Sisouan ou lArméno-Cilicie

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  Autant les environs d'Araglie sont fertiles et abondent en plantes fructifères et en bois, autant les lieux un peu éloignés offrent un aspect stérile: le côté du sud et de l'est est montueux et plein de sapins; le côté nord-ouest est marécageux et inculte, mais plein de toutes sortes de fleurs de diverses couleurs brillantes et d'une admirable beauté, surtout de fleurs rouges et dorées [1]. Le côté nord-est est renommé pour ses sources sulfureuses à la distance de dix kilomètres de la ville aux pieds de petites collines de 60 ou 70 pieds de haut, formées de masses gypseuses et calcaires, et près desquelles les Turcomans ont bâti des huttes ils s'abritent en été, pendant qu'ils font paître leurs troupeaux. Du côté nord-ouest de ces collines, il y a une tranchée de 2 à 300 mètres de longueur, d'où jaillissent une dixaine de sources bourbeuses, dont les eaux se réunissent d'abord dans des bassins ou des fosses: ailleurs s'évaporant, elles forment des dépôts côniques sur le terrain, et s'infiltrant cherchent une issue pour se délivrer. L'eau fait entendre un bruit souterrain, des bulles montent à la surface qui est recouverte par endroit d'une vapeur subtile: elles ont une saveur salée et sulfureuse. L'aspect de la surface du terrain et la position des sources changent peu à peu: celles qui apparaissaient au sud-est, sont taries, à présent on en trouve au nord-ouest. Les bassins ou les puits ont une forme semi-circulaire; selon la forme du terrain, le dépôt de la fange, s'élève quelquefois à deux ou trois pieds de hauteur, mais il y en a encore plusieurs de plus petite dimension, de deux ou trois pouces. Il paraît étrange que ces masses étant déposées l'une près de l'autre possèdent un goût différent; quelques unes sont salées, d'autres sulfureuses, et plusieurs sont sulfureuses et boueuses ou gypseuses: elles ont encore une différence de chaleur; les unes sont froides, les autres ont 30° R. et si on les agite, elles écument. Les habitants du lieu appellent ces eaux Kukurdlu (sulfureuses). Près de l'ouverture de la tranchée, les torrents ont déposé des masses de formes bizarres, et dans quelques parties on trouve des tubes de sel formés par déposition lente; l'eau traverse ces tubes très fragiles. On remarque encore à la surface des eaux des globules un peu durs formés par des bulles d'écume entourées de matières fangeuses. Durant l'évaporisation de l'eau ils s'unissent avec d'autres plus durs et glissent sur l'eau. Ces globules ont d'abord l'écorce tellement subtile qu'ils volent en éclats au moindre choc: mais peu à peu elle se durcit par suite de dépôt, et ils tombent au fond de l'eau pour ne plus former qu'une masse; quelques-uns de ces globules restent vides au dedans; ils ressemblent aux bouillons des termes d'Alacheguierd dans la Grande Arménie. N'oublions pas une autre colline isolée ou il y a une grande caverne, au fond de laquelle on affirmait entendre le bruit d'un torrent; mais Hamilton n'y a rien entendu. Tous ces phénomènes indiquent évidemment un volcan, dont le centre sera sans doute le mont Karadja, au nord-ouest à l'extrémité de la plaine d'Héraclée, à dix heures de chemin des sources sulfureuses.

Les recherches des géographes et des voyageurs de nos jours affirment que la ville d'Héraclée est la même que Cypistra, qui était un siège épiscopal de la Cappadoce dans le canton de Cataonie, entre la Cilicie, la Cappadoce et la Lycaonie.

Cicéron, chargé du gouvernement des contrées de la Cilicie, choisit cette ville pour sa résidence d'hiver, et pour le campement de l'armée qui devait maintenir l'ordre intérieur et en même temps préserver le pays contre les attaques des Arméniens alliés avec les Parthes. Il la dit située à l'extrémité de la Cappadoce, non loin du Taurus: «In Cappadocia extrema, non longe a Tauro, apud oppidem Gybistra castra feci» [2] .

Les hagiographes regardent Cupistra, «ville des Arméniens», comme le lieu d'origine de Saint Jean du Puits [3] ; mais d'autres écrivains le font venir de Césarée en Phénicie.

Laissant de côté l 'examen détaillé de la ville, nous mentionnerons les villages du district. Nous partirons du sud-ouest, des sources du fleuve Khodja et de sa vallée, qui n'est pas loin des affluents de Sarus et des mines de Boulghar-madén. N'ayant rien de précis sur les villages indiqués dans les cartes, je citerai seulement Sinanté [4] , nom qui paraît grec et d'une origine ancienne. Trois milles plus loin se trouvent les ruines du village Zanapa, naquit, selon nos ménologes, Saint Doulas; après avoir été soumis à d'horribles tortures, celui-ci fut noyé dans le fleuve, deux chiens retirèrent son corps du fleuve et le gardèrent, jusqu'au moment les fidèles l'enlevèrent et l'enterrèrent avec honneur. D'autres pourtant affirment que ce Saint naquit dans Zéphyre, ville de la Prétoriade, au bord de la mer, et siège du préteur Romain [5] . Les ruines de Zanapa méritent d'être bien examinées. Au nord-ouest de ce village, à un mille de distance au pied du mont Kapaklou (recouvert), est situé un petit village appelé Tchifdlik (campagne); à deux milles à l'ouest de ce lieu, au pied d'un monticule isolé, on voit les ruines du village Tont, au sud duquel on trouve des moulins, au bord d'une rivière. A une lieue de distance, dans la direction du sud-ouest, au pied des monticules et à quatre mille au sud-est d'Héraclée, se trouve le village de Bardala, l'ancien Baratta, Baratensium, nom qui fait allusion aux forêts de pins que l'on trouve aux environs de Cypistra, vivait l'anachorète Chryssus. Ce fut lui qui ensevelit Saint Jean du Puits, dans une citerne dont le fond, selon la légende, s'éleva pour recevoir le corps, puis s'abaissa spontanément. A cinq milles au nord-est de Bardala, et un peu plus au nord-est de Tchayan, est situé le village Kouzoundja, au pied des collines.

Maintenant passons sur la rive gauche du fleuve, et suivons son cours vers la ville. Nous trouvons indiqués les lieux Tchakal-keuy, Djédéssi? et Verneg, à une demi-lieue au sud-est de Zanapa, les montagnes très proches des bords du fleuve laissent à peine un passage étroit. Aux pieds des montagnes rougeâtres près d'un ruisseau limpide et poissonneux, se trouve le village Ibrize, construit en briques, à une lieue à l'ouest de Verneg et à une et demie de la rivière: ce village qui compte 700 habitants turcs, a donné son nom aux montagnes environnantes appelées, Yfipiç, par les Grecs. On trouve en ces lieux, à l'entrée du vallon, sur une paroi de granit rougeâtre et polie, une image sculptée semblable à celles de l'Assyrie, à environ dix pieds au-dessus du niveau du ruisseau. Elle est grossièrement travaillée mais non entièrement dépourvue d'art; gravée en relief de 4 ou 5 pouces; on y voit deux figures, la plus grande mesure près de 20 pieds de haut; la petite environ 12; elle est aussi accompagnée d'une sorte d'inscription figurée en signes ou lettres, qui ne ressemblent pas aux hiéroglyphes égyptiens, mais plutôt à ceux qu'on appelle maintenant hétéens. On voyait encore une autre inscription sous l'image en relief mais presqu'effacée; les villageois affirmaient qu'il y en avait d'autres encore plus bas, qui ne se voyaient, que lorsque le cours de l'eau s'abaissait. En considérant les fruits qui sont dans les mains de la plus grande des deux figures, les grappes de raisin et les épis de froment, un voyageur a cru y découvrir l'image du dieu de l'Été ou de la nouvelle année, ( Ամանոր ) des Arméniens; mais je veux croire qu'ils devaient avoir des dieux plus jolis que celui-là, alors qu'ils fêtaient ces jours si solennellement. Un voyageur suédois (Water) avait vu et mentionné cette image l'an 1736, près des sources du ruisseau qui jaillit du mont Ardoust, et qu'on appelait l'image Abrize, corruption du nom Abrinus ou Aprinus, nom du propriétaire de la place. (p. 190 Image sculptée en bas-relief à Ibrize) L'anglais Davis, fait provenir ce mot du persan abryze, qui veut dire pompe à eau [6] . On trouve dans la mosquée du village des chapiteaux et une colonne de marbre, dont on ne connaît pas la provenance.

Sur la cime du mont, en un lieu escarpé, on voit une chapelle élégante à demi-ruinée, avec des fresques sur ses murs et à côté d'elle, deux petites constructions comme des monastères. Peut-être que le village Esghi-Assan aura des traces d'antiquités: il est dans un coin du mont près d'un ruisseau, à une lieue au sud-est d'Ibrize, et à une demie au sud de Verneg. - De même, à une lieue de distance à l'ouest d'Ibrize, est situé le village Dédé-Kébir, dans un vallon près d'un autre ruisseau, ainsi que d'autres encore. Plus près de la ville, à 3 milles au nord-ouest de Bartal, se trouve le village Béli-aghadj; et au nord d'Héraclée, à une distance de 6 ou 7 milles, est situé sur la route, le bourg principal: Bektik. Avant l'hiver de 1873-4, on y comptait 400 familles; plus de la moitié moururent par suite de la famine qui fit périr également un grand nombre d'animaux, 30, 000 brebis et boucs et 3, 000 autres bestiaux.

Tous ces villages sont renommés pour leurs vignes et leurs jardins fertiles; de même aussi les vallées et les collines sont célèbres pour leurs nombreuses espèces de fleurs de vives couleurs et pour toutes sortes d'arbres, parmi lesquels on cite les hêtres d'une grandeur remarquable, nichent les rossignols au chant harmonieux.

Dans les vallons, le ruisseau le plus grand des côtes septentrionales du Taurus, est celui qui est le plus à l'est et qui se jette dans le fleuve Khodja, après avoir traversé les villages qui sont entre Tchacal-keuy et Esghi-Assan. A gauche de ce ruisseau, au sud du village Kara-Youssouf, au haut d'une montagne, on aperçoit les ruines d'une forteresse qu'on appelle Mintas-kalessi; mais je ne trouve aucune allusion récente à ces ruines dans les relations de voyage. Cependant nos écrivains anciens nous en donnent des informations importantes. Notre historien royal, qui fut peut-être témoin oculaire de ce qu'il raconte, nous informe que ces contrées étaient soumises à l'autorité des sultans d'Iconium durant le règne de Héthoum I er; mais l'un des princes de ce dernier, du nom d'Ochine, et de rite grec, s'empara secrètement de cette forteresse que l'historien appelle le château de Mountas. Le sultan (ou son fils Rouknaddin) entra dans une grande fureur et envoya, l'an 1259, une grande armée pour assiéger la forteresse, s'était réfugiée une grande multitude de chrétiens des alentours. Un des assiégés, un brave, réussit à sortir de la forteresse et par des voies secrètes passa les montagnes, parvint en Cilicie, et apporta au roi Héthoum la nouvelle alarmante; «Le roi ordonna de rassembler ses gens d'arme, et se mettant à leur tête il parvint jusqu'aux confins de la forteresse. Il avait apporté avec lui la Sainte Croix qu'on désignait sous le nom de Cossidar, et un grand miracle eut lieu. Dans la nuit pendant que l'armée marchait en secret, on vit apparaître comme un grand flambeau qui précédait le roi. Lorsqu'ils s'approchèrent de la forteresse, en marchant sur la neige, (c'était le mois de juillet, les montagnes sont donc très hautes), le général Léon, surnommé Abelhassanantz qui commandait l'avant garde, rencontra sur son chemin une troupe de soldats des avant-postes ennemis: l'attaque eut lieu; les hommes du sultan furent défaits, s'enfuirent et se retirèrent à Araglie: l'armée ayant entendu les cris et le bruit des chrétiens, accourut, et le combat s'engagea en plein front de part et d'autre. Les chrétiens alors commencèrent à s'embarrasser. L'officier renommé, Vahram de Hamousse fut entouré; les ennemis appuyant sur lui leurs lances de quatre côtés, le poussaient de ci de sans pouvoir le renserver. Ce que voyant, Sempad (le Connétable), frère du roi, le plus brave soldat et général en chef, prit une lance et s'élança sur eux, il en renversa plusieurs, délivra Vahram son gendre, et repoussa les ennemis jusqu'à leur camp. Ce fut alors que fut visible la puissance de la Sainte Croix. A la vue de la fuite de leurs ennemis, les chrétiens s'encouragèrent, et en les attaquant leur firent subir une grande perte; le reste de l'armée plein de honte, dut se retirer à Iconium, auprès de son sultan. Le roi Héthoum recueillit un grand butin et retourna en Cilicie avec tout le bagage de l'ennemi. Quant à toute cette multitude qui s'était réfugiée dans le château, il la fit sortir, et la fit conduire dans ses états».


[1] The flowers were truly wonderful in quantity and colour. There were flowers of various tints of red and yellow, eight to ten species at least, and amongst them some of the most brilliant red or yellow that can be conceived. There were flowers of crimson, orange and scarlat, mauve, pink and lake; it was a véritable flower garden. Yellow trefoil and clover grew in the greatest profusion. Davis, 265.

[2] Cicéron, lettre à Caton XV, IV.

[3] Les Bollandistes donnent la vie du Saint, à la date de 30 Mars: «De S. Johanne in Putos, Eremita in Armenia».

[4] On connaît une ville et un évêché du nom de Σινι áνδου, dans la Pisidie.

[5] Dans la Hagiographie de 1'empereur Basile (juin 15), Doulas est appelé prince de la Cilicie.

[6] Water écrit en notes: «Il me paraît plus naturel que ce soit les Karamans qui lui aient donné ce nom, qui est purement persan, et signifie dans cette occasion celui qui verse de l'eau.