La
vaste
plaine
qui
s'étend
des
deux
côtés
du
fleuve
de
Djahan,
forme
la
province,
désormais
déserte,
d'Anazarbe;
elle
s'étend
au
sud
et
à
l'est
du
district
de
Sis,
au
nord
de
Messis,
—
dont
elle
est
séparée
par
la
rivière
Ara,
—
et
à
l'ouest
de
Thil
de
Hamdoun.
(p.
272-
Vue
de
la
ville
d'Anazarbe,
d'après
V.
Langlois)
A
deux
lieues
des
ruines
d'Anazarbe,
le
Djahan
reçoit
le
Saouran
et
la
rivière
de
Sembosse.
La
ville
est
bâtie
dans
l'angle
que
forme
leur
jonction.
La
province
n'est
pas
seulement
arrosée
par
ces
trois
fleuves,
elle
est
de
plus
très
marécageuse,
et
l'air
est
souvent
empesté
d'exhalaisons
méphitiques.
Le
sol
est
cependant
en
général
très
fertile,
comme
dans
les
autres
plaines
ciliciennes.
Je
ne
trouve
aucun
mémoire
ni
sur
la
configuration,
ni
sur
les
produits
du
sol
de
cette
province,
à
part
ceux
que
j'ai
déjà
cités
dans
la
topographie
générale,
comme
le
fait
curieux
qui
concerne
le
village
de
Djourag
et
dont
il
est
question
déjà
sous
la
domination
de
nos
princes;
on
voyait
près
de
ce
village
un
«lac
fameux;
car
aussitôt
qu'un
cheval,
ou
un
autre
animal,
y
entrait,
il
perdait
sa
queue
et
ses
poils;
de
même
les
sabots
se
détachaient
comme
s'ils
avaient
été
arrachés.
Cependant
si
les
animaux
ne
faisaient
que
de
boire
de
cette
eau,
ils
ne
souffraient
aucun
mal».
Je
ne
saurais
dire
le
cas
qu'on
doit
faire
de
cette
assertion,
cependant
elle
nous
fait
connaître
que
même
dans
le
XIV
e
siècle,
il
y
avait
dans
ces
régions
des
étangs,
et
qu'ils
s'agrandirent
encore
plus
lorsqu'ils
furent
abandonnés
par
les
habitants;
qui
durent
s'enfuir
devant
les
incursions
des
barbares
et
la
tyrannie
des
peuples
nomades
et
des
Turcomans
vagabonds,
auxquels
s'ajoutèrent
dernièrement
les
Circassiens.
Au
moyen
âge
cette
province
était
pourtant
renommée
comme
l'une
des
plus
fertiles
de
la
terre.
Edrisi,
le
géographe
arabe
du
XII
e
siècle,
la
compare
au
terrain
paradisiaque
de
Damas.
Dans
la
vaste
solitude
inhabitée
que
les
affluents
du
Djahan,
cités
plus
haut,
forment
entre
eux,
s'élèvent,
comme
en
un
désert,
les
restes
de
la
ville
d'Anazarbe;
autrefois
c'était
une
des
plus
grandes
villes,
la
deuxième
après
la
capitale,
et
la
province
qui
en
dépendait,
comprenait
un
nombre
considérable
de
bourgs
et
de
villages.
Disons
de
plus,
qu'elle
fut
comme
l'un
des
plus
grands
théâtres
du
monde
et
le
séjour
d'une
grande
diversité
de
peuples;
aujourd'hui
il
y
règne
un
silence
absolu,
selon
les
lois
inexorables
du
temps
et
de
la
fortune.
Un
grand
rocher
calcaire,
haut
de
200
à
300
mètres
et
long
d'une
lieue,
s'étend
du
nord
au
sud
et
surplombe
les
rivières
citées.
Par
endroits
il
est
très
resserré,
jusqu'à
n'avoir
qu'une
quinzaine
de
mètres
de
large.
C'est
sur
cette
cime
abrupte
que
s'élève
l'un
des
châteaux
les
plus
forts
de
la
Cilicie.
A
ses
pieds,
à
l'ouest,
se
trouvent
les
ruines
de
la
ville
avec
des
murailles
carrées.
Texier
compare
la
situation
de
ces
lieux
à
celle
de
la
ville
et
de
la
forteresse
de
Van.
Il
pense
qu'Anazarbe
fut
fondée
par
Sémira-mis,
ou
du
moins
par
un
prince
oriental,
comme
son
nom
semble
l'indiquer.
En
effet,
dans
la
langue
sémitique
ou
arabe
عين
زربه
aïn-zarba
signifie
«source
jaune».
Les
Grecs
veulent
découvrir
le
nom
d'Anazarbe
dans
leurs
récits
fabuleux;
toutefois,
dans
leurs
auteurs
anciens
on
ne
rencontre
pas
le
mot
anazarba,
'
Ανα
̀
ζαρβας
ou
'
Αναζαρβος;
et
cependant
la
ville
existait
déjà
[1]
et
s'appelait
selon
quelques-uns
Kynda,
Κ
ύνδα.
L'empereur
Auguste
ayant
été
très
bien
reçu
par
les
citoyens
d'Anazarbe,
dota
la
ville
de
son
titre,
en
l'appelant
Cesarea;
et
pour
la
distinguer
d'autres
villes
de
ce
nom,
on
disait
Cœsarea
ad
Anazarbum.
On
essaya
aussi
de
lui
donner
le
nom
de
Diocesarea,
mais
le
nom
ancien
prévalut.
Plusieurs
auteurs
et
même
des
Arméniens
ont
écrit
indifféremment
Anazarba
ou
Anavarza,
mais
il
est
plus
juste
d'écrire,
d'après
l'étymologie
arabe:
Anazarbe,
et
c'est
ainsi
que
nous
l'écrirons.
L'historien
Mathieu
d'Edesse
attribue
à
cette
ville
encore
un
autre
nom
assez
étrange;
il
dit,
je
ne
sais
trop
pourquoi,
«
Trovada,
(Troie),
qui
est
Anavarza
».
Cette
ville
inconnue
dans
les
temps
reculés,
ne
commença
à
devenir
célèbre
qu'à
partir
de
la
domination
romaine.
Après
la
conquête
de
la
ville,
l'empereur
y
envoya
un
gouverneur,
par
ordre
duquel
furent
martyrisés,
durant
les
persécutions,
les
trois
Saints
Tarasiens,
chantés
par
un
de
nos
anciens
poètes
ecclésiastiques:
«D'abord
torturés
à
Tarse
Et
puis
encore
à
Mamestie,
Furent
martyrisés
à
Anazarbe
Les
trois
élus
du
Seigneur».
Selon
notre
poète,
l'un
des
martyrs
était
jeune,
l'autre
vieux
et
le
troisième
dans
l'âge
mûr.
Anazarbe
semble
avoir
été
le
jouet
des
malheurs:
quatre
fois
elle
fut
ruinée
par
des
tremblements
de
terre;
après
la
dernière
de
ces
catastrophes,
elle
ne
fut
plus
capable
de
se
relever.
Le
premier
de
ces
tremblements
de
terre
eut
lieu
sous
le
règne
de
l'empereur
Nérouas
qui
fit
restaurer
la
ville;
le
second,
sous
le
règne
de
l'empereur
Justinien,
en
525;
ce
prince
la
releva
également
de
ses
ruines
et
lui
donna
son
nom,
en
l'appelant
Justinianopolis;
le
troisième
arriva
quelque
temps
après;
l'empereur
Justin
la
rebâtit
et
changea
ce
nom
en
celui
de
Justinopolis.
Anazarbe
s'honore
d'avoir
été
la
patrie
du
grand
médecin
Dioscorite,
qui
vécut
dans
le
premier
siècle
de
notre
ère,
la
date
exacte
n'est
pas
connue.
C'est
là
que
naquit
également,
dans
le
II
e
siècle,
Oppianus,
le
poète
de
la
Chasse.
Dès
le
commencement
du
III
e
siècle
Anazarbe
est
appelée
Métropole,
comme
on
le
voit
sur
la
monnaie
de
bronze,
battue
durant
le
règne
de
l'empereur
Valérien
(253-260).
(p.
274-
Monnaie
d'Anazarbe,
sous
l'empereur
Valérien)
Sous
le
règne
de
Théodose
II,
(en
444),
elle
fut
déclarée
la
principale
de
toutes
les
villes
de
la
II
e
Cilicie
[2].
Notre
géographe
(Moïse
de
Khorène)
établit
aussi
cette
distinction:
«Il
y
a
la
I
e
et
la
II
e
Cilicie,
dit-il...,
dont
les
capitales
sont
Tarse
et
Anazarbe,
ayant
sous
leur
autorité
plusieurs
provinces
et
châteaux».
Ainsi
dit
encore,
plusieurs
siècles
plus
tard,
Saint
Nersès
de
Lambroun:
«Anazarbe
et
Sis
et
les
pays
qui
en
dépendent»;
indiquant
par
là
l'accroissement
et
la
prospérité
de
la
ville.
Anazarbe
eut
aussi
à
souffrir
de
l'avidité
des
conquérants;
elle
fut
attaquée
par
les
Arabes
et
les
Grecs,
comme
nous
l'atteste
notre
historien
Mathieu
d'Edesse.
Suivant
les
historiens
arabes,
elle
fut
conquise
pour
la
première
fois,
au
VIII
e
siècle,
par
Haroun-el-Rachid,
qui
y
fit
venir
des
colonies
de
la
Perse
et
des
Indes.
Après
lui
ce
fut
l'émir
Mutassem,
dans
la
première
moitié
du
IX
e
siècle;
puis
Mutévakkel
l'an
860.
L'empereur
Basile
I
er
eut
le
bonheur
de
la
délivrer
en
880,
et
après
avoir
chassé
le
général
Abdellah,
il
abattit
quelques
châteaux
des
environs
dont
les
noms
sont
altérés,
mais
nous
les
citerons
quand
même:
ce
sont
Gais-sous
(
Καίσους
),
Catassamas
(
Κατασάμας
)
ou
Cassaman
(
Κασα
̀
μν
),
Carban
(
Καρβάν
),
Artala
(
Αρταλα
)
ou
Artabas,
Robam
(
Ροβα
̀
μ
)
Endele-khonis
(
Ενδελεχο
̀
νης
)
ou
Eremosykea
(
Ερημοσυχέα
).
Vers
la
moitié
du
X
e
siècle,
les
émirs
d'Egypte,
s'emparèrent
de
ces
lieux,
«mais
Arabig,
(les
Arabes)
les
en
délogea
avec
succès»,
comme
le
dit
Mathieu
d'Edesse.
Ce
même
historien
ajoute
qu'en
962
l'empereur
Nicéphore
conquit,
avec
d'autres
villes,
«la
célèbre
Anavarze,
et
fit
un
grand
massacre
de
Turcs,
jusqu'à
la
porte
d'Antioche».
Selon
les
Grecs,
l'empereur
s'empara
alors
de
cinquante-cinq
châteaux,
et
quelques
années
après,
en
965,
de
vingt
autres
places.
Ses
successeurs,
les
empereurs
Zimisces
et
Basile
II,
assurèrent
pour
quelque
temps
la
paix
à
cette
grande
ville
et
aux
districts
environnants;
mais,
durant
le
règne
de
Théodora
(1054-58),
la
ville
tomba
de
nouveau
aux
mains
des
mahométans,
et
les
habitants
furent
massacrés
ou
emmenés
en
captivité.
Les
Grecs
la
reprirent
bientôt,
mais
le
temps
des
transformations
des
royaumes
était
proche.
Vers
la
fin
du
XI
e
siècle
les
Croisés
accoururent
dans
la
Cilicie,
et
leurs
troupes,
dit
l'historien
Mathieu,
passèrent
d'Anazarbe
à
Antioche.
Ce
fut
presqu'à
cette
même
époque,
au
commencement
du
XII
e
siècle,
que
cette
grande
et
célèbre
ville
devint
la
résidence
de
la
famille
de
nos
Roupiniens,
après
que
Thoros
I
er
l'eut
enlevée
aux
Grecs,
dès
les
premières
années
de
son
règne.
Ce
prince
y
transporta
avec
les
trésors
des
frères
Mantalé,
«la
précieuse
Image
de
la
Sainte
Vierge,
qu'il
avait
enlevée
aux
Grecs,
et
qu'il
déposa
dans
le
château
d'Anazarbe;
il
y
érigea
un
temple
célèbre
et
il
y
plaça
l'image,
comme
c'est
indiqué
dans
les
écrits
et
dans
l'inscription
relative
à
la
construction
du
temple».
Vahram
le
Docteur
nous
le
confirme
dans
son
poème,
où
il
ajoute
encore
le
nom
de
l'église:
Il
(Thoros)
s'empara
d'Anazarbe
Et
y
construisit
le
grand
temple,
En
le
dédiant
à
la
gloire
des
Généraux;
Il
y
déposa
l'Image
de
la
Sainte
Vierge,
Comme
l'attestent
les
inscriptions.
Puisque
nous
sommes
arrivés
à
ce
fait
important,
arrêtons-nous
un
instant
pour
examiner
le
Château
et
l'
Eglise.
(p.
275-
L'église
d'Anazarbe)
Les
Arméniens
affirment
que
ces
deux
constructions
furent
l'œuvre
de
Thoros
I
er:
en
effet
c'est
lui
qui
le
premier
arracha
Anazarbe
des
mains
des
Grecs,
et
ce
fut
lui
aussi
qui
le
premier
fut
honoré
du
titre
de
Protosébaste.
(p.
276-
Chateau
d'Anazarbe,
d'après
une
photographie
des
explorateurs
Mandrot
et
Favre)
Le
Château
couronne
le
rocher
au
sud-est
de
la
ville;
cet
emplacement
fut
fortifié
dès
les
temps
anciens,
et
suivant
les
paroles
de
Strabon
et
de
Plutarque,
on
pourrait
l'identifier
avec
Quinta,
la
trésorerie
des
Macédoniens.
Cette
place
fut
sans
doute
restaurée
lors
des
incursions
des
Arabes,
et
Thoros
et
Léon,
son
fils,
la
fortifièrent
encore
davantage.
Jusqu'à
la
construction
des
remparts
de
Sis,
ce
château
fut
la
première
des
forteresses
et
comme
le
gardien
du
territoire
des
descendants
de
ces
deux
princes.
De
trois
côtés
il
est
presque
inaccessible
et
se
trouve
sur
un
rocher
de
700
pieds
de
haut.
On
y
arrive
par
un
sentier
difficile
et
escarpé.
Il
se
compose
de
deux
enceintes,
et
est
mieux
conservé
que
tous
les
autres
châteaux
du
territoire.
Les
murailles
et
les
tours
sont
plus
hautes
que
dans
les
autres
forteresses;
à
l'ouest,
les
tours
sont
semi-circulaires
et
à
bossages.
Langlois
attribue
ces
constructions
aux
Byzantins,
et
les
autres
parties
aux
Arméniens.
La
forme
et
les
aspérités
du
roc
sur
lequel
la
forteresse
est
assise,
ont
mis
les
constructeurs
dans
la
nécessité
de
lui
donner
des
contours
irréguliers.
Dans
la
première
enceinte
se
trouve
l'église
à
demi-ruinée
des
Généraux,
(Saint
Georges
et
Saint
Théodore);
quatre
piliers
carrés
en
supportaient
la
voûte;
l'un
de
ces
piliers
est
renversé,
mais
la
toiture
existe
en
partie.
Les
murailles
intérieures
de
cette
chapelle
sont
ornées
de
peintures
à
la
fresque,
assez
bien
conservées.
Sur
l'arc
de
l'une
des
portes
latérales
de
cette
église,
on
lit
le
mot
ΕΥΛΟΓΕΟ
C.
Autour
de
l'édifice
et
à
la
hauteur
du
toit
on
remarque
une
inscription
de
Thoros,
en
grandes
lettres
majuscules:
son
état
de
mutilation
ne
permet
pas
de
la
déchiffrer
entièrement,
mais
du
côté
sud
on
peut
encore
lire:
Par
la
volonté
de
la
très-Sainte
Trinité,
moi,
Théodos...
Sébaste,
fils
de
Constantin...
fils
de
Roupin,
j'ai
construit
cette
église...
L'inscription
du
côté
est,
peut
être
unie
a
celle-ci,
par
la
préposition
«pour»,
Le
salut
de
mon
âme,
et
en
mémoire
de
mes
parents,
et
durant
la
vie...
par
l'intercession...
Celle
du
côté
nord
est
presqu'entièrement
mutilée;
enfin
on
lit
au
côté
ouest:
Souvenez-vous
de
Théodos,
de
mon
fils
Constantin,
dans
vos
saintes
et
dignes
prières,
en
J.
C.
notre
Seigneur,...
dans
l'année...
Le
pavé
de
l'église
est
défoncé;
Langlois
y
croit
enterrés
les
premiers
princes
Roupiniens;
il
base
cette
opinion
sur
l'inscription,
mais
cela
manque
de
fondement.
On
voit
les
débris
d'une
plus
grande
église
à
mi-chemin
du
rocher
qui
conduit
de
la
ville
au
château;
la
partie
inférieure
de
cet
édifice
était
creusée
dans
le
roc,
et
la
supérieure
formée
par
des
pierres
énormes;
on
y
voit
trois
fenêtres
à
plein-cintre
et
des
colonnes
d'ordre
ionique.
Les
violents
tremblements
de
terre
ont
déplacé
la
plus
grande
partie
des
pierres
[3].
Le
chemin
qui
conduit
au
château
est
taillé
dans
le
rocher,
et
de
chaque
côté
on
aperçoit
des
sarcophages.
A
l'extrémité
orientale
des
remparts,
ce
rocher
a
été
coupé
artificiellement
au
commencement
du
règne
de
Léon
le
Magnifique,
en
1187;
en
face
la
montagne
est
couronnée
par
le
château
ou
la
citadelle
qui
portait
alors
le
nom
de
Cla,
selon
l'appellation
des
Arabes.
On
ne
pouvait
y
arriver
qu'au
moyen
d'un
pont-levis,
et
comme
depuis
très
longtemps
il
n'y
en
a
plus,
le
lieu
est
comme
inaccessible.
Une
inscription
est
restée
sur
le
donjon
dans
un
état
intact,
peut-être
grâce
à
sa
position
inaccessible;
on
est
cependant
parvenu
à
la
déchiffrer
avec
habileté,
et
on
admire,
avec
la
grandeur
de
l'édifice,
l'audace
du
constructeur.
Cette
inscription
est
sans
contredit
la
plus
précieuse
de
toutes
celles
qui
nous
sont
parvenues
du
pays
de
Sissouan;
la
voici:
L'an
636
de
l'ère
arménienne,
le
soleil
s'obscurcit
à
un
tel
point
que
les
étoiles
furent
visibles;
le
Turc
s'empara
de
la
sainte
ville
de
Jérusalem.
La
même
année,
Roupin,
fils
de
Stéphané,
mourut,
et
sur
le
trône
lui
succéda
le
pieux
Léon;
ayant
sous
sa
domination
la
Cilicie
avec
les
montagnes
du
Taurus
et
les
Montagnes
Noires,
et
les
bords
de
la
mer,
jusqu'à
Atalie.
La
seconde
année
de
son
règne,
il
se
mit
a
élever
ce
Cla
d'Anazarbe,
qui
est
métropole.
Il
fendit
ces
rochers
avec
des
fers
encore
plus
durs,
et
sur
des
fondements
solides,
construisit
les
murailles
avec
de
pierres
massives,
et
les
cimenta
avec
du
fer
et
du
plomb.
Tout
fut
exécuté
dans
l'espace
d'un
an.
La
construction
et
son
inscription
sont
deux
documents
authentiques,
qui
se
vérifient
l'un
l'autre
et
concordent
en
même
temps
pour
rendre
témoignage
de
la
grande
puissance
et
du
génie
de
Léon.
Dans
l'intérieur
du
château,
il
y
a
dit-on,
des
inscriptions
arméniennes
et
latines,
mais
ce
n'est
pas
encore
vérifié
[4].
Avant
la
construction
de
cette
forteresse,
de
Thoros
I
er
jusqu'à
Léon,
durant
80
ans,
bien
des
événements
eurent
lieu
à
Anazarbe
et
dans
les
alentours.
D'abord,
selon
notre
historien
royal,
en
1107,
«douze
mille
Persans
franchissant
le
Taurus,
dévastèrent
le
territoire
d'Anazarbe,
et
s'en
allèrent
en
traversant
la
plaine
de
Marache,
emportant
avec
eux
un
grand
butin
et
de
nombreux
captifs».
Une
seconde
fois
en
1110,
«Les
soldats
turcs
entrèrent
dans
le
pays
d'Anazarbe,
et
massacrèrent
les
habitants
de
la
province
de
Marba;
le
prince
des
Arméniens
Thoros,
fils
de
Constant,
n'eut
pas
le
courage
d'aller
les
combattre.
Ils
retournèrent
dans
leur
pays»
[5].
Quelle
partie
de
cette
province
portait
le
nom
de
Marba,
je
ne
saurais
le
dire
[6].
Il
y
a
bien
un
village
appelé
Maraba
près
d'Albistan;
mais
le
territoire
d'Anazarbe
ne
pouvait
guère
s'étendre
jusque
là.
Après
ces
événements
Thoros
régna
paisiblement
et
jouit
d'une
grande
renommée;
il
passa
douze
ans
à
Anazarbe,
où
se
réfugia
en
1117,
à
cause
de
l'avidité
des
princes
francs
qui
le
faisaient
souffrir,
le
grand
prince
arménien
Abelgharib,
fils
de
Vassag,
seigneur
de
Bir.
Sous
le
règne
de
Léon,
frère
et
successeur
de
Thoros,
en
1137,
l'empereur
Jean
Alexis
Porphyrogène,
(comme
nous
l'avons
dit
ailleurs),
marcha
en
personne
contre
ce
prince
et
après
un
siége
de
trente-sept
jours,
s'empara
d'Anazarbe
et
de
tout
le
territoire
de
Léon;
il
réussit
même
à
se
saisir
du
prince
et
de
sa
famille
qu'il
emmena
avec
lui
à
Constantinople,
où
Léon
resta
jusqu'à
sa
mort.
L'empereur
mourut
d'une
manière
imprévue
quelques
années
plus
tard
(le
8
avril
1143),
aux
environs
d'Anazarbe,
pendant
qu'il
campait
dans
la
vallée
près
de
la
montagne
appelée
par
les
Grecs
Χοράχεων
φωλία,
[7],
(Nid
des
corbeaux).
«Il
était
à
la
chasse,
et
poursuivait
un
sanglier;
il
voulut
lui
décocher
une
flèche;
mais
il
se
blessa
lui-même
à
la
main
gauche
avec
sa
flèche
empoisonnée,
et
quelques
jours
après
il
mourut
des
suites
de
cette
blessure.
Les
princes
après
avoir
extrait
ses
entrailles
et
les
avoir
ensevelies
à
l'endroit
qui
s'appela
Kaghertig
[8],
transportèrent
son
corps
embaumé
à
Constantinople».
Manuel
son
fils
et
son
successeur,
qui
l'accompagnait
à
la
guerre,
jeta
les
fondement
d'un
monastère
là
où
son
père
avait
expiré,
et
s'empressa
de
retourner
à
Constantinople.
Quelques
années
plus
tard,
Thoros
II
réussit
à
échapper
des
prisons
de
Byzance,
et
une
des
premières
places
qu'il
soumit,
ce
fut
Anazarbe
qui
devint
depuis
lors
le
siège
du
grand
Baron
des
Arméniens;
cependant
il
paraît
que
les
Grecs
s'en
seraient
emparés
encore
une
autre
fois,
sous
le
règne
de
l'empereur
Manuel.
Cela
est
indiqué
par
Nersès
de
Lambroun,
lorsqu'en
parlant
de
la
première
prise
d'Anazarbe
par
l'empereur
Alexis,
il
dit
(dans
son
Commentaire
de
la
Liturgie):
«Les
princes
arméniens
construisirent
des
églises
à
Anazarbe,
et
les
Grecs
conquirent
la
ville
une
et
deux
fois,
et
établirent
des
évêques
dans
l'église
des
Arméniens,
et
ordonnèrent
au
peuple
de
payer
la
dîme
à
cette
église.
Toutefois
les
princes
arméniens
s'étant
de
nouveau
emparés
de
la
ville,
chassèrent
l'évêque
des
Grecs,
et
laissèrent
l'église
sans
culte
ni
service;
état
dans
lequel
elle
se
trouve
encore
à
présent».
Nersès
écrivait
cela
durant
l'anarchie
et
la
confusion
causé
par
Meleh,
l'indigne
frère
de
Thoros,
et
au
commencement
de
la
domination
de
leur
neveu
Roupin
II.
Quand
à
ce
dernier
succéda
son
frère,
Léon
le
Grand,
tout
changea
de
fond
en
comble,
aussi
bien
le
pays
que
la
ville;
non
seulement
le
sommet
du
rocher
fut
couronné
par
ce
château
inaccessible,
mais
encore
toute
la
ville
fut
embellie
par
diverses
constructions
et
reliée
au
château
par
de
forts
remparts.
Elle
devint
si
puissante,
si
élégante
et
si
glorieuse,
que
Léon
ajouta
à
son
blason
le
nom
d'
Anazarbe,
ou
bien
il
y
fit
figurer
l'image
du
château,
comme
nous
l'affirme
Willebrand:
«Venimus
Navarsam,
quod
est
castrum
optimum
in
alto
monte
situm,
quod
natura
in
media
planicie
illius
terræ
ad
totum
commodum
Domini
Regis
ordinavit,
a
quo
Rex
ipse
signum
suum
Navarsa
solet
proclamare.
In
pede
hujus
montis
sita
fuit
quædam
civitas,
cujus
auctoritatem
magnam
fuisse,
quidam
mirabilis
aquæductus,
illuc
super
altas
columnas
ad
spatium
duorum
milliariarum
productus,
hodie
contestatur».
Près
de
cet
aqueduc,
il
y
a,
dit-on,
une
église
dédiée
à
Saint
Grégoire
le
Thaumaturge.
La
légende
raconte
que,
comme
ce
saint,
s'enfuyait
à
cheval,
la
montagne
s'entrouvrit
pour
lui
livrer
passage,
et
empêcher
qu'il
ne
tombât
dans
les
mains
de
ses
persécuteurs.
Lorsque
la
ville
de
Sis
obtint
la
primauté
par
sa
splendeur
et
par
ses
fortifications,
Anazarbe
ne
fut
point
laissée
de
côté;
son
château
bien
fortifié,
protégeait
non
seulement
ceux
qui
s'y
réfugiaient,
mais
encore
lors
des
incursions
des
ennemis,
il
avertissait
les
forts
du
voisinage,
en
allumant
des
feux.
En
1279,
un
certain
Bizar,
général
égyptien,
vint
assiéger
Anazarbe
pendant
dix
jours,
mais
ne
pouvant
la
prendre,
il
ravagea
les
alentours.
Parmi
les
constructions
de
la
ville,
durant
le
règne
des
princes
arméniens,
nous
ne
trouvons
citée
que
l'église
de
l'Image
de
la
Sainte
Vierge;
(p.
279-
L'Annonciation
de
la
Sainte
Vierge.
Iconographie
arménienne,
v.
page
219
)
mentionnée
une
seconde
fois
en
1285.
Il
paraît
que
cette
image
était
différente
de
celle
du
château
de
Guentrosgave,
laquelle,
dit-on,
fut
transportée
à
Constantinople
par
l'empereur
Alexis,
avec
le
Baron
Léon,
qu'il
avait
fait
prisonnier.
Comme
sous
la
domination
des
Grecs,
de
même
sous
celle
des
Arméniens,
Anazarbe
fut
un
siège
archiépiscopal:
les
archevêques
mentionnés
dans
l'histoire
sont
les
suivants:
1174-79.
Jean.
1198.
Constantin.
1263.
Jacques.
1293.
Grégoire
(plus
tard
catholicos).
1307-14.
Jean.
1326.
Jacques
(plus
tard
catholicos).
1342.
Etienne.
[1]
Suivant
Suidas,
les
anciennes
monnaies
de
la
ville,
comme
celle
que
nous
reproduisons,
portent
l'inscription:
ΑΝΑΖΑΡΒΕΩΝ.
L'image
de
la
personne
qui
se
baigne,
est
le
symbole
du
fleuve
Pyramis,
près
duquel
la
ville
est
bâtie.
Cette
monnaie
fut
frappée
en
180
de
la
date
des
Grecs
ou
d'Alexandre,
ce
qui
est
indiqué
par
les
lettre
ΙΙΡ,
au-dessous
du
cheval
au
trot,
comme
on
le
voit
sur
le
revers
de
la
monnaie.
(
p.
272
(
դրամի
նկար
առանց
մակագրութեան
)
[6]
Al-Harizi
juif,
qui
a
écrit
son
itinéraire
pendant
la
domination
des
Roupiniens,
cite
une
ville
du
nom
de
Maraba,
entre
Alep
et
Saroudje.
Voir
aussi
ce
que
nous
avons
dit
sur
Maraba
à
la
page
167.