Sisouan ou lArméno-Cilicie

Հեղինակ

Բաժին

Թեմա

  Grégoire surpassa tous les autres en renommée; il est connu sous le nom de Grégoire d'Anazarbe; lorsqu'il était encore évêque du diocèse et supérieur du couvent de Medz-kar, on le désignait sous ce dernier nom. C'est à lui qu'Ochine, seigneur de Gantchi, écrivit une lettre en vers et fit don d'un anneau, comme nous l'avons déjà rappelé, page 213.

Son érudition et la pureté de sa vie ne suffirent pas à mettre d'accord les Arméniens avec l'église de Rome, pour les questions concernant les rits et les fêtes. Sous ce rapport, l'intervention violente des rois fut bien plutôt nuisible qu'avantageuse, et refroidit les relations de plusieurs avec le catholicos, qui était pourtant digne de la plus grande confiance, et mérite d'être regardé comme le dernier des Pères de l'Eglise arménienne.

L'ouvrage le plus important qui nous soit parvenu de lui c'est le Ménologe, Histoire des Saints, des trois églises, arménienne, latine et grecque, rédigée probablement avant son élévation au trône patriarcal. Le jour de sa consécration, sur sa demande, le célèbre docteur Jean d'Ezenga, fit le discours dans l'église d'Anazarbe: il choisit pour texte ces mots des Psaumes, «Ta science fut admirable»; et fit l'éloge de Grégoire, charmé de son savoir et de ses vertus, comme il le dit:

«Ton visage gai et angélique, tes paroles douces et agréables, les fleurs de tes vertus variées et parfaites qui croissent au jardin de ton cœur, la sagesse des frères et des enfants, qui admirent tes talents et ton amour pour la science, ainsi que tant de bienfaits qui ont été cause de ma réjouissance, m'obligent d'obéir aux règles de convenance et à l'obligation des ordres imposés, et me font un doux plaisir de pouvoir rendre un service devant cette illustre assemblée».

Outre plusieurs panégyriques, Grégoire a inséré dans le Ménologe, un sermon de la Toussaint qu'il avait composé sur la demande de Héthoum II, son Mécène, la cinquième année de son règne (1293).

L'amitié mutuelle de ces deux personnages et leur coopération dans les questions ecclésiastiques sont bien connues. Grégoire n'étant pas arrivé à rassembler un concile pour régler ces questions, communiqua ses pensées par écrit, en forme de lettre en langue vulgaire, à Héthoum, lui expliquant tout ce qu'il jugeait convenable, ce fut comme son testament spirituel. Les évêques présents au concile de Sis en 1307, après l'avoir reçu de plein gré, mentionnent Grégoire avec grande révérence et tendresse, et lui attribuent le nom de Père Bienheureux.

Parmi les autres ouvrages de ce vénérable catholicos, il en est d'assez distingués, comme ses Hymnes, qui forment une série d'une quarantaine de canons, pour les fêtes anciennes et nouvelles, et qui pour la plupart sont en vers. Ces hymnes n'ont pas en vérité le style sublime des cantiques de nos premiers auteurs; pourtant les pensées délicates n'y font pas défaut; elles sont simples, mais attrayantes, et d'une élégante composition. Souvent les premières lettres des strophes sont en acrostiches et forment son nom ou celui de ceux qui les lui ont demandées: Constantin (en 1299-1305), et plus souvent Héthoum, ou Jean, son nom de religieux.

Il a composé entre autres trois hymnes pour la fête de Noël et trois pour l'Epiphanie, séparant ces deux fêtes l'une de l'autre, à l'exemple des Latins. Le canon placé à la tête de ces hymnes me paraît très remarquable et élégant; c'est comme le prélude et la préparation de la veille de Noël; je crois qu'il vaut la peine d'en donner ici la traduction.

 

Canon de la veille du glorieux Noël de Notre Seigneur.

  «Prépare-toi Bethléem! toi qui jadis n'étais qu'un hameau de bergers, voilà que maintenant tu deviens la reine des villes de l'univers.

Tu n'es plus la moindre des villes de la Judée, ni plus petite que Jérusalem; mais tu es grande parmi les princes de Juda, ô maison d'Ephrata!

Le Verbe qui est du Père, sans commencement; celui qui, existait avant le nombre des jours, voici qu'il sort de toi pour nous guider, nous, le nouvel Israël.

Prépare-toi, ô Bethléem: tu vas succéder à l'Ephrata! Voici qu'un nouveau roi David naît en toi et redevient enfant.

Regarde, ô Bethléem; aujourd'hui, au lieu du paradis, la grotte devient un nouveau ciel, et la crêche un trône suprême.

Toi aussi, prépare-toi ô grotte; et toi ô crêche avance pour recevoir le roi de la gloire, le roi infini, le roi sans bornes.

Préparez-vous aussi, ô bergers; laissez de côté vos chalumeaux, et chantez avec les anges; annoncez la grande nouvelle!

Soyez prêts et avancez, ô prophètes, présentez ce que vous avez prédit; parlez du Dieu qui se plaît à naître comme un homme.

Préparez-vous, ô chœurs des anges, pour exalter la sainteté sur la terre; dressez-y un trône: votre maître naît dans une grotte.

O toi, notre Seigneur, tu t'humilies, et tu te laisses enrégistrer au recensement; Roi, tu t'appauvris; maître, tu te ranges parmi les serviteurs.

Tu viens pour faire un nouveau recencement, pour annuler le régistre du péché: pour nous délivrer, nous, qui sommes asservis, et nous inscrire dans les cieux.

Tu viens à Bethléem te faire inscrire avec Joseph; Seigneur, tu viens, assis sur un nuage léger, cachant la gloire de ta nature.

O Fils de David, Seigneur des cieux, tu viens à Bethléem avec Joseph, pour te faire enregistrer au cens, avec ta mère, la Vierge!

Toi, Seigneur, tu naît, d'une vierge dans la grotte, comme un enfant; pour nous rajeunir, nous, qui sommes vieillis, et pour nous conduire au paradis, nous qui en étions éloignés.

O, notre Seigneur, tu deviens un enfant, pour déjouer le serpent perfide; et tu t'appauvris pour enrichir la pauvreté de notre nature.

C'est pourquoi nous te bénissons, toi qui est , et nous t'adorons; nous venons au devant de toi avec foi, ô Lumière, qui étais avant le soleil.

Toi, la fontaine d'Eden, tu nous ouvres aujourd'hui le paradis.

Prépare toi et réjouis toi, ô Vierge, le Christ s'incarne en toi».

 

Parmi les passages de ses autres hymnes, la noblesse se joint au sentiment, citons cette apostrophe qu'il a placée dans son hymne dédiée à Saint Jean Ghrysostome.

«Les rayons du feu de ta charité ne furent pas éteints par le torrent des grandes eaux. Ni les rois ne purent te vaincre, ni les souffrances infinies, abattre ta vie. La mort n'a pu réduire ta bouche en silence, ni le couvercle du cercueil voiler ton éclat. O voix! qui harcelais les oppresseurs! ô toi, qui sacrifiais ta personne pour sauver les veuves»!