Sisouan ou lArméno-Cilicie

Հեղինակ

Բաժին

Թեմա

  Un village célèbre, sur la rive gauche de l'Aléous, c'est celui de vahga, Վահկա, ou Vaca Baxà, selon les Grecs, et Féké ou Vaka, selon les Turcs. Il est bâti au pied d'un mont rocheux, isolé: c'est une place fortifiée tant par la nature que par l'art [1]. Les habitants sont pour la plupart des Arméniens ou des Afchars. Mourad d'Alep, y comptait 100 maisons d'Arméniens, en 1840; Bardizbanian [2] en comptait 200 en 1863: Tchihatchef qui y passa en 1853, y trouva 150 maisons entre les Arméniens et les Afchars. Actuellement, selon les dernières informations de la Compagnie cilicienne, il y aurait 300 maisons d'Arméniens. Ce lieu est un de ceux que nos ancêtres conquirent les premiers; ils s'y sont établis et y sono demeurés jusqu'à nos jours. Nos historiens et nos chroniques disent que Constantin, fils de Roupin, s'empara d'abord de la forteresse de Vahga et de plusieurs autres lieux en 1097 [3]. Thoros, son fils et son héritier, fit transporter à Vahga les trésors des princes grecs Mandaléens lorsqu'il s'empara de la forteresse avait été tué Kakig, roi des Bagratides. Nous avons rapporté ailleurs (p. 48) comment l'empereur Jean Comnène se rendit maître de Vahga.

Un historien byzantin (Cinnamus) dit qu'en même temps que de Vahga, l'empereur s'empara d'une autre place fortifiée qu'il appelle Καπνισχέρτι. On ne sait trop quelle peut être cette forteresse: c'est peut-être Gaban [4] .

Lorsque Thoros, fils de Léon, s'échappa de prison (1145), il s'empara, après Vahga, d'une autre forteresse que nos historiens appellent Ariudz (lion), mais dont je ne connais point la position. Ce même Thoros reconquit peu à peu, par les armes, la partie de la plaine, recherchant les villes florissantes pour y établir sa domination et s'éloignant de plus en plus de Vahga. Son frère Meléh le Tyran, qui lui succéda, quitta Vahga et choisit Sis pour résidence.

Durant le règne de ces deux princes vivait un personnage lettré, Enoch de Vahga, qui suivait le rite grec, méprisant les traditions de sa nation. Après avoir injurié les Grecs, il s'était mis de leur côté et même vivait avec eux, comme l'affirme Saint Nersès de Lambroun, dans sa lettre au moine Oscan ou Houssig.

Les successeurs de Meléh, ses neveux Roupin II et Léon, établirent leurs résidences dans les villes de Tarse ou de Sis: sous leur règne le château de Vahga servit de prison pour les hauts personnages. Léon y emprisonna Héthoum, frère de Saint Nersès. Nous avons déjà raconté comment ce Héthoum prit l'habit religieux et fut remis en liberté par Léon. Ce dernier emprisonna encore à Vahga, sa première femme dont il avait à se plaindre.

A part ces quelques faits, nous ne trouvons plus dans l'histoire que Vahga ait depuis servi comme résidence royale ou princière. Au XIII e siècle on trouve plusieurs chroniqueurs originaires de Vahga, entre autres les prêtres Etienne (1280) et Thoros. Dans la première moitié du XV e siècle (1430-1438), s'est illustré le Catholicos, Constantin de Vahga.

Il paraît qu'à cette époque une famille de cette place, famille sacerdotale (et même, selon une tradition, de descendance royale), s'appropria des saintes reliques du siége patriarcal (les bras droits des Saints, Grégoire l'Illummateur, Nicolas, Sylvestre et Barsam), et les conserva de génération en génération, comme un héritage Cette famille fut appelée Atchebaniank, «Gardienne des bras saints», ainsi que nous le verrons dans le mémoire des Catholicos de Sis. Quant aux églises de Vahga, nous n'en trouvons qu'une de mentionnée, dans un manuscrit du XIV e siècle; c'est l'église de la Sainte- Croix.

Pourtant, selon notre P. Luc Indjidjian, il devait y avoir à Vahga plusieurs églises, sous les vocables des Saints Archanges et des Saints Thoros, Minas et Georges, et aussi un monastère dédié à Saint Jean, situé à l'une des extrémités du village. On y voyait en outre les ruines d'un couvent, dont l'église était sous le vocable de la Très-Sainte-Vierge. Ce couvent avait été bâti, dit-on, par le Catholicos Nersès. Actuellement on n'a pas de donnée certaine sur ces monuments. C'étaient assurément une de leurs ruines que virent en ces lieux, en 1836, les explorateurs autrichiens venus pour y étudier le pays dans un but géographique ou pour y rechercher des mines. Lorsque Vahga est mentionné pour la dernière fois dans notre histoire, c'est à propos de sa prise par Chah-Souar, le Zulkadrien, en 1467.

Il ne faut pas oublier non plus de mentionner aux environs de Vahga, le monastère de Castalon, le patrimoine des fils de Roupin, à Vahga, l'une de leurs places les plus importantes. Depuis l'extinction de la dynastie des Roupiniens jusqu'à nos jours, ce lieu semble être resté tout à fait inconnu. Avant leur domination c'était sans doute un simple couvent; ils le choisirent pour leur tombeau. Selon le témoignage de Mathieu d'Edesse, ce lieu «était près de la forteresse de Vahga, dans les montagnes du Taurus». Le D r. Vahram, dit à propos de Constantin, seigneur de cette forteresse:

«C'est ici qu'il mourut en J. C,

Et fut mis à côté de son père Roupin.

Il fut enterré dans le couvent

Qui porte le nom de Castalon».

Quelques années après la mort de Constantin, (1099), on enterra dans ce couvent un moine nommé Marc, (1105), qui, retiré dans les monts de Coc, ( Կոկք, Կոկաց գաւառ ) s'était, dit-on, nourri d'herbes pendant 65 ans.

Ce dernier couvent de Castalon servit-il de résidence aux évêques d'Anazarbe, ville bien éloignée de Vahga, il est difficile de le croire. Pourtant l'historien royal dans sa chronique cite vers la fin du XII e siècle, en termes très clairs l'Abbé « Constantin, archevêque d'Anazarbe et supérieur de Castalon». Plus tard on trouve le nom d'un certain Jacques, évêque de Castalon vers le milieu du XIII e siècle, qui exhorta Mekhitar de Sghévra à écrire une notice sur les siéges patriarcaux. Je n'ai pas pu établir, si le siége d'Anazarbe était situé dans ce couvent lointain, ou bien dans un autre du même nom, situé près de la même ville. En effet, dès les temps anciens on connaissait deux villes du nom de Castavala ( Καστάβαλα ); dont l'une presqu'au centre de la Cilicie et siège du métropolitain d'Anazarbe, est citée dans l'énumération des siéges patriarcaux. Le village actuel de Kastal, à 6 ou 8 kilomètres au sud d'Anazarbe, et à l'ouest d' Osmanié, marquerait l'emplacement de cette ville: Osmanié, au dire de quelques savants, s' appelait autrefois Hérapolis. L'autre ville de Castavala était située au pied des montagnes du Taurus, non loin de Tyana, à l'endroit se trouvent actuellement les ruines d'un village que les Turcs appellent Késtughine. On trouve encore en cet endroit des débris de grandes colonnes et des pierres funéraires taillées en croix. Il y a tout près un couvent désert appelé Vénk, par les Turcomans Foursakh; Վանք en arménien signifie couvent.

Au sud de Vahga, le Sarus reçoit un petit affluent, près du village Bélén. Le fleuve contourne ensuite le mont Kérès ou Kirèze; sur ses rives se trouvent plusieurs villages dont l'un porte le nom du mont Kérès; un autre, près de la même montagne, s'appelle Thapan ou Thapan-oghlou: il est situé sur le chemin public qui va de Sis à Hadjine. On voit encore dans ce dernier village des restes de bastides, ouvrage des Kozans, qui campèrent dans ces lieux lors de leur révolte contre les Turcs, en 1865.

La dernière statistique ottomane donne pour Thapan, 267 Arméniens et 726 Turcs. Près de ce village on cite à l'ouest le village de Thénkerli, et au sud, ceux de Thokmali et de Tache- kueupru (Pont en pierre).

Dans le Sarus se jette encore une autre rivière, un peu plus en amont; elle est bordée de platanes, et Kotschy voudrait l'appeler «Rivière des platanes». Il cite à propos de cet endroit plusieurs espèces de plantes communes et des pins d'Alep. Au milieu des platanes et des vignes, il trouva sur la rive droite de la rivière, un village aux maisons dispersées. Près de , s'élève la montagne calcaire d' Osgouhan ou Osguihan Ոսկուհան, ոսկիհան, (mine d'or). Elle est entourée d'un terrain rouge brique, dans lequel pousse la scorzonère qui y atteint deux pieds de haut. Les paysans donnent à cette plante le nom de Kara-richan. On y voit encore des collines rocheuses d'un aspect volcanique.

A huit kilomètres de Thapan, au nord de Bélén et de Vahga, sur la rive droite du fleuve, on trouve le village appelé Gulluchène. C'est que fut capturé Youssouf le Kozan, en 1865, pendant qu'il excitait les villageois à la rébellion, il fut trahi et livré par eux.

A l'est de ces villages et du fleuve, se trouve le bourg de Houd ou Koud. En 1836, c'était la résidence d'été du chef de la tribu afchare de Karsandli, le bey Samour ou Samara; mais pendant l'hiver il habitait dans le bourg de Bélén; lors du voyage d'exploration de l'officier géologue Rousseger (11 août, 1836), il se trouvait à Houd. Le voyageur Téxier qui avait visité ces lieux quelques jours auparavant (le 22 juin), loue la fertilité du sol, la richesse de la végétation, surtout des pins et des sapins. Il y trouva aussi des pétrifications de coquillages. Il dit avoir passé par un petit vallon étroit, dont l'entrée était gardée par une forteresse: lors de son passage plusieurs parties des anciennes constructions étaient encore debout. Actuellement cette place est complétement ruinée.

Ce qui fait surtout la renommée de ce pays, ce sont ses mines. On trouve du fer dans toute la partie qui est couverte de calcaire, de serpentine et d'ardoise; elle s'étend de Houd jusqu'aux frontières de la province de Sis, des deux côtés du fleuve. Aussi cette vallée est appelée Baker-ovassi, (Vallée du fer). Les habitants en exploitent les minerais depuis les temps anciens. Ces mines étaient exploitées aussi au temps de la domination arménienne, et nos princes payaient pour cela un tribut aux Egyptiens, qui s'élevait chaque année à 1, 000 tables de fer, plus des clous et autres objets. (Traité entre Bibarse et Léon II, en 1282).

En 1836, vers la mi-août, deux géologues autrichiens, Ghensberg et Slabey, conduits par Rousseger, examinèrent ces lieux: le minerai se trouvait surtout en abondance près de Kouléli, village au sud de Houd, l'on voyait encore à cette époque, d'anciennes ruines, près de Vahga, de Bélén, de Inek-tépéssi, du hameau de Féyline, de Ouroum-nahiéssi et d'Akharcha. Passant au sud de Farache, ils en trouvèrent près de Tipi-dérésssi, et enfin sur la rive droite du Zamanti, entre ce fleuve et la chaîne des monts Ala-dagh, s'élève le mont Baker-dagh.

Le baron Léon possédait plusieurs forteresses dans cette région, parmi lesquelles, outre celles de Tzakhoud et de Vahga, devait se trouver celle du Garmir-liaren (Mont-rouge), mentionnée par nos historiens. Ce mont Rouge est peut-être la montagne que les Turcs appellent de nos jours, Kezel-dagh, (ce qui signifie de même, Mont rouge), et qu'il ne faut pas confondre avec le Kezel-tépé (Pic rouge). Peu importe que le mont Garmir ait fait partie du domaine de Léon ou non, il nous suffit de savoir qu'il était déjà connu comme un lieu de refuge du temps des Roupiniens. Les seigneurs de ces différentes forteresses s'occupèrent non seulement d'élever des fortifications contre les ennemis du dehors, mais bâtirent encore des sanctuaires et des écoles; ainsi il faudrait encore chercher dans les environs du mont Garmir, le Couvent du même nom.

Cela est confirmé par Etienne Orpélian dans sa lettre au Catholicos Grégoire d'Anazarbe, dans laquelle il dit: «Pendant que moi humble, je me trouvais chez votre magnificence, les moines de la Montagne Garmir, nous ont ennuyés par leurs accusations, (ils attribuaient à Grégoire une inclination exagérée envers les Latins), «et le roi (Léon II) et tous le concile prêtant foi à de telles accusations, ne voulurent pas vous oindre à la dignité de catholicos, vous, qui étiez l'élu du Saint Esprit», l'an 1286, après la mort du Catholicos Jacques.


[1] L'historien grec Nicétas affirme cela dans la vie de Jean Porphyrogène. ' Εφ ̉ ου ̃ περ η ̉ με ̀ ν φύσις τη ̀ ν πέτραν  α ̀ νεδωωχεν, η ̉ δε ̀ τέχνη τείχεσι περιε ̀ βαλε χαι ̀ ε ̀ χράτνεν. 

[2] Tous deux écrivains arméniens modernes.

[3] C'est ainsi qu'écrit le continuateur de la chronique de Mekhitar d'Ani: «Il s'empara aussi du célèbre château de Vahga, il établit son siège, et de il se rendit maître de plusieurs autres lieux». Toutefois quelques historiens en parlant de la manière dont ce château fut pris, affirment que ce fut par une surprise. Durant la grande foire du lieu, Constantin envoya des hommes déguisés comme des négociants, qui, au milieu du public, dégainant tout-à-coup leurs épées cachées sous leurs habits, s'élancèrent dans la forteresse et s'en emparèrent.

[4] Dulaurier aussi est de la même opinion, et il veut lire Gabnitz-pert, ce qui signifierait château de Gaban ou château des liens, peut-être mieux encore, Forteresse des passages étroits.