des poulains). C'est le livre XVI de la G é oponique grecque du X e si è cle, qui occupe les chapitres CCXCIV-CCCX du Livre des travaux (Girk‘ vastakoc‘). «Ces conseils (fournis par le livre XVI) relatifs aux soins à donner aux chevaux, aux chameaux et à leur médecine, é crit E. Lipšic, traducteur de la G é oponique (1960) en russe, ont de grandes ressemblances avec ceux des auteurs des Hippiatiques et des Cin é g é tiques des auteurs anciens: voir les renseignements fournis par les agronomes romains Varron (116-87 av. J. -C. ), Columelle (I er si è cle ap. J. -C. ), Palladus (IV e si è cle) et Plinius (23-79 ap. J. C. [30]

Le Livre des travaux (Girk‘ vastakoc‘), traduction d'une variante arabe de la G é oponique [31], et qui contient l'essentiel du texte grec, dans ses chapitres (portes) CCXCIV-CCCX suit approximativement l'ordre des chapitres du livre XVI de la G é oponique; les feuillets des chapitres XVI-XXII ont é t é é gar é s. Les quelques é carts du texte peuvent provenir aussi bien du texte arabe que du traducteur arm é nien

Ł. Ališan, qui a publi é ce Livre des travaux en 1877, situe l' é poque de sa traduction au XIII e si è cle, «et plus t ô t que plus tard» [32], dit-il. L'opinion d'Ališan a é t é admise par tous ceux qui, à diff é rentes reprises, ont eu à s'occuper de ce livre, sauf par le philologue K. Brockelmann, qui, dans la revue Byzantinische Zeitschrift, V (1896), p. 385-409, à l'appui de diverses preuves, donne la Pologne comme lieu de traduction et la fin du Moyen Age comme é poque. Les preuves fournies par Brockelmann ont é t é r é fut é es avec succ è s par S. Sarean [33] dans un article de la revue Bazmav ē p en 1900. Le phililogue K. Andrikean situe l' é poque de sa traduction «au XII e si è cle, et s û rement apr è s 1160» [34], et consid è re Mxit’ar Herac‘i comme son traducteur. Quelques termes employ é s dans le Soulagement des fi è vres et que l'on retrouve dans le Livre des travaux lui semblent des preuves suffisantes pour lui permettre de conclure en ce sens

On pourrait probablement faire encore d'autres trouvailles semblables chez Mxit‘ar Herac‘i ainsi que chez les auteurs du XIIIe si è cle, mais ce ne sont l à que de trop faibles arguments pour la datation d'une œuvre, alors qu'on trouve dans le vocabulaire g é n é ralement employ é dans le Livre des travaux et le Trait é d'hippiatrie qui nous occupe les particularit é s linguistiques de la m ê me é poque, ce pourquoi Ališan a eu raison de dater la traduction pas plus tard que le XIII e si è cle

2. Vasn jioy payt‘arnman (De la m é decine des chevaux) est un livre d’hippiatrie traduit par le diacre Step‘anos en 1263 sur ordre du roi Het‘um I er, mais qui ne nous est pas parvenu (voir supra, p. 108). L. A. Hovhannisyan, dans son Histoire de la m é decine en Arm é nie (en russe), en é num é rant les ouvrages hippiatriques arm é niens du Moyen Age, cite pour m é moire un travail de l'entomologiste bien connu Ibn al-Baytar [35], traduit de l'arabe, mais on ne trouve nulle trace d'un tel ouvrage dans les é tudes concernant cet auteur. Il y a confusion chez Hovhannisyan: il nous semble que c'est le titre de l'ouvrage, Vasn jioy payt‘arnman-paytar ou baytar est un nom commun arabe qui signifie «v é t é rinaire» - qui l'a induit en erreur.

3. B ž škaran jioy ew arhasarak grastnoy (Trait é d'hippiatrie et des b ê tes en g é n é ral) du m é decin Faradj, traduit de l’arabe en arm é nien en 1296-1298 à la demande du roi Smbat III, est le livre qui nous occupe. L’unique exemplaire du manuscrit de ce Trait é d’hippiatrie se trouve à Los Angeles ainsi que nous l’avons dit plus haut, chez Zareh Sarajian. Le microfilm du manuscrit nous a é t é fourni par A. Sanjian

Description du manuscrit:

Epoque: XIII e si è cle (1296-1298); lieu: Sis; copiste: T‘oros le pr ê tre; acheteur: le roi Smbat III; feuillets: 184; mati è re: papier; dimensions: 16 × 18 cm.; é criture sur une colonne; caract è res: bolorgir; lignes: 17; miniatures et images: «le philosophe Djina» (fol. 4), un dessin représentant un cheval entour é de nombreuses indications sur les qualit é s et les d é fauts des diverses parties de l'animal (fol. 33 v ); marques (caut è res) de chevaux (fol. 37 v -39 v ); ornements frontaux (fol. 7-34 v ); ornements marginaux (fol. 7, 8, 34 v, 40, 101); lettres orn é es (fol. 7, 34 v, 40, 101) [36]; reliure: bois garni de peau; page de garde: parchemin, bolorgir yerkatagir sur deux colonnes: 2 (A-B) +2 (C-D); é tat: bon

Remarques: les premiers et les derniers feuillets du manuscrit sont tomb é s; manquent la table des chapitres I-XIII au d é but et une partie du colophon à la fin. Les titres des chapitres sont en rouge

Colophon du scribe: fol. 183-184 v.

Mentions:

Du scribe,

fol. 6 v: Zgorcs jerac‘ meroc‘, u ł i ł ara ’i mez tēr

fol. 7: Zgorcs jerac‘ meroc‘ yaĵołea ’i mez

Ensuite, fol. 1, à l'angle gauche de la marge de tête: 475; à l'angle gauche de la marge de pied: es Xač‘ik ała

fol. 7: deux cachets: Ep‘rem vardapet, 1222 (1773).

fol. 19: Es tēr Tat‘ēosik ordi Yovnēss grec‘ i t‘vin p‘ok‘r 144  (144+1616=1760) ovdni 5-umn (20 janvier) astucov.

fol. 21 32, 39 v, 63: essais de plume

fol. 94: Gork'in, Vardan, Datos, Ohanēs.

Page de garde 2: fragment beit persan: Sakī bīā ki bādih bināmi  ‘ishk bar khatti ū….

4. I grastu bzškaranēn p‘oxac (Traduit du trait é vétérinaire). - Ce manuscrit se trouve à la biblioth è que des P è res M é khitaristes de Venise. C'est un texte incomplet de 5 pages - on y trouve les chapitres I-XIX et XXIX-XXX de la table des mati è res - qui a été publié en 1887 dans la revue Bazmavēp. L'éditeur, le p è re H. T‘., écrit à ce sujet: «Notre langue ne se trouve probablement pas à un niveau inférieur en comparaison des langues développées quant aux mots concernant la botanique, la zoologie, l'anatomie et surtout la médecine, que l'on trouve par milliers dans les livres de médecine. Nous n'avons pas id é e de la richesse de notre langue, et souvent nous peinons en vain pour forger des termes nouveaux (souvent sans art ni é l é gance), alors que nos anciens en ont cr éé s et expliqu é s non seulement un mais deux ou trois à leur place» [37]. H. T‘., en se basant sur la pr é sence de quelques mots fran ç ais dans le texte (provenant de la fr é quentation des Arm é niens avec les Latins pendant les Croisades), croit que le manuscrit est «traduit du français», alors qu' à la première comparaison avec le Trait é d'hippiatrie de Faradj on s'aper ç oit que ceci n'est qu'un bref r é sum é de quelques passages de cela [38]. On trouve dans le texte les particularit é s du moyen arm é nien de Cilicie et des emprunts arabes. Un examen comparatif minutieux nous permet de conclure à l'identit é des deux textes.

5. L'exemplaire ayant servi à la traduction en géorgien est probablement une deuxième version ou une deuxième copie du Traité d'hippiatrie de Faradj

La traduction géorgienne du Traité d'hippiatrie a été faite en 1788 à la demande du dernier souverain de Géorgie, le régent Georgi Herakli, par le père Osesje et le père arménien Petros, en collaboration avec P‘ilipos Łait‘mazyan et son fils, le père Samuēl [39].

P. Muradyan, dans l'article cité plus haut, fait remarquer que le colophon du texte arménien est reproduit avec quelques abréviations et quelques altérations; ainsi, le lieu de la copie, Sis, a été remplacé par Sivas, et l'époque, 1296-1298, par 950 (1504). Nous croyons que les faits rapportés ne proviennent pas d'altérations mais de l'original lui-même, et donc à l'existence d'une deuxième version du Traité d'hippiatrie de Faradj ou d'une deuxième copie du livre exécutée à Sivas en 1504

Notre supposition se confirme par la comparaison de notre texte avec sa traduction g é orgienne [40]. Cette derni è re est compos é e de deux grandes parties: une premi è re partie de 56 chapitres et une deuxi è me de 224 [41], alors que l'ensemble de la variante en contient 182. La table des mati è res est bien traduite, sauf les termes arabes inconnus du traducteur qui les a délaissés

6. B ž škaran vasn jioy ew ĵ oroy ew kam išu, or Xosrov ark‘a zgrel et (Livre de m é decine des chevaux, des mulets ou des â nes é crit à la demande du roi Xosrov). - C'est un texte de petit format é crit en 1696 au monast è re du Saint-Esprit de Van par Ł azar Amt‘ec‘i et qui se trouve au Matenadaran ms. n ° 459, fol. 104 v -114 v [42]. Quelques extraits de ce manuscrit ont é t é publi é s par A. Ter-Po ł osyan dans le D é veloppement de la pens é e biologique en Arm é nie (Er é van, 1960, p. 334)

Ter-Po ł osyan fait les remarques suivantes à propos de l' é poque de la r é daction de ce Livre de m é decine: «Nos anc ê tres, qui se sont beaucoup int é ress é s à l'aspect pratique des choses, se sont mis à é crire en arm é nien populaire dans la Cilicie arm é nienne. Ce Livre de m é decine  est probablement une œuvre de la p é riode cilicienne et il faut chercher le roi Xosrov à l' é tranger». L' é minent biologiste ajoute que le roi Xosrov en question est probablement Xosrov II Parw ï z, roi de Perse du VII e si è cle (590-628), et que l'original persan fut traduit probablement en arabe par la suite, et de l à en arm é nien [43]

Malheureusement, pour formuler ses suppositions Ter-Po ł osyan ne s'appuie pas sur des preuves linguistiques. En effet, un premier coup d'œil sur la langue employée dans cette hippiatrie donne l'impression que l'on se trouve en pr é sence d'une œuvre plus r é cente. Les termes d é riv é s de l'arabe - aspect tr è s particulier aux ouvrages scientifiques ciliciens - sont tr è s peu nombreux, et l'on trouve davantage d'emprunts faits au turc. Une langue simple, avec absence de particularit é s de l'arm é nien moyen

Ne poss é dant pas de renseignements pr é cis sur l'auteur ou sur le texte original de ce Livre de m é decine, et nous appuyant sur les seules donn é es linguistiques et stylistiques fournies par le texte nous pouvons dire que c'est probablement une œuvre originale. Peut- ê tre a-t-elle é t é r é dig é e dans un but utilitaire par un hippiatre qui a d û avoir plusieurs livres hippologiques à sa disposition, dont l'un portait le nom de Xosrov (sic)

Ce petit ouvrage hippiatrique, par l'ensemble de son vocabulaire, la description de certaines maladies, rappelle beaucoup le Trait é d'hippiatrie de Faradj, et cela peut provenir des sympt ô mes connus de toutes les maladies dont il est question

7. Ya ł ags jioy maraz í ew ureck‘i (Des maladies et des tumeurs des chevaux). - Texte d'une feuille écrit au XVIII e si è cle (apr è s 1710), sans indication de provenance, conserv é dans le manuscrit n ° 550 (pp. 18-9) du Matenadaran, o ù l'on enseigne brièvement la mani è re de soigner quelques maladies du cheval [44]

B ž škaran jioy ew arhasarak grastnoy (Trait é d'hippiatrie et des animaux en g é n é ral). - Le XIII e si è cle est une grande p é riode de l'histoire culturelle arm é nienne avec la floraison de la litt é rature et des arts, ainsi que des sciences appliqu é es. Rappelons que dans la seule ann é e 1263, d'apr è s les colophons du Livre de chimie (Girk  aruesti k‘imiakan), dont le manuscrit se trouve à la Biblioth è que nationale de Paris [45], des livres sur la fonte de l'acier, l'hippiatrie, la fabrication des é p é es et l'astronomie ont é t é traduits en arm é nien sur la recommandation du roi Het‘um I er. Ces livres, malheureusement, ne sont pas parvenus jusqu' à nous

«Ew ays xratnis, lit-on dans le manuscrit du Livre de chimie, ayl ’i het po ł pat šinelun ew mux talun er grac ’i noyn imastasirac‘n parsic‘ zor t‘ark‘manec‘ Het‘um t‘agaworn hayoc‘ yor ž am gnac‘ Z Ǝ R (18. 000) hecelov ’i veray t‘šnamwoyn Sultanin ew kotoreac‘ ew spareac‘ zamenesin, ew gnac‘ mecaw patuov ’i Pa ł tat ar Nsor xalifayn ew mec pargew ō k‘ darjaw. ew imastas ē r omn sarkawag Step‘anos anun gteal ar kaysrn, or ayn č ʻ ap azg azgi gir ew lezu useal' nman ara č ʻ i p ʻ ilisop‘ayic‘n ew o č kayr gir or ar nma o č gtan ē r. ew na sirec‘eal e ł ew ’i hayoc t‘agawor ē n vasn hz ō r gitut‘ean, ew xndreac‘ yark‘ay ē n ew et t‘argmanel erek‘ girs Vasn jioy payt ʻ arnman, ew Vasn t‘ri šineloy ew Vasn aregakan ew lusni arvestin ew bereal i hayoc‘ ašxarh» [46]

La r é alisation de livres se rapportant aux diverses mati è res scientifiques n'a pas é t é l'effet d'un hasard. L'Etat arm é nien s' é tait consolid é à l'int é rieur, ses relations politiques et économiques avec les pays voisins et lointains s' é taient é tendues, et la population vivait dans un é tat de paix satisfaisant. Pour affermir les assises politiques et militaires du pays et r é sister au danger venant de l' é tranger, les princes arm é niens devaient se consacrer au d é veloppement é conomique du pays, et plus particuli è rement aux progr è s de l'agriculture, à l'extension des é changes commerciaux int é rieurs et ext é rieurs.

Le Trait é d'hippiatrie qui fait l'objet de notre examen a é t é é crit, ainsi que nous l'avons dit plus haut, à la demande du roi Smbat III (1296-1298), au temps du catholicos Grigoris, par le m é decin syrien Faradj, avec la collaboration du p è re Toros qui en a é t é le scribe

Dans le colophon du manuscrit du Trait é d'hippiatrie le m é decin Faradj dit qu'il a «traduit» cette œuvre «de l'arabe en arm é nien»

L. A. Hovhannisyan, qui conna î t le mieux l'histoire de la médecine arm é nienne, dit que dans la litt é rature m é dicale du Moyen Age on appelait «traduction» tout travail effectu é à partir de textes  é trangers [47], et c'est dans ce sens qu'il faut interpr é ter l'expression «j'ai traduit» de Faradj

La comparaison de ce livre de chevaux avec d'autres ouvrages hippologiques arabes ou persans [48] nous permet de leur trouver une certaine ressemblance de contenu et de construction, mais aussi des diff é rences manifestes et des interventions r é dactionnelles, ce qui nous conduit à penser que le m é decin Faradj, tout en suivant les livres arabes de m é decine «qui disent», et «selon plusieurs philosophes, tels Djina, Abi-Y ū suf, al-Rash ī d et plusieurs philosophes de l'Inde et de Baghdad», composa sa br è ve et claire hippiatrie à l'image des œuvres de ceux-ci, mais sans leur complexit é et avec moins de d é tails [49]

En effet, il faut insister sur la complexit é de la composition des œuvres similaires arabes et persanes m é di é vales et leur caract è re extr ê mement d é taill é, particuli è rement en ce qui concerne l'importance attach é e aux couleurs et aux teintes insaisissables pour d é cider des qualit é s et des d é fauts des chevaux, ce qui surcharge d'autant la composition, rend difficile la compr é hension du sujet et laisse peu de place à la description et au traitement des maladies des chevaux. Par suite de l'int é r ê t superstitieux attach é à la couleur, des dizaines de pages sont consacr é es dans les livres persans aux é v é nements de la vie du proph è te Mahomet et de ses disciples, mettant l'accent sur la signification «b é n é fique» des diff é rentes couleurs des chevaux sur lesquels ils se trouvaient durant les combats. Dans le livre qui nous occupe, le m é decin Faradj donne moins de place à la description des couleurs et des teintes, et davantage aux soins, aux maladies et à leur traitement

La lecture du premier chapitre du Trait é d'hippiatrie du m é decin Faradj, qui a le caract è re d'une br è ve entr é e en mati è re, nous donne l'impression que l'on se trouve devant une œuvre originale r é dig é e par un chr é tien avec une certaine empreinte de la pens é e linguistique arm é nienne. Le mot ji est expliqu é selon l' é tymologie populaire, jig ə nt‘ac ʻ o ł ew arag aršawo ł; dans l' é num é ration des marques on trouve des caract è res arm é niens et dans la partie ayant trait aux talismans, un talisman à caract è res arm é niens. Le m é decin Faradj, qui a é tudi é et exerc é longtemps «dans la grande ville de Bagdad», ainsi  qu'il le dit lui-m ê me, fait souvent allusion à ses exp é riences pour indiquer le r é sultat positif obtenu dans tel ou tel cas, ou pour pr é coniser une autre m é thode [50]

On ne sait rien pour l'instant sur l'identit é du m é decin Faradj. Hovhannisyan, dans son Histoire de la m é decine é crit que «dans la p é riode en question nous n'avons trouv é aucune indication sur un m é decin ou v é t é rinaire du nom de Faradj parmi les médecins arabes plus ou moins connus» [51]

Le Trait é d'hippiatrie est compos é de 182 chapitres. Le premier chapitre, ainsi que nous l'avons dit plus haut, a le caractère d'une courte pr é face; les chapitres II-IV sont consacr é s à la reconnaissance des chevaux; les chapitres XI-XV à la grossesse et à la mise bas; les chapitres XVI-XXI aux couleurs, aux marques et aux boucles des poils (classification des poils boucl é s des chevaux); les chapitres XXII-XXXI aux soins; les chapitres XXXII-XLVII aux tares des diff é rentes parties du corps de la b ê te, tandis que les chapitres XLVIII-CLXXXII sont consacr é s aux diff é rentes maladies et à leur traitement

Pr é cisons que le titre de l'ouvrage ne correspond pas au texte, qui traite d'hippologie et d'hippiatrie uniquement. Cela provient de ce que - au dire des sp é cialistes [52] - au Moyen Age la science arabe dans ces livres - et celui-ci à leur image - ne diff é rencie pas l'hippologie de la zooth é rapie, ce qui permeta A č aryan de la classer en zooth é rapie [53]

Le travail du m é decin Faradj est celui d'un sp é cialiste consciencieux. Comme Mxit‘ar Herac ʻ i, il cite ses sources, rappelant les noms de ses auteurs aussi bien dans le texte que dans le colophon; en plus, il a dessin é le portrait du philosophe Djina au d é but du livre. Pour rendre son texte encore plus intelligible, il a dessin é avec beaucoup d'art un cheval, en indiquant pr è s de chaque membre ses qualit é s et ses d é fauts. Il é crit à ce propos (fol. 151)

Aynok‘, or č ʻ ē in gitawłk‘ ew č ana č ʻ o ł k‘ zawdvacoc‘ ew kerparanac‘ jioy, mek‘ hanak‘ zjioyn kerpn u grec ʻ ak‘ i x ēč am ē n zowdvaci zir orpisut ʻ iwnn, za łē kn u zpi ł cn

A propos de la langue du Trait é d'hippiatrie.

Le vocabulaire employ é dans le Trait é d'hippiatrie de Faradj est de la m ê me veine que les ouvrages connus du XIII e si è cle, tels le Code (Datastanagirk‘) du Conn é table Smbat, les Assises d'Antioche (Asizk‘ Antiok‘ay), traduit du fran ç ais m é di é val, et particuli è rement le Livre des travaux (Girk‘ vastakoc‘), traduit de l'arabe, l'Examen du corps humain et de ses maladies (K‘nnut ʻ iwn bnut‘ean mardoy ew norin c ʻ awoc‘) de Grigoris

A notre é poque de progr è s v é t é rinaires, alors que l'on é tudie attentivement les exp é riences des temps pass é s et la m é decine m é di é vale populaire, les ouvrages m é dicaux arm é niens du Moyen Age peuvent pr é senter aussi de l'int é r ê t, qu'ils soient originaux ou des traductions. On sait que jusqu' à la fin du Moyen Age tous ceux qui portaient le titre de m é decin s'occupaient aussi bien des gens que des b ê tes, et que les noms des maladies et des m é dicaments é taient les m ê mes, et que seules les proportions diff é raient

Dans le cas pr é sent, le Trait é d'hippiatrie est é tudi é par l'auteur à titre de contribution à la connaissance de la litt é rature arm é nienne m é di é vale. De m ê me que le Soulagement des fi è vres, é crit au XII e siècle par le plus grand repr é sentant de la médecine arm é nienne, Mxit‘ar Herac ʻ i, «en langage paysan et en prose pour ê tre compris de tous», un grand nombre de livres pr é sentant un int é r ê t utilitaire du XIII e si è cle (Livre des travaux, Livre de Chimie, etc. ), dont le Trait é d'hippiatrie de Faradj, sont r é dig é s en langue populaire. Ceci nous explique la pr é sence d'un grand nombre de mots compos é s arm é niens (105 mots) qui ne se trouvent pas dans nos dictionnaires classiques, et des termes hippologiques (146 mots) é trangers, principalement d'origine arabe ou persane - et m ê me quelquefois fran ç aise

Parmi les mots compos é s arm é niens nous trouvons: ar ō tkah (prairie), be č c‘aw (mal au dos), hovamut, mazberan (fente), ne ł hrel (serrer, presser), paxrec ʻ aw, smbakberan, k‘aštel (lieu d'attache de la sangle), etc.; parmi les mots arm é niens form é s à partir d'emprunts é trangers: ar ł apel (tordre, courber), gahlnal (s'amollir, tomber malade), č lel (couvrir de chiffons), mazk‘alel (raboter, polir), yaypel (tacher); emprunt é s de l'arabe: ahsaf (cicatrice), aysam (cheval ayant une ou deux pattes blanches), atala (muscle), ziar (sangle), xartas (papier appr ê t é, nous avons d é j à k‘art ē s, emprunt é au grec), xut‘ (luzerne), hat (limite), harun (cheval ent ê t é ), hart (mal à l'omoplate) mutla (couleur dor é e), mk‘uk‘ (mesure pour c é r é ales ou liquides), ya č (d é fense d' é l é phant, ivoire), nasay (nerf sciatique), samand (cheval à queue et crini è re noires), tahin (huile de s é same); emprunt é s au persan: zark‘ (jaune), cnur (du persan «znur», tube de verse pour absorber le sang), rasxut (antimoine), rk‘ep ( é trier), susani (bleu â tre), k‘ik‘k‘ (prunelles des yeux), etc

Dans certains cas particuliers, parall è lement aux expressions et aux mots é trangers on trouve la traduction du mot ou l'expression correspondante. Ainsi

Ǝ nt‘išarn, or t‘ark‘mani c‘rk‘iln u m ē kniln (fol. 94 v )
Yatasi, or t‘argmani ir spnaxayt (fol. 35);
Nek‘t‘af, or t‘argmani bēčcaw (fol. 98 v );
Nufax, or t‘argmani p
ʻ uk‘k‘ (fol. 97 v );
Šurnax, or k‘ac
ʻ parn (fol. 122);
Ya
ł ags darfayi, or ē zarkk‘ i ya č ʻ k‘n (fol. 117), etc.

Une partie des mots compos é s arm é niens ou emprunt é s, particuli è rement les formes iraniennes, avaient probablement cours dans le langage populaire, mais ne sont pas pass é s dans la litt é rature

Les quelques dictons suivants que l'on trouve dans le Trait é d'hippiatrie font partie du langage populaire. Ainsi

Na or šat janay` na šat gitenay (fol. 56 v );
A
ł vor ba ž neln i jioyn a žē za ł vor i vray kenaln (fol. 59);
Berd amur
ē ew zarknaw ł n ə mbereli (fol. 60 v );
T‘
ē jiawor es` na k‘o jiovn es (fol. 61)

Le jeu suivant, d é crit dans la partie hippique du Trait é d'hippiatrie est un fragment sur la vie sportive, témoignage important pour les é tudes ethnographiques (fol. 60 v )

Ayr omn jiawor dram mi m ē k otin nerk’ew dner ew dram mi m ē kaylin i hecelnin, ew xa ł ayr, ew šat mi ə r ə mbni kot ə rt ē r ew puhurt ē r (… ?), u erb tesnuin na hawn kayr i te ł in` dramn anxaxt nerk‘ew otinn

Les noms des plantes cit é es dans le Trait é d'hippiatrie, dont le nombre monte à plusieurs dizaines, m é ritent une attention particulière. On sait que la litt é rature arm é nienne m é dicale du Moyen Age se servait du Dictionnaire de Galien (Bark‘ Galianosi b ž škapeti), et à l' é poque m ê me de la r é daction de notre Trait é d'hippiatrie, vers la fin du XIII e si è cle, et plus pr é cis é ment en 1294, on recopiait le Dictionnaire m é dico-pharmaceutique (T‘argmanut‘iwn anuanc‘ de ł oc‘) [54]. Il se peut que le m é decin Faradj et le p è re T‘oros aient eu à leur disposition ce dictionnaire et encore d'autres, et qu'ils les aient utilis é s, mais il faut noter qu'il y a dans leur Trait é d'hippiatrie quelques noms de plantes m é dicinales, tels que gum, mtet, mormur, spungar, faxt‘, etc., qu'on voit pour la premi è re fois

On trouve aussi quelques noms de poids et de mesures dont on se servait à l' é poque en Arm é nie cilicienne, ce qui est tr è s int é ressant pour l' é tude de la vie é conomique de la Cilicie. Ce sont: Pa ł ta č i (= pa ł tatc ʻ i) kankun (fol. 45), qui vaut, selon le Trait é d'hippiatrie, Hayoc‘ erkrin kanknovn z ē d erek‘ hariwr kankun (fol. 45), litr pa ł tac ʻ i (= pa ł tatc'i), qui vaut hariwr u eresun dramakš ē r (fol. 41 v ), mk‘uk‘ (fol. 41 v ), nuki (fol. 103), kut (fol. 154), dram (fol. 119), t‘u ł t‘ (fol. 103), dang (fol. 154)

L'orthographe du manuscrit est aussi int é ressante à suivre. Le traducteur et le copiste n' é tant pas tr è s vers é s dans l'orthographe de l'arménien classique, ont quelquefois é crit le m ê me mot de fa ç ons diff é rentes, ce qui nous permet de mieux nous rendre compte de la prononciation arm é nienne de l' é poque

Tout ceci et plusieurs autres formes linguistiques du manuscrit enrichissent nos connaissances de l'arm é nien du Moyen Age et confirment l'appr é ciation d’A č aryan selon laquelle on se trouve bien devant un manuscrit «excellent par le texte et son é criture»

Les différents aspects de l'arménien du Moyen Age ont été étudiés par les célèbres arménistes A. Ayt ə nyan, Ł. Hovnanyan, J. Karst, M. Abełyan, H. Ačaryan, S. Łazaryan, A. Abrahamyan et G. Ĵahukyan [55]

La publication par l'Institut H. A č aryan de l'Académie des sciences de la R. S. S. d'Arm é nie des tomes I et II des Regards sur l'histoire de de l'arm é nien littéraire du Moyen Age est une nouvelle é tape pour ces é tudes, dont les auteurs (H. D. Muradyan, M. H. Muradyan, S. M. Ant‘osyan, L. S. Hovsep‘yan, P. K. Vardapetyan, L. L. Karapetyan), après avoir rassembl é les r é sultats des é tudes faites sur l'arm é nien du Moyen Age et à la suite des publications de textes faites ces dix derni è res ann é es ont r é examin é certaines hypoth è ses et certaines conclusions pour r é pondre aux questions pos é es par l' é tude du moyen arm é nien

Pour contribuer à l'examen du vocabulaire de l'arménien du Moyen Age l'auteur a ajout é à l' é dition du Trait é d'hippiatrie un important glossaire de termes obscurs, des mots compos é s nouveaux et des emprunts é trangers avec leur étymologie. On trouve dans ce glossaire un grand nombre de mots dont l'origine ne se trouve pas dans les dictionnaires publi é s à ce jour, ainsi que certains mots qui apparaissent pour la premi è re fois

Traduit de l'arménien par Léon T. Hatchikian


 



!      Armenian Studies/ Études Arméniennes, In Memoriam Haïg Berbérian, Ed by D. Kouymjian, Lisboa, 1986, pp. 105-123

[1]     H. Ačařyan, Mémoires, Erévan, 1967, p. 300 (en arménien). 

[2]     H. Ačařyan, Catalogue des manuscrits de Tabriz, Vienne, 1910, ms. 74, p. 137 (en arménien).

[3]     Sovetakan Hayastan, Erévan, 171, 24 juillet 1968. Le manuscrit a été décrit pour la première fois par E. Takayšvili ( Opisanie Rukopiseï, I, pp. 690-693). L. Melik‘set‘-beg en fait mention dans son article «Les Arméniens dans la littérature ancienne de Géorgie», Kełarwest, Tiflis, 1921, 7, p. 48 (en arménien).

[4]     S. K. Mežlumjan, La paléontologie à l'âge de pierre, de bronze et de fer sur le territoire arménien, Erévan, 1972, p. 89 (en russe).

[5]     Histoire du peuple arménien, t. I, Erévan, 1971, p. 374 (en arménien)

[6]     N. Harutjunjan, L'Agriculture et l'élevage en Urartu, Erévan, 1964, p. 210 (en russe)

[7]     Xénophon, Anabasis, trad. arm. Simon Krkyašaryan, Erévan, 1964, p. 98.

[8]     Xenophon in Seven Volumes, VII, Scripta Minora, trad. E. C. Marchetn et G. W. Bowersock (Leob Classical Library), Londre, 1968, pp. 296-369. Cette indication nous a été fournie par H. Bart‘ikyan

[9]     «The horses in this part of the world were much smaller than the Persian horses, but much more finely bred», Anabasis, Xenophon, The Persian Expedition, trans. Rex Warner, Baltimore, 1949, p. 155

[10]   Harutjunjan, op. cit., p. 174

[11]   G. K. Apʻinyan, «L'élevage du cheval dans l'Arménie ancienne», Matėriaux pour servir à l'histoire de l'agriculture et de la paysannerie en Arménie, t. I, Erévan, 1964, pp. 236-258 (en arménien).

[12]   Ibid., p. 248.

[13]   Opus Geographicum auctore Ibn-Haukal, éd. J. H. Kramer, Leyde, 1938, p. 346. Cette indication nous a été fournie par A. Ter-Łevondyan

[14]   Bazmavēp (1924), pp. 387-8.

[15]   Ališan, Sisuan, Venise, 1885, p. 31.

[16]   Ibid.

[17]   Ibid., p. 387.

[18]   H. Hakobyan, Récits de voyages, t. I, Erevan, 1932, p. 114 (en arménien).

[19]   Matenadaran, ms. 459, p. 104

[20]   Géoponique, Encyclopédie agricole byzantine du X e siècle; introduction, traduction du grec et notes par E. Lipšic, 1960, pp. 345-346 (en russe)

[21]   The Encyclopedia of Islam, 2ème ed., t. II, 1965, p. 786.

[22]   Pour les manuscrits hippologiques conservés dans les sections orientales des bibliothèques européennes, voir Hammer-Purgstall, «Sur la chevalerie des Arabes antérieure à celle de l'Europe», JA (1849), et L. Mercier, La Chasse et les sports chez les Arabes, Paris, 1927.

[23]   A. Haffner, Das Kitab Al Chail von Al Asmai, Vienne, 1895.

[24]   Ibn al-Kalbï and Ibn al-‘Arabï, Kitab asma khayl al-‘Arab wa fursanihim, éd. G. Levi Della Vida, Les «Livres de chevaux», Leyde, 1928

[25]   Voir la description du manuscrit chez Ibrahim Shabüh, Catalogue des manuscrits illustrés, t. III, Sciences, II e partie, Médecine, Le Caire, 1959, p. 169. Nous avons reçu avec reconnaissance du V. Mustahir, de la Congrégation franciscaine du Caire, les microfilms de ce manuscrit et d'une autre copie datant de 1209/10, tandis que B. Brentjes, orientaliste, nous a indiqué le lieu de conservation (Université de Halle, R. D. A. )

[26]   Ch. Rieu, Supplement of the Catalogue of the Persian Manuscripts in British Museum, London, 1895, p. 114. Nous avons reçu du British Museum, sur la recommandation du V. Nersessian, les microfilms de ce manuscrit ainsi que ceux des trois autres manuscrits illustrés persans du catalogue de Ch. Rieu ( Catalogue of the Persian Manuscripts in British Museum, v. II, 1966, pp. 480-482).

[27]   Qābūs ibn-Vishmkir Ziyär, Qābūs-nāmā, avec une introduction et des notes d'Abd al-Madjïd Badarï, Téhéran, 1342/1963, p. 105

[28]   Rieu, op. cit., ibid.

[29]   Zabardast Khan, The Faras-nama, ed. D. C. Phillot, Calcutta, 1911

[30]   Géoponique, pp. 345-6.

[31]   Livre des travaux, trad. de l'arabe, Venise, 1877, p. 209, note en bas de page.

[32]   Ibid., p. XV

[33]   S. Sarean, «K. Prockelman [Brocklemann] et la traduction arménienne du Livre des travaux», Bazmavēp (1900), pp. 4-7, 52-58 (en arménien).

[34]   G. Andrikean, «Le traducteur du Livre des travaux», Bazmavēp (1906), p. 439 (en arménien)

[35]   L. A. Oganesjan (Hovhannisyan), Histoire de la médecine en Arménie de l’Antiquité à nos jours, 2 e partie, Erévan, 1946, p. 171 (en russe).

[36]   Ačaryan commet une erreur dans sa description en écrivant que le manuscrit ne comporte ni lettres ornées ni ornements marginaux

[37]   Bazmavēp (1867), p. 354.

[38]   L. Hovhannisyan, qui n'a pas eu l'occasion de voir le Traité d'hippiatrie de Faradj, dans son Histoire de la médecine en Arménie, sur la simple description faite par Ačaryan trouve que ces deux textes sont différents. Cf. L. A. Oganesjan, op. cit., pp. 171-174

[39]   Sovetakan Hayastan, 24 juillet 1968, et L. Melik‘set‘-beg, «Les Arméniens dans la littérature ancienne de Géorgie», op. cit., p. 48

[40]   Nous avons fait la comparaison du texte géorgien en nous faisant aider par le jeune géorgiologue B. Čobanyan.

[41]   Takayšvili, qui a étudié le premier le texte géorgien, Opisanie rukopisei, p. 693, et qui n'a pas remarqué ce passage, compte 224 chapitres.

[42]   Voir la description du manuscrit au O. Eganyan, A. Zeytunyan, P‘. Ant‘abyan, Catalogue des manuscrits du Matenadaran, t. I, Erévan, 1965, p. 324 (en arménien)

[43]   A. Ter-Połosyan, Le Développement de la pensée biologique en Arménie, Erévan, 1960, p. 335 (en arménien)

[44]   Voir la description du manuscrit dans le Catalogue des manuscrits du Matenadaran, t. I, p. 346

[45]   F. Macler, Catalogue des manuscrits arméniens et géorgiens de la Bibliothèque nationale, Paris, 1908, p. 130 (ms. 248)

[46]   Bazmavēp (1867), p. 354; P. G. Zarphanalean, Traductions arméniennes anciennes, p. 558; Vahram T‘orgomean, «Les Manuscrits médicaux du couvent de Saint-Lazare», Bazmavēp (1924), pp. 387-8 (en arménien)

[47]   Oganesjan, op. cit., p. 173.

[48]   Traité d'hippiatrie, fol. 6-11

[49]   C'est probablement à cause de cela que Ačaryan, dans sa description du Traité d'hippiatrie considère le médecin Faradj et le P. T‘oros comme étant les «auteurs du livre» ( H. Ačaryan, Catalogue des manuscrits de Tabriz, p. 137).

[50]   Traité d'hippiatrie, fol. 65, 73, 78, 100, 101 v, 138 v.

[51]   Oganesjan, op. cit., p. 173.

[52]   The Encyclopaedia of Islam, 2ème ed., vol. II, 1965, p. 786.

[53]   Ačaryan, Catalogue des manuscrits de Tabriz, p. 137. 

[54]   Pour plus de détails à propos de ces dictionnaires, voir X. H. Melik‘ Pʻarsandanyan, «Renseignements succincts sur le plus ancien dictionnaire médical qui nous soit parvenu», Bulletin des travaux de la section d'histoire de la médecine et de la biologie arméniennes, vol. II (1949), pp. 67-74; H. M. Amalyan, Les Monuments lexicographiques arméniens du Moyen Age, Xe-XVe siècles, Erévan, 1966, pp. 179-208. Dans son article, X. Melik‘-Pʻarsandanyan trouve que les deux dictionnaires cités ci-dessus sont les mêmes, tandis que H. Amalyan, bien qu'il n'ait pas eu à sa disposition le dictionnaire médical «Gagik-Het‘umyan» et ne s'est servi que de l'article du V. T‘orgomyan, Bazmavēp (1923), après une comparaison poussée les trouve différents. Nous-mêmes, après examen des photocopies du dictionnaire médical «Gagik-Het‘umyan», nous trouvons que ce sont des dictionnaires différents.

[55]   A. Aydənean, Grammaire critique de la langue vulgaire ou moderne arménienne, Vienne, 1866 (en arménien); L. Hovnanean, Recherches sur la langue vulgaire des anciens, cahier I, Vienne, 1897 (en arménien); J. Karst, Historische Grammatik des Kilikisch-Armenischen, Strassburg, 1901; M. Abełyan, «Chants anciens de troubadours», Bulletin scientifique, Tełekagir (1927), n os 2-3 (en arménien); H. Ačaryan, Histoire de la langue arménienne, t. II, Erévan. 1951 (en arménien); A. Abrahamyan, Les Partinipes arméniens et la signification de leurs forme s, Erévan, 1951, (en arménien); G. Ĵahukyan, Les Ouvrages grammaticaux et orthographiques dans l'Arménie ancienne et médiéval, Erévan, 1954 (en arménien); S. Łazaryan, L'Arménien moyen, t. I, Erévan, 1960 (en arménien).