Sisouan ou lArméno-Cilicie

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  Le fort de Hamousse, comme nous l'avons indiqué, est à l'est de Thil de Hamdoun: probablement il fut pris par Thoros II en même temps que cette dernière place. On trouve dans un mémoire que l'an 1165, un Grec, duc de Hamousse, tua Stéphané; d'un autre côté l'historien royal affirme seulement que Stéphané «fut livré traîtreusement par l'inique duc des Grecs du territoire des Ciliciens, devant Hamousse». Ce dernier château finit cependant par tomber sous la domination arménienne, et à la fin du XII e siècle le seigneur de la forteresse était un certain Arévkouyn; après lui, l'an 1259, elle eut pour maître un certain Vahram, gendre du connétable Sempad. C'est ce même Vahram, qui faillit périr dans la bataille de Mountas, comme nous l'avons déjà dit ailleurs, et fut sauvé par son courageux beau-père. Hamousse fut pris l'an 1266 et dévasté par les Egyptiens; et ce qu'ils ne purent pas ruiner, fut détruit trois ans plus tard (1269), par un grand tremblement de terre. Mais il paraît que, comme les autres châteaux, Hamousse aussi fut restauré; car les Egyptiens en 1337 l'avaient exigé dans le nombre des cinq forteresses. Si l'historien allemand Weil lit bien le nom, le fort Houmey-masa, cité par les historiens arabes, serait le même que Hamousse.

La dernière année du royaume des Arméniens, il est fait mention d'un Léon de Hamousse, qui fut envoyé en députation auprès de Léon V, le dernier roi.

 

La première et la principale de toutes les forteresses de cette contrée, c'était Haroun, écrit en latin Haronia, Haronie, tantôt Aronie, Airone. Construite probablement par le calife Haroun-al-Rachid: elle était située dans la région sud-ouest du Djahan, non loin des districts Djegher et Ayas. A la fin du XII e siècle le maître de ce château portait le nom de Léon; après lui c'est Godefroi ou Jeofroi qui en est le maître; il fit ensuite partie du domaine royal. Héthoum I er, avec le consentement de la reine Zabel, accorda, par un édit spécial, cette forteresse et ses dépendances, aux Chevaliers Teutoniques. Ceux-ci, comme nous l'avons vu, avaient déjà reçu de Léon le château d'Amouda avec d'autres villages et possessions, en signe de gratitude pour leurs services et pour leur promesse de défendre le royaume des Arméniens. C'est pourquoi, dit-on, Héthoum et la reine Zabel leur étaient liés, comme un frère et une sœur, et leur avaient accordé la forte et belle ville de Haronia. Ce sont le grand maître Hermann et le commandeur Littold, qui reçurent la donation.

Ne possédant pas l'original arménien, nous publions ici la traduction contemporaine latine.

 

De civitate Haronia cum suis pertinentiis, que dedit Domui (Teutonice [1] ) Eython, Rex Hermenie.

 

Voluntate beneficii Dei Patris et gracia Domini nostri et Salvatoris (a) Jhesu Christi et beneplacito Sancti Spiritus, ego Eython, Christi Dei fidelis Rex Armenie, filius Costantini stirpis regie, et Elisabeth (b) Regina ejusdem, filia quiescentis in Christo Leonis Regis. Notum facimus vobis, qui nunc estis et qui post futuri estis, quod dedimus, ut petiit, Dei habitaculo domui Hospitalis Alemannorum, per manus sancti et religiosi Magistri Fratris Hermani [2] et dilecti Dei Comendatoris Fratris Lutoldi (c), nominatam et speciosam civitatem Haroniam cum sui dispositione confinii, sicut est contiguum et separatum, secundum quod Dominus Gaufridus (d) habebat, quando Haronie dominus erat; quod nominamus singillatim cum abbaciis, casalibus, gastinis, terra, aqua, molendinis, prodiis, montibus, collibus et fructiferis planis, et omnibus fructibus et pertinentiis et possessionibus. Quia vidimus sanctam et religiosam Domum Hospitalis Alemannorum impletam et refertam omni bonitate in omnibus et per omnia cruce signatam et militantem contra inimicos crucis Christi, et per ipsum vincentem in adversarios in preliis, et ornatam et confortatam in servicio infirmorum, et semper sibi provident in dona pauperum, et receperunt nostrum regnum (a) in veram fraternitatem et sororitatem. Modo autem amplius conjuncti sumus, non ficto amore set verissimo vinculo, sicut confitentur nobis servare et tueri regnum nostrum ab omni parte, sicut veri fratres et inseparabiles amici, secundum mandatum Christi Dei nostri, quod est diligere invicem, et in hoc discipulos ejus fieri; sicut sancte Domus Alemannorum fratres perficiunt omnem legem scriptam et christianam, et pro transitoria vita voluerunt et emerunt immortalem et eternum regnum Dei, sicut scriptum est: «Ubi ego sum, illic et minister meus erit»; et iterum: «Ubi duo vel tres congregati fuerint in nomine meo, ibi ego sum in medio eorum». Propter hoc, sanctam domum istam Dei habitaculum appellamus et volumus ipsorum participes fieri in omnibus hiis bonis, et dedimus eisdem supra nominatam civitatem Haroniam cum terra sibi contigua et separata, cum suo confinio, sicut dispositum est, et nunc recordamur per partes sigillatim: Civitatem Haroniam, cum molendinis, abbaciam Ovide, abbaciam Sancti Mamas, abbaciam Sougre [3] , casale Lalyan (b), casale Costinos, casale Goustgenache (c), casale Gausquigne, casale Cherrare, casale Chacorin (d), cum suo molendino, casale Cainchequice (e ), Aguechemoin; castine, Sanctum Danielem, Davenim, Saargague, Sanctum Thoros, Cievaverac pirt, Quiang Thelague (f), Mautrigue Pert, Guenecch, Hachoudage (g), in quo sunt regis rustici et unus rusticus domini Mich æ lis d'Andraple, et alii regis ligiorum hominum rustici, et domini Baugdin (h) Emerance (i). Illos rusticos si volunt fratres dimittere in sua terra, dabunt sicut ante erat costitutum, ut darent medietatem redditum qui dicentur armenice engague [4] Haronie, et cetera dominis suis. Sin autem accipiet unusquisque suos rusticos et exibit de suo loco (k), et remanebunt illa loca cum suis rebus integre, et erit terra in mandato fratrum, secundum quod est intra eorum confinium.

Igitur predictam civitatem et terram pretaxatam quam nominatim recolimus et per confinia distincximus, dedimus angelice legionis fraternitati Hospitali Alamannorum in perpetuam et permansuram hereditatem, qui nunc sunt et qui post futuri sunt. Non ergo habeat aliquis potestatem in tota regione Armenie de subditis nostris, neque magnus, neque par vus, sancte Domui et spirituali fraternitati, vim vel molestiam facere, neque de confinio, neque de pertinencia minuere; sed sit Hospitalis Alemannorum supranominate et distincte terre, auctoritas ex nostro magnifico mandato. Propter hoc, ergo dedimus nostrum gratuitum Privilegium: et ut majorem habeat firmitatem, manu regia subscripsimus et sigillavimus aureo sigillo nostro.

Datum januario mense, xxaija die, anno Armenorum DCXLXXXV o (l), indictione ixa, per manus Manuelis Cancellarii.


[1] Le dos du manuscrit de Venise porte cette note: «Rescriptum Privilegij Regis Armenie super bonis Baronie»: mais je crois que c'est par erreur qu'on a écrit Baronie au lieu d'écrire Haronie.

[2] Hermann de Salza turingien, était le quatrième chef de l'ordre des chevaliers Teutons; il devint le premier par ses mérites, ayant accompli beaucoup d'actes de bravoure et de bonté durant les trente années de sa direction (1210-1239). Dans les première années (1212) s'étant rendu à Antioche et en Arménie, il obtint de Léon en donation, le château d'Amouda; pendant ses dernières années (1236), étant de nouveau retourné à Sissouan, il reçut de Héthoum le château de Haronia. Il avait acquis encore d'autres possessions en plusieurs lieux de la Syrie, et il y avait fondé des maisons pour les chevaliers de son ordre, comme il l'avait fait en Occident. Il jouissait de la sympathie et de l'estime du Pontife romain, ainsi que de l'empereur Frédéric II, et il faisait tous ses efforts pour les reconcilier. Il passa ses dernières années en Italie et mourut dans la ville de Salerno.

a. Dans l'exemplaire de V. Langlois ou de Berlin, ces deux mots: «et Salvatoris», manquent.

b. Dans l'exemplaire de V. Langlois, Ehelisabeth.

c. Id. Id. Littoldi.

d. Id. Id. Gofridus.

[3] On pourrait le prendre pour Chougher Շուղր; mais ce n'est pas le célèbre couvent situé au sud d'Antioche.

[4] L'impôt foncier que les sujets payaient au gouvernement, pendant la dynastie des princes de Sissouan, s'élevait à la cinquième partie des revenus annuels, comme l'affirme aussi Sempad dans son livre des lois, (Ch. I. ). En effet, Engague, en arménien Հնգակ Hengag, signifie la cinquième partie. Langlois pense que le mot du texte arménien devrait être yeg ( եկք ), signifiant les revenus ou les rentes du gouvernement; mais cela n'est pas admissible.

a. L'exemplaire de Langlois, negocium.

b. Id. de Venise, Loulian.

c. Dans Langlois, manque Goustgenache.

d. Exemplaire de Venise,  Cachorin.

e. Id. Cainthequece.

f. Id. Langlois,  Quiang, Telagre, Id. Mautrigue, Port.

g.  Id. Id. Hachoudagre.

h.  Id. Id. Baudin.

i. Id. de Venise,  Hemarance.

k. Id. Langlois.  exibit de loco.

l. Dans l'exemplaire de Venise la date est mal marquée et presque effacée. Ce qu'écrit Langlois DC et quadragesimo octagesimo , est étrange et privé de sens, car on doit le lire 600 et 40 et 85.