Le
pays
de
Sissouan
et
son
port
d'Ayas
se
trouvant
par
leur
situation,
comme
un
point
central
entre
l'orient
et
l'occident,
il
nous
importe
de
savoir
quels
étaient
les
produits
que
le
pays
pouvait
offrir
lui-même
aux
étrangers.
Les
principaux
étaient:
la
laine,
le
poil
de
chèvre,
duquel
on
se
servait
pour
tisser
les
cambellotto
ou
zambelotti;
(il
paraît
qu'on
exportait
aussi
le
poil
de
chameau
dont
on
fabriquait
le
cilice);
de
la
flanelle,
du
coton
[1],
et
du
lin
[2],
des
boucrans
ou
bouquerans
[3],
des
métaux:
tels
que
du
fer
et
du
cuivre;
de
l'alun;
des
bêtes
de
somme;
des
chevaux,
des
mulets,
des
ânes;
des
bêtes
de
boucherie;
mais
surtout
des
fourrures,
que
la
Grande
Arménie
fournissait
en
abondance,
ainsi
que
des
peaux
de
buffle
[4]
et
d'autres
animaux
et
des
cornes
de
buffle;
des
céréales
et
des
conserves
alimentaires;
du
blé,
du
raisin
sec,
du
vin
et
du
moût,
de
la
volaille
et
des
œufs;
du
bois
brut,
des
fourrages,
des
cordages,
de
la
soie,
du
sel,
et
après
tout
cela,
des
esclaves.
Ce
commerce
abominable
était
alors
un
des
plus
florissants.
Un
sacristain
Génois
vendit
une
musulmane
nommée
Fatma
pour
400
pièces
de
monnaie
arménienne.
Dans
la
même
année,
un
autre
occidental
vendit
un
musulman,
qui
avait
été
baptisé
et
avait
reçu
le
nom
de
Guirardin,
pour
200
pièces
de
la
même
monnaie
[5].
Des
occidentaux,
Ayas
recevait
de
la
soie
ouvrée,
des
cambelotti,
des
étoffes
de
laine,
des
tissus
d'or
[6],
du
sucre,
de
l'encens,
du
savon,
de
l'huile,
du
vin,
des
étoffes,
du
cuivre,
de
l'étaim,
de
l'or,
de
l'argent,
de
l'indigo,
du
mercure,
des
coraux,
des
épices,
des
joujoux,
des
bois
de
charpente
[7],
des
agrès
de
navire,
des
rames
[8],
des
ancres
et
même
des
vaisseaux,
que
les
Arméniens
achetaient
aux
Vénitiens
[9].
Les
occidentaux
apportaient
probablement
aussi
des
armes,
car
il
est
rapporté,
dans
les
Archives
de
Venise
qu'en
1330,
le
gouverneur
du
fort
d'Ayas,
demanda
au
noble
Marco
Bembo,
qui
avait
chargé
de
blé
sa
tarita
et
s'en
retournait,
40
cuirasses,
(coratia),
18
balistes
et
20
flèches
(panesios).
Ce
dernier
n'osa
pas
les
lui
refuser,
parce
qu'il
eut
peur
qu'autrement
le
gouverneur
ne
lui
prit
de
force
et
les
armes,
et
le
blé
qu'il
avait
chargé
[10].
Autant
que
les
économistes,
nous
serions
désireux
de
savoir
quels
étaient
à
cette
époque,
les
prix
des
diverses
marchandises
que
nous
venons
de
citer,
comme
de
celles
dont
nous
n'avons
pas
parlé;
nous
pourrions
alors
le
comparer
avec
celui
de
nos
jours.
Or,
il
est
fort
difficile
de
les
apprécier
exactement;
car
la
quantité
de
ces
marchandises,
aussi
bien
que
le
prix
de
vente,
souvent
n'est
pas
indiqué
et
nous
ne
pouvons
guère
en
déduire
la
valeur
moyenne.
Voici
pourtant
ce
que
nous
avons
trouvé
dans
la
liste
des
objets
de
trafic,
qu'en
1306,
Léon
III
et
Héthoum
II,
envoyèrent
à
Venise
pour
réclamer
le
prix
des
objets
que
les
Vénitiens
avaient
pris
lors
du
pillage
de
la
forteresse
de
terre
d'Ayas.
Nous
avons
relevé
aussi
les
différents
prix
notés
dans
les
comptes
des
marchands,
et
ceux
que
nous
avons
découverts
dans
les
pièces
d'Archives.
Ces
prix
sont
indiqués
en
monnaies
arméniennes
par
besants
sarrasins,
par
pièces
de
monnaie
nouvelle
et
par
takvorines.
Nous
indiquerons
plus
loin
la
valeur
de
ces
monnaies,
comparées
avec
le
franc
moderne.
Valeur
et
prix
des
objets
de
trafic
à
Ayas
et
dans
le
pays
de
Sissouan,
pendant
les
années
1274-1330.
Année
effets
VALEURS
1279
Un
rottolo
[11]
de
gingembre
de
l'espèce
de
Bélédi
[1]
Une
recette
des
archives
de
Gênes,
écrite
à
Ayas,
le
14
novembre,
1278,
fait
voir
qu'un
sensal
du
nom
de
Vassil,
acheta
au
génois
Emmanuel
Lercari
des
tissus
(draperia)
de
coton,
pour
313
besants
sarrasins
arméniens,
pour
les
revendre
à
Tarse,
en
l'échangeant
contre
200
rottoli
de
laine,
avant
la
fête
de
Noël.
Quelques
années
auparavant,
en
1274,
le
Sénat
de
Venise
avait
décrété
que
son
bailli
à
Ayas,
d'accord
avec
ses
conseillers,
y
achèterait
de
la
laine.
Dans
les
archives
de
Venise,
on
trouve,
qu'en
1283,
une
société
de
marchands
vénitiens
acheta
à
Ayas
de
la
laine,
du
cambelotto,
et
du
poivre.
Un
autre
document
dit
qu'en
1298,
le
rottolo
de
laine
d'Alep
coûtait
à
Ayas
13
pièces
de
nouvelle
monnaie,
et
que
26
rottoli
formaient
une
balle.
En
1344,
un
nommé
Zambon,
de
Mantoue,
qui
faisait
le
trafic
en
Arménie
et
à
Chypre
depuis
vingt
ans,
avait
emporté
à
Venise
quatre
mille
balles
de
laine.
Marino
Sanudo
lui-même
affirme
(Liv.
I
er,
c.
V,
3),
que
les
Arméniens
retiraient
de
grands
bénéfices
de
la
vente
du
coton
que
l'on
récoltait
en
grande
abondance
dans
leur
pays.
[2]
En
1316,
des
marchands
de
Barcelone
achetèrent
en
Arménie
un
ballot
de
lin
qu'ils
portèrent
à
Venise.
[3]
On
suppose
que
ce
nom
vient
de
Boukara,
grande
contrée
de
l'Asie
Orientale.
[4]
L'an
1332,
Jean
Dandolo
avait
emporté
en
cachette
d'Ayas
à
Venise,
85
balles
de
peaux.
On
ne
voulut
pas
lui
en
tenir
rancune.
Soixante
ans
auparavant,
un
autre
vénitien
avait
acheté
à
Ayas
24
peaux
de
buffle,
pour
860
pièces
de
monnaie
nouvelle;
le
prix
ordinaire
de
chaque
peau
était
d'environ
36
monnaies.
[5]
Léon
l'Africain
cite
dans
sa
Chronique
(VIII)
pour
les
temps
de
Saladin:
«Gli
schiavi
di
Circassia,
che
allora
li
re
d'Armenia
usavan
di
pigliar
et
mandar
a
vendere
nel
Cairo».
[6]
Pendant
les
années
1297
et
1298,
le
roi
Sempad
acheta
par
l'entremise
de
son
ambassadeur
Emmanuel,
au
vénitien
Lo-Tataro,
neuf
pièces
de
Samitti
pour
7300
pièces
de
nouvelle
monnaie,
pour
les
offrir
au
sultan
d'Egypte.
(Archives
de
Venise.
Libri
Gratiarum,
Vol.
III,
51).
[7]
Dans
les
Archives
de
Venise,
on
trouve
maint
document
parlant
du
bois
de
charpente
qu'on
envoyait
tout
façonné
à
Ayas,
pour
les
réparations
de
la
maison
du
bailli
de
la
république.
[8]
L'an
1314,
l'ambassadeur
du
roi
Ochine
à
Venise,
emporta
cinq
cent
soixante
rames,
sans
payer
aucune
taxe.
Ceci
lui
avait
été
accordé
par
faveur
du
Sénat.
[9]
En
1284,
Léon
acheta
au
bailli
une
tarita
pour
600
besants.
En
1338,
l'on
donna
ou
l'on
vendit
à
Léon
IV,
un
vieux
navire
de
l'Arsenal
de
Venise;
ainsi
qu'en
font
mention
les
décrets:
«Concedatur
et
detur
Domino
Regi
Hermenie
unum
lignum
vetus
de
nostris
Arsenatus,
de
Banchis
XX,
conducendum
ad
partes
Hermenie,
cum
cordis
necessariis
pro
illo:
pretio
quo
fuerit
estimatum.
Et
hoc
consulunt
Patroni
arsenatus».
-
Libri
Gratiarum,
VII,
100.
[10]
Les
consuls
de
mer
de
la
République,
considérant
ce
fait
comme
une
action
criminelle,
infligèrent
une
amende
au
propriétaire
du
navire;
mais
le
gouvernement
ne
le
poursuivit
pas
d'avantage.
[11]
A
propos
de
cette
mesure,
il
est
dit
quelque
part,
que
40
rottoli
de
gingembre
se
contenaient
dans
un
seul
cabas.
[12]
10
quintaux
de
ce
temps
équivalent
à
338
kilogrammes.
[13]
En
tout,
il
avait
acheté
486
rottoli,
pour
6323
1/2
pièces
de
monnaie
nouvelle.
[14]
La
pièce
était
longue
de
dix
aunes
et
large
d'une
palme
de
canne.
[15]
Peut-être
terbisiani,
c'est-à-dire
de
Tébris
ou
Tauris.
[16]
Il
s'appelait
Khalamatchi,
selon
les
Tartares;
ce
mot
signifie
interprète.
Il
paraît
qu'il
conduisait
sa
caravane
de
Trébizonde
à
Tabris.
[17]
La
durée
de
cette
location
n'est
pas
indiquée,
mais
elle
ne
devait
être
que
d'une
année.