Enfin
pour
achever
l'énumération
des
lieux
de
la
province
de
Lambroun
et
de
la
Cilicie
Pierreuse,
dont
nos
ancêtres
nous
ont
laissé
les
noms
dans
leurs
écrits,
il
ne
faut
pas
oublier
la
forteresse
de
Loulou,
l'une
des
plus
fortes
de
la
contrée,
à
l'ouest
de
Lambroun,
un
peu
vers
le
nord.
On
rencontre
le
nom
de
ce
château:
Loulou,
Loulon,
Λουλον,
dès
le
IX
e
siècle.
Les
historiens
byzantins
le
posent
près
de
la
ville
de
Tarse,
à
proximité
des
retranchements
des
montagnes
de
la
Cilicie
et
de
l'Isaurie,
et,
selon
Saint
Nersès
sur
un
plateau
commandant
l'entrée
de
la
Porte
de
Cilicos.
Les
Arabes
appelaient
cette
forteresse
Loulels,
Il
est
probable
qu'elle
tomba
pour
la
première
fois
entre
leurs
mains
à
la
fin
du
VIII
e
siècle
ou
au
commencement
du
IX
e;
ils
la
perdirent
bientôt.
En
832
l'émir
El-Mamoun
et
ses
fils
Motassem
et
Abbas,
l'assiégèrent
pendant
cent
jours
sans
pouvoir
s'en
rendre
maîtres;
sur
quoi
ils
confièrent
les
opérations
du
siège
à
un
autre
individu;
mais
les
paysans,
souffrant
de
la
faim,
s'unirent
aux
assiégés,
assaillirent
les
assiégeants,
et
furent
assez
heureux
de
faire
prisonnier
le
nouveau
commandant
des
Arabes
et
de
mettre
en
fuite
ses
soldats.
L'empereur
Théophile
aussi
de
son
côté
les
poursuivit.
Mais
ils
revinrent
bientôt:
l'émir
força
l'empereur
à
reculer
et
s'empara
de
la
forteresse.
Ce
fait
est
raconté
aussi
par
l'Arménien
Vartan,
qui
ajoute:
«Mamoun
s'empara
de
la
forteresse
très
forte
de
Loulou
et
resta
près
de
sept
années
dans
les
terres
des
Grecs».
Cette
place
eut
à
soutenir
un
grand
nombre
de
sièges;
tour
à
tour
aux
mains
des
Grecs
et
des
Arabes,
elle
souffrit
beaucoup,
fut
détruite
et
rebâtie
plusieurs
fois.
Restaurée
dans
la
seconde
moitié
du
IX
e
siècle,
durant
le
règne
de
Michel
III,
elle
servit
de
poste
d'observation
à
des
gardiens
chargés
de
signaler
par
des
feux
l'arrivée
des
Arabes.
Leurs
signaux
étaient
répétés
par
les
gardiens
de
l'observatoire
du
mont
Argée,
aux
environs
de
Césa-rée
et
de
là
par
d'autres
gardiens
de
montagne
en
montagne
jusqu'à
Constantinople.
On
comptait
huit
de
ces
postes
depuis
Loulou
jusqu'à
la
colline
de
Saint-Auxence,
qui
était
la
dernière
station
et
près
de
la
capitale.
C'est
de
là
qu'on
avertissait
l'empereur
dans
son
palais
de
Byzance
[1].
Lorsque
Loulou
se
trouvait
aux
mains
des
Arabes,
c'est
de
là
qu'ils
partaient
pour
leurs
incursions
en
Cilicie.
L'empereur
Basile,
ainsi
que
le
rapporte
Constantin
Porphyrogène,
fit
tous
ses
efforts
pour
la
leur
reprendre,
car
les
frontières
de
la
Petite
Cappadoce
allaient
jusque
là.
Après
trois
années
de
lutte
875-8,
il
y
parvint
enfin
et,
selon
l'historien
Cétrénus,
la
prise
de
cette
place
amena
la
capitulation
de
Mélvous,
peut-être
Molévon.
Au
commencement
du
XII
e
siècle,
Loulou
ainsi
que
d'autres
parties
de
la
Cilicie,
dépendait
du
Prince
d'Antioche,
en
vertu
d'un
traité
passé
avec
l'empereur
Alexis
[2]
l'an
1108.
A
partir
de
cette
époque
je
ne
trouve
plus
aucun
acte
relatif
à
ce
château,
dans
l'histoire
des
empereurs
de
Byzance.
Comme
la
puissance
des
Emirs
allait
en
s'affaiblissant,
cette
place
ne
fut
plus
regardée
comme
aussi
nécessaire
qu'aux
siècles
précédents.
On
rencontre
encore
quelquefois
son
nom
dans
nos
historiens
arméniens:
ainsi
S.
Nersès
l'an
1195,
trois
siècles
après
l'époque
où
nous
retrouvons
pour
la
première
fois
le
nom
de
Loulou,
dit
que
«cette
place
tombait
en
ruines
et
que
l'un
de
mes
frères,
Chahenchah,
la
rendit
de
nouveau
habitable
et
rebâtit
plus
solidement
cet
édifice,
que
les
Grecs
avaient
élevé
et
que
les
Ismaélites
avaient
détruit.
Ainsi
la
puissance
de
Léon
I
s'agrandit
et
il
put
étendre
la
domination
de
son
sceptre
jusque
sur
la
seconde
Cappadoce
dont
la
capitale
était
Tiana,
s'emparant
et
reconstruisant
cette
forteresse
pour
la
gloire
de
Dieu
et
la
sûreté
des
chrétiens».
Vingt
ans
plus
tard,
durant
la
vieillesse
et
la
dernière
maladie
du
roi,
Keykaous,
sultan
d'Iconie,
vint
assiéger
Gaban,
sans
parvenir
toutefois
à
prendre
cette
forteresse.
Il
s'empara
par
contre
de
Constantin,
neveu
de
S.
Nersès,
et
d'un
autre
Constantin,
qui
fut
dans
la
suite,
Régent
du
royaume,
et
les
amena
prisonniers.
Leur
captivité
dura
un
an
et
demi;
le
roi
Léon
livra
au
sultan
quelques
places,
entre
autres
la
forteresse
de
Loulou,
et
obtint
ainsi
la
délivrance
des
prisonniers.
Cet
acte
est
le
dernier
que
nous
trouvons
dans
notre
histoire
arménienne
relativement
à
Loulou.
Nous
pouvons
croire
cependant
qu'à
l'extinction
du
règne
des
sultans,
pendant
les
incursions
des
Tartares,
les
gouverneurs
arméniens,
s'emparèrent
de
nouveau
de
ce
château,
car
les
Tartares
leur
laissaient
les
places
frontières.
Soixante
ans
environ
après
la
suppression
du
royaume
des
Arméniens,
elle
était
encore
debout.
Nous
en
avons
la
preuve
dans
le
récit
de
voyage
d'un
gentilhomme
français,
Bertrandon
de
la
Broquière,
qui
visita
cette
région.
Après
avoir
passé
par
Gaban
et
les
vallées
des
monts
de
l'ouest,
il
s'avança
jusqu'à
Laranda,
et
vint
voir
en
passant
la
forteresse
de
Loulou
qu'il
appelle
Lève.
Selon
son
témoignage,
le
prince
de
Karamanie
y
avait
établi
une
douane
et
en
avait
confié
la
garde
à
un
Grec.
Le
voyageur
français
paya
deux
ducats;
on
lui
ouvrit
les
portes
de
la
forteresse
et
il
passa
plus
loin.
Quarante
ans
plus
tard,
les
Turcs
faisant
la
guerre
contre
les
princes
Karamans,
Mustapha,
fils
du
conquérant
Méhémed
II,
et
Ahmed
pacha,
assiégèrent
cette
forteresse,
qu'un
voyageur
vénitien
d'alors
appelle
une
ville
très
forte,
«una
città
fortissima
nominata
Lula».
Les
gardiens
de
la
place
n'étant
pas
habitués
aux
coups
de
feu,
se
rendirent
tout
tremblants
et
eurent
beaucoup
d'humiliations
à
subir
de
la
part
de
Mustapha,
qui,
après
avoir
placé
une
garnison
turque
dans
la
forteresse,
repartit
pour
Iconie
[3].
Ce
même
voyageur
vénitien
mentionne
une
autre
forteresse
du
nom
d'
Asers,
au
delà
de
Loulou,
avant
d'arriver
à
Héraclée.
Elle
devait
être
comme
la
précédente
l'une
des
forteresses
principales
et
célèbres
du
royaume
des
Arméniens,
laissées
à
ceux-ci
comme
les
autres,
par
les
Grecs
de
Byzance.
Asers
est
sans
doute
un
nom
déformé,
il
doit
correspondre
au
nom
arménien
d'
Asgouras.
L'histoire
de
cette
forteresse,
avant
l'établissement
de
la
dynastie
roupinienne,
est
assez
analogue
à
celle
de
Babéron
ou
de
Lambroun.
Elle
servait
de
demeure
à
la
famille
des
Nathanaël,
qui
vécurent
en
bons
rapports
avec
les
Héthoumiens.
De
quel
pays
était
originaire
cette
famille?
Je
ne
puis
le
préciser.
On
dit
qu'elle
était
venue
de
l'Orient,
tout
comme
les
Héthoumiens.
En
tout
cas
comme
ces
derniers,
les
Nathanaël
restèrent
attachés
aux
empereurs
grecs
et
leur
rendirent
de
nombreux
services;
ainsi
ils
s'allièrent
à
eux
contre
Thoros.
Ils
prirent
part
à
la
fameuse
bataille
de
Mamestie,
furent
faits
prisonniers,
ainsi
qu'Ochine
et
les
généraux
grecs,
et
furent
rachetés
en
même
temps
qu'eux,
comme
nous
avons
déjà
rapporté
ailleurs.
La
famille
des
Nathanaël
dut
s'éteindre
assez
vite,
tout
comme
celle
d'Abelgharib;
leur
château
passa
aux
mains
des
Héthoumiens.
Déjà
dans
les
premières
années
du
règne
de
Léon,
le
gouverneur
d'Asgouras
était
un
Héthoumien,
nommé
Vassag,
père
de
Constantin
(qui
fut
régent)
et
qui
depuis
1165
en
était
le
maître.
On
trouve
encore
une
fois
dans
l'histoire
le
nom
de
cette
forteresse,
mais
beaucoup
plus
tard,
en
1316.
Elle
appartenait
alors
à
Sempad
le
maréchal
qui
était
en
même
temps
seigneur
de
la
forteresse
de
Binag.
Mais
nous
n'avons
aucune
donnée
certaine
sur
sa
position;
c'est
encore
une
découverte
qui
reste
à
faire
pour
nos
successeurs.
[1]
Entre
Issame
et
la
colline
de
Saint
Auxence;
les
autres
quatre
observatoirs
sont
appelés
Equials(?),
Mamante,
Circus,
Mokillus.