Non
loin
du
voisinage
d'Aguener
existait,
je
crois,
aussi
le
couvent
de
Turkety
(nez
tordu);
car
quelques
personnes
qui
sont
rappelées
dans
le
couvent
d'Aguener,
de
1313-1329,
sont
citées
encore
dans
un
livre
de
Saint
Jean,
qui
avait
été
copié
dans
ce
couvent
de
Turkety
l'an
1314;
comme
Basile,
l'économe,
les
Pères
spirituels
Grégoire
et
Jean,
et
le
copiste
Constantin.
Ce
dernier
ajoute
d'autres
personnages,
comme
Sir
Thoros,
frère
de
Jean
et
de
Grégoire,
et
il
place
ce
dernier
comme
supérieur
du
couvent,
et
l'autre,
son
frère,
comme
gardien.
Constantin
écrivit
le
livre
sous
leur
ordre;
les
églises
qu'il
cite
sont
celles
de
la
Sainte
Mère
de
Dieu,
du
Saint
Sauveur
et
de
la
Sainte
Croix.
Grégoire,
supérieur,
assista
au
concile
de
Sis,
l'an
1310,
mais
lors
de
celui
d'Adana,
l'an
1316,
le
supérieur
se
nommait
Haïrabiet.
Je
veux
insérer
ici
une
tradition
merveilleuse
se
rapportant
à
une
forteresse
située
près
de
Partzerpert,
et
appelée
Pharsipée
suivant
la
légende.
Il
y
avait,
dit-on,
un
milan
sur
un
joli
juchoir,
et
une
nymphe
très
belle
le
gardait
soigneusement.
Elle
accordait
à
celui
qui
prenait
soin
de
cet
oiseau
et
le
gardait
incessamment
durant
trois
ou
sept
jours,
toutes
espèces
de
biens
terrestres,
selon
les
désirs
de
son
cœur:
mais
celui
qui
manquait
de
soins
pendant
ces
jours-là
ou
qui
s'endormait,
il
mourait,
et
même
disparaissait.
Ce
fut
une
fois
un
pauvre
qui
veilla
scrupuleusement
durant
les
jours
fixés,
et
il
demanda
en
récompense
de
la
richesse,
ce
qui
lui
fut
accordé
par
le
moyen
du
commerce;
il
fut
si
riche
qu'il
était
incapable
à
compter
même
la
millième
partie
de
ses
trésors.
Un
chevalier
de
l'ordre
des
Hospitaliers
y
veilla
aussi,
et
comme
c'était
l'usage,
présenta
à
la
nymphe
une
bourse
qu'elle
remplit
d'or,
tout
en
prévoyant
qu'une
telle
abondance
d'or
serait
dangereuse
pour
lui
et
pour
son
ordre,
et
en
effet
sa
prévision
se
réalisa.
Un
des
rois
d'Arménie
(Ermeny),
homme
excellent,
et
de
grand
cœur
et
brave
cavalier,
étant
venu
lui
aussi
veiller,
vers
la
fin
du
temps
prescrit,
la
nymphe
lui
demanda
ce
qu'il
désirait
avoir;
le
roi
lui
répondit
en
ces
termes:
«Je
n'ai
plus
besoin
de
grandeur,
car
ce
que
je
possède
est
déjà
de
trop;
je
suis
maître
de
vastes
terres,
je
mène
une
vie
paisible,
et
pour
compléter
mon
bonheur
je
n'aspire
qu'à
toi.
—Tu
m'as
demandé,
reprit
la
nymphe
courroussée,
tu
m'as
demandé
fort
maladroitement,
ce
que
tu
ne
pourras
pas
posséder;
car
ma
promesse
est
de
donner
des
biens
terrestres,
et
moi
je
ne
suis
point
de
ce
monde,
je
ne
suis
qu'un
esprit,
un
habitant
des
cieux».
Et
comme
le
roi
insistait
encore,
la
nymphe
prenant
un
ton
menaçant
lui
dit:
«Puisque
je
n'ai
pas
pu
te
détourner
de
ton
inutile
et
audacieuse
pensée,
je
donnerai
ce
que
tu
n'as
pas
désiré
non
seulement
à
toi,
mais
encore
à
tes
descendants
jusqu'à
votre
neuvième
génération.
Apprends
maintenant,
ô
prince,
que
tu
seras
accablé
de
guerres
et
d'ennemis
qui
envahiront
ton
royaume
et
tu
te
verras
exposé
aux
dernières
extrémités».
Si
tôt
dit,
si
tôt
fait,
continue
le
naïf
chroniqueur;
le
roi
d'Arménie
et
son
pays
perdirent
leur
grandeur
et
leur
tranquillité;
tous
deux
devenant
vassaux
des
Sarrasins.
L'auteur
et
le
rapporteur
de
ce
récit
est
Jean
Maundeville,
explorateur
anglais
de
la
première
moitié
du
XIV
a
siècle.
Comme
on
sait,
après
avoir
erré
pendant
longtemps
dans
beaucoup
de
pays
à
peine
connus,
il
poussa
ses
explorations
jusqu'au
pays
des
Tartares,
en
écrivant
ce
qu'il
voyait
et
même
ce
qu'il
ne
voyait
pas,
et
beaucoup
pour
l'avoir
ouï
dire.
Il
rapporte
ceci
en
décrivant
le
chemin
qui
conduit
de
Trébizonde
à
Erzeroum,
et
il
ajoute
toujours
avec
la
même
naïveté,
que
«ce
chemin
n'est
pas
celui
qui
doit
conduire
aux
villes
susdites,
mais
qu'il
a
rebroussé
chemin
désirant
voir
ce
lieu
merveilleux».
Selon
ces
détails
on
pourrait
appeler
cette
forteresse
Sparrow-kawk,
forteresse
du
milan
ou
du
faucon.
Selon
l'ordre
de
nomenclature
de
l'historien
royal,
entre
Partzerpert
et
Molévon
doit
être
Gobidara
ou
Copitar.
Mathieu
d'Edesse
qui
est
le
premier
qui
en
parle,
dit:
«Constantin,
fils
de
Roupin,
tenait
la
montagne
de
Taurus
dans
le
territoire
de
Gobidara,
dans
Maraba
»(?).
Un
historien
nous
présente
Gobidara
non
comme
une
forteresse
mais
comme
un
vaste
territoire,
dont
Maraba
ou
Marba
ferait
partie.
Ailleurs,
il
met
ce
pays
aux
limites
d'Anazarbe:
«cette
année,
1100,
dit-il,
les
Turcs
levèrent
des
trouppes,
et
entrant
dans
Anazarbe
ils
pillèrent
et
dépouillèrent
tout
le
pays,
y
compris
Marba
».
Le
même
désastre
est
ainsi
décrit
par
l'historien
royal:
«Ils
entrèrent
dans
Anazarbe
et
massacrèrent
les
chrétiens
de
la
province
de
Marba».
Selon
le
premier
historien,
Gobidara
et
A-nazarbe
sont
un
même
pays,
et
Marba
ou
Maraba
n'est
qu'un
district
d'Anazarbe.
Ainsi
nous
pouvons
dire
justement
qu'au
onzième
siècle
et
au
commencement
du
règne
des
Roupiniens,
Anazarbe
et
Gobidara
étaient
deux
vastes
cantons
limitrophes,
le
premier
à
l'est
et
le
second
au
nord-ouest.
Constantin,
fils
de
Roupin,
s'empara
de
Gobidara,
pendant
que
son
père
s'était
rendu
maître
d'une
autre
forteresse
presque
d'un
même
nom,
Gossidar
ou
Gavsidar.
Et
il
faut
que
ce
soient
deux
places
distinctes,
car
nous
trouvons
toujours
cette
distinction
dans
les
possessions
de
Roupin.
Gossidar,
selon
les
témoignages
des
historiens,
est
située
vers
le
nord,
en
dehors
de
la
Cilicie,
sur
les
frontières
de
la
Phrygie.
Laissons-la
pour
le
moment
et
cherchons
à
retrouver
l'emplacement
de
Copitar.
Heureusement,
plusieurs
années
après
la
publication
du
présent
ouvrage
en
arménien,
tout
récemment
nous
est
parvenue
une
note
sur
ces
contrées,
écrite
par
un
auteur
du
commencement
du
siécle
dernier,
Avédik
de
Diarbékir:
«Copitar
(
Կոպիտառ
),
dit-il,
est
directement
à
l'est
de
Sis;
on
le
nomme
maintenant
Guéok-déré
(Vallon
bleu):
et
ailleurs:
La
forteresse
de
Copitar,
que
les
Turcs
appellent
Guéok-déré
».
Ce
fut
l'un
des
premiers
territoires
dont
s'emparèrent
les
Roupiniens,
qui
étendirent
leurs
conquêtes
du
nord
au
sud.
L'italien
Pegolotti
étend
leurs
confins
d'Ayas
jusqu'à
Copidar;
dans
son
manuscrit
est
écrit
Colidara.
Il
paraît
par
ces
citations,
que
c'était
une
des
plus
anciennes
forteresses
de
la
Cilicie,
peut-être
construite
par
les
Grecs.
C'était
une
grande
forteresse
sur
une
place
inaccessible;
ainsi
elle
est
restée
inprenable
jusqu'à
la
fin
du
règne
des
Roupiniens;
elle
a
eu
même
une
durée
plus
longue;
et
maintenant
encore
elle
n'est
probablement
pas
entièrement
ruinée.
Le
géographe
Vartan
en
montre
la
grandeur,
lorsqu'en
parlant
de
nombreuses
forteresses
de
la
Cilicie,
il
ne
cite
par
leurs
propres
noms
que
les
forteresses
de
Gobidara
et
de
Partzerpert,
non
loin
de
Molévon.
Un
siècle
s'écoule
après
le
règne
de
Constantin
I
er,
jusqu'à
ce
que
nous
rencontrions
le
nom
de
cette
place,
et
cela
dans
un
fait
douleureux:
dans
cette
forteresse
fut
emprisonné
le
jeune
Catholicos
Grégoire
V.,
parce
qu'il
n'écoutait
point
les
conseils
de
ses
évêques
plus
âgés,
et
gouvernait
avec
trop
d'imprudence.
On
l'accusa
devant
Léon
I
er,
qui
n'était
pas
encore
couronné
roi.
Celui-ci
envoya
alors
Jean,
évêque
de
Sis,
à
Rome-cla,
siège
du
patriarche,
pour
cette
affaire.
Jean
se
saisit,
avec
fraude,
du
Catholicos
et
l'enferma
dans
Gobidar
(1194).
Dans
ce
récit
la
forteresse
est
posée
sur
un
rocher,
et
l'historien
Orpélian,
l'appelle
Rocher
de
Gobidara.
Les
habitants
de
Rome-cla
conseillèrent
au
prisonnier
de
s'évader,
et
ils
lui
préparèrent
un
cheval;
«il
les
écouta
comme
un
enfant,
et
au
moyen
d'un
linge
il
se
hasarda,
pendant
la
nuit,
à
se
laisser
glisser
du
haut
de
la
forteresse.
Le
linge
se
déchira,
et
dans
la
chute
il
trouve
une
mort
instantanée».
On
lui
donna
pour
cela
le
surnom
de
Précipité
du
rocher
(
Քարավէժ
).
Un
écrivain
contemporain
raconte
brièvement
ce
fait
et
appelle
la
forteresse
Château
de
Gobidar.
A
cette
époque
le
seigneur
de
la
forteresse
était
Constantin,
qui
est
mentionné
plus
tard
durant
le
règne
de
Léon.
Je
ne
connais
pas
ses
successeurs,
jusqu'au
XIV
e
siècle;
c'est
dans
le
concile
de
Sis
(1307)
que
paraît
Ochine,
seigneur
de
la
forteresse.
Gobidar
n'était
pas
seulement
le
siège
d'un
prince,
mais
encore
elle
avait
un
évêque
qui
résidait
probablement
dans
un
couvent;
pourtant
nous
ne
trouvons
ni
le
nom
du
couvent
ni
celui
de
toute
autre
construction.
De
Gobidar
on
ne
connaît
qu'un
seul
évêque;
c'est
précisement
Siméon,
cité
dans
le
même
concile
de
Sis.
Après
cent
soixante
ans,
lorsque
Chah-Souar
s'empara
de
Sis,
l'an
1467,
les
habitants
se
réfugièrent
dans
la
forteresse
de
Gobidar.