La
hauteur
du
fleuve
au-dessus
du
niveau
de
la
mer
est
de
3,
500
à
4,
000
pieds
en
cet
endroit.
Ce
qui
contribue
surtout
à
rendre
le
passage
si
étroit,
ce
sont
les
amas
de
pierres
et
de
blocs
de
rochers
entre
le
fleuve
et
les
monticules
qui
le
bordent,
dont
le
principal,
le
Gulek-tépé,
au
nord
de
la
Porte,
est
haut
de
5,
000
pieds;
sur
un
autre
rocher
à
pic,
d'une
égale
hauteur
à
peu
près,
mais
du
côté
de
l'ouest,
s'élève,
depuis
des
temps
immémoriaux,
la
célèbre
Forteresse
de
la
Porte.
Les
Turcs
appellent
Gulek-kalé
le
château-fort,
et
Gulek-boghaze
le
passage,
que
nous
nommons
Passage
de
Gouglag,
et
Forteresse
des
Portes.
De
la
forteresse
jusqu'au
bord
du
fleuve
propre
de
la
Cilicie,
vers
l'est,
l'espace
libre
est
un
peu
plus
d'un
kilomètre;
mais
à
partir
du
pied
du
mont
rocheux
qui
porte
la
forteresse,
le
passage
qui
forme
alors
la
véritable
porte
de
Cilicie,
va
en
se
retrécissant
de
plus
en
plus
jusqu'à
ne
compter
que
8
ou
10
mètres
de
largeur,
laissant
à
peine
un
passage
pour
le
fleuve;
de
sorte
que
pour
passer
on
est
obligé
d'escalader
les
rochers
de
l'ouest.
C'est
peut-être
à
cause
de
cette
étroitesse
et
des
difficultés
qui
en
résultent,
qu'un
historien
des
Croisades
a
donné
à
ces
lieux
le
nom
de
Porte
de
Judas
[1].
Quoi
qu'il
en
soit,
de
la
possession
et
de
la
sauvegarde
de
ce
petit
coin
de
terre
ont
dépendu
durant
des
siècles,
la
fortune
et
la
tranquillité
de
tant
de
peuples,
parmi
lesquels
la
nation
arménienne
joua
aussi
son
rôle
important.
La
longueur
de
tout
le
défilé
est
évaluée
à
75
milles
environ.
Des
frontières
de
l'Iconie
il
se
dirige
vers
le
sud
jusqu'à
Mézarlik-khan,
considéré
comme
l'ancien
Mopsucrène,
à
l'entrée
de
la
plaine
d'Adana.
Cependant
la
plupart
des
auteurs
anciens
et
modernes
n'attribuent
au
défilé
des
Portes
qu'une
longueur
de
40
milles,
parce
qu'ils
ne
considèrent
que
l'espace
compris
entre
le
bourg
de
Mézarlik-khan
et
Podande.
Pendant
la
domination
romaine,
et
plus
tard
sous
celle
des
Byzantins,
ces
deux
places
déterminaient
la
frontière
des
provinces
de
l'
Arménie
(la
Seconde
Cappadoce)
et
de
la
Cilicie.
Mopsucrène,
actuellement
Mézarlik,
est
à
une
distance
de
8
milles
au
sud-ouest
de
la
Porte,
et
18
milles
au
nord-ouest
de
Tarse.
Autrefois,
c'était
une
petite
ville
assez
importante
par
sa
position.
Ce
qui
la
rendit
célèbre,
ce
fut
la
mort
de
l'empereur
Constance
II,
l'an
361.
C'est
à
partir
de
cette
localité
que
le
chemin
commence
à
monter;
il
s'engage
peu
à
peu
dans
les
bois
de
cèdres
et
est
bordé
d'une
végétation
sous-alpine.
Le
prêtre
anglican
Davis,
qui
fit,
l'an
1875,
une
excursion
depuis
Adana
jusqu'à
la
Forteresse
de
Gouglag,
en
allant
d'abord
de
l'est
à
l'ouest,
puis
au
nord,
mentionne,
dans
l'ordre
suivant,
quelques-uns
des
villages
et
des
bourgs
qu'il
a
rencontrés
sur
sa
route
[2].
Il
passa
d'abord
au
village
de
Zeitine
dont
il
trouva
les
habitants
attaqués
par
la
fièvre;
de
là,
à
Kazïk-bache,
village
formé
par
quelques
pauvres
cabanes
construites
avec
de
la
terre
ou
de
l'argile.
Il
évalua
à
deux
heures
de
marche
la
distance
de
ce
lieu
à
Tarse;
les
environs
du
village
lui
parurent
assez
bien
cultivés
et
verdoyants,
A
partir
de
cet
endroit,
il
s'engagea
dans
les
défilés
des
montagnes,
traversa
plusieurs
cimetières
et
arriva
à
Mélémendji.
Un
peu
plus
loin
se
trouve
une
halte
d'où
l'on
jouit
d'une
fort
belle
vue,
nommée
Yarameze-Cheshmé.
Cette
station
est
très
fréquentée
par
les
voyageurs
à
cause
de
la
source
dont
elle
a
pris
le
nom.
C'est
par
là
que
passent
presque
toutes
les
caravanes
des
marchands;
bien
que
le
terrain
soit
très
accidenté
et
montueux,
on
y
voit
cependant
des
champs
de
blé.
Notre
voyageur,
en
continuant
sa
route,
remarqua
à
une
demi-heure
du
chemin
une
vieille
forteresse
appelée
Dorak
(?),
et
d'autres
ruines
moins
importantes.
Le
chemin,
en
côtoyant
une
petite
rivière
bordée
d'oléandres,
conduisait
au
passage
rocailleux
de
Gouglag,
dont
la
première
station
est
Gueuslug-khan.
C'est
là
que
notre
voyageur
passa
sa
seconde
nuit,
(le
2
Juin).
Il
arriva
ensuite
après
un
trajet
de
deux
heures
au
milieu
des
montagnes,
à
Tchatal-tschéchemé.
Cette
dernière
localité
possède
deux
sources
où
les
caravanes
abreuvent
leurs
chameaux;
et
à
une
heure
et
demie
au
delà,
il
mentionne
encore
la
station
de
Sari-machik-khan
et
une
source.
En
cet
endroit
un
Grec
avait
ouvert
une
auberge
et
il
y
cultivait
un
peu
de
tabac.
C'est
à
partir
de
ces
lieux
que
commence
le
plus
étroit
des
défilés.
A
un
kilomètre
au
sud
de
la
forteresse
de
Gouglag,
s'élève
une
colline
rocheuse
d'une
hauteur
de
4,
000
pieds
au-dessus
du
niveau
de
la
mer.
Elle
est
appelée
Anananli-tépéssi,
et
elle
est
couronnée
par
d'anciennes
fortifications
en
ruines.
Entre
cette
colline
et
la
forteresse,
le
terrain
est
recouvert
de
vignes
et
de
jardins
fleuris.
Au
milieu
de
ces
jardins,
se
trouve
le
village
de
Tchoukour-bagh
(Vigne
creuse),
composé
de
trente
à
quarante
familles
turques.
Kotschy
y
séjourna
quelques
temps;
plus
tard
vint
le
naturaliste
Haberhaver,
son
compatriote,
pour
y
recueillir
des
insectes
et
des
papillons.
Ce
village
set
considéré
comme
une
partie
de
celui
de
Gulek,
qui
se
trouve
vis-à-vis,
à
l'ouest,
au
bord
du
Manouchag,
et
porte
le
nom
de
Kalé-kueuy,
à
cause
de
son
voisinage
de
la
forteresse.
Gulek
est
habité
par
les
Arméniens,
par
quelques
Grecs
et
par
les
Turcomans.
Il
y
a
environ
une
centaine
de
maisons;
elles
sont
toutes
construites
sur
la
pente
de
la
montagne;
à
l'extrémité
du
village
s'élèvent
l'église
des
Arméniens
et
la
mosquée
des
Turcs;
ils
vivent
ensemble
en
assez
bonne
harmonie,
au
dire
des
voyageurs.
Au
reste,
une
partie
des
Arméniens,
aurait,
dit-on,
apostasié,
il
y
a
un
siècle
et
demi,
et
aurait
embrassé
la
religion
musulmane,
pour
échapper
aux
persécutions
d'un
pacha,
nommé
Hassan.
Le
seigneur
de
la
place
était
alors
Mélémendji-oghlou.
La
rue
du
marché,
nommée
Gulek-bazar,
est
regardée
comme
un
quartier
à
part;
c'est
une
espèce
de
faubourg
formé
par
des
magasins,
qui,
au
nombre
d'une
vingtaine
de
chaque
côté,
bordent
la
rue
pavée,
large
de
7
mètres
et
longue
de
200.
Cette
rue
est
presque
entièrement
couverte
par
les
corniches
des
toits
qui
font
saillie;
les
passants
sont
ainsi
à
l'abri
de
la
pluie.
Les
boutiques
des
artisans
ordinaires
sont
au
rez-de-chaussée;
les
cafés,
les
pharmacies,
les
magasins
d'orfévrerie
se
trouvent
au
premier
étage.
Le
marché
est
très
fréquenté,
car
ce
village
est
le
principal
centre
de
la
Cilicie
Thrachée,
et
le
lieu
d'arrêt
des
caravanes,
soit
à
l'aller
soit
au
retour.
Les
habitants
sont
actifs
et
industrieux;
les
Turcomans
sont
pour
la
plupart
bergers
ou
vignerons.
Autant
que
le
permet
le
terrain
rocailleux,
tous
les
lieux
labourables
sont
couverts
de
vignes
et
de
plantations;
le
reste
du
terrain
est
garni
de
térébinthes,
de
styrax
et
de
platanes;
un
peu
plus
haut
que
le
village,
commencent
les
forêts
de
pins,
de
chênes,
de
sapins
et
d'autres
espèces
semblables.
Au
nord
de
la
place
du
marché,
au
bas
de
la
colline,
jaillit
une
source
d'eau
froide
et
agréable
au
goût.
La
fraîcheur
de
cette
eau
et
de
celle
de
deux
petites
rivières
qui
coulent
dans
le
voisinage,
assainissent
et
rafraîchissent
l'air
de
cet
endroit
et
en
font
un
séjour
des
plus
agréables
de
la
Cilicie.
On
a
à
l'ouest
du
village,
construit
un
pont
sur
le
fleuve
Manouchag,
qui
relie
le
village
à
la
route
de
Kantzé
qui
mène
au
pont
du
Cydnus
(Djéhennem-déréssi)
et
aboutit
à
Lambroun
et
à
Tarse.
Un
géographe
turc
dit
que,
l'an
1522
un
vizir
du
nom
de
Méhémmed,
fit
construire
un
caravansérail
près
de
la
forteresse
de
Gouglag;
je
crois
qu'il
devait
se
trouver
dans
ce
village.
C'est
en
effet
à
un
demi-kilomètre
au
nord-est
de
cette
localité,
que
se
dresse
le
rocher
qui
porte
à
son
sommet
la
plus
fameuse
des
forteresses
qui
défendent
les
Portes
de
la
Cilicie,
le
célèbre
château
de
Gouglag,
ainsi
qu'on
l'appelait
au
temps
des
Arméniens.
Les
flancs
de
la
colline
rocheuse
étant
couverts
de
cèdres,
l'aspect
du
château
n'en
est
que
plus
altier;
il
surplombe
les
passages
étroits
d'une
hauteur
de
1,
500
pieds
et
commande
à
l'entrée
des
Portes.
La
colline
est
formée
par
des
roches
calcaires,
disposées
par
couches
vers
le
sommet,
mais
mélangées
à
la
base.
On
y
trouve
une
quantité
de
coquilles
pétrifiées
univalves
ou
bivalves,
surtout
de
la
famille
des
Echinites;
il
y
a
aussi
diverses
espèces
de
coraux.
C'est
vers
l'ouest
qu'on
en
trouve
le
plus,
surtout
sur
le
susdit
Anananli-tépé.
On
rencontre
aussi
beaucoup
d'ossements
pétrifiés
dans
les
rochers.
L'espace
compris
entre
la
colline
rocheuse
et
les
Portes
est
très
escarpé,
rude
et
rocailleux;
il
est
recouvert
de
grands
blocs
de
rochers,
entassés
pêle-mêle.
Le
chemin
qui
est
maintenant
au
fond
du
vallon,
se
trouvait
autrefois
à
3
ou
4
pieds
plus
haut.
L'endroit
le
plus
étroit
a
tout
au
plus
7
ou
8
mètres
de
large
et
une
longueur
de
85
pas;
à
cet
endroit
des
rochers
de
5
à
6
mètres
de
hauteur
forment
une
muraille
naturelle
des
deux
côtés.
Le
côté
ouest
du
défilé
est
bordé
par
un
plateau
couvert
de
pierres,
qui
est
à
une
hauteur
de
300
pieds;
le
côté
est,
tout
couvert
de
blocs
de
rochers
et
de
pierres,
est
impraticable.
Dans
cet
espace
resserré
souffle
toujours
un
vent
frais.
Les
deux
pics
les
plus
élevés
qui
bordent
ce
passage
étroit,
ont
environ
700
pieds
de
hauteur.
Sur
la
paroi
du
rocher
de
l'ouest
on
voit
encore
les
restes
en
bas-relief
d'un
ancien
autel
sculpté
dans
le
roc.
On
y
découvre
aussi
les
traces
de
deux
inscriptions
mais
tout
à
fait
illisibles;
quelques-uns
ont
voulu
y
voir
des
caractères
grecs,
d'autres
des
lettres
cunéiformes,
d'autres
enfin,
parmi
lesquels
V.
Langlois
et
Davis,
ont
cru
y
reconnaître
des
lettres
latines
et
y
déchiffrer
le
nom
de
l'empereur
Adrien.
Ils
ont
également
cru
retrouver
le
portrait
de
cet
empereur
dans
la
figure
humaine
sculptée
sur
l'autel.
On
y
voit
également
les
débris
d'une
colonne,
que
Davis
a
considérée
comme
un
signal
de
mesure
itinéraire.
La
forteresse
de
Gouglag
est
à
présent
presque
entièrement
ruinée,
Quelques
pans
de
murs
et
des
tours
démantelées,
voilà
tout
ce
qui
reste
de
ce
château
fameux,
qui
a
vu
le
passage
de
tant
de
nations
et
qui
a
subi
tant
de
dominations
différentes,
parmi
lesquelles
celle
des
Arméniens
fut
remarquable.
Comme
on
peut
le
voir
sur
la
vignette,
cette
forteresse
est
longue
et
carrée,
les
bâtiments
se
dirigent
de
l'ouest
à
l'est.
Du
côté
de
l'ouest
et
du
sud,
il
y
a
encore
des
restes
de
tours
rondes.
Au
centre
de
l'enceinte
fortifiée
on
voit
les
ruines
de
plusieurs
maisons
qui
formaient
un
petit
village,
habité
encore
au
commencement
de
ce
siècle
par
quelques
familles
turcomanes.
Il
y
a
aussi
deux
citernes
creusées
dans
le
roc,
des
caves,
et
une
cour
ornée
d'une
colonnade.
(132
-
Plan
de
la
Forteresse
de
Gouglag
)
Quant
aux
constructions
fortifiées,
c'est
à
peine
s'il
en
reste
quelques
indices.
L'arc
de
voûte
de
la
grande
porte
est
encore
debout.
On
y
arrive
par
une
soixantaine
d'escaliers
gigantesques,
taillés
dans
le
roc,
et
dont
les
marches,
longues
et
basses,
ont
environ
un
pied
et
demi
de
large.
De
nos
jours
ces
escaliers
sont
battus
par
un
torrent
qui
s'y
précipite
d'une
hauteur
de
3
1/2
mètres.
L'entrée
de
la
forteresse
est
ombragée
par
deux
noyers
séculaires.
Près
de
ces
arbres,
disent
les
habitants,
il
y
avait
une
église
transformée
plus
tard
en
mosquée,
et
qui
devait
exister
encore
il
y
a
un
siècle;
mais
on
n'en
voit
pas
le
moindre
vestige
à
présent.
Les
murailles
de
l'ouest,
les
mieux
conservées,
dénotent
une
construction
assez
grossière;
la
partie
supérieure
est
construite
en
pierres
polies
d'une
belle
forme.
Le
château
proprement
dit
mesurait
300
pas
en
longueur,
et
100
dans
sa
partie
la
plus
large.
Sa
circonférence
est
de
1000
pas.
Du
côté
du
nord-ouest
tout
est
absolument
ruiné;
vers
le
centre,
on
trouve
encore
quelques
bastions
à
demi
ruinés.
Le
donjon
se
trouve
à
l'ouest
sur
un
avancement
à
pic
du
rocher.
L'intérieur
en
est
complètement
ruiné;
on
y
voit
les
traces
d'incendie.
Les
rochers
du
nord-est
semblent
avoir
été
garnis
de
remparts,
et
la
forteresse
devait
être
aussi
inabordable
de
ce
côté.
Il
y
a
sur
ce
versant
de
la
colline
une
fontaine
et
quelques
pâturages.
Du
côté
du
nord,
le
rocher
est
creusé
de
cavernes,
de
citernes,
et
de
caves,
peut-être
de
magasins;
le
plus
grand
a
deux
rangs
de
colonnes
et
un
vestibule.
Les
habitants
du
lieu
appellent
cette
grotte
artificielle
«le
marché»,
mais
plus
probablement
ce
n'était
qu'une
citerne.
Le
côté
sud-est,
surplombe
un
précipice
de
1,
500
pieds
de
profondeur.
Ce
n'est
donc
que
du
côté
de
l'ouest
que
la
forteresse
est
accessible,
et
comme
elle
couronne
une
sommité
isolée,
à
mi-hauteur
des
montagnes
des
alentours,
elle
était
tout
à
fait
imprenable
avant
l'invention
des
canons.
A
un
quart
d'heure
de
chemin
au
nord
des
Portes,
on
trouve
la
douane
et
la
poste.
A
une
demie
heure
de
là,
en
face,
au
pied
de
la
colline
qui
porte
le
château,
vers
l'ouest,
se
trouvent
les
mines
de
Gulek-madén;
c'est
là
que
l'on
raffinait
le
plomb
argentifère,
apporté
des
mines
du
mont
Boulghar-madén.
On
a
coupé
le
rocher
du
côté
du
nord
pour
livrer
un
passage
aux
ouvriers
des
mines.
On
a
aussi
ouvert,
du
côté
du
sud-est,
un
chemin
qui
conduit
à
Lambroun.
Les
principales
stations
qui
bordent
cette
route
sont:
Kétchin(?)
à
proximité
des
mines;
In-kueuy
à
un
demi-kilomètre
à
l'est;
de
là,
le
chemin
se
dirige
vers
le
sud,
passe
à
Eféler,
village
à
3
kilomètres
d'In-kueuy;
il
est
habité
par
des
Tur-comans
qui
ont
pour
principale
industrie
la
fabrication
de
vases
en
bois.
A
trois
kilomètres
environ,
plus
en
aval,
on
trouve
un
moulin
à
eau,
et,
en
continuant
d'avancer,
dans
la
direction
du
sud-ouest,
on
arrive
au
bout
d'environ
trois
quarts
d'heure
à
Bochelar,
puis
à
Télchén;
la
distance
de
ces
deux
localités
est
d'un
mille.
De
Télchén
à
Lambroun,
il
n'y
a
plus
que
4
kilomètres.
Voilà
tout
ce
que
nous
connaissons
aujour-d'hui
des
lieux
qui
avoisinent
la
célèbre
forteresse
de
Gouglag
et
le
passage
renommé
des
Portes
de
la
Cilicie,
l'un
des
plus
parfaits
qui
existent
au
point
de
vue
stratégique.
C'est
probablement
par
ces
défilés
que
passèrent
les
grandes
armées
des
Assyriens
et
des
Egyptiens,
et
après
eux
des
Perses.
Le
premier
des
passages
que
nous
connaissons
est
celui
de
l'armée
de
Cyrus
le
Jeune,
lors
de
sa
révolte
contre
son
frère
Artaxersès
II.
(400
avant
J.
C.
).
Xénophon,
son
allié
et
chef
des
Dix-mille,
a
rendu
plus
célèbre
encore
ce
défilé
en
le
citant
dans
son
Anabase.
Mais
à
cette
époque
ce
lieu
n'était
qu'un
simple
passage
resseré,
il
n'était
pas
fortifié;
les
mots
«
τ
α̉
ά̉
χρα
»
employés
par
l'historien,
semblent
n'indiquer
qu'un
simple
défilé
entre
les
montagnes,
et
comme
le
remarque
Ritter,
il
ne
se
sert
pas
du
mot
Πυ
̀
λας
expression
employée
plus
loin
pour
désigner
les
Portes
Syriennes.
Lorsque
Cyrus
arriva
dans
cette
région,
après
avoir
traversé
l'Iconie,
Syennesis,
roi
de
Cilicie,
occupait
le
sommet
des
montagnes;
mais
à
l'approche
de
Cyrus,
il
abandonna
sa
position
et
se
retira
dans
les
montagnes
des
Portes
Syriennes,
qu'il
abandonna
également
plus
tard.
Un
fait
à
remarquer,
c'est
qu'à
l'époque
de
cette
guerre,
la
femme
de
Syennesis,
la
princesse
Epiache
ou
Epiaxa,
se
trouvait
auprès
de
Cyrus;
celui-ci
l'envoya
par
un
chemin
plus
court
d'Iconium
à
Tarse.
Ceci
prouve
que
le
passage
de
l'ouest
entre
Héraclée
et
Soli,
dans
les
montagnes
Boulghars,
était
déjà
connu
alors.
On
croit
généralement
qu'une
partie
de
l'armée
d'Alexandre
a
passé
par
ce
dernier
défilé;
mais
le
héros
macédonien
avec
le
gros
de
son
armée,
passa
par
celui
de
Gouglag
dont
il
délogea
les
Perses,
commandés
par
Arzanès.
Ceux-ci
auraient
pourtant
pu
résister
facilement
aux
Grecs,
et
dans
un
passage
si
étroit,
une
poignée
d'hommes
résolus
auraient
pu
sauver
la
fortune
de
Darius,
ou
du
moins
retarder
sa
chute.
Au
temps
de
la
domination
romaine,
vers
la
fin
du
deuxième
siècle,
les
Portes
Ciliciennes
servirent
de
refuge
à
l'un
des
usurpateurs
du
trône,
Pescenius
Niger.
Celui-ci
fortifia
ces
lieux
afin
de
résister
aux
troupes
de
Septime
Sévère;
mais
ses
travaux
de
fortification
furent
ruinés
par
la
violence
des
torrents,
et
ses
soldats
défaits
par
ceux
de
son
adversaire
qui
était
de
beaucoup
le
plus
fort.
Dans
notre
siècle
encore
d'importantes
fortifications
furent
élevées
dans
ces
lieux,
durant
les
années
1839
et
1840,
pendant
l'insurrection
de
Méhémmed-Ali,
gouverneur
d'Egypte,
contre
la
Porte.
Ibrahim
Pacha,
après
avoir
défait
les
troupes
turques,
fit
commencer
les
travaux
de
fortifications.
Par
des
éboulements
artificiels,
il
ferma
plusieurs
défilés;
puis,
ne
pouvant
construire
ses
fortifications
dans
le
défilé
des
Portes,
(car
le
retrécissement
de
ces
lieux
ne
lui
eût
pas
permis
de
déployer
ses
troupes
comme
il
l'entendait
et
eût
rendu
le
feu
de
son
artillerie
trop
plongeant),
il
fit
construire
des
bastions
à
une
demie-heure
plus
au
nord,
près
du
village
de
Tékir
[3],
à
une
altitude
de
3,
000
pieds
environ
au-dessus
du
niveau
de
la
mer.
Il
confia
la
direction
des
travaux
à
un
ingénieur
polonais,
le
colonel
Schultz,
appelé
par
les
Turcs
Yousouph-agha.
La
ligne
des
retranchements
s'étend
sur
une
longueur
de
plus
de
deux
milles;
elle
va
du
sud-est
au
nord-ouest.
A
l'extrémité
sud
une
tour,
dans
une
position
très
élevée,
devait
servir
de
poste
d'observation.
Ibrahim
fit
aussi
établir
sur
la
cime
d'une
colline
une
route
bordée
de
fortifications,
qui
fut
nommée
Tabia.
Entre
la
tour
et
cette
route
il
fit
élever
diverses
constructions
militaires,
des
tranchées,
des
blockhaus
et
des
bastions.
Il
munit
la
place
de
120
pièces
d'artillerie
de
divers
calibres.
Il
rendit
ainsi
ce
passage
aussi
redoutable
que
son
armée,
et
confirma
le
dicton
des
Turcs:
Celui
qui
ne
craint
pas
le
Boghaze
Ne
craint
pas
Dieu.
Mais
tous
ces
travaux
furent
inutiles
pour
celui
qui
les
avait
fait
élever.
On
sait
comment
les
puissances
européennes
intervinrent
et
obligèrent
les
Egyptiens
à
renoncer
à
leur
campagne
(1840).
Ibrahim
se
retira;
il
fit
enlever
une
partie
des
canons
que
l'on
avait
eu
tant
de
peine
à
monter
au
milieu
de
ces
rochers
et
il
abandonna
le
reste
qui
fut
transporté
par
les
Turcs.
Lorsque
la
guerre
éclata
entre
les
Russes
et
les
Turcs,
en
1853,
ceux-ci
ruinèrent
le
plus
possible
ces
fortifications,
et
ils
emportèrent
tout
le
matériel
de
guerre
qui
y
avait
été
abandonné.
De
nos
jours
on
peut
cependant
remarquer
encore
parmi
les
décombres,
les
emplacements
et
la
destination
des
diverses
fortifications.
La
nature
s'est
plu
à
parer
de
ses
plus
belles
fleurs
ces
lieux
redoutables;
tous
les
voyageurs
admirent
la
beauté
pittoresque
de
ce
passage,
la
clarté
de
l'air,
la
fraîcheur
de
l'eau,
et
la
richesse
des
plantes.
Un
voyageur
anglais
(Ainsworth)
qui
y
passa
le
30
novembre
1839,
après
avoir
parlé
de
la
position
stratégique
et
des
derniers
travaux
des
Egyptiens,
donne
les
détails
suivants
sur
la
flore
de
ces
lieux:
«It
would
also
be
impossible
for
any
traveller
to
ride
the
whole
length
of
this
pass,
without
being
much
struck
with
its
varied
beauties....
till
the
Golek
Boghas
contains
by
far
the
most
numerous
and
varied
points
of
bold
and
massive
mountain
scenery
of
any
of
the
passes.
The
superior
height
of
the
mountains,
and
the
gigantic
scale
of
the
scenery
of
the
Alps,
does
not
allow
of
their
being
fairly
compared
with
the
chain
of
Taurus,
in
every
aspect
inferior
to
them;
but
the
able
illustrator
of
the
former
(M.
r
Brockedon)
would
also
find
much
that
would
be
highly
worthy
of
his
pencil
in
the
Golek
Boghas.
The
differences
of
elevation
between
the
two
will
no
doubt
be
hereafter
ascertained,
but
it
will
be
more
difficult
to
décide
upon
their
peculiar
claims
to
distinction.
There
are
in
the
Golek
pass
open
spaces
like
the
Vallais,
but
in
the
Vallais,
on
each
side,
are
long
continuous
mountain
ranges,
which
ultimately
(especially
to
a
pedestrian)
become
monotonous,
while
in
the
Golek,
mountain
succeeds
to
mountain
to
the
right
and
left,
and
vast
semicircular
precipices
support
broken
glaciers
piled
one
upon
another
in
such
profuse
confusion
and
inimitable
grandeur,
that
it
is
impossible
to
tear
oneself
from
a
scene
which,
wherever
one
turns,
presents
new
wonder.
In
its
more
rocky,
craggy
scenery,
the
Golek
is,
as
far
as
I
have
seen,
quite
unrivalled:
such
a
succession
of
fallen
masses,
rocky
projections,
and
steep
cliffs,
will
not
admit
of
description,
nor
would
they
be
represented
by
the
Trosachs
[4]
ten
times
magnified.
I
need
not
mention
the
vegetation
or
the
habitations
of
men,
as
adding
to
the
peculiarities
of
these
scenes:
but
one
thing
is
deserving
of
notice:
the
lammergeyer
or
the
condor
of
the
Alps,
is
rarely
seen
by
the
traveller,
except
at
height
at
which
its
size
and
strength
can
only
be
conjectured;
but
the
great
bare-necked
vulture,
which
represents
in
Taurus
the
condor
of
the
Andes
and
the
lammergeyer
of
the
Alps,
and
is
a
larger
bird
than
the
lasser,
may
be
sometimes
seen
in
dozen
together,
waiting
till
some
surely
shepherd's
dogs
have
had
fill
of
a
newly-killed
animal,
and
they
are
never
wanting
amidst
their
favourite
crags»
[5].
—
La
végétation
très
abondante
sur
tous
les
points,
est
surtout
riche
et
remarquable
dans
la
partie
méridionale.
On
trouve
sur
les
bords
de
la
vallée,
des
pins
à
longues
aiguilles
et
des
platanes
à
longues
feuilles;
les
vallons
sont
couverts
de
chênes
toujours
verts,
d'ifs,
de
platanes,
de
lauriers,
de
sycomores,
de
cognassiers,
de
pampres
et
de
vignes
sauvages,
à
l'ombre
desquels
croissent
l'arroche
bleuâtre
et
le
safran
jaunâtre.
Dans
les
vallons
plus
retirés
on
trouve
les
myrtes,
les
cornouillers,
les
oliviers
sauvages,
les
jujubiers,
et,
sur
les
bords
de
toutes
les
petites
rivières,
l'oléandre.
Sans
parler
d'une
infinité
de
plantes
et
de
fleurs
plus
petites,
dont
M.
r
Kotschy
cite
minutieusement
les
noms,
nous
rappellerons
cependant
l'
Arum
maculatum:
V.
Langlois,
l'a
trouvée
merveilleusement
belle;
il
en
parle
avec
admiration
dans
la
relation
de
son
voyage
en
Cilicie
[6].
Après
avoir
examiné
dans
notre
histoire
tout
ce
qui
y
est
dit
sur
la
position
de
la
Forteresse
de
la
Cilicie
et
tous
les
faits
politiques
qui
s'y
rattachent,
je
puis
affirmer
que
les
lieux
appelés
par
les
étrangers
Portes
ou
Passages
de
la
Cilicie
(Pylæ
Cilicisæ),
correspondent
à
la
forteresse
et
aux
Passages
de
Gouglag
des
Arméniens.
Le
rang
important
qu'occupait
cette
forteresse
parmi
les
autres,
la
mention
qu'en
fait
Sempad
le
Connétable,
ainsi
que
la
mention
faite
dans
l'édit
de
Léon
II,
accordé
aux
Génois
(1288),
où
il
est
parlé
des
deux
douanes,
comme
des
principales,
celles
d'Ayas
et
de
Gouglag,
enfin
le
témoignage
d'un
voyageur
français,
qui
visita
ces
lieux
peu
de
temps
après
l'extinction
du
royaume
des
Arméniens,
tout
prouve
cette
assertion.
Comme
les
Roupiniens
possédaient
déjà
la
plupart
des
passages
des
montagnes,
du
moins
les
principaux,
dès
la
seconde
moitié
du
XI
e
siècle,
il
est
probable
que
celui
de
Gouglag
se
trouvait
aussi
en
leur
pouvoir.
S'ils
n'avaient
pas
encore
fortifié
ni
établi
de
garde
à
la
place
qui
constitue
les
Portes
proprement
dites,
la
partie
supérieure
du
passage
étroit
que
les
Arméniens
et
les
voyageurs
européens
appelaient
«Col
de
Podande»,
était
déjà
en
leur
pouvoir.
C'est
à
un
de
ces
importants
défilés
en
possession
de
nos
ancêtres
que
fait
allusion
Mathieu
d'Edesse,
lorsqu'il
rappelle
le
passage
du
Taurus
par
la
grande
armée
des
Croisés,
commandés
par
l'immortel
Godefroi.
Selon
lui,
le
nombre
des
soldats,
cavaliers
et
fantassins,
s'élevait
à
200,
000;
et
il
dit
qu'ils
traversèrent
«le
territoire
de
Bythinie
et
de
Camirk
(Cappadoce)
et
arrivèrent
aux
Passages
difficiles
des
monts
Taurus;
l'armée
franchit
ces
défilés
étroits
qui
conduisent
en
Cilicie,
passa
à
Trovada
(Anazarbe)
et
arriva
enfin
à
Antioche».
Cela
n'indique
pas
bien
clairement
quels
étaient
ces
passages
difficiles.
En
comparant
les
divers
récits
des
anciens
chroniqueurs
européens,
des
examinateurs
sérieux
ont
fini
par
conclure
que
la
grande
armée
passa
d'Iconium
à
Héraclée.
Après
s'être
reposée
quelques
jours
dans
cette
ville,
la
plus
grande
partie
des
Croisés
se
seraient
avancés
vers
le
nord-est,
auraient
passé
par
Mariza,
puis
par
Alphia,
place
forte
dont
ils
s'emparèrent,
et
y
mirent
comme
gouverneur
un
prince
arménien,
nommé
Chemavon
(Siméon),
puis
se
dirigèrent
vers
Césarée,
passèrent
dans
une
ville
inconnue
de
nos
jours
et
citée
par
les
historiens
sous
le
nom
de
Plastentia:
quelques
auteurs
croient
que
c'est
Comana;
de
là
ils
arrivèrent
à
Coghisson
(Cucussus),
et,
selon
les
chroniqueurs,
furent
de
nouveau
obligés
de
franchir
avec
beaucoup
de
peines,
des
montagnes
«diaboliques
et
exécrables»
et
des
vallons
profonds,
pour
arriver
à
Marache.
Ces
vallons
sont
probablement
ceux
que
forme
la
vallée
du
fleuve
Djahan,
et
la
montagne
raboteuse
qu'ils
eurent
à
escalader,
doit
être
celle
qu'on
appelle
aujourd'hui
Akher-dagh.
Une
fois
à
Marache,
ils
avaient
devant
eux
deux
routes:
ils
pouvaient
se
rendre
directement
à
Antioche
ou
bien
passer
par
Anazarbe.
Selon
nos
chroniqueurs
orientaux,
c'est
cette
dernière
qu'ils
choisirent.
Mais
ce
qu'il
importe
de
savoir,
c'est
que
le
corp
principal
ne
passa
pas
par
les
Portes
de
la
Cilicie,
mais
par
des
passages
bien
connus
dans
les
montagnes
du
canton
de
Djahan,
non
loin
de
Zeithoun.
Avant
que
le
gros
de
l'armée
des
Croisés
eût
quitté
Antioche
de
Pisidie,
deux
corps
de
troupes
s'en
détachèrent,
l'un
sous
les
ordres
de
Tancrède
[7]
l'Audacieux,
l'autre,
sous
la
conduite
de
Baudouin
de
Bourg,
le
rival
de
Tancrède.
Selon
le
témoignage
des
chroniqueurs
latins,
ces
deux
troupes
choisirent
un
chemin
plus
court,
mais
plus
difficile
que
celui
du
reste
de
l'armée:
passant
le
vallon
de
Bodrentrotte,
elles
pénétrèrent
dans
la
Cilicie
et
vinrent
dans
la
province
de
Tarse.
Notre
historien
de
la
Cilicie
ordinairement
d'accord
avec
les
chroniqueurs
latins,
ne
mentionne
pas
cette
séparation;
mais
il
dit
que,
sur
le
conseil
des
princes
arméniens,
une
multitude
innombrable
passa
le
défilé
de
Podande,
puis
se
rendit
à
Adana
et
à
Anazarbe,
et
enfin,
dans
la
grande
Antioche.
Il
est
donc
probable
qu'une
partie
de
l'armée
des
Croisés,
sous
les
ordres
de
ces
deux
chefs
nobles
et
valeureux,
Baudouin
et
Tancrède,
aura
traversé
le
passage
de
Podande
et
les
Portes
de
la
Cilicie.
Ces
faits
eurent
lieu
durant
la
seigneurie
de
Constantin,
fils
de
Roupin,
l'an
1097.
Je
crois
qu'ensuite,
l'ancienne
forteresse
de
la
Porte,
ainsi
que
celles
de
Lambroun
et
de
Babéron,
furent
abandonnées
et
peut-être
même
ruinées.
Mais,
lorsque
la
domination
des
Arméniens
se
fut
étendue
sur
toute
la
Cilicie,
le
château
de
Gouglag
reprit
son
rôle
important
et
figura
parmi
les
principales
forteresses
du
pays.
Un
siècle
après
le
passage
des
premiers
Croisés,
sous
le
règne
de
Léon,
le
seigneur
de
Gouglag
était
Sempad,
probablement
de
la
famille
des
Hétoumiens,
peut-être
même
le
frère
du
régent
Constantin.
Dans
ses
mémoires,
l'historien
Connétable
parle
à
deux
reprises
différentes
du
château
et
du
défilé
de
Gouglag.
C'est
à
propos
des
incursions
de
Key-Khosrou,
sultan
d'Iconium,
les
années
1245
et
1246.
Guidées
par
le
Baron
Constantin,
seigneur
de
Lambroun,
propre
neveu
de
Saint
Nersès,
les
troupes
du
sultan
avaient
pénétré
dans
la
Cilicie
par
le
territoire
de
Babéron.
Pour
rentrer
dans
leur
pays,
elles
voulurent
passer
par
le
défilé
de
Gouglag
qui
leur
était
connu.
Ainsi
fut
fait;
«mais
le
roi
Héthoum,
le
régent
et
Sempad
le
Connétable,
les
poursuivirent.
Arrivés
dans
un
lieu
appelé
Maïdzar,
les
ennemis
en
grand
nombre,
firent
volte-face;
mais
les
Arméniens
encouragés,
parvinrent,
avec
l'aide
de
Dieu,
à
les
disperser
et
à
en
massacrer
un
grand
nombre,
chassant
le
reste
jusqu'à
Podande».
L'année
suivante
(1246),
le
sultan
rassembla
de
nouveau
une
grande
armée;
elle
franchit
le
défilé
de
Gouglag,
vint
assiéger
Tarse
et
ne
se
retira
qu'après
une
longue
résistance
et
d'après
un
traité
de
paix.
Nous
avons
déjà
rappelé
l'édit
de
Léon
II
en
faveur
des
Génois,
(1288).
Cet
édit
prouve
que,
dès
les
premiers
temps
de
la
domination
arménienne,
on
avait
déjà
établi
un
octroi
dans
ces
lieux.
Voici
par
exemple
les
taxes
que
l'on
payait
pour
la
soie,
à
Ayas
et
à
Gouglag
(l'ancien
traducteur
latin
écrit
Gogulac):
«Pour
la
charge
d'un
chameau,
25
pièces
d'argent
neuf
[8];
pour
la
charge
d'un
mulet,
19
pièces;
pour
celle
d'un
âne,
16,
etc».
La
taxe
variait
avec
la
nature
et
la
qualité
des
marchandises.
Sous
le
règne
d'Ochine,
au
commencement
du
XIV
e
siècle,
le
seigneur
de
Gouglag
était
son
frère
Alinakh,
ainsi
que
nous
l'apprend
un
mémoire
[9].
A
partir
de
cette
époque,
il
n'est
plus
fait
mention
de
Gouglag
dans
aucun
manuscrit
arménien.
Comme
nous
l'avons
fait
remarquer
plus
haut,
nous
trouvons
quelquefois
le
mot
Gaban
(passage
étroit)
qui
sera
confondu
plus
d'une
fois
avec
le
Gaban
de
Djahan,
et
souvent,
il
est
vraiment
impossible
de
savoir
duquel
de
ces
deux
châteaux-forts
il
s'agit.
Voici
ce
qu'écrivit
Bertrandon
de
la
Broquière
qui
passa
par
le
château
de
Gouglag,
cinquante-sept
ans
après
la
suppression
du
royaume
des
Arméniens.
«Nous
partîmes
donc,
tous
les
deux,
de
très
bonne
heure,
et
nous
montâmes
sur
les
hautes
montagnes
où
le
château
de
Cublech
[10]
est
situé;
c'est
le
plus
haut
château
que
je
sache.
On
le
voit
de
loin
à
deux
journées
de
distance:
cependant
quelquefois
nous
lui
tournions
le
dos,
à
cause
des
détours
de
la
montagne,
et
même
quelquefois
nous
le
perdions
de
vue,
restant
caché
derrière
les
cimes
de
ces
hauteurs.
On
ne
peut
entrer
dans
le
pays
du
Karaman
qu'à
pied
et
en
traversant
la
montagne
sur
laquelle
le
château
est
bâti.
Le
passage
est
étroit,
et
en
quelques
endroits
il
a
été
perforé
au
ciseau;
cependant
il
est
partout
dominé
par
le
château.
Celui-ci,
le
dernier
que
les
Arméniens
aient
perdu,
appartient
aujourd'hui
au
Karman;
il
l'eût
pour
sa
part
après
la
mort
de
Ramedan.
Ces
montagnes
sont
couvertes
de
neige
perpétuelle;
elles
n'ont
qu'une
route
pour
les
chevaux,
quoique
on
voie
des
vallées
éparses
entre
elles.
Elles
ne
sont
pas
sûres
à
cause
des
Turcomans
qui
les
habitent;
cependant
durant
les
quatre
jours
que
j'y
voyageais,
je
n'ai
remarqué
pas
même
une
habitation.
En
quittant
les
montagnes
d'Arménie
pour
entrer
dans
le
pays
du
Karaman,
il
y
a
encore
d'autres
montagnes
à
traverser.
Sur
l'une
de
ces
dernières
existe
un
passage
gardé
par
un
château
appelé
Lève
[11],
où
l'on
paye
un
droit
de
péage
au
Karaman.
Ce
droit
était
affermé
à
un
Grec;
lequel
en
m'observant,
comprit
à
mon
aspect
que
j'étais
un
chrétien,
et
m'arrêta.
Si
on
m'eût
forcé
de
rebrousser
chemin
on
m'aurait
tué;
car
on
m'assura
après,
qu'avant
que
j'eusse
franchi
une
demi-lieue
de
chemin,
on
m'eût
coupé
la
gorge,
la
caravane
étant
déjà
très
loin.
Heureusement
mon
Mameluk
corrompit
le
Grec,
qui,
en
considération
des
deux
ducats
que
je
lui
donnai,
nous
ouvrit
le
passage.
Au
delà
il
y
a
le
château
d'
Asers,
et
plus
loin
encore
le
château
d'une
ville
appelée
Araclie
(Eregli)»
[12].
De
Loulou,
Bertrandon
passa
à
Asgouras
et
de
là,
à
Héraclée,
Laranda,
Iconium,
etc;
il
doit
avoir
suivi
le
chemin
des
montagnes
et
du
château-fort
de
Podande;
car
s'il
avait
suivi
le
chemin
qui
s'engage
dans
la
montagne
à
l'ouest
de
Gouglag,
comme
on
l'écrit
dans
les
topographies,
il
aurait
été
directement
à
Laranda;
il
ne
serait
pas
dirigé
vers
le
nord
et
n'aurait
pas
passé
par
les
montagnes
de
Loulou
et
d'Asgouras,
puis
à
Héraclée
pour
revenir
à
Laranda,
au
sud.
De
tous
les
voyageurs
qui
ont
écrit
la
relation
de
leur
voyage
en
Cilicie,
je
n'en
trouve
qu'un
seul
qui
fasse
mention
de
ces
passages
situés
du
côté
de
l'occident,
et
qui
se
trouvent
pourtant
indiqués
sur
plusieurs
cartes
géographiques.
Au
commencement
du
siècle,
M.
r
Corancez
écrivait
ainsi:
«Ce
passage
étroit,
est
dominé
par
un
château
qui
appartient
aujourd'hui
à
un
aga
indépendant;
il
est
bien
connu
des
Tartares
qui
le
redoutent,
à
cause
des
extorsions
auxquelles
ils
y
sont
très
souvent
soumis».
Actuellement
le
village
de
Gouglag,
n'est
habité
que
par
des
mahométans
descendants
des
chrétiens;
à
ce
qu'ils
disent,
la
forteresse,
jusqu'à
la
prise
de
Chypre
par
les
Turcs,
serait
restée
aux
mains
des
chrétiens
qu'ils
appellent
encore
Génois:
un
général
arménien
au
service
du
sultan
les
aurait
assiégés
inutilement
pendant
six
semaines,
sans
même
pouvoir
les
réduire
par
la
famine.
Enfin
il
aurait
monté
sur
les
hauteurs
du
nord-ouest
et
aurait
bombardé
la
forteresse
et
incendiée
la
forêt,
s'emparant
ainsi
de
la
place.
Une
petite
rivière
qui
vient
du
nord,
des
montagnes
qui
séparent
les
affluents
du
Cydnus
de
ceux
du
Sarus,
passe
entre
la
tour
et
les
bastions
élevés
par
Ibrahim-pacha,
et
va
se
jeter
dans
la
rivière
de
Gouglag
près
des
habitations
et
de
la
douane.
Près
de
la
source
de
cette
rivière,
il
y
a
une
ancienne
station,
au
nord
de
la
tour,
et
plus
loin,
à
l'est
du
passage,
on
voit
les
ruines
d'un
grand
bourg,
peut-être
celui
de
l'ancienne
forteresse
de
Gouglag.
Non
loin
de
là
se
trouvait
la
forteresse
de
Trizivi?
Δριζύβιον,
où
l'empereur
Nicéphore
Phocas
établit
sa
famille,
l'an
965,
pendant
qu'il
marchait
contre
les
Arabes.
[3]
Suivant
la
Nouvelle
Arménie
(livre
en
arménien)
p.
360:
«C'est
un
village
situé
à
la
distance
d'un
jet
de
flèche
du
château
de
Gulek,
et
bâti
sur
un
plateau.
Les
Européens
l'écrivent
Tékiche;
il
semble
être
le
même
que
celui
qu'Edib
appelle
Tékirli
yaïlak
(pâturages
de
Tékirli).
[4]
Montagnes
d'Ecosse,
célèbres
par
la
beauté
de
leurs
panoramas.
[5]
W.
Ainsworth,
Travels
and
Researches,
Tom.
II,
79-81.
[6]
«C'est
principalement
dans
cette
région
que
j'ai
remarqué
une
admirable
plante
particulière
à
l'Asie
Mineure
et
qui
mérite
une
mention
spéciale.
La
tige
de
cette
plante
de
3
à
4
pieds,
est
couronnée
par
un
calice
de
couleur
pourpre,
en
forme
de
cornet,
dont
l'angle
supérieur
s'allonge
et
retombe
comme
la
manche
d'un
kaftan.
De
la
corolle
s'élance,
en
guise
de
pistil,
un
dard
quadrangulaire,
semblable
à
une
lame
d'épée,
d'un
violet
presque
noir
et
long
d'un
pied
environ.
L'extérieur
des
étamines,
la
tige
et
les
feuilles
finement
découpées
et
frisées
sont
d'un
vert
clair
moucheté
de
brun
comme
la
peau
d'une
couleuvre.
Les
Turcs
nomment
cette
plante
Ilan-otou
(Herbe
de
serpent);
son
nom
scientifique
est
Arum
maculatum.
C'est
une
plante
employée
en
médecine».
—
V.
Langlois,
Voyage
dans
la
Cilicie,
p.
368-9.
[7]
At
Tancredus
nemorum
devia,
montium
ardua,
Cilicum
flumina
prætervolanda
eligit.
—
Raoul
De
Caen.
—
D'autres
historiens
aussi
parlent
presque
de
la
même
manière.
[8]
La
monnaie
neuve
des
Arméniens
d'alors
pouvait
valoir
un
peu
moins
d'un
demi-franc.
Aujourd'hui
la
douane
du
gouvernement
turc
pour
la
charge
d'étoffe
ou
de
laine
d'un
chameau,
ou
pour
une
charge
de
légumes,
fait
payer
la
taxe
de
sept
piastres:
pour
les
matières
plus
fines,
un
peu
plus.
[9]
Dans
la
chronique
des
Arméniens
de
Jean
Dardel,
nouvellement
découverte,
nous
trouvons
rapporté
le
siége
de
Sis,
dernier
refuge
de
Léon
V,
mais
de
Gaban
nous
ne
trouvons
aucune
mention.